Aller au contenu principal

LE COMITÉ CONSULTATIF DES DROITS DE L'HOMME REPREND L'EXAMEN DU PROJET DE DIRECTIVES SUR LES PERSONNES TOUCHÉES PAR LA LÈPRE

Compte rendu de séance

Le Comité consultatif a repris, cet après-midi, l'examen du projet révisé de principes et de directives en vue de l'élimination de la discrimination à l'égard des personnes touchées par la lèpre et des membres de leur famille, en vue de l'adoption d'un texte finalisé qui doit être soumis au Conseil des droits de l'homme à sa session de septembre. En début de séance, il a brièvement abordé la question des personnes disparues qui avait fait l'objet d'un débat hier matin.

M. Shigeki Sakamoto, membre du Comité chargé de cette tâche, a informé ses collègues des modifications apportées au texte du projet de principes et de directives en tenant compte des propositions et commentaires présentés au cours du débat qui s'est tenu en début de session, lundi dernier. Le groupe de rédaction est également composé de Mme Mona Zulficar et de MM. José Bengoa, Latif Hüseynov et Dheerujlall Seetulsingh, qui ont pris part au débat, de même que M. Emmanuel Decaux, Mme Halima Warzazi et M. Alfred Ntunduguru Karokora, ainsi que les représentants du Japon, des Philippines, de l'Indonésie, du Brésil et de Association of World Citizens.

Plusieurs intervenants ont fait de nouvelles propositions d'amendement dont certaines ont été directement incorporées au texte, après une courte interruption de séance. Le Comité poursuivra l'examen du texte demain.

La question des personnes disparues, qui avait fait l'objet d'une discussion hier matin, a été brièvement abordée en début de séance. Le représentant du Honduras a indiqué que son pays avait établi une commission de vérité et a espéré que cette initiative servirait d'exemple dans la lutte contre le phénomène des disparitions forcées. M. Wolfgang Stefan Heinz, Mme Purificacion Quisumbing et la représentante de Association of World Citizens ont également fait des déclarations.


Le Comité consultatif se penchera demain, à partir de 10 heures, sur un projet de déclaration sur le droit des peuples à la paix et sur l'examen des moyens de renforcer la coopération dans le domaine des droits de l’homme, deux tâches dont il a été chargé par le Conseil des droits de l'homme. Il devrait ensuite reprendre l'étude du projet de principes et directives sur les personnes touchées par la lèpre.


Reprise du débat relatif à l'étude sur les meilleures pratiques concernant les personnes disparues

M. ROBERTO FLORES BERMUDEZ (Honduras) s'est félicité de la composition du groupe de rédaction chargé de préparer l'étude sur les meilleures pratiques concernant les personnes disparues. Le représentant a jugé encourageant le débat sur les moyens techniques de l'identification des victimes de disparitions forcées. Le Honduras ne connaît plus de problème de cet ordre, mais constate qu'il intervient encore dans plusieurs régions du monde. Le Honduras a par ailleurs mis en place une «commission de vérité», dont l'indépendance et la crédibilité sont garanties par le fait qu'elle est présidée par un ancien Vice-Président du Guatemala, pays voisin. Il faut espérer que cette initiative servira d'exemple dans la lutte contre le phénomène des disparitions forcées.

MME GENEVIÈVE JOURDAN (Association of World Citizens) a attiré l'attention sur la situation des boat people et des familles qui se demandent comment obtenir des nouvelles des personnes qui se trouvent dans ces embarcations. Alors que cette question a déjà été abordée au temps de la Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme, elle a souhaité savoir ce qui a été fait ces dernières années.

M. WOLFGANG STEFAN HEINZ, membre du Comité consultatif et du groupe de rédaction, a précisé que le mandat du groupe de rédaction porte précisément sur les conflits armés, et non sur les situations dans les pays. Il a souligné que c'est le Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires qui devrait être contacté.

MME PURIFICACION QUISUMBING, Présidente du Comité consultatif, a estimé importante la contribution des organes chargés de traiter les situations au niveau des pays et a rappelé que le Comité consultatif ne souhaite pas aborder des problèmes ne ressortissant pas de son mandat.


Examen du projet de principes et directives en vue de l'élimination de la discrimination à l'égard des personnes touchées par la lèpre

Présentation

M. SHIGEKI SAKAMOTO, membre du Comité consultatif, a présenté les amendements apportés par le groupe de rédaction au projet révisé de principes et de directives en vue de l'élimination de la discrimination à l'égard des personnes touchées par la lèpre et des membres de leur famille (document A/HRC/AC/5/2). Le groupe de rédaction est également composé de Mme Mona Zulficar et de MM. José Bengoa, Latif Hüseynov et Dheerujlall Seetulsingh.

M. Sakamoto a rendu comte des nombreux changements dans la formulation des articles du projet en tenant compte des commentaires reçus suite à la présentation du projet révisé en début de semaine. Le groupe de rédaction a par exemple atténué la formulation du principe 9, posant désormais que les personnes affectées par la lèpre «doivent avoir», et non plus «ont» le droit de participer aux démarches et décisions les concernant. Le groupe de rédaction a également apporté une distinction nette entre la Déclaration universelle des droits de l'homme et les autres instruments internationaux des droits de l'homme: la première n'est en effet pas strictement contraignante au plan juridique pour les États, au contraire des seconds (directives 1.2 et 10.1). Un paragraphe de la directive 5 dispose désormais que les États «devraient» améliorer les conditions de vie dans les léproseries et hôpitaux. Enfin, la directive 13 ajoute que la lèpre «est guérissable» et qu'elle ne doit pas servir de prétexte à la discrimination contre les personnes atteintes de cette maladie et leurs familles.

Débat

M. LATIF HÜSEYNOV, membre du Comité consultatif, a salué le travail de fond accompli par M. Sakamoto avec l'aide des autres membres du Comité consultatif. Il a apporté son soutien aux différents amendements, estimant qu'ils améliorent le texte. Il a indiqué avoir transmis pour sa part quelques amendements d'ordre technique à M. Sakamoto et a espéré qu'ils pourront en discuter bientôt. L'expert a estimé qu'il ne devrait pas y avoir de lien entre la discrimination et les droits de l'homme uniquement, mais qu'il conviendrait plutôt d'affirmer que les personnes touchées par la lèpre ne devraient pas faire l'objet de discrimination au motif de leur maladie.

M. JOSÉ ANTONIO BENGOA CABELLO, membre du Comité consultatif, a observé que le projet devrait absolument poser le principe de la nécessaire mise en place, par les États, de programmes visant à fermer, graduellement et à terme, toutes les léproseries. On parle ici de petites communautés regroupées autour d'une institution de santé. À défaut d'une telle obligation, on peut craindre que les léproseries ne restent ouvertes ad vitam aeternam. Le cas échéant, des personnes qui n'auraient d'autre lieu de vie, compte tenu de leurs handicaps, pourraient y rester.

M. EMMANUEL DECAUX, membre du Comité consultatif, a pour sa part estimé que la formulation du tout premier principe est particulièrement lourde et longue. Il a plaidé pour une formulation plus légère. D'autre part, il a constaté qu'à plusieurs reprises, les principes et directives font référence aux personnes vivant au-dessous du seuil de pauvreté. Il a préféré que le texte parle de «personnes vivant dans la pauvreté» et ne fasse pas référence à un «seuil» ou une «ligne» de pauvreté.

M. AKIO ISOMATA (Japon) a observé que l'expression de l'intégration sociale progressive des résidents des léproseries (directive 5.4) appelle la question de savoir si ces personnes souhaitent quitter leurs communautés, et si les États ont les moyens de procéder à cette intégration. Le représentant a demandé l'avis du groupe de rédaction à ce sujet.

MME HALIMA EMBAREK WARZAZI, membre du Comité consultatif, a rappelé que les États membres du Conseil des droits de l'homme ont toute la liberté de proposer des amendements; c'est leur droit et le Comité consultatif n'a rien à dire, a-t-elle souligné. Mais le temps presse et elle a suggéré que M. Hüseynov fasse part de ses propositions d'amendement maintenant.

M. HÜSEYNOV a présenté plusieurs amendements de forme au projet de M. Sakamoto. Il a notamment proposé que les États soient tenus de «promouvoir, protéger et assurer» la pleine réalisation des droits des personnes atteintes de la lèpre (directive 1.1) et de prendre à cet égard les mesures «administratives, législatives et autres» qui s'imposent. L'expert a proposé en outre de supprimer la directive 10.1, qui répète la directive 1.2.

M. BENGOA a proposé que lorsque le texte des directives stipule que les États devraient améliorer les conditions de vie dans les léproseries et les hôpitaux, d'ajouter que les États devraient concevoir et mettre en œuvre des plans pour l'élimination progressive de ces lieux et la réintégration des résidents.

M. DHEERUJLALL SEETULSINGH, membre du Comité consultatif, a recommandé au Comité consultatif de se prononcer sur les amendements de M. Bengoa puis d'envoyer le texte au Conseil, où il fera l'objet d'un débat auquel pourra participer le représentant du Japon.

Examen de nouveaux amendements

M. SAKAMOTO a indiqué que des amendements proposés ont été intégrés au projet pendant la pause s'agissant notamment du principe selon lequel les personnes souffrant de la lèpre et leurs familles ne doivent pas faire l'objet de discrimination sur la base de la maladie.

MME MONA ZULFICAR, membre du Comité consultatif, a indiqué que la proposition d'amendement de M. Bengoa a été incluse afin d'affirmer que les États devraient améliorer les conditions de vie dans les léproseries et les hôpitaux et devraient concevoir des plans pour l'intégration progressive des résidents de ces lieux dans la communauté et pour l'élimination progressive de ces lieux. L'accent est mis sur le caractère progressif de ces mesures, a précisé l'experte. Un effort constant doit être fait pour sortir ces personnes de l'isolement dans lequel ils vivent, a-t-elle rappelé. Elle a également souligné que le Comité consultatif ne souhaite pas que les États forcent ces personnes à quitter les léproseries et hôpitaux, mais qu'elles respectent leur choix.

Pour M. HÜSEYNOV, l'amélioration des conditions de vie des personnes doit être promue par principe. Il faudra adapter le texte de la directive 5.4 dans ce sens.

M. SEETULSING a estimé que le Comité consultatif devait s'efforcer de soumettre au Conseil des droits de l'homme un projet ne nécessitant plus d'amendements. Le débat reste entier quant au seuil de pauvreté, a-t-il ajouté.

MME QUISUMBING, Présidente du Comité consultatif, a fait remarquer qu'il n'est pas possible d'obtenir un document parfait. Il faut toutefois aboutir à un document que le Comité consultatif accepte. Il est très important que les consultations ultérieures, si elles s'avèrent nécessaires, soient tenues au sein du Comité consultatif et non pas dans le cadre de négociations avec les gouvernements.

MME ZULFICAR a proposé une nouvelle version de la directive 5.4 tenant compte des commentaires de M. Hüseynov.

M. ALFRED NTUNDUGURU KAROKORA, membre du Comité, a observé que la plupart des léproseries sont aujourd'hui fermées dans certains pays, compte tenu de la quasi-éradication de la maladie: il reste ainsi 345 cas en Ouganda. Les malades, soignés gratuitement et efficacement, ne sont d'autre part plus contagieux. Des cas de discrimination persistent cependant. Le Comité consultatif devrait peut-être accorder davantage d'attention au VIH/sida, pour lequel il n'existe pas de traitement.

M. BENGOA a relevé la justesse des observations de M. Karokora: l'Ouganda a, de fait, appliqué avant l'heure les recommandations du Comité consultatif.

MME WARZAZI a fait remarquer que le Comité consultatif ne saurait élaborer un texte qui donne satisfaction à tous les membres du Conseil des droits de l'homme. L'important est de s'assurer que les experts du Comité consultatif sont satisfaits de leur texte.

M. JÉSUS ENRIQUE G. GARCIA (Philippines) a constaté une tendance à l'abandon progressif des léproseries, précisant que son pays y est d'ailleurs favorable. Il a toutefois fait valoir que les situations diffèrent selon les pays et que parfois, les personnes touchées par la lèpre souhaitent rester entre elles. Il a suggéré de faire mention de ces différents contextes en ajoutant «le cas échéant» à la directive 5.4 relative aux léproseries.

MME QUISUMBING, Présidente du Comité consultatif, a estimé que la dernière version du texte livrée par Mme Zulficar reprend très bien les différentes suggestions.

M. KAMAPRADIPTA ISNOMO (Indonésie) a expliqué que son pays était favorable à l'abandon des léproseries. Il a toutefois relevé l'importance de tenir compte du niveau de développement de chaque pays. En effet, des problèmes peuvent se poser pour les pays en développement qui disposent de peu de ressources. Il faut également tenir compte des parlements et des gouvernements locaux et régionaux qui ont leurs propres dynamiques et particularités. La mise en œuvre de telles mesures prendrait du temps, a insisté le représentant. Il a proposé d'introduire davantage de souplesse dans ce principe, sans en remettre en question le fond.

M. AKIO ISOMATA (Japon) a déclaré comprendre la raison d'être des amendements portés à la directive 5.4. Si possible, il faudrait y ajouter la mention «dans la mesure où la chose est réalisable», pour tenir compte des situations juridiques des États.

M. JOAO ERNESTO CHRISTOFOLO (Brésil) a déclaré que son pays appuie la formulation du projet en l'état actuel. Ce document pourrait utilement mentionner l'importance de la coopération internationale pour la mise en œuvre des directives, surtout compte tenu des capacités des pays en voie de développement et des pays les moins avancés.

MME QUISUMBING a relevé à cet égard que la coopération internationale est complémentaire de l'action des États.

MME GENEVIÈVE JOURDAN (Association of World Citizens) a estimé que ce projet est un très beau texte mais s'est dite navrée qu'il ne parle que de la lèpre. C'est un mauvais sujet, trop restreint, a-t-elle jugé, se demandant pourquoi le mandat n'a pas été élargi à d'autres maladies, tel que le VIH/sida et la tuberculose qui font des ravages et dont les victimes sont aussi traitées comme des parias. Elle s'est demandée s'il serait possible de consulter le Conseil des droits de l'homme pour envisager de s'intéresser aussi à ces maladies.

M. SAKAMOTO a fait remarquer que selon la manière dont la directive sur les léproseries est rédigée, le texte peut donner l'impression que l'on prive les personnes atteintes de la lèpre de leur droit de continuer de vivre dans les léproseries et les hôpitaux. Il a toutefois estimé que le dernier amendement apporté au texte règle ce problème.

M. BENGOA s'est dit défavorable à l'ajout de la mention «dans la mesure où la chose est réalisable» proposée par le Japon. En effet, une simple recherche sur Internet montre que le nombre des personnes vivant encore dans des léproseries se chiffre en millions. Il a affirmé qu'il ne souscrirait pas à des recommandations faibles ou hésitantes.

MME WARZAZI a observé que le seul point de désaccord porte sur l'ajout de M. Sakamoto. L'accord entre les experts étant acquis, il ne faut pas le remettre en question à la dernière minute.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

AC10/016F