Fil d'Ariane
LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME SE PENCHE SUR L'ASSISTANCE À LA SOMALIE DANS LE DOMAINE DES DROITS DE L'HOMME ET SUR LA SITUATION DANS CE PAYS
Le Conseil des droits de l'homme a tenu ce matin une réunion-débat sur l'assistance à la Somalie dans le domaine des droits de l'homme, en particulier sur l'état de la coopération technique et les mesures efficaces à prendre pour améliorer la situation des droits de l'homme en Somalie et pour rendre plus efficace l'appui des Nations Unies à la promotion et à la protection des droits de l'homme dans ce pays. Le Conseil a ensuite tenu un débat interactif avec l'expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Somalie, qui a présenté son rapport. Il a également procédé, au cours d'une séance prolongée au cours de la mi-journée, à son débat général sur l'assistance technique et le renforcement des capacités dans le domaine des droits de l'homme.
Après une présentation par Mme Navi Pillay; Haut-Commissaire aux droits de l'homme; neuf panélistes ont participé à la réunion-débat: M. Abdirahman Haji Aden Ibbi; Vice-Premier Ministre du Gouvernement fédéral de transition de la Somalie; M. Shamsul Bari; expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Somalie; M. Augustin P. Mahiga; Représentant spécial du Secrétaire général pour la Somalie; M. Mark Bowden; Coordinateur résident des Nations Unies en Somalie; M. Boubacar Gaoussou Diarra; chef de la mission de l'Union africaine en Somalie; M. George Okoth-Obbo; du Haut Commissariat aux réfugiés; et M. Charles Vincent, du Programme alimentaire mondial. La société civile somalienne était représentée par M. Abdullah Shirwa, président de Somali Peace Line, et par M. Omar Farukh Osman, de l'Union nationale des journalistes somaliens.
Les panélistes ont souligné que la Somalie n'a pas connu la paix depuis plus de vingt ans, et que les droits de l'homme n'y seront pas respectés en l'absence d'un gouvernement en état de fonctionner, de ressources adéquates et d'une volonté politique. Il a été rappelé que près d'un quart de la population du pays est déplacée dans son propre pays. Les Nations Unies pourraient jouer un rôle beaucoup plus marqué par le biais d'une meilleure coordination, a-t-il été observé: le Haut Commissariat devrait ainsi faire preuve de davantage de créativité dans la promotion et la protection des droits de l'homme en Somalie.
Au cours du débat, des intervenants ont estimé que les Nations Unies devaient demeurer pleinement engagées en Somalie afin de soutenir les efforts de stabilisation. Il importe que les Somaliens eux-mêmes tiennent les rênes du rétablissement en cours. Une délégation a souligné la nécessité d'une approche globale, la lutte contre l'insécurité supposant d'en traiter les causes. Une délégation s'est félicitée que la crise somalienne, «trop longtemps négligée», mobilise enfin la communauté internationale.
Les délégations suivantes ont fait des observations ou adressé des questions dans le cadre de la réunion-débat: Nigéria (au nom de l'Union africaine), Union européenne, Éthiopie, Pakistan (au nom de l'Organisation de la Conférence islamique), Italie, Syrie (au nom du Groupe arabe), Espagne, Égypte, Kenya, Royaume-Uni, Ghana, Australie, Brésil, Argentine, Suisse, États-Unis, Yémen, Émirats arabes unis, Mexique, Djibouti, Uruguay, Israël, Japon et Thaïlande. Le Fonds des Nations Unies pour l'enfance ainsi qu'Amnesty International et Cairo Institute for Human Rights Studies ont aussi participé à cette réunion-débat.
Présentant son rapport sur la situation des droits de l'homme en Somalie, l'expert indépendant, M. Shamssul Bari, a déploré les nombreuses pertes en vies humaines depuis le début du mois d'août (offensive du mois du Ramadan), une tendance inquiétante pour l'avenir du processus de paix. Malgré ces violations, perce une lueur d'espoir et il semble que l'on puisse faire état d'évolutions positives. L'expert indépendant a par ailleurs déploré qu'une grande partie des financements promis ne soit toujours pas arrivée. La Somalie est intervenue à titre de pays concerné.
Les délégations suivantes ont participé au débat interactif avec l'expert indépendant: Nigéria (au nom du Groupe africain), Ouganda, Djibouti, Union européenne, Éthiopie, Yémen, Égypte, Bangladesh, Royaume-Uni, Bahreïn, Italie, Syrie (au nom du Groupe arabe), Koweït, Australie, Algérie, Chine, Arabie saoudite, Canada, Thaïlande, Norvège, États-Unis, Soudan, Suède, Suisse et Tanzanie. Quatre organisations non gouvernementales ont également pris la parole: International Educational Development, Freedom House, Human Rights Watch et Cairo Institute for Human Rights Studies.
Le Conseil a ensuite tenu un débat général sur l'assistance technique et le renforcement des capacités dans le domaine des droits de l'homme et a été saisi dans ce cadre de rapports préparés par le Secrétariat, et portant respectivement sur la coopération régionale dans la région Asie-Pacifique et sur le rôle du Haut Commissariat en matière d'assistance technique au Gouvernement et au peuple du Cambodge. Le Cambodge a fait une déclaration à titre de pays concerné, ainsi que les représentants de l'Organisation internationale de la francophonie et des États membres suivants Belgique (au nom de l'Union européenne et de plusieurs autres pays), Chili, Suisse, États-Unis, Thaïlande et Brésil. Le Comité de coordination des institutions nationales de droits de l'homme ainsi que les organisations non gouvernementales suivantes ont également fait des déclarations: Rencontre africaine pour la défense des droits de l'homme et Human Rights Watch.
À partir de 15h15, le Conseil se prononcera sur plusieurs projets de résolution, à commencer par un texte relatif à la mission d'établissement des faits sur les attaques israéliennes contre la flottille à destination de Gaza.
Réunion-débat sur l'assistance à la Somalie dans le domaine des droits de l'homme
Exposés des panélistes
M. NAVI PILLAY, Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, a déclaré que la Somalie est en bute à la pire crise humanitaire de la planète. Un enfant sur sept meurt avant d'avoir cinq ans. Un enfant sur cinq meurt de malnutrition. Mogadiscio connaît la situation la plus préoccupante. Mme Pillay a chiffré à plusieurs centaines de milliers le nombre de personnes victimes du conflit et des attaques de bandes armées. Il faut réagir face à ces événements et protéger les civils et non pas céder à l'inertie. Chacun doit s'intéresser à ce conflit et faire respecter le droit international. La Haut-Commissaire a déclaré que tous les responsables de violences et de violations du droit humanitaire international doivent être traduits en justice. La collecte de preuves contre les auteurs de violations est essentielle a-t-elle déclaré. Mme Pillay s'est en outre dite préoccupée par l'absence d'organisations de la société civile en Somalie. La communauté internationale doit leur accorder une assistance et leur assurer une protection; le Haut Commissariat est disposé à fournir les conseils nécessaires dans cette tâche.
Concernant la situation des enfants soldats, Mme Pillay s'est dite encouragée par la décision du Gouvernement fédéral de transition de ratifier la Convention des droits de l'enfant. Elle s'est en outre félicitée de la décision prise par ce gouvernement de ne pas recruter des enfants dans les forces armées et de prendre des mesures pour que cela n'ait plus lieu. La mise en place d'une police et d'une armée est essentielle, mais cela doit se faire en conformité avec les règles des droits de l'homme. La Haut-Commissaire a lancé un appel aux États afin qu'ils aident la Somalie dans ces efforts. Elle s'est aussi réjouie faite par l'annonce du Secrétaire général de renforcer le rôle de la Mission d'observation militaire de l'Union africaine en Somalie (AMISOM) et notamment au Somaliland et dans le Puntland. Le dialogue interactif est une occasion qui est donnée à la communauté internationale d'orienter le débat en cessant de se pointer mutuellement du doigt et en s'attelant à mettre fin aux discriminations faites aux minorités et aux groupes les plus vulnérables, dont les personnes déplacées. Citant le Secrétaire général, la Haut-Commissaire a déclaré que l'assistance à la Somalie nécessitait une coordination de tout le système des Nations Unies et de la communauté internationale.
M. ABDIRAHMAN HAJI ADEN IBBI, Vice-Premier Ministre du Gouvernement fédéral de transition de la Somalie, a souligné qu'en tant que nation n'ayant pas connu la paix depuis plus de vingt ans, il faut constater amèrement que les droits de l'homme ne pouvaient être pleinement protégés en l'absence, notamment, d'un système de gouvernement en état de fonctionner, de ressources adéquates et d'une volonté politique sans faille. Il a tenu à assurer le Conseil qu'à la suite des allégations récentes sur l'enrôlement d'enfants dans l'armée somalienne, le Gouvernement fédéral de transition avait réagi rapidement, ce qui démontre et illustre le fait que celui-ci a effectivement adopté une politique de tolérance zéro envers toutes les formes de violations des droits de l'homme.
Si le pays a connu un très grand nombre de violations des droits de l'homme ces deux dernières décennies, elles n'ont jamais atteint le niveau de la vague actuelle de violations perpétrées par Al-Chabaab et les prétendus Hizbul Islam, a-t-il poursuivi. «Ces deux organisations extrémistes ont imposé des politiques dures et cruelles qui dénient à la population les droits que Dieu leur accorde, y compris celui à la nourriture». Le Vice-Premier Ministre a cité, parmi les peines «judiciaires» appliquées par ces groupes, les amputations, les lapidations et les décapitations en public. Il a dit avoir une pensée particulière pour les journalistes somaliens qui risquent quotidiennement leur vie en accomplissant leur devoir. Il a assuré que son gouvernement soutenait fermement la Déclaration universelle des droits de l'homme. M. Aden Ibbi s'est félicité de la décision de relocaliser les agences onusiennes en territoire somalien, une décision attendue depuis longtemps par la population, a-t-il souligné.
M. SHAMSUL BARI, expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Somalie, a déclaré que la Somalie mérite que la communauté internationale consente des efforts concertés pour mettre un terme à ses souffrances. Il faut donc se féliciter de l'organisation du dialogue ce matin. Pour l'expert indépendant, il faut trouver des solutions à deux problèmes: mettre un terme au conflit armé, cause de toutes les violations des droits de l'homme, et répondre aux besoins élémentaires du peuple somalien. S'agissant du premier, une solution militaire semble illusoire; il conviendrait peut-être que la communauté internationale tente un effort de médiation au plus haut niveau, par le biais de l'Union africaine, de la Ligue arabe ou de l'Organisation de la Conférence islamique. Ensuite, la communauté internationale doit accorder une attention soutenue à la diminution des souffrances de la population, épuisée par la violence commise par les deux parties au conflit. La formation des forces fédérales aux grands principes des droits de l'homme est déjà assurée par une initiative de l'Union européenne, dont il faut espérer le prolongement.
Aujourd'hui, il est impératif que le Gouvernement fédéral déploie des efforts véritablement unifiés démontrant sa volonté et sa capacité à gouverner le pays, a souligné l'expert indépendant, qui a ajouté que l'aide de la communauté internationale y est conditionnée. À ce stade, l'aide technique doit porter sur la mise en place d'institutions judiciaires et de maintien de l'ordre, même si leur portée ne dépassera pas Mogadiscio pour l'instant. L'expert indépendant s'est dit convaincu que l'aide nécessaire sera accordée à partir du moment où le Gouvernement fédéral de transition en fera la demande précise. M. Bari a recommandé que la communauté internationale accorde une attention particulière à la reconstruction du système scolaire, fortement perturbé après deux décennies de conflit.
Quant aux Nations Unies, a poursuivi M. Bari, elles pourraient jouer un rôle beaucoup plus marqué par le biais d'une meilleure coordination. Le Haut Commissariat doit faire preuve de davantage de créativité dans son action en faveur de la promotion et de la protection des droits de l'homme en Somalie, a estimé l'expert indépendant, préconisant une présence accrue sur le terrain, aux côtés des victimes.
M. AUGUSTINE P. MAHIGA, Représentant spécial du Secrétaire général pour la Somalie, a déclaré que ce dialogue était une occasion d'améliorer le respect des droits de l'homme dans la région, notamment pour les personnes les plus vulnérables. Il s'est dit encouragé par l'enthousiasme des autorités et de la société civile pour travailler ensemble vers cet objectif. Il devrait être noté que si la paix n'est pas rétablie en somalie, il sera difficile d'envisager des changements profonds dans la situation précaire des droits de l'homme, en particulier en matière de droit à la vie, et des droits fondamentaux comme le droit à l'alimentation, au logement, à la santé à l'éducation. Il est impératif que tous les efforts soient fait pour lettre fin à ce conflit. M. Mahiga s'est par ailleurs dit conscient que si l'approche «droits de l'homme» était nécessaire dans la stratégie commune, il fallait se demander comment protéger les civils pour qu'ils échappent à ces attaques de bandes motivées par l'idéologie. Protéger le droit à la vie du peuple somalien doit être notre objectif non seulement, en mettant fin au conflit, mais en fournissant une aide adéquate pour l'eau, la nourriture, le logement et l'éducation partout où il y a des besoins. À cet égard, le Représentant spécial s'est dit très préoccupé par la chute de l'assistance destinée à l'aide humanitaire. Selon un rapport récemment publié, la Somalie est le pire endroit au monde pour un enfant. La situation s'agissant de l'accès à l'éducation reste l'une des plus difficiles et le taux de mortalité infantile le plus élevé du monde.
Abordant les questions institutionnelles, le Représentant spécial du Secrétaire général a estimé que la justice ne pouvait être rendue sans la lutte contre l'impunité, comme l'exige l'Accord de Djibouti. Dans le même temps, des ressources adéquates doivent être allouées pour reconstruire le système judiciaire afin de traduire en justice les auteurs de violation des droits de l'homme. Il n'est pas suffisant de former la police, l'armée et les institutions judiciaires; les dirigeants de ces organes doivent intégrer les principes des droits de l'homme dans leurs propres politiques. Dans ce sens, M. Mahiga s'est déclaré encouragé par le projet de constitution qui doit être soumis au peuple somalien et qui contient de fortes dispositions relatives aux droits de l'homme. Il a enfin estimé que la communauté internationale devait apporter son soutien aux organisations de la société civile.
M. MARK BOWDEN, Coordonnateur résident des Nations Unies pour les affaires humanitaires en Somalie, a souligné qu'il était difficile de trouver un pays dans le monde où la situation fût aussi difficile qu'en Somalie. Les femmes et les enfants sont de plus en plus vulnérables, ainsi que les jeunes en général, a-t-il noté. Selon les statistiques, seuls 10% d'entre eux seraient scolarisés. L'accès aux services de base est particulièrement malaisé pour les femmes. En outre, l'impunité est quasiment totale, les enfants étant susceptibles d'être enrôlés de force. Évoquant le problème des personnes déplacées, M. Bowden en a évalué le nombre à 1,4 million. Les Nations Unies s'efforcent de créer des partenariats avec des groupes et dirigeants religieux locaux afin d'améliorer la sécurité dans les camps. Des comités de protection des mineurs ont été mis en place pratiquement partout.
M. Bowden a souligné que sur le terrain, les relations étaient bonnes entre les Nations Unies et la Mission de l'Union africaine. Les droits de l'homme font partie de l'action fondamentale des Nations Unies. Le Coordonnateur résident de l'ONU a cité en particulier le travail de conviction en direction de la population visant à l'inciter à renoncer aux mutilations génitales. Il a indiqué que 350 000 enfants avaient bénéficié d'un appui social. Des formations sont dispensées aux forces de l'ordre en matière de droits de l'homme et de droit humanitaire. M. Bowden a enfin souhaité que le Gouvernement de transition s'engage à adhérer aux instruments internationaux relatifs aux droits de l'enfant et à ceux des femmes.
M. BOUBACAR GAOUSSOU DIARRA, représentant spécial du Président de la Commission de l'Union africaine pour la Somalie, chef de la Mission d'observation militaire de l'Union africaine en Somalie (AMISOM), a indiqué que la Mission est composée de sept bataillons burundais et ougandais. Agissant de concert avec le Gouvernement fédéral de transition de la Somalie, elle met tout en œuvre pour mettre un terme aux agressions de groupes armés, Al Chabaab et autres. Pour sa part, la composante civile de l'AMISOM se consacre à la reconstruction des structures étatiques telles que la police, ainsi qu'à la distribution de l'aide humanitaire. Elle dispense une formation aux droits de l'homme aux troupes engagées, en particulier aux officiers, cours portant par exemple sur la nécessité de minimiser les pertes humaines lors des engagements en milieu urbain. La Mission travaille en outre à l'amélioration du dialogue et de réconciliation nationale. L'AMISOM se félicite de l'organisation de ce dialogue interactif et appelle la communauté internationale à accorder davantage de moyens à ses soldats pour qu'ils puissent accomplir leur tâche.
M. GEORGES OKOTH-OBBO, Directeur du bureau Afrique au Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, a rappelé qu'il y avait environ 1,4 million de personnes déplacée en Somalie, soit pratiquement un quart de la population. Rien qu'en août dernier, 20 000 personnes se sont déplacées à cause des combats. C'est donc un domaine dans lequel la mise en place de capacités pour cimenter les droits de l'homme doit continuer et recevoir une attention toute particulière. Le représentant a par ailleurs estimé qu'il fallait trouver un moyen de mettre la population à l'abri; les attaques contre les populations civiles doit cesser. En outre, l'appui des Nation Unies est indispensable.
Le représentant du Haut Commissariat pour les réfugiés a souligné que la situation d'ensemble est désespérante, mais il faut adopter une vision plus nuancée. Ainsi, au Somaliland, il y a des possibilités d'actions et le Haut Commissariat pour les réfugiés a pu y renforcer ses capacités. Il existe une réelle possibilité d'œuvrer à favoriser un climat de tolérance et ainsi désamorcer les tensions. Concernant les populations somaliennes déplacées à l'étranger, M. Okoth-Obbo a estimé que la communauté internationale avait aussi un devoir d'assistance. Il a rappelé que 500 000 Somaliens sont en exil dans les pays de la région, notamment à Djibouti. Il a déclaré que ces populations étaient souvent victimes de stéréotypes et nombre d'entre elles se sont heurtées à des frontières qui leur étaient fermées. Le représentant du HCR a ajouté que 25 000 Somaliens ont été renvoyés chez eux contre leur volonté, y compris à Mogadiscio.
M. CHARLES VINCENT, du Programme alimentaire mondial, a indiqué que le PAM avait pour objectif d'atteindre 1,2 million de personnes, tout en rappelant qu'il ne pouvait toutefois plus intervenir dans le centre et le sud du pays. De bonnes récoltes ont permis une amélioration de la situation, une constatation à relativiser, la Somalie n'ayant jamais été en mesure d'assurer plus de la moitié de ses besoins alimentaires. Une mission doit être effectuée au Somaliland, pour y évaluer les excédents alimentaires afin d'estimer les possibilités d'acheter au niveau local, ce qui devrait permettre d'intervenir dans les régions où prévalent des situations alimentaires aiguës. Si la situation générale apparaît extrêmement précaire, le tableau n'est pas totalement sombre, la situation dans les régions du Puntland et du Somaliland étant globalement plus favorable. Dans le Sud, à l'inverse, plusieurs organisations qui travaillaient notamment dans les domaines de l'alimentation et de l'assainissement ont dû partir. Le PAM, qui s'est retiré lui aussi, avait pris la précaution d'évacuer ses stocks de vivres au préalable, a-t-il indiqué.
M. ABDULLAHI SHIRWA, président de l'organisation Somali Peace Line, représentant la société civile somalienne, a indiqué que la situation sanitaire et sécuritaire des civils s'est dégradée tout au long du premier semestre 2010. M. Shirwa a insisté sur l'urgence de la mise en place de mécanismes de protection des populations civiles, afin de gagner les cœurs et les esprits du peuple somalien, de sauver le Gouvernement fédéral de transition et de mettre un terme aux graves violations des droits de l'homme en Somalie. L'application d'une puissance de feu disproportionnée dans des zones densément peuplées ne permettra pas de trouver de solution durable: elle entraînera par contre le discrédit du Gouvernement fédéral de transition et risque de valoir les sympathies du public aux insurgés. M. Shirwa a recommandé qu'il soit mis un terme à l'impunité en Somalie et que les auteurs de violations des droits de l'homme soient traduits en justice, préconisant la création d'une commission indépendante et impartiale chargée d'enquêter sur les crimes commis en contravention du droit international. M. Shirwa a également insisté sur la nécessité de renforcer les mécanismes de protection des civils, par le biais d'une meilleure coordination entre les institutions fédérales de transition, la Mission d'observation militaire de l'Union africaine en Somalie (AMISOM) et les intervenants soucieux de contribuer à l'amélioration de la situation sécuritaire.
M. OMAR FARUKH OSMAN, représentant de l'Union nationale des journalistes somaliens, a déclaré que la situation des droits de l'homme ne cesse de se dégrader en Somalie, notamment s'agissant de la liberté. Les journalistes paient un lourd tribut dans ce conflit. Des journalistes sont été assassinés alors que d'autres connaissent des intimidations sur leur lieu de travail. M. Osman a notamment cité la condamnation à six ans de prison d'un journaliste au Puntland, ce qui une lourde sanction pour un journaliste pour avoir exercé sa profession. La communauté internationale doit s'assurer que les droits de l'homme sont respectés, poursuivre les auteurs de ces violations de droits de l'homme et lutter contre l'impunité. Si on laisse faire, cela incitera les auteurs à poursuivre leur macabre besogne. Le Conseil doit viser tout ce qui touche à la liberté de la presse pour ne pas entraver le travail des journalistes et des organisations de la société civile.
Résumé des interventions
Le Nigéria, intervenant au nom du Groupe africain, a souligné que les Nations Unies doivent demeurer pleinement engagées en Somalie afin de soutenir les efforts de stabilisation. Il est très important, a-t-il toutefois précisé, que ce soit les Somaliens eux-mêmes qui tiennent les rênes du rétablissement en cours. La délégation de l'Union européenne a souligné de son côté la nécessité d'une approche globale, la lutte contre l'insécurité supposant d'en traiter les causes. Elle a ajouté que l'UE apportait sa pierre à l'édifice en formant notamment des membres des forces de l'ordre. Le Brésil a demandé aux représentants du Gouvernement fédéral de transition quelle était la priorité principale qu'il s'était fixée en vue de parvenir à la fin du conflit.
L'Éthiopie s'est félicitée que la crise somalienne, «trop longtemps négligée», mobilise enfin la communauté internationale. Elle souhaite que les Nations Unies marquent davantage leur présence dans ce pays. Le Pakistan, au nom de l'Organisation de la Conférence islamique (OCI), a estimé pour sa part que la Somalie ne bénéficiait pas d'un intérêt suffisant. Il a apporté le soutien de l'OCI au Gouvernement fédéral de transition, rappelant que c'était le seul reconnu au niveau international. Le Kenya a souligné la nécessité de placer la Somalie «tout en haut de l'agenda international», ce qui suppose de s'attaquer aux racines mêmes du conflit, à défaut, la communauté internationale se bercerait d'illusions, a-t-il dit.
De son côté, l'Espagne a évoqué la dix-huitième réunion du groupe de contact pour la Somalie qui s'est tenue en début de semaine à Madrid et à laquelle assistait le chef de l'État somalien lui-même, Sharif Sheikh Ahmed, l'Espagne démontrant ainsi son engagement dans la recherche de solutions globales en faveur de la Somalie.
La Syrie, au nom du Groupe arabe, a souligné que la communauté internationale était invitée à fournir une aide humanitaire et logistique, qui doit avoir la primauté absolue sur toute action militaire.
Quant au Royaume-Uni, il a estimé vital que les organisations internationales indépendantes aient accès aux plus nécessiteux. Le Ghana a rappelé que 25% de la population était confronté à une crise humanitaire. Concrètement, l'Australie a noté que l'un des problèmes à résoudre consistait à améliorer la coordination de l'ONU sur le terrain afin de parvenir à une meilleure cohérence. «La solution sera somalienne mais la communauté internationale doit jouer son rôle afin de l'aider à surmonter cette crise», a souligné l'Australie.
L'Algérie a attiré l'attention du Président du Conseil sur le consensus qui se dégageait des interventions de ce matin et émis l'espoir que cela se traduirait concrètement sur le terrain. Il est temps que la communauté internationale et l'ONU renforcent leur présence en Somalie, face au «démembrement de fait» dont souffre le pays, a-t-il affirmé.
La Suisse a souligné de son côté que l'on ne pouvait espérer obtenir un rétablissement du pays à court terme, compte tenu des dégâts occasionnés par le conflit intérieur qui déchire le pays depuis près de vingt ans. Elle a demandé aux panélistes comment un dialogue sur les normes en matière de droits de l'homme pourrait être engagé ou renforcé avec les factions. Il a en effet rappelé que l'impunité était un des principaux facteurs alimentant les violations des droits de l'homme.
La délégation italienne a dit la nécessité d'associer les autorités du Somaliland et du Puntland dans les efforts de concertation avec le Gouvernement fédéral de transition.
De nombreuses délégations se sont inquiétées du nombre important de violations des droits de l'homme et des attaques contre les populations civiles, notamment de la part d'Al Chabaab, qualifié de groupe terroriste par les États-unis. Elles ont toutes souligné la nécessité de lutter contre ces violations, notamment par le renforcement des capacités du Gouvernement fédéral de transition. Dans ce contexte, elles ont appuyé la recommandation du Représentant spécial relative à une aide de la communauté internationale. Elles ont souligné que le Gouvernement devait renforcer son autorité et augmenter les zones sous son contrôle (États-unis, Japon, Émirats arabes unis, Mexique). Le Yémen a fait remarquer que l'on dépensait davantage pour la lutte contre la piraterie que pour ce dont le Gouvernement somalien a besoin pour rétablir la paix sur son territoire. Djibouti a chiffré à moins de 40% le financement réalisé en matière de ressources affectées à l'eau et à la santé. Le Japon a estimé que le Gouvernement devait établir une feuille de route avec des objectifs réalisables jusqu'à la fin de la transition l'année prochaine.
La lutte contre l'impunité a également retenu l'attention des délégations. Amnesty International a par exemple plaidé pour la mise en place d'un mécanisme internationale d'enquête ou mécanisme analogue pour enquêter sur les violations des droits humains, notamment les plus graves pour que les responsables répondent de leurs actes. Israël a estimé que les violations des droits de l'homme ne devaient pas rester impunies en Somalie. Le Cairo Institute for Human Rights Studies a souligné la nécessité de collecter les informations relatives à toutes les parties au conflit. Il faut s'assurer de la lutte contre l'impunité et esquisser un mécanisme de reddition de comptes approprié. Un représentant du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) a déclaré disposer de nombreuses preuves de recrutement d'enfants soldats, y compris chez les forces gouvernementales. La représentante a invité le Conseil à veiller à ce que le Gouvernement somalien respecte le droit international et ratifie dans les meilleurs délais la Convention relative aux droits de l'enfant et son Protocole facultatif sur les enfants dans les conflits armés.
Conclusions des panélistes
M. ABDIRAHMAN HAJI ADEN IBBI, Vice-Premier Ministre du Gouvernement fédéral de transition de la Somalie, a indiqué que son pays est fermement déterminé à appliquer ses obligations en matière de droits de l'homme au profit de la population. Malheureusement, des groupes terroristes liés à Al-Qaida s'en prennent délibérément aux civils - au mépris des préceptes religieux - qu'ils n'hésitent pas à utiliser comme boucliers humains. Avec l'aide de la communauté internationale, et notamment de l'AMISOM, les autorités de transition mettront tout en œuvre pour protéger les civils, a assuré le Vice-Premier Ministre, en s'efforçant en particulier de minimiser les dommages collatéraux de leurs opérations militaires. M. Ibbi a aussi assuré que son Gouvernement ne recrute pas d'enfants soldats.
M. MAHIGA a constaté que ce mois de septembre constituait un jalon dans l'assistance de la communauté internationale à la Somalie, un nombre important de réunions s'étant tenu à haut niveau, à l'ONU à New York, à Genève, ainsi qu'à Madrid au sujet de ce pays. Le Représentant spécial du Secrétaire général pour la Somalie a demandé au Gouvernement fédéral de transition d'épauler la Mission d'observation militaire de l'Union africaine en Somalie (AMISOM) et souligné la nécessité d'intégrer les principes relatifs aux droits de l'homme dans les programmes d'aide internationale.
M. BOWDEN a salué l'engagement du Gouvernement fédéral de transition, notamment en ce qui concerne la facilitation de l'accès des humanitaires. S'agissant des racines du conflit, les Nations Unies tachent de mettre l'accent sur les programmes en faveur des droits de l'homme. Il existe toutefois un déficit de financement très important en ce qui concerne les droits fondamentaux, a averti le Coordonnateur résident des Nations Unies. Les enfants et les jeunes doivent particulièrement être mis au cœur de l'action internationale, a insisté M. Bowden.
M. DIARRA a estimé que les mesures prises pour le contrôle de Mogadiscio ainsi que les différents accords signés par le Gouvernement méritaient d'être salués. Le chef de la Mission d'observation militaire de l'Union africaine en Somalie (AMISOM) a en outre estimé qu'il fallait renforcer les capacités du pays en matière d'aide humanitaire et veiller à ce que la propagande d'Al Chabaab soit neutralisée. Il a rappelé la grande implication des forces de l'AMISOM sur le terrain militaire et humanitaire ainsi que la nécessité d'une aide et d'une assistance technique internationale accrues.
M. OKOTH-OBBO a indiqué que plusieurs institutions des Nations Unies pourraient déployer davantage de personnel sur le terrain si seulement l'accès aux populations était assuré. Compte tenu des conditions opérationnelles, il est vrai que la capacité d'absorption des financements est limitée dans le sud et le centre du pays. Pour sa part, le Haut Commissariat pour les réfugiés a besoin de 65 millions de dollars mais n'en dispose que de douze.
M. VINCENT a déclaré qu'on ne sera pas étonné de constater que le Programme alimentaire mondial et le Haut Commissariat pour les réfugiés faisaient des constats équivalents de la situation à laquelle ils sont confrontés. Le représentant du PAM a reconnu que l'on pouvait faire davantage, ce qui pose la question des moyens matériels et financiers.
M. SHIRWA s'est félicité de la tenue de cette réunion, assurant que la société civile somalienne épaulerait la communauté internationale et émettant l'espoir que les violations des droits de l'homme cesseraient au plus tôt.
M. OSMAN a indiqué que la liberté d'expression n'avait guère de sens lorsque la vie même des journalistes était menacée. Un mécanisme de prévention et de dissuasion doit être mis en place pour les protéger. Pour le moment, un tel mécanisme fait défaut, a déploré le journaliste somalien.
Examen du rapport sur la situation des droits de l'homme en Somalie
Présentation du rapport
M. SHAMSSUL BARI, expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Somalie, a déclaré que la situation des droits de l'homme en Somalie continuait d'être préoccupante. Depuis deux mois, on a assisté à de graves violations des droits de l'homme. L'offensive du mois du Ramadan a fait beaucoup de morts. Cela est de nature à inquiéter l'avenir du processus de paix. L'expert indépendant a cependant déclaré que malgré ces violations, il y avait une lueur en bout de tunnel; il a dit percevoir des évolutions positives.
Dans ses recommandations, M. Bari a suggéré que le Gouvernement fédéral de transition soit le principal acteur du pays. Le gouvernement doit montrer son unité, ce qui n'est pas le cas. Il est juste là pour montrer sa détermination et sa volonté. J'ai aussi laissé entendre que l'Organisation des nations unies doit coordonner ses efforts et que la communauté internationale doit assurer le financement de l'aide et de l'assistance dont a besoin le gouvernement de transition. Il a déploré qu'une grande partie des financements promis ne soit toujours pas arrivée. Il est nécessaire d'accorder nos violons pour améliorer la situation en Somalie. C'est une tâche pour la conscience de l'humanité, a conclu M. Bari.
Le rapport sur la situation des droits de l'homme en Somalie (A/HRC/15/48, disponible en anglais seulement) attire l'attention sur une intensification des combats depuis le mois d'août et, notamment, la détérioration de la situation des défenseurs des droits de l'homme. Dans le Puntland et le Somaliland, la situation est restée plus stable.
Pays concerné
M. YUSUF MOHAMED ISMAIL (Somalie) a salué le rapport, important et complet, qu'a présenté l'expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Somalie et qui témoigne de l'ampleur de l'engagement de ce dernier en faveur du bien-être du peuple somalien. Le représentant somalien a attiré l'attention sur l'importance que revêtent certaines des remarques faites par l'expert indépendant, s'agissant notamment du constat selon lequel il ne saurait y avoir de solution militaire et de l'affirmation selon laquelle la protection des civils devrait être au premier plan des préoccupations de toutes les parties concernées. Le représentant somalien a par ailleurs indiqué ne pas percevoir, dans l'immédiat, d'alternative viable autre que l'application d'une feuille de route axée sur la fourniture de l'aide humanitaire et des services sociaux. À cet égard, la communauté internationale – en particulier les pays frères et sœurs de la Somalie – devrait soutenir ou déployer des corps d'ingénieurs militaires afin de fournir les services sociaux tant nécessaires et d'ouvrir des couloirs civils pour la protection et l'assistance, afin de gagner le cœur et l'esprit du peuple somalien à Mogadiscio et, si possible, partout dans le pays.
Quant au traitement des causes profondes de la crise politique et socioéconomique prolongée que connaît la Somalie, son représentant a également indiqué ne pas percevoir d'alternative autre que la mise en œuvre d'un processus de paix durable axé sur la création de l'État. À cet égard, il a affirmé que la justice de transition ne constitue pas la solution contre l'impunité. Il convient de souligner qu'après l'effondrement du régime de feu Syad Barre, en 1991, seules deux ressources avaient été laissées aux mains du citoyen ordinaire somalien: l'identité clanique et l'identité religieuse. Malheureusement, les deux ont été instrumentalisées à différentes étapes du long combat mené afin d'obtenir des gains politiques et économiques. Aussi, va-t-il sans dire que des solutions technocratiques qui seraient applicables pour tous, hors de tout contexte, ne peuvent être accueillies que par la méfiance. Le représentant somalien a plaidé en faveur d'une coordination effective entre les institutions des Nations Unies impliquées et les autorités somaliennes sur le terrain. Il a également plaidé en faveur du renouvellement du mandat de l'expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Somalie, M. Bari, et du renforcement de ce mandat.
Débat interactif
M. FRANK ISOH (Nigéria au nom du Groupe africain) a dit sa satisfaction que l'expert indépendant effectuera prochainement sa cinquième mission en Somalie. La Somalie étant la pire crise humanitaire dans le monde, la communauté internationale se doit de faire le maximum pour lui venir en aide. Les pays africains expriment leur indignation à la suite du dernier attentat ayant frappé des membres du Gouvernement fédéral de transition. Le Groupe africain se félicite que le Puntland et le Somaliland connaissent une situation relativement plus favorable en matière de droits de l'homme. La communauté internationale doit s'engager à financer toutes les activités onusiennes en Somalie: «Nous sommes une humanité commune», a-t-il rappelé. Le représentant a enfin qualifié de «central» le mandat de l'expert indépendant, dont il appuie le renouvellement.
M. JUSTINIAN MUHWEZI KATEERA (Ouganda) a rappelé que son pays est fournisseur de contingent important à la Mission d'observation militaire de l'Union africaine en Somalie (AMISOM). Pour que cette Mission réussisse, il convient de disposer de ressources importantes, a-t-il souligné. Il faut promouvoir une approche globale en matière d'assistance à la Somalie, a poursuivi le représentant ougandais. Il faut notamment faire progresser le processus de paix de Djibouti, renforcer la sécurité sur le terrain et reconstruire des infrastructures. Tous ces éléments doivent s'accompagner d'une assistance humanitaire garantissant la sécurité alimentaire et les soins de santé. Les troupes ougandaises de la Mission, bien que cela ne fasse pas partie de notre mandat, offrent des services médicaux à la population trois fois par semaine; avec cinq médecins seulement, le contingent parvient à traiter 6000 patients par mois. Ainsi, avec six médecins supplémentaires seulement, on pourrait doubler la fourniture de services médicaux à Mogadiscio, a souligné le représentant ougandais.
M. MOHAMED SIAD DOUALEH (Djibouti) s'est dit préoccupé par la détérioration quotidienne de la situation des droits de l'homme en Somalie et des abus commis par Al Chabaab et ses alliés dans leurs zones de contrôle. Il a cité la décapitation, le lynchage, les mariages forcés de jeunes filles avec les soldats, la violence envers les journalistes. La communauté internationale peut appuyer sur le processus de Djibouti pour redonner le moral au peuple somalien a déclaré le représentant. Il a par ailleurs appuyé les recommandations de l'expert indépendant en vue de renforcer les capacités du Gouvernement somalien. L'impunité est au cœur de l'insécurité en Somalie et Djibouti invite la communauté internationale à envoyer un message fort à Al Chabaab et à ses alliés.
MME RADKA PATALOVA (Union européenne) a évoqué les progrès accomplis tout en relevant que les femmes et les enfants étaient les premières victimes de la situation en Somalie. Elle a demandé à l'expert indépendant quels moyens pourraient être mis en œuvre pour que les parties en présence respectent les droits élémentaires de la population. Elle a enfin souhaité savoir quelles mesures de justice transitionnelle pourraient être envisagées.
M. ABEBE ALLEHONE (Éthiopie) a remercié l'expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Somalie pour son rapport circonstancié. Il s'est dit préoccupé par la grave situation des droits de l'homme et humanitaire en Somalie et a salué la contribution des soldats de l'AMISOM sur le terrain. Il s'est par ailleurs dit encouragé de voir que malgré les énormes difficultés, des signes positifs apparaissent sur lesquels la communauté internationale devrait faire fond. Le représentant éthiopien a demandé davantage de transparence autour des travaux en cours concernant la Somalie et a exhorté le Haut Commissariat aux droits de l'homme à fournir ce qu'il sait fournir au mieux, à savoir l'assistance technique, afin de renforcer les capacités des autorités fédérales de transition et de l'AMISOM.
M. FADHL AL-MAGHAFI (Yémen) a estimé qu'il fallait soutenir le gouvernement de transition pour qu'il puisse étendre son autorité sur tout le pays. Il a en outre déclaré qu'en ce qui concerne les enquêtes sur les violations des droits de l'homme, il fallait laisser cela aux organes nationaux du Gouvernement somalien. Le Yémen insiste sur la nécessité pour la communauté internationale de porter assistance au Gouvernement pour qu'il puisse faire face aux problèmes actuels.
MME HEBA MOSTAFA RIZK (Égypte) a souligné l'importance d'obtenir tout l'appui de la communauté internationale en faveur de la Somalie, ce qui implique que les besoins matériels et financiers soient assurés. Il convient de ne pas perdre de temps, a-t-elle ajouté, soulignant que l'accent doit être mis sur les causes profondes de la situation prévalant dans ce pays. Elle a souligné en particulier la nécessité de favoriser le dialogue entre les parties, aussi bien à l'intérieur du pays qu'avec la diaspora.
M. MOHAMMED NORE-ALAM (Bangladesh) a souscrit à la plupart des recommandations présentées par l'expert indépendant. Le Bangladesh reconnaît les circonstances difficiles dans lesquelles M. Bari doit s'acquitter de son mandat, compte tenu de la situation précaire du pays. Le Bangladesh demeure préoccupé par la poursuite du recrutement d'enfants dans le conflit, particulièrement de la part des factions armées. Il a aussi fait part de sa préoccupation face aux meurtres ciblés et aux enlèvements de journalistes. Il a apporté tout son appui à l'expert indépendant.
M. PHILIP TISSOT (Royaume-Uni) a salué l'action de sensibilisation de l'opinion devant la détérioration de la situation des droits de l'homme en Somalie. Le Royaume-Uni partage en outre la préoccupation de l'expert indépendant devant les sévices indicibles infligés par des groupes rebelles à la population et souligne que la protection des civils doit être au cœur des préoccupations des parties en conflit. Malgré les difficultés, une lueur d'espoir subsiste: le Gouvernement fédéral de transition continue de gouverner malgré la poursuite des activités des groupes rebelles. Il faut donc renforcer les capacités d'action des autorités de transition. Le Royaume-Uni se fait l'écho des préoccupations de l'expert s'agissant de la persistance du recrutement d'enfants dans les rangs des combattants.
MME BUDOOR ABDULAZIZ AHMED (Bahreïn) a estimé que la situation des droits de l'homme en Somalie est une question importante qui doit être examinée par le Conseil, notamment pour ce qui a trait à la situation des réfugiés somaliens. Elle a souscrit à l'avis de l'expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Somalie selon lequel la situation en Somalie est en train de changer, si l'on considère la lutte contre le trafic, la formation des forces de l'ordre et le développement des infrastructures. Elle a appelé toutes les parties en Somalie à respecter leurs obligations en vertu du droit international et a plaidé en faveur de l'octroi d'une assistance technique adéquate à la Somalie.
M. PAOLO CUCULI (Italie) a déclaré que le renouvellement du mandat de M. Bari était une priorité. Il a relevé l'optimisme prudent dont l'expert indépendant fait montre à la fin de son rapport. «Nous devons toutefois faire plus et plus rapidement», a estimé le représentant italien. Il a demandé à l'expert quel rôle pourrait jouer la société civile dans ce contexte, et quel aide les bailleurs de fonds pourraient fournir à celle-ci.
M. FAYSAL KHABBAZ HAMOUI (Syrie au nom du Groupe arabe) a rappelé que la Somalie a souffert de conditions très difficiles qui se sont aggravées en raison du manque d'intérêt que cette situation a suscité dans la communauté internationale. Aussi, faut-il espérer que la communauté internationale va maintenant aider le Gouvernement somalien à surmonter les difficultés auxquelles il est confronté. Il faut respecter l'unité de la Somalie et permettre au Gouvernement d'étendre son autorité sur l'ensemble du territoire somalien, a poursuivi le représentant syrien. Il s'est par ailleurs réjoui de l'annonce du transfert du bureau des Nations Unies à l'intérieur du territoire de la Somalie, le mois prochain. Il faut protéger les civils et lutter contre l'impunité, les enquêtes concernant les violations des droits de l'homme devant être laissées aux institutions nationales somaliennes, a ajouté le représentant syrien.
M. ALMASHAN ZEYAD (Koweït) a fait part de la préoccupation avec laquelle son pays prend connaissance du rapport de M. Bari, compte tenu de la détérioration de la situation en Somalie. Le Koweït appelle toutes les parties à prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité des civils. Le représentant a souligné la faiblesse des institutions de transition et a appelé la communauté internationale à leur accorder son soutien. Il s'est félicité de la démarche du Conseil d'organiser ce matin un dialogue destiné à sensibiliser la communauté internationale aux difficultés de la Somalie.
MME FATIMA MALIK (Australie) a repris à son compte l'appel lancé par l'expert indépendant en faveur de la protection de la société civile. Elle a également pris note de ses recommandations en matière d'accès à l'eau. L'Australie fournit une aide substantielle en faveur de la Somalie, a-t-elle indiqué, se félicitant par ailleurs du renforcement du contingent de l'AMISOM.
M. IDRISS JAZAÏRY (Algérie) a exprimé l'espoir que le rapport qu'a présenté aujourd'hui l'expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Somalie aidera la communauté internationale à sortir de l'indifférence coupable dont elle a fait preuve à l'égard de la Somalie et aidera le pays à sortir de la pire crise humanitaire existant actuellement au monde. Il est primordial de tout mettre en œuvre pour faire avancer le processus de paix initié dans le cadre de l'accord de paix de Djibouti, a-t-il ajouté. Il a réaffirmé l'attachement de l'Algérie à l'unité de la Somalie dans le cadre de ses frontières internationalement reconnues. M. Jazaïry a par ailleurs souligné que sécurité, droit humanitaire, droits de l'homme et droits économiques et sociaux sont interdépendants. La communauté internationale doit assumer ses responsabilités en renforçant les institutions somaliennes, a poursuivi le représentant algérien. Les bailleurs de fonds doivent répondre aux besoins d'assistance de la population, a-t-il insisté. L'ONU doit jouer un rôle d'appui plus dynamique, a également déclaré le représentant algérien. Il s'est dit heureux que les bureaux onusiens soient en train d'être déplacés de Nairobi en Somalie. L'Algérie est favorable à la prolongation du mandat de l'expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Somalie, a-t-il en outre indiqué. Pour ce qui est de la lutte contre l'impunité, indispensable à des fins de dissuasion, c'est aux Somaliens de mettre en place un mécanisme à cet effet en temps utile, a-t-il déclaré. Pour l'heure, la priorité doit être consacrée à faire cesser les effusions de sang.
M. YANG CHUANHUI (Chine) a pris note du rapport de l'expert indépendant M. Bari et a exprimé la reconnaissance de son pays pour le travail accompli. La Chine est heureuse de constater que la position du Gouvernement fédéral de transition s'est améliorée au point de vue militaire, notamment. Elle déplore, par contre, la détérioration de la situation des droits de l'homme, qui entraîne d'importants déplacements forcés de populations. Le processus de paix, qui est à un tournant, est confronté à d'importantes difficultés. Il importe dans ce contexte que le Gouvernement engage un dialogue avec toutes les franges de la société somalienne. La Chine est très engagée en faveur de la résolution de la crise en Somalie, comme en témoigne le rôle de coordinateur qu'elle joue à cet égard au Conseil de sécurité. La Chine est aussi prête à porter assistance à l'AMISOM, dans la mesure de ses capacités, a assuré le représentant chinois.
M. ABDULWAHAB ATTAR (Arabie saoudite) a insisté sur la nécessaire conjugaison des efforts internationaux, face notamment à la recrudescence des affrontements en Somalie. La délégation saoudienne souscrit à l'appel lancé par l'expert indépendant en vue d'un plus grand effort en faveur de ce pays. Elle insiste sur l'importance d'une réconciliation nationale et est favorable au maintien du mandat de l'expert indépendant. Elle soutient le projet de résolution qui sera soumis à ce sujet.
M. JEFFEY HEATON (Canada) s'est dit préoccupé par l'impunité généralisée en Somalie face aux violations des droits de l'homme et du droit humanitaire internationale. Le Canada invite toutes les parties au conflit à ce qu'une action décisive soit menée pour mettre en œuvre les recommandations contenues dans le rapport de l'expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Somalie. Le Canada appuie le renouvellement de ce mandat. Que peut faire la communauté internationale pour protéger les droits de l'homme des plus vulnérables et comment l'ONU et la communauté internationale peuvent-t-ils agir de concert pour que le Programme alimentaire mondial et d'autres institutions puissent reprendre leurs activités dans le centre et le sud de la Somalie, a notamment demandé le représentant canadien à l'intention de M. Bari?
M. VIJAVAT ISARABHAKDI (Thaïlande) a déclaré que le dialogue interactif est un excellent exemple d'initiatives régionales dans le domaine de la coopération technique aux États. La Thaïlande estime que le mandat de l'expert indépendant doit être non seulement renouvelé mais aussi renforcé, afin d'améliorer sa coopération avec les autres initiatives des Nations Unies en faveur de la Somalie. La communauté internationale doit pour sa part envisager de renforcer son aide à la Somalie, afin notamment de garantir la sécurité du pays tandis qu'il chemine vers la réconciliation.
M. GEIR SJØBERG (Norvège) a regretté profondément que la population civile, les femmes et les enfants en particulier, continue d'être la première victime de l'instabilité dans le pays. Dans la mesure où les factions en présence se préoccupent fort peu des droits de l'homme, il revient à la communauté internationale de faire en sorte qu'ils soient mieux respectés, a-t-il souligné. Le Gouvernement fédéral de transition doit s'élever au-dessus des différends qui déchirent la société, tandis que la communauté internationale doit renforcer ses efforts en les coordonnant mieux. La Norvège note toutefois que certains représentants des institutions présentes ce matin semble défendre les modalités actuelles de fonctionnement.
MME CARTTON E. FORBES (États-Unis) a remercié l'expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Somalie, M. Bari, pour le travail qu'il a réalisé ces douze derniers mois et a indiqué que les États-Unis sont en train d'examiner avec soin toutes ses recommandations. Ces recommandations soulignent la gravité des problèmes de droits de l'homme en Somalie et l'urgente nécessité qu'il y a pour les Somaliens et la communauté internationale à trouver un moyen effectif de relever les défis qui se posent dans ce contexte, a-t-elle déclaré. Elle s'est enquise auprès de M. Bari des mesures concrètes que les institutions des Nations Unies et les acteurs internationaux pourraient prendre dans l'année à venir afin d'améliorer la situation des droits de l'homme sur le terrain, au bénéfice du peuple somalien.
M. HAMZA OMER HASSAN AHMED (Soudan) a observé que la crise en Somalie ne saurait trouver de solution militaire, c'est pourquoi il faut y favoriser le dialogue et la concertation. Le Soudan estime que la communauté internationale doit œuvrer au rétablissement des conditions de sécurité du peuple somalien. Le Soudan n'est pas opposé au renouvellement du mandat de l'expert indépendant, pour autant que le Gouvernement de la Somalie en fasse expressément la demande. En effet, aucun mandat concernant un pays ne doit être créé sans l'aval de l'État concerné, a souligné le représentant.
MME CARINA MARTENSSON (Suède) a exhorté le Gouvernement fédéral de transition et l'AMISOM à prendre toutes les mesures possibles pour éviter les victimes civiles et pour améliorer les régimes de protection. Les Somaliens doivent avoir l'assurance que le gouvernement épaulé par la communauté internationale fait le maximum pour améliorer la situation des droits de l'homme, particulièrement à Mogadiscio où la situation est la plus aiguë, estime la délégation suédoise. Sa représentante a souhaité que M. Bari évoque de manière plus précise le problème de la traite des êtres humains, qui a attiré relativement peu l'attention à ce jour dans le cas somalien.
M. MICHAEL MEIER (Suisse) a relevé, comme le constate l'expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Somalie, M. Bari, que la situation demeure extrêmement préoccupante en Somalie. D'après le rapport de l'expert indépendant, un nombre incalculable d'atteintes aux droits humains et de violations du droit international humanitaire se produisent régulièrement et la situation s'est même aggravée depuis l'an dernier, a-t-il insisté. La protection des civils doit être l'objet d'une attention constante de toutes les parties, a-t-il poursuivi. À cet égard, le représentant suisse s'est enquis auprès de M. Bari de la forme que devrait selon lui revêtir le soutien technique qu'il préconise à l'ONU de garantir afin d'intensifier les efforts déployés par l'AMISOM pour protéger les civils. Le problème de l'impunité doit demeurer pour toutes les parties un sujet de préoccupation majeure en matière de droits humains, a poursuivi le représentant, après s'être alarmé des violations des droits fondamentaux perpétrées chaque jour. Aussi, a-t-il demandé à l'expert indépendant de développer davantage sa recommandation suggérant que le Secrétaire général de l'ONU envisage la création d'une commission d'enquête internationale indépendante sur les violations des droits de l'homme ou d'un mécanisme similaire pour enquêter sur toutes les exactions commises par tous les acteurs impliqués dans le conflit en Somalie. Enfin, le représentant suisse a exprimé l'espoir que le Somaliland continue son processus de démocratisation. Il s'est par ailleurs inquiété de la réduction significative de l'espace accordé à la société civile, ces derniers mois, au Puntland, demandant aux autorités du Puntland d'avancer dans le processus de démocratisation et de réformes.
M. DEUSDEDIT B. KAGANDA (Tanzanie) a dit la préoccupation de son pays devant la dégradation de la situation politique, sociale et sécuritaire en Somalie. Le représentant a appelé les parties en présence à redoubler d'efforts en vue de la création d'un gouvernement d'union nationale et les acteurs de la communauté internationale à continuer de prodiguer une aide humanitaire. La Tanzanie est reconnaissante au Burundi et à l'Ouganda pour les sacrifices que ces pays consentent pour la sécurité militaire de la Somalie. Pour sa part, la Tanzanie s'engage à former mille soldats somaliens.
Organisations non gouvernementales
MME KAREN PARKER (International Educational Development) a émis l'espoir que la présence accrue de l'Expert dans la région serait utile. Elle a attiré l'attention sur le fait que les apports de fonds en faveur de la Somalie étaient tout à fait insuffisants. Constatant que la solution militaire seule n'était pas suffisante, elle s'est félicitée de la situation régnant au Somaliland et au Puntland et demandé à l'expert comment on pourrait envisager d'étendre à d'autres régions la paix civile relative qui y règne.
M. OMAR FARUK OSMAN NUR (Freedom House) a souligné qu'en Somalie, 22 journalistes ont été assassinés depuis 2007. Depuis plusieurs années, a-t-il insisté, l'assassinat de journalistes est une tactique permanente employée par les militants islamiques qui, ces derniers temps, recourent en outre à une nouvelle approche consistant à prendre la tête de médias privées pour les utiliser à des fins de propagation de campagnes de haine et de désinformation. Une fois de plus, la Somalie a été cette année le pire endroit d'Afrique pour les journalistes, a conclu le représentant, demandant au Conseil de condamner ces actes criminels.
M. PHILIPPE DAM (Human Rights Watch) s'est félicité du dialogue interactif qui s'est tenu ce matin, dont il faut espérer qu'il serve à recentrer les efforts de la communauté internationale en Somalie. Le représentant a dénoncé les massacres de civils à Mogadiscio dans le cadre du conflit qui oppose les forces rebelles et le Gouvernement fédéral de transition, des civils utilisés comme «boucliers humains» par les rebelles alors qu'ils attaquent au mortier les positions gouvernementales et de l'AMISOM. Ces civils sont ensuite seuls exposés à la riposte des forces gouvernementales. Il a aussi condamné les exactions commises par Al Chabaab dans le sud du pays, notamment contre les femmes. Le représentant a appelé à la lutte contre l'impunité dont jouissent les auteurs de violations des droits de l'homme et à un renforcement de la capacité du Haut Commissariat à suivre la situation sur le terrain, par exemple en procédant à l'audition de victimes et de personnes déplacées.
M. AHMED MOHAMMED ALI (Cairo Institute for Human Rights Studies) a déclaré que les militants des droits de l'homme continuaient de payer un lourd tribut dans les violence en Somalie. En 2010 plusieurs journalistes ont été victimes de détention arbitraire et d'enlèvement. Les médias ont connu des sévères restrictions. La voix de ses acteurs se fait de moins en moins entendre car ils doivent faire preuve d'autocensure ou s'enfuir vers d'autres régions. Il a estimé que la communauté internationale doit envisager des mécanismes de reddition de compte pour les auteurs de violence contre les militants des droits de l'homme et leur assurer un soutien logistique politique et financier. Il a en outre estimé que la situation est d'autant plus grave qu'il n'existe pas de statistiques permanentes de ces violations. Dans ce contexte, le représentant a souhaité la création d'une présence permanente des Nations Unies au Puntland et invité le Bureau politique des Nations Unies pour la Somalie et le Haut Commissariat aux droits de l'homme à déployer suffisamment de fonctionnaires sur le terrain.
Conclusion de l'expert indépendant
M. BARI a remercié tous ceux qui ont qualifié son rapport d'utile et se sont prononcés pour la prorogation de son mandat. S'agissant des tâches prioritaires, M. Bari a estimé que pour ce qui concerne le Gouvernement, il serait bon qu'il établisse – en collaboration avec l'ONU, notamment – une feuille de route afin, notamment, de faire connaître les plans qui sont les siens en matière de lutte contre la corruption et de promotion de l'éducation. Le Gouvernement fédéral de transition doit dire haut et fort qu'il se préoccupe de sa population, a relevé l'expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Somalie. Il a toutefois souligné que la fonction publique, les services de santé, le versement des salaires des soldats sont autant de domaines dans lesquels des améliorations doivent être apportées, a poursuivi l'Expert indépendant. Pour ce qui concerne les Nations Unies, a-t-il ajouté, il convient de promouvoir davantage de coordination pour que les activités des Nations Unies portent leurs fruits sur le terrain. M. Bari a salué le retour en Somalie du bureau des Nations Unies pour la Somalie.
Pour ce qui est de la communauté internationale, plusieurs recommandations lui ont été adressées, a rappelé M. Bari; il faudrait par exemple aider le Gouvernement fédéral de transition à former des fonctionnaires, a-t-il indiqué. Il conviendrait en outre de réfléchir comment la société civile, qui fait déjà beaucoup, pourrait faire davantage. Pourquoi à cet égard ne pas mettre en place, dans le cadre de la feuille de route, un programme spécifique s'adressant à la société civile qui indiquerait par exemple ce que celle-ci pourrait faire en matière d'éducation, a-t-il interrogé? M. Bari a par ailleurs plaidé en faveur du développement d'institutions au Somaliland et au Puntland.
Les atrocités qui sont commises en Somalie, depuis longtemps mais qui ont redoublé ces derniers temps, sont un poids sur la conscience de l'humanité, a souligné l'expert indépendant. Maintenant que nous en avons pris conscience, il faut agir pour aider la population somalienne, a déclaré l'expert indépendant. Les Somaliens sont des êtres humains qui souffrent autant que les Afghans et les Iraquiens et il convient donc de leur apporter autant d'attention que nous en accordons à ces derniers, a-t-il conclu.
Assistance technique et renforcement des capacités dans le domaine des droits de l'homme
Présentation de rapports
M. IBRAHIM WANI, Directeur de la Division Afrique du département de la coopération technique au Haut Commissariat aux droits de l'homme, a présenté les deux rapports dont le Conseil est saisi au titre de l'assistance technique et du renforcement des capacités.
Le premier des deux rapports (A/HRC/15/39, à paraître en français) a trait au quinzième atelier sur la coopération régionale dans la région Asie-Pacifique, atelier consacré au renforcement des pratiques en matière de droits de l'homme par le biais des échanges d'expériences. Les participants se sont félicités de la création de mécanismes régionaux et nationaux de promotion et la protection des droits de l'homme et ont encouragé le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme notamment à appuyer ces mécanismes.
Le second rapport (A/HRC/15/48, à paraître en français) est consacré au rôle du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme en matière d'assistance technique au Gouvernement et au peuple du Cambodge. Le Haut Commissariat a mis l'accent sur l'appui juridique à la réforme du système judiciaire et carcéral, sur la promotion des droits fonciers
Pays concerné
M. SUN SUON (Cambodge) a dit prendre note du rapport du Haut Commissariat et s'est félicité des mesures de coopération. Il a toutefois déclaré que le rapport ne dresse pas un tableau fidèle de ce qui se passe au Cambodge. On n'y parle que des sujets de préoccupation dont le Gouvernement a bien conscience et auxquels il a déjà répondu. Il a notamment indiqué que son pays avait déjà mis en œuvre différents traités et fait des efforts pour l'application d'autres normes internationales, concernant notamment la torture. Le Gouvernement cambodgien a déployé de nombreux efforts pour répondre à ses obligations en matière de droit international et a déjà envoyé un rapport au Comité contre la torture. Le Haut Commissariat doit agir comme un partenaire et non comme un organe de contrôle. Ce n'est pas non plus une organisation non gouvernementale. Il doit se concentrer sur les programmes et les activités de suivi de la mise en œuvre des recommandations découlant de l'Examen périodique universel et fournir une assistance technique dans ces domaines.
Débat général
M. XAVIER BAERT (Belgique au nom de l'Union européenne et de plusieurs autres pays) a rappelé que tous les États ne disposent pas des mêmes ressources pour concrétiser l'objectif consistant à respecter, protéger et promouvoir les droits de l'homme. C'est la raison pour laquelle l'Union européenne est convaincue que la coopération constitue un élément essentiel pour prévenir les violations des droits de l'homme et y remédier.
L'Union européenne regrette que le dialogue interactif avec le Burundi ait été reporté pour la seconde fois, alors que la situation des droits de l'homme dans ce pays reste particulièrement préoccupante et fragile, malgré quelques évolutions positives, a poursuivi le représentant belge. Le respect de la liberté d'expression et des activités pacifiques de l'opposition constitue aujourd'hui une priorité, a-t-il ajouté. En pleine période de transition démocratique, le Burundi ne peut faire l'économie d'un mécanisme de suivi, a-t-il affirmé, avant d'inviter les autorités burundaises à coopérer pleinement avec le nouvel expert indépendant et de les enjoindre à mettre rapidement sur pied une Commission nationale des droits de l'homme conforme aux Principes de Paris.
Le rapport préliminaire sur les viols massifs en République démocratique du Congo publié la semaine dernière a une fois de plus démontré le volontarisme et la compétence du Haut Commissariat aux droits de l'homme lorsqu'il s'agit de répertorier des violations graves des droits de l'homme et de proposer des solutions concrètes pour l'avenir, a en outre souligné le représentant de l'Union européenne. Il a salué le renforcement de la présence du Haut Commissariat sur le terrain, de même que l'extension de la coopération technique offerte à des pays tels que la Guinée et le Kirghizistan.
M. HASSAN ZERAN (Chili) a souligné l'importance de l'assistance technique en tant que moyen de prévention des violations des droits de l'homme. Le représentant a insisté sur la nécessité pour le Conseil d'agir au profit des victimes de violations des droits de l'homme et de prévoir un chapitre consacré à la coopération. Nombre d'États devront être aidés à appliquer les recommandations issues de l'Examen périodique universel, a observé le représentant chilien.
M. MICHAEL MEIER (Suisse) a déploré qu'un débat avec l'expert indépendant sur le Burundi n'ait pas eu lieu durant cette session après qu'il a déjà repoussé lors de la précédente session. Il a par ailleurs noté qu'une commission indépendante des droits humains n'a pas encore été mise en place. Cependant, la Suisse estime qu'il est important d'informer le Conseil sur les travaux de l'expert. La pertinence de ce mandat ne peut être sous estimée. De ce fait, le représentant suisse a demandé à l'expert indépendant de faire rapport de la situation des droits humains au Burundi à la prochaine session du Conseil.
MME MEKENZIE MILLAR (États-Unis) a souligné que l'assistance technique est l'un des nombreux outils dont dispose le Conseil pour protéger et promouvoir les droits de l'homme. Afin de renforcer sa capacité dans ce domaine, le Conseil pourrait s'inspirer des bonnes pratiques d'autres organes multilatéraux, a-t-elle indiqué. Le Haut Commissariat aux droits de l'homme a fait un bon travail d'assistance à travers le monde, a-t-elle estimé, citant notamment la formation dispensée aux soldats de la paix aux fins de la protection des civils ou encore l'aide à l'établissement d'institutions nationales de droits de l'homme. Elle a par ailleurs encouragé le Haut Commissariat aux droits de l'homme et le Conseil à remédier à la situation dans laquelle se trouve, du point de vue des ressources humaines, le Bureau conjoint aux droits de l'homme des Nations Unies en République démocratique du Congo. Les États-Unis sont favorables au maintien de l'indépendance du Haut Commissariat, a-t-elle ajouté. Enfin, elle a regretté que l'expert indépendant sur le Burundi n'ait pas été en mesure de présenter son rapport à la présente session.
M. VIJAVAT ISARABHAKDI (Thaïlande) s'est félicité de la présentation des travaux du quinzième atelier sur la coopération régionale dans la région Asie-Pacifique, qui s'est tenu à Bangkok. Ses participants ont relevé qu'il faudra accorder une assistance accrue aux États afin qu'ils soient en mesure de souscrire à leurs engagements envers les nouveaux mécanismes de droits de l'homme au niveau régional et international, notamment l'Examen périodique universel. La Thaïlande insiste en outre sur l'importance de la coopération interrégionale et relève que les partenariats entre institutions nationales de droits de l'homme et organisations de la société civile sont la clé de la réussite à cet égard.
M. JOÃO ERNESTO CHRISTÓFOLO (Brésil) a déclaré qu'il est important d'examiner les situations sur lesquelles la communauté internationale avait réellement apporté sa contribution technique. La condamnation est parfois nécessaire. Elle ne devrait pas un objectif en soi mais un instrument dans la recherche d'amélioration sur le terrain. Le représentant a par ailleurs estimé qu'il était de la responsabilité du Conseil de s'acquitter de sa tâche en la matière. De nombreux pays ont demandé une assistance technique mais aucune stratégie n'a été mise en place pour répondre à ces demandes. Le représentant brésilien a en outre estimé que le processus d'examen des travaux du Conseil des droits de l'homme devait avoir pour objectif la mise en place d'un Conseil qui joue un rôle actif dans l'amélioration des situations sur le terrain. Nous avons tous la responsabilité de partager et de fournir les ressources pour aider les pays à surmonter les défis auxquels ils font face et que le Conseil a contribué à identifier.
Observateur
M. LIBÈRE BARARUNYERETSE (Organisation internationale de la Francophonie) a rappelé qu'au lendemain du séisme qui a frappé Haïti, l'OIF avait présenté des propositions concrètes pour la reconstruction de ce pays dans le cadre de la Conférence internationale des donateurs pour un nouvel avenir en Haïti. Mais l'action de l'OIF pour Haïti s'inscrit bien au-delà de ce cadre puisqu'un de ses programmes phares sur la justice a démarré dès la fin de l'année 2005, avec le financement du Canada et de l'Union européenne. L'OIF se trouve être actuellement l'un des seuls intervenants internationaux actifs dans le secteur de la justice et de l'état de droit en Haïti, a insisté le représentant, ajoutant que l'Organisation envisage également un appui d'urgence aux médias haïtiens, en partenariat avec l'UNESCO. Enfin, le représentant de l'OIF s'est félicité de la prorogation du mandat de l'expert indépendant qui contribue pleinement à une approche intégrée et coordonnée en matière de droits de l'homme dans cette période cruciale pour la reconstruction d'Haïti.
Institutions nationales de droits de l'homme et organisations non gouvernementales
MME KATHARINA ROSE (Comité de coordination des institutions nationales de droits de l'homme - CIC) a rappelé que les efforts de la Mission des Nations Unies en Haïti, du Haut-Commissaire, des procédures spéciales et de l'expert indépendant convergent vers les mêmes priorités, à savoir le renforcement de la protection dans la crise humanitaire, qui n'est pas terminée, par le biais notamment du soutien à l'institution nationale de droits de l'homme incarnée par l'Office de la protection du citoyen et de la citoyenne. Le CIC se félicite des efforts de l'expert indépendant ainsi que des efforts conjoints du Haut Commissariat aux droits de l'homme et de l'Organisation de la Francophonie, qui ont récemment dépêché une mission en Haïti en vue d'évaluer les besoins en vue du renforcement de l'Office. Les priorités à cet égard concernent la protection renforcée des droits des personnes, la promotion systématique d'une culture de droits de l'homme à tous les échelons de la société haïtienne et une attention soutenue en faveur de la protection des groupes spécifiques.
M. ROMAIN MORIAUD (Rencontre africaine pour la défense des droits de l'homme) s'est déclaré inquiet du climat d'insécurité qui prévaut en Somalie. Le respect de la Charte fédérale de transition et de l'accord de Djibouti présente pour notre organisation les documents de base du processus de négociation politique pour le retour de la paix et de la sécurité en Somalie. Concernant les nombreuses attaques de civils et les violations de droits de l'homme, le représentant a estimé qu'il fallait une meilleure coordination entre les agences afin de créer une atmosphère visant à garantir la protection des personnes déplacées et es réfugiés. Il en outre demandé au Conseil d'établir une stratégie de coopération avec les différentes agences pour réévaluer les besoins concernant l'assistance humanitaire ainsi que le renforcement de la capacité de l'AMISOM.
M. PHILIPPE DAM (Human Rights Watch) a dénoncé l'attitude des autorités burundaises qui s'efforcent d'éviter que ne se tienne au Conseil un débat public sur la situation au Burundi et s'efforcent de faire taire l'opposition. Il est donc regrettable que l'expert indépendant sur le Burundi ait été empêché de faire son rapport depuis deux ans. Le Conseil doit maintenir son attention sur le Burundi.
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HRC10/115F