Fil d'Ariane
LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME ACHÈVE SON DÉBAT SUR L'EAU POTABLE ET L'EXTRÊME PAUVRETÉ ET EST SAISI DE RAPPORTS PRÉPARÉS PAR LE SECRÉTARIAT
Le Conseil des droits de l'homme a conclu ce matin le dialogue interactif entamé hier avec les expertes indépendantes qu'il a chargées respectivement de la question de l'accès à l'eau potable et à l'assainissement et de la question des droits de l'homme et de l'extrême pauvreté. Il a aussi été saisi de divers documents préparés par le Secrétaire général de l'ONU, la Haut-Commissaire aux droits de l'homme et le Haut Commissariat, avant d'entendre une déclaration du Secrétaire général de l'Organisation de la Conférence islamique, M. Ekmeleddin Ihsanoglu.
Le Secrétaire général de l'OCI a dénoncé les campagnes antireligieuses récentes et les menées xénophobes ou visant à semer la peur, ainsi que les mesures discriminatoires telle que l'interdiction d'édifier des minarets, qui doivent être condamnées très fermement par la communauté internationale. Pour l'OCI, un tel contexte confirme qu'une approche normative s'impose face à des initiatives aux conséquences imprévisibles et dangereuses, rappelant que la liberté n'allait pas sans la responsabilité, et a proposé la création, par le Conseil, d'un observatoire chargé de surveiller ces phénomènes. Il a par ailleurs salué les déclarations qui ont été faites suite aux incidents récents par certains dirigeants mondiaux, notamment le Président des États-Unis et la Chancelière allemande.
À la fin du débat sur l'accès à l'eau et sur l'extrême pauvreté, la situation des Roms a été évoquée à plusieurs reprises en raison en particulier de la situation dans les campements où vivent ces populations. Par ailleurs, les participants ont généralement convenu que si la privatisation de la fourniture d'eau ne devait pas être exclue, l'accès universel à ce bien commun doit rester de la responsabilité des États, qui doit veiller à ce qu'aucune catégorie de la population n'en soit exclue.
Outre les expertes indépendantes, qui ont fait des déclarations en conclusion du débat, les représentants des délégations suivantes ont pris la parole: Slovénie, Algérie, Japon, Djibouti, Philippines, Bolivie, Portugal, Cuba, Maroc, Égypte, Maldives, Thaïlande, Norvège, Saint-Siège, Ordre souverain militaire de Malte, Afrique du Sud, Canada, Éthiopie, Pérou, Viet Nam et Sénégal.
Les représentants du Fonds des nations Unies pour l'enfance (UNICEF) et des organisations non gouvernementales suivantes ont également fait des déclarations: Mouvement international ATD Quart Monde, au nom de plusieurs autres organisations non gouvernementales1), France Libertés – Fondation Danielle Mitterrand (au nom également de l'Association américaine de juristes, International Educational Development, et le Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples - MRAP), Action internationale pour la paix et le développement dans la région des Grands Lacs, CIVICUS: Alliance mondiale pour la participation des citoyens, Forum européen pour les personnes handicapées et Amnesty International.
S'agissant des rapports de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme, du Haut Commissariat et du Secrétaire général, le rapporteur du Groupe de travail à composition non limitée sur un protocole facultatif à la Convention aux droits de l'enfant, M. Drahoslav Stefanek, a indiqué qu'un projet de protocole facultatif sera disponible sous peu dans toutes les langues des Nations Unies. M. Bacre Ndiaye, Directeur de la division du Conseil des droits de l'homme et des procédures spéciales au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, a présenté les différents rapports thématiques publiés ou en préparation et qui concernent, notamment, les peuples autochtones, la peine de mort, le droit à la vérité, entre autres.
Cet après-midi, le Conseil tiendra un débat général sur ces rapports. Il devrait par ailleurs être saisi du rapport du Groupe de travail sur le droit au développement.
Accès à l'eau potable et à l'assainissement; droits de l'homme et de l'extrême pauvreté
Fin du débat
M. MARKO HAM (Slovénie) a rappelé que l'experte indépendante chargée des droits de l'homme et de l'accès à l'eau potable et à l'assainissement avait effectué une visite dans son pays en mai dernier. Mme Catarina de Albuquerque a noté au cours de cette visite que certains membres de la communauté rom ne jouissaient pas pleinement de leurs droits. Le Gouvernement slovène, conscient du problème, s'efforce d'améliorer les conditions de vie des Roms, en veillant à l'intégration de cette communauté dans le respect de sa culture et de sa langue. L'État a adopté, en mars dernier, un nouveau programme national d'intégration pour la période 2010-2015. Ce sont toutefois les municipalités qui sont les autorités compétentes en matière de logement, ce qui explique que la situation soit très contrastée selon les régions. La majorité des communautés roms privées d'accès à l'eau potable et à l'assainissement se sont installées illégalement. Pour des raisons liées à la protection de l'environnement, il n'est pas possible de légaliser tous ces campements, a souligné le représentant.
MME SELMA MALIKA HENDEL (Algérie) a indiqué que l'Algérie était un pays précurseur dans le droit à l'eau et à l'assainissement. Un département ministériel est en charge de la politique de mobilisation des ressources publiques de l'eau. Le taux de raccordement au réseau d'eau potable est passé de 78 % en 1999 à 93 % aujourd'hui, le taux de raccordement à l'égout de 72 % à 86% durant la même période. Ainsi, l'Algérie a-t-elle dépassé l'une des cibles du septième objectif du Millénaire pour le développement (assurer un environnement humain durable). L'Algérie a également mis en place des cadres juridiques et institutionnels régissant les conditions de délégation aux opérateurs privés des services publics d'alimentation en eau potable et d'assainissement, qui relèvent, à la base, de la compétence de l'État. Les aspirations de personnes qui vivent dans une situation d'extrême pauvreté sont traitées dans une perspective séparée de celle de la collectivité dont elles font partie intégrante. Le renforcement des capacités dans le cadre du développement et de la coopération internationale est par ailleurs crucial. En conclusion, la déléguée algérienne a déploré que les références à la coopération et à l'assistance internationales ne tiennent pas suffisamment compte des aspirations d'un grand nombre de pays dans la lutte contre la pauvreté, ne dépassent pas les simples opérations d'assistance ponctuelle, sachant que l'extrême pauvreté réside souvent dans les structures iniques du système économique international qui entrave le droit au développement.
MME FUMIKO NISHIHARA (Japon) a espéré que le rapport de Mme de Albuquerque, qui présente de nombreuses pratiques optimales, contribuera à améliorer les conditions d'accès à l'eau potable et à l'assainissement. Le Japon considère que l'État est, au premier chef, responsable d'assurer l'accès à l'eau et à l'assainissement. La représentante japonaise a souligné l'engagement de son pays à mettre à la disposition des pays ayant des besoins en la matière son expérience dans l'accès à l'eau et à l'assainissement. Le Japon attend avec intérêt la publication du rapport de l'experte indépendante sur sa visite dans le pays en juillet dernier.
M. AHMED MOHAMED ABBO (Djibouti) a indiqué soutenir le point soulevé dans le rapport sur l'accès à l'eau potable et à l'assainissement concernant les différents modèles de fourniture de services, et plus précisément le fait que, quel que soit le modèle retenu, les droits de l'homme à l'eau et à l'assainissement devaient être garantis. Djibouti réaffirme «le rôle crucial» des États, qu'ils soient prestataires de services ou non. Djibouti a «déjà démontré son engagement dans ce sens à travers le développement d'un programme national d'assainissement», a fait valoir son représentant.
M. EVAN P. GARCIA (Philippines) a déclaré que la solidarité et la coopération internationale, la réalisation du droit au développement et les objectifs de développement pris au niveau international devraient être pris en compte dans la préparation des principes directeurs visant l'éradication de la pauvreté, notamment dans les pays les moins avancés. Les questions structurelles ne devraient pas être écartées de la réflexion. Il faut veiller à ce que les entreprises transnationales ne portent pas atteinte aux droits de l'homme des personnes vivant dans la pauvreté extrême. Le Conseil des droits de l'homme doit donner à l'experte indépendante sur l'extrême pauvreté le mandat de poursuivre ses travaux sur les principes directeurs.
MME MAYSA UREÑA MENACHO (Bolivie) a souligné que son pays a consacré le droit à l'eau dans sa Constitution avant même qu'il ne le soit par les Nations Unies. La représentante a rappelé que son pays avait présenté à l'Assemblée générale, en juillet dernier, un projet de résolution consacrant le droit à l'eau potable et à l'assainissement comme un droit humain. L'initiative bolivienne a été acceptée par 122 voix pour, 41 abstentions et aucune voix contre. La représentante a lancé un appel aux États membres, aux organisations non gouvernementales et aux observateurs afin qu'ils œuvrent à l'application de cette importante résolution.
MME ANA E BRITO MANEIRA (Portugal) a souligné que Mme de Albuquerque avait contribué à aider son pays dans son travail d'évaluation interne des politiques concernant l'eau et l'assainissement. La représentante a demandé à l'experte indépendante de donner des exemples de mesures ciblées en direction des personnes les plus marginalisées qu'elle évoque dans son rapport. Elle a aussi souhaité savoir quel serait son programme de travail pour l'an prochain.
MME MARGARITA VALLE (Cuba) a déclaré que la question de l'eau se trouve au cœur même de la survie de l'humanité. Cuba a atteint dès 1995 l'objectif du Millénaire pour le développement concernant l'eau potable. Pratiquement toute la population cubaine a accès à l'eau potable. Il n'y a pas de préférence à exercer quant au modèle de prestation de service, mais il faut garantir le droit à l'eau potable et à l'assainissement. La résolution adoptée cet été par l'Assemblée générale des Nations Unies, qui reconnaît le droit à l'eau et à l'assainissement en tant que droit de l'homme, n'est pas en contradiction et ne préjuge en aucune façon du débat sur l'eau et l'assainissement au Conseil des droits de l'homme: au contraire, elle le complète et le renforce. Cuba réaffirme l'importance de la coopération internationale en vue du développement des structures hydrauliques.
M. MOHAMED ACHGALOU (Maroc) a invité Mme de Albuquerque à se rendre au Maroc. Le représentant a par ailleurs appuyé les recommandations de l'experte indépendante invitant les institutions financières internationales et les donateurs à soutenir le processus de décision en matière de gestions de l'eau à l'échelon national et local. Il a également approuvé la recommandation de Mme Sepúlveda demandant à la communauté internationale d'aider le Bangladesh.
MME HEBA MOSTAFA RIZK (Égypte) est convenue avec l'experte indépendante des obligations impérieuses qui incombent aux États dans la définition des droits et responsabilités des acteurs non étatiques, des entreprises privées en particulier. Les donateurs, quant à eux, n'ont pas à imposer leurs conditions quant au choix d'un modèle, eu égard notamment à l'étendue du rôle respectif des services publics et des acteurs privés. S'agissant de l'extrême pauvreté, l'Égypte estime que les efforts internationaux doivent être accélérés face à ce fléau persistant.
MME IRUTHISHAM ADAM (Maldives) a déclaré que les gouvernements ont l'obligation de fournir des services d'eau et l'assainissement. Pour les Maldives, le problème de l'accès à l'eau est particulièrement important du fait de la situation géographique unique de l'archipel et de sa vulnérabilité et de la difficulté de fournir à la population une eau potable. Le secteur privé doit être impliqué dans les services d'eau et d'assainissement. Les pouvoirs publics doivent édicter un cadre juridique ferme pour gérer les relations avec ces sociétés privées et faire respecter les contrats signés. Cette attitude doit également être adoptée dans le cadre de la santé et de l'éducation.
M. VIJAVAT (Thaïlande) a indiqué que son pays avait divisé par deux le nombre de personnes n'ayant pas accès à l'eau potable et à l'assainissement. Il a également reconnu que de nombreux défis demeurent, notamment en zone rurale. Le représentant a espéré que le rapport de Mme de Albuquerque aidera son pays à garantir les droits de l'homme de toute la population. Par ailleurs, il a estimé que l'extrême pauvreté est à la fois une cause et une conséquence des violations des droits de l'homme. Il est donc important que le droit au développement soit au cœur des principes directeurs sur les droits de l'homme et la pauvreté préparés par Mme Sepúlveda. Le représentant a soutenu le principe d'une coopération accrue avec les pays pauvres dans le cadre du renforcement des engagements internationaux visant à réduire l'extrême pauvreté.
MME BENTE ANGELL-HANSEN (Norvège) a souligné que les principes directeurs préparés par Mme Sepúlveda contribueront certainement à combler le fossé entre les exigences en matière de droits de l'homme et la situation réelle des personnes vivant dans la pauvreté extrême. La Norvège se réjouit donc de la poursuite de ce travail. S'agissant de l'eau potable, la représentante a rappelé que l'on estime que, d'ici à 2025, trois milliards de personnes souffriront du manque d'eau. La couverture géographique et la priorité en matière d'investissement doivent résulter de décisions politiques: on sait que les compagnies privées investissent rarement dans des zones peu rentables, à moins que l'État ne l'exige. Or, c'est à l'État que revient l'obligation ultime en matière d'accès à l'eau et à l'assainissement, l'eau ne pouvant être un bien abandonné à la seule régulation du marché. Même en cas de privatisation, l'État doit s'assurer que les pauvres y ont accès, a souligné la représentante norvégienne.
M. SILVANO TOMASI (Saint-Siège) a déclaré que l'eau potable est un droit humain au même titre que le droit à la vie ou à la santé. Neuf cent millions de personnes continuent d'utiliser des sources d'eau peu salubre pour boire et préparer les aliments; 2,5 milliards de personnes ne bénéficient pas de conditions sanitaires appropriées; 1,8 millions d'enfants succombent, chaque année, à des maladies telles que le choléra ou la dysenterie, maladies liées à la qualité l'eau. Le manque de solidarité entre les pays à cet égard doit être stigmatisé. L'accès à l'eau devrait être assuré partout le monde, aujourd'hui comme demain. Le représentant a estimé que le secteur public et le secteur privé devaient travailler en synergie pour trouver des mesures ciblées capables d'atteindre les personnes les plus défavorisées.
M. ERIK NYMAN (Fonds des nations Unies pour l'enfance - UNICEF) s'est félicité de la reconnaissance par l'Assemblée générale de l'accès à l'eau et à l'assainissement en tant que droit de l'homme. Le représentant s'est dit heureux de travailler avec les gouvernements et communautés pour assurer la mise en pratique des droits humains, spécialement pour les femmes et les enfants. En conclusion, l'UNICEF réitère son soutien au mandat de Mme de Albuquerque, avec laquelle il continuera de collaborer.
MME MARIE-THÉRÈSE PICTET-ALTHANN (Ordre souverain militaire de Malte) a rappelé que l'Ordre apporte une aide substantielle dans 120 pays pour fournir un accès à l'eau et à l'assainissement aux personnes pauvres et souffrantes. Dans les situations d'état d'urgence et de conflits, des interventions doivent permettre d'éviter les épidémies, en particulier. La représentante a espéré que le Conseil finaliserait la définition des principes directeurs concernant l'extrême pauvreté actuellement en discussion.
M. JERRY MATHEWS MATJILA (Afrique du Sud) a déclaré que la Constitution sud-africaine faisait de l'eau et l'assainissement un droit opposable. Le droit sud-africain dans le domaine des droits de l'homme repose sur le principe de l'égalité et de la non-discrimination. Or, la discrimination structurelle a eu de graves conséquences dans le cas sud-africain. Le Gouvernement a mis en place des lois progressives pour l'égalité des femmes et leur accès aux moyens productifs de l'économie. Un processus a également été lancé pour identifier les familles indigentes, pour leur venir en aide. Une attention toute particulière est portée au prix des aliments de base, notamment le pain. Le principal objectif est d'empêcher que les entreprises concluent entre elles des ententes sur les prix des denrées alimentaires.
MME LORAINE ANDERSON (Canada) a indiqué que son gouvernement reconnaissait que les États ont des obligations en matière d'accès à l'eau et à l'assainissement. Le Gouvernement canadien partage en outre l'analyse de Mme de Albuquerque sur la nécessité d'engagement général de la communauté internationale. Cependant, le Canada ne partage pas l'affirmation selon laquelle il existerait un droit d'accès à l'eau et à l'assainissement en tant que tels. Le Canada estime, par contre, que l'une des obligations des droits de l'homme liées à l'accès à l'eau potable et à l'assainissement est la non-discrimination.
M. ALLEHONE MULUGETA ABEBE (Éthiopie) a souligné que son Gouvernement accordait la plus haute importance à l'accès à l'eau et à l'assainissement. L'Éthiopie a en effet particulièrement souffert de la famine, de la sécheresse et de l'absence de développement. L'accès à l'eau en Éthiopie est l'un des plus faibles au monde, les femmes et les enfants devant souvent passer des heures en quête d'eau. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement met en œuvre une politique de gestion rationnelle d'une ressource rare, qui devrait, par ailleurs, être partagée équitablement entre les pays de la région.
M. CARLOS SIBILLE (Pérou) a estimé essentiel que les principes directeurs préparés par Mme Sepúlveda contribuent effectivement à l'amélioration de la situation des personnes vivant dans une situation de pauvreté extrême. Les principes devront définir de manière très claire les obligations de matière de droits économiques, sociaux et culturels. L'État demeure le principal responsable en matière d'obligations liées aux droits de l'homme. Les États doivent mettre en place des politiques sociales pour garantir le droit à l'eau et l'assainissement dès lors les acteurs non étatiques ne sont pas en situation de le faire. Le Pérou souhaite que l'experte indépendante apporte un complément d'informations quant aux bonnes pratiques en la matière.
M. NGO LE HOANG VU (Viet Nam) a déclaré que son pays accorde une grande priorité au combat contre la pauvreté, de même qu'aux politiques concrètes pour garantir l'accès de la population aux ressources et services de base. Le représentant a indiqué que son pays est l'un des premiers à avoir atteint les cibles du premier objectif du Millénaire pour le développement concernant l'eau potable, grâce notamment à l'application du «plan national pour l'eau potable et l'assainissement des zones rurales 2000-2020». Cependant ces réalisations restent encore modestes, d'autant plus que les crises économiques et les désastres naturels sont dévastateurs. Le représentant vietnamien a d'autre part relevé que la lutte contre la pauvreté nécessite des efforts concertés au niveau national et international. Il a dit prendre note des recommandations de Mme de Albuquerque quant au rôle des entités non étatiques en matière de fourniture d'eau.
MME MARIAME SY (Sénégal) a déclaré que l'accès à l'eau potable et aux services d'assainissement adéquats est l'une des grandes priorités de son pays. L'État mène en effet, depuis plusieurs décennies, une «politique de maîtrise de l'eau». «Ces efforts ont permis au Sénégal d'enregistrer des progrès importants grâce auxquels il peut légitimement espérer être au rendez-vous de 2015 s'il parvient à pérenniser les ouvrages et à mobiliser des ressources supplémentaires», a conclu la représentante après avoir évoqué en détail les réalisations accomplies par son pays.
Organisations non gouvernementales
MME JANET NELSON (Mouvement international ATD Quart Monde, au nom de plusieurs autres organisations non gouvernementales1) a souligné la valeur ajoutée du projet des principes directeurs de Mme Sepúlveda. Le processus de rédaction a commencé il y a six ans, à l'initiative de la Commission des droits de l'homme: il serait temps d'achever ce processus. Les principes directeurs finalisés pourraient être un outil efficace pour évaluer et améliorer les objectifs du Millénaire pour le développement, dans le cadre des crises futures. Les organisations de la société civile jouent un rôle primordial dans la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement. Très souvent, la société civile assume la responsabilité de la mise en œuvre des services au niveau national et international. De plus, les organisations de la société civile forment les opinions publiques à réclamer des gouvernements les bénéfices auxquels elles ont droit.
MME ORETTA BANDETTINI DI POGGIO (France Libertés – Fondation Danielle Mitterrand, au nom également de l'Association américaine de juristes, International Educational Development, et le Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples - MRAP) a salué l'initiative du Gouvernement bolivien devant l'Assemblée générale des Nation Unies. La représentante a par ailleurs exprimé son soutien aux travaux de Mme de Albuquerque. Elle a estimé que États doivent se porter garants du respect du droit d'accès à l'eau, y compris lorsque cet accès est assuré par des acteurs non étatiques. Or, la résolution adoptée par les Nations Unies ne fait aucune mention des responsabilités des États en la matière. Pour la représentante, la communauté internationale doit se doter d'un cadre réglementaire international, afin de créer une «gouvernance de l'eau» au niveau international, et reconnaître l'eau comme un bien commun dont pourront jouir sans danger les générations futures.
M. MAURICE KATALA (Action internationale pour la paix et le développement dans la région des Grands Lacs) a évoqué un récent séjour qu'il a effectué au Kasaï, en République démocratique du Congo. Ce séjour l'a conduit à s'interroger sur les politiques de développement et sur les programmes de coopération économique internationale. «Nous avons vu une population oubliée après avoir été rejetée, un intérêt marqué des sociétés internationales pour les richesses du sous-sol, le total enclavement routier et téléphonique», sans parler d'un «manque total d'eau potable», a-t-il constaté. «Il est urgent que le Conseil des droits de l'homme invite les États à traduire dans les faits les grands principes du développement, de la coopération internationale, de la dignité humaine et du droit à la vie», a conclu le représentant.
MME RENATE BLOEM (CIVICUS: Alliance mondiale pour la participation des citoyens) a déclaré que les droits humains doivent être au cœur de la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement, de même qu'au centre de toutes les démarches en vue de l'élimination de la pauvreté extrême. Les propositions de l'experte indépendante, Mme Sepúlveda, constituent le cadre conceptuel des futures lignes directrices, marquées par les grands principes des droits de l'homme que sont l'indivisibilité, l'interdépendance, l'universalité et la non-discrimination. Le représentant a jugé indispensable d'associer pleinement les personnes vivant dans la pauvreté à la lutte contre ce phénomène.
MME ELLEN WALKER (Forum européen pour les personnes handicapées) a rappelé que les personnes handicapées dans les pays pauvres doivent souvent faire de kilomètres pour avoir accès à l'eau. Dans les pays plus riches, les toilettes et l'eau ne sont pas toujours accessibles, non plus, aux personnes handicapées. La représentante a donc demandé que des mesures soient prises pour tenir compte de leurs besoins. Les situations de conflit ou de catastrophe compliquent encore les conditions de vie des personnes handicapées: les gouvernements, les organisations non gouvernementales et les donateurs doivent compte de leurs difficultés. Le Forum européen des personnes handicapées organisera prochainement un débat sur le sujet. Il espère que de nombreuses délégations y participeront.
MME PATRIZIA SCANELLA (Amnesty International) a rappelé que le septième objectif du Millénaire prévoit de réduire de moitié la proportion de personnes n'ayant pas accès à l'eau potable et à l'assainissement de base. Malheureusement la réalisation du droit à l'assainissement a pris beaucoup de retard. Ces deux dernières années, Amnesty International a enquêté sur la situation des Roms en Slovénie: elle a constaté que de nombreux campements n'avaient pas d'adduction d'eau digne de ce nom. Par ailleurs, Amnesty International s'inquiète de la situation dans les bidonvilles au Kenya. La représentante a demandé à l'experte indépendante si elle avait reçu une réponse du gouvernement de ce pays à sa demande de pouvoir y effectuer une visite.
Réponses et conclusions des titulaires de mandats
MME CATARINA DE ALBUQUERQUE, experte indépendante chargée d'examiner la question des obligations en rapport avec les droits de l'homme qui concernent l'accès à l'eau potable et à l'assainissement, a déclaré qu'elle présenterait son rapport à l'Assemblée générale l'année prochaine.
L'experte a souligné que l'État ne saurait déléguer à qui que ce soit la responsabilité en matière de droits de l'homme. L'assainissement fait partie intégrante du concept de niveau de vie convenable et digne. Davantage d'attention doit être portée aux problèmes que posent les eaux usées pour la qualité de vie, a souligné Mme Albuquerque. On a beaucoup parlé du sommet des objectifs du Millénaire pour le développement, qui aura lieu la semaine prochaine à New York: il faut que ces objectifs soient envisagés dans le cadre plus général des droits humains, a insisté l'experte indépendante.
Répondant à la Suisse s'agissant de l'évaluation de l'impact des questions liées à l'eau et à l'assainissement sur les droits de l'homme, Mme Albuquerque a observé que cette évaluation n'est pas un processus séparé, mais qu'elle se combine à l'évaluation d'autres impacts: social, gouvernemental, notamment. Plusieurs pays ont posé la question du manque d'eau. Il faut savoir que l'eau n'est pas si rare que l'on pense. Il faut toujours donner la priorité aux utilisateurs et au respect de leurs droits humains. Concernant les pratiques optimales, l'experte indépendante a demandé d'attendre septembre de l'année prochaine: un livre sera écrit sur la question et une compilation des pratiques optimales présentée. Un colloque sur la question se tiendra à Genève. La coopération avec d'autres mandats a montré qu'il existe un potentiel encore trop peu exploité au sein du système des Nations Unies. Mme de Albuquerque a également annoncé sa prochaine visite au Pérou.
MME MARIA MAGDALENA SEPÚLVEDA, experte indépendante sur la question des droits de l'homme et de l'extrême pauvreté, a rappelé que son rapport est centré sur la nécessité d'une plus grande coopération internationale. Le texte final des principes directeurs mentionnera un certain nombre d'obligations pour les États. S'agissant du Bangladesh, l'experte indépendante a reconnu que des efforts avaient été faits pour la réduction de la pauvreté, dans un contexte de ressources limitées. Par ailleurs, Mme Sepúlveda a noté, que dans les pays pauvres, les personnes vivant dans l'extrême pauvreté ne sont pas toujours recensées. Il faut, au niveau national, des programmes d'identification de ces personnes. «Je suis persuadée qu'en adoptant les principes directeurs, le Conseil pourra améliorer la visibilité des personnes vivant dans l'extrême pauvreté», a déclaré l'experte indépendante. Elle a espéré que le projet final consacrera ce droit.
Déclaration du Secrétaire général de l'Organisation de la Conférence islamique
M. EKMELEDDIN IHSANOGLU, Secrétaire général de l'Organisation de la Conférence islamique, a d'emblée regretté le contexte actuel, évoquant des initiatives antireligieuses tel que l'appel à brûler le Coran, estimant qu'il s'agissait d'une provocation qui devait être universellement condamnée. M. Ihsanoglu a souligné que des campagnes de cette nature, des menées xénophobes ou visant à semer la peur, ainsi que les mesures discriminatoires telle que l'interdiction d'édifier des minarets, devaient être condamnés très fortement par la communauté internationale. Pour l'OCI, un tel contexte confirme qu'une approche normative s'impose face à des initiatives aux conséquences imprévisibles et dangereuses. Il s'est dit satisfait des déclarations faites par un certain nombre de responsables de la communauté internationale, citant en particulier le Président des États-Unis ou la Chancelière allemande. Tout cela indique qu'il s'agit d'un épisode à la fois malheureux mais d'une grande gravité, un cas classique d'incitation à la haine.
Des fanatiques de toutes obédiences menacent la coexistence et nous ne pouvons pas devenir les otages de ce type d'incitation à la haine, a observé le Secrétaire général de l'Organisation de la Conférence islamique. Nous devons être tous unis face à de tels événements susceptibles de mener à la violence. Le Conseil est la conscience de la communauté internationale en matière de droits de l'homme, a-t-il souligné. Il a rappelé que la liberté n'allait pas sans la responsabilité. Il a appelé tous les responsables à encourager un climat favorable à la liberté religieuse. On doit aussi encourager à prendre la parole contre l'intolérance et la haine religieuse. Il s'agit de prendre des mesures visant à réprimer tout appel à la violence antireligieuse. M. Ihsanoglu appelle les Nations Unies à lutter contre le déni des religions.
Le Secrétaire général de l'Organisation de la Conférence islamique a enfin proposé au Conseil de créer un observatoire permettant de connaître à tout moment la situation réelle dans ce domaine. La présentation d'un rapport annuel qui brosserait le tableau de la situation est plus que souhaitable, selon lui. Un engagement continu en faveur de l'élaboration de normes contraignantes s'avère aussi indispensable, a-t-il conclu.
Rapports du Secrétaire général, de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme et du Haut Commissariat
Présentation de rapports
M. SIHASAK PHUANGKETKEOW, Président du Conseil des droits de l'homme, a évoqué les modalités de fonctionnement du Conseil dans le cadre de l'actuelle procédure de réexamen et les consultations qu'il a menées à ce sujet jusqu'à présent. Il a précisé qu'il travaillait dans un esprit de consensus, s'efforçant de faire preuve de souplesse dans la gestion du temps afin que chacun ait la latitude de s'exprimer le plus largement possible. Le Président a aussi évoqué son récent séjour à New York, soulignant la nécessaire étroite coordination entre New York et Genève dans l'examen du statut du Conseil qui se déroule de manière plus ou moins concomitante des deux côtés de l'Atlantique. Les débats de fond à New York devraient débuter à la fin de la soixante-cinquième session de l'Assemblée générale. À Genève, il serait souhaitable que cet examen s'achève en juin 2011, a-t-il indiqué.
Le rapport du Secrétaire général sur l'amélioration des services de conférence et de secrétariat, publié sous la cote A/HRC/15/17, n'est disponible qu'en anglais.
M. DRAHOSLAV STEFANEK, rapporteur du Groupe de travail à composition non limitée sur un protocole facultatif à la Convention aux droits de l'enfant, a déclaré que le Groupe de travail s'était réuni en décembre dernier et que son rapport a été communiqué à la session de mars dernier, à l'issue de laquelle la résolution 13/3 a été adoptée. Le projet de résolution de la présente session devrait tenir compte des avis et propositions exprimées lors de la session du comité de travail et prendre en compte les avis exprimés au sein du Comité des droits de l'enfant. Le rapporteur a informé le Conseil des activités du groupe de travail menées depuis mars dernier.
Des premiers éléments officieux pour la rédaction d'un éventuel protocole facultatif ont été rédigés et toutes les missions permanentes à Genève ont été informées de ces éléments. Le document a fait l'objet de consultations informelles qui se sont tenues à Genève le 26 mai. Les 21 et 22 juin, M. Stefanek a participé à une consultation d'experts organisée par le Haut-Commissariat aux droits de l'homme à l'initiative du vice-président du Comité des droits de l'enfant, sur la base de la résolution 13/3 du Conseil des droits de l'homme qui demande de prendre en compte l'avis des experts pertinents dans la proposition de projet. À la suite de cette réunion, un projet de protocole facultatif et un mémoire explicatif ont été distribués par le Haut-Commissariat aux droits de l'homme durant la première semaine du mois d'août.
Le rapporteur du Groupe de travail a annoncé que le projet a été mis en page et sera disponible sous peu dans toutes les langues des Nations Unies. Des consultations seront menées du 6 au 10 décembre 2010 pour préparer un rapport au Conseil des droits de l'homme, au plus tard à sa dix-septième session.
M. BACRE NDIAYE, Directeur de la division du Conseil des droits de l'homme et des procédures spéciales au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, a fait le bilan des actions de l'institution en évoquant les différents rapports thématiques publiés ou en préparation, notamment sur, les peuples autochtones, la peine de mort, ou encore l'éducation aux droits de l'homme.
Ainsi, deux rapports concernent les droits des peuples autochtones (A/HRC/15/34) et l'éventuel élargissement du mandat du Fonds volontaire pour les populations autochtones (A/HRC/15/38).
M. Ndiaye a par ailleurs présenté le rapport du Secrétaire général sur la question de la peine de mort (A/HRC/15/19), qui indique notamment que des faits récents semblaient montrer que la tendance favorable à l'abolition se poursuit. Dans plusieurs pays, le débat porte sur la question de savoir s'il convient de lever les moratoires actuellement en place ou s'il faut abolir la peine capitale, tandis que d'autres ont limité son application. Des problèmes sérieux demeurent toutefois en matière de respect du droit international dans les pays où la peine de mort est toujours pratiquée, particulièrement sur la question de la limitation aux crimes les plus graves, l'exclusion des mineurs de son application ainsi que la garantie de jugements équitables. L'analyse de l'application de la peine capitale demeure difficile à la lumière du manque de transparence de certains États dans la fourniture d'informations sur les individus condamnés et exécutés.
Le droit au développement dans la perspective des activités visant à renforcer le partenariat mondial pour le développement entre États membres, agences de développement et institutions financières ou commerciales fait l'objet d'un rapport du Secrétaire général et de la Haut-Commissaire sur le droit au développement (A/HRC/15/24).
M. Ndiaye a aussi évoqué la demande de l'Assemblée générale souhaitant disposer d'une réflexion sur l'utilisation d'experts en médecine légale pour enquêter sur des violations massives des droits de l'homme (A/HRC/15/26). Un document est en préparation sur les tendances et les meilleures pratiques à ce sujet. S'agissant de la traite des êtres humains, M. Ndiaye a évoqué la tenue, en mai dernier, d'un séminaire visant à identifier les opportunités et les défis dans la préparation de réponses à la traite des personnes fondées sur les droits de l'homme (A/HRC/15/27, à paraître). Il a aussi évoqué le projet de plan d'action pour la seconde phase du programme mondial pour l'éducation aux droits de l'homme (A/HRC/15/28, à paraître en français).
Une étude du Haut Commissariat est par ailleurs consacrée aux défis et meilleures pratiques dans la mise en place d'un cadre international pour la protection des droits de l'enfant dans le contexte des migrations (A/HRC/15/29).
Un rapport de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme concerne le droit à la vérité (A/HRC/15/33) et examine les obligations des États dans la protection des témoins, des victimes et d'autres personnes concernées, tout en analysant les pratiques judiciaires et la jurisprudence. Il conclut qu'il y a trop peu d'exemples de programmes de protection des témoins.
Par ailleurs le Haut-Commissariat a préparé une étude thématique sur la discrimination contre les femmes, dans la loi et la pratique (A/HRC/15/40.Add.1). Il se penche sur la manière dont cette question est traitée dans l'ensemble du système des Nations Unies.
Les efforts effectués par le Haut-Commissariat et les Nations Unies pour renforcer l'application de la Déclaration de 1992 sur les droits des personnes appartenant à des minorités ethniques, religieuses et linguistiques sont résumés dans le document A/HRC/15/42.
M. Diacre Ndiaye a ensuite évoqué le rapport analytique du Secrétaire général sur l'impact de mesures coercitives unilatérales sur la jouissance des droits de l'homme (A/HRC/15/43). Il contient les résumés des réponses fournies par onze pays.
La dix-septième réunion annuelle des procédures spéciales, qui s'est tenue du 28 juin au 2 juillet à Genève, a fait l'objet d'un rapport (A/HRC/15/44) consacré notamment à l'indépendance et à l'efficacité de ces procédures.
M. Ndiaye a indiqué par ailleurs que le rapport actualisé du Secrétaire général consacré à un résumé comparatif des communications, procédures et pratiques d'enquête existantes était en préparation (A/HRC/15/49) dans la perspective de sa présentation en décembre devant le groupe de travail sur le Protocole additionnel de la Convention relative aux droits de l'enfant.
M. Ndiaye a aussi évoqué la réunion-débat sur la protection des journalistes dans les conflits armés (A/HRC/15/54 en anglais seulement), «qui témoigne de l'importance que le Conseil accorde à cette grave question».
La question du renforcement de la coopération entre mécanismes internationaux et régionaux des droits de l'homme a fait l'objet d'un atelier qui s'est tenu à Genève en mai (A/HRC/15/56).
Par ailleurs, le rapport du Secrétaire général relatif à un projet de programme d'activités pour l'Année internationale des peuples d'ascendance africaine figure dans une note du Secrétariat (A/HRC/15/59).
1Déclaration conjointe: Mouvement international ATD Quart Monde, Conseil international des femmes, Associazione Comunita Papa Giovanni XXIII, Franciscain international, Association Points-Cœur, Communauté internationale bahá'íe, Commission internationale de juristes, Centre on Housing Rights and Evictions, Organisation mondiale contre la torture (OMCT), Confédération internationale d'organismes catholiques d'action charitable et sociale, Dominicains pour justice et paix - Ordre des frères prêcheurs, Action Aid International, et Bureau international catholique de l'enfance.
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
HRC10/095F