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LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME DÉBAT DES DROITS CULTURELS ET DES DROITS DES MIGRANTS

Compte rendu de séance
Le Président annonce que le Conseil tiendra cet après-midi un débat urgent consacré à l'attaque israélienne contre une flottille humanitaire au large de Gaza

Le Conseil des droits de l'homme a tenu ce matin un débat interactif avec l'experte indépendante dans le domaine des droits culturels, Mme Farida Shaheed, et avec le Rapporteur spécial sur les droits des migrants, M. Jorge Bustamante, dont les rapports ont été présentés hier après-midi. En début de séance, le Président du Conseil a annoncé la tenue, cet après-midi à 15 heures, d'un débat urgent consacré à l'attaque israélienne d'hier contre une flottille humanitaire qui se dirigeait vers Gaza.

S'agissant du rapport présenté par le Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants, plusieurs délégations se sont félicités de la présentation de pratiques exemplaires mises en œuvre par plusieurs gouvernements et organisations internationales pour promouvoir le droit au logement et à la santé des migrants, la réalisation de ces droits étant une condition nécessaire pour l'intégration effective des migrants dans les pays d'accueil. Il a été souligné que les États sont également tenus de lever les obstacles à la jouissance par les migrants de leurs droits fondamentaux, notamment la criminalisation des migrants en situation irrégulière, la limitation de l'accès aux services et l'obligation de dénoncer imposée aux fonctionnaires des pays d'accueil. La nécessité d'une approche globale des droits de l'homme des migrants a aussi été soulignée, fondée sur le développement en tant que droit humain, en amont comme en aval de l'acte de migration. Une délégation a exprimé des réserves quant aux méthodes de travail choisies par le Rapporteur spécial qui, selon elle, contribuent à occulter des problèmes graves auxquels sont confrontés les migrants. Réagissant aux interventions en fin de séance, M. Bustamante a souhaité l'adoption de règles obligeant les pays à présenter des informations statistiques sur le marché du travail et la place qu'y occupent les travailleurs en situation irrégulière, afin de contribuer aux efforts pour un respect plein et entier des droits de l'homme de tous les migrants.

En ce qui concerne le premier rapport de l'experte indépendante sur les droits culturels, des délégations ont approuvé les principes proposés par Mme Shaheed concernant l'approche à adopter dans l'accomplissement de son mandat, notamment en plaçant les droits culturels au cœur du développement, de la paix et du dialogue entre les peuples et les individus. Des délégations ont aussi souligné que toutes les pratiques culturelles ne sont pas nécessairement conformes au droit international et que la diversité culturelle ne saurait justifier ces pratiques. L'experte indépendante a notamment été priée de s'opposer aux efforts visant à promouvoir l'idée de «relativisme culturel». Concluant le débat, Mme Shaheen a déclaré que les cultures sont dynamiques et complexes. Les négociations tenant compte de l'évolution et du milieu permettent de faire entendre la pluralité des voix des différentes entités culturelles. À cet égard, l'adoption d'une démarche de non-confrontation et l'implication de la jeunesse dans des pratiques d'ouverture culturelle sont des moyens permettant de suivre le développement des pratiques culturelles.

Les représentants des États suivants ont participé au débat interactif: Sénégal, Indonésie, Arménie, Malaisie, Algérie, Pakistan (au nom de l'Organisation de la Conférence islamique), Guatemala, Afrique du sud, Venezuela, Chine, Canada, Cuba, Mexique, Brésil, Angola, Nicaragua, Russie, Pérou, Grèce, Nigéria (au nom du Groupe africain), Bosnie Herzégovine, Bangladesh, Ghana, Japon, Chili, Suisse, Népal, Équateur, Argentine, Iran, Bolivie, Australie, Émirats arabes unis, Maroc, Égypte, États-Unis, Azerbaïdjan et Philippines. Les représentants de L'Union européenne et de l'Union africaine ont également pris la parole, ainsi que les représentants des institutions nationales de droits de l'homme et des organisations non gouvernementales suivantes: Commission des droits humains de la Nouvelle Zélande, Commission des droits humains de l'Écosse, Commission des droits de l'homme des Philippines, Planetary Association for Clean Energy (au nom de plusieurs autres organisations non gouvernementales1), Human Rights Advocates, Mouvement international ATD Quart Monde, Nord-Sud XXI (au nom également de l'Union des juristes arabes), Indian Council of South America, et Human Rights Watch.


Le Conseil poursuit ses travaux à 12h10 en tenant un débat interactif avec le Représentant du Secrétaire général sur les droits de l'homme et les sociétés transnationales, l'expert indépendant sur les droits de l'homme et la dette étrangère et le Rapporteur spécial sur le droit à l'éducation. À 15 heures, le Conseil tiendra un débat urgent consacré à l'attaque israélienne contre une flottille humanitaire au large de Gaza.


Examen des rapports sur les droits des migrants et sur les droits culturels

Documentation

Les experts chargés de mandats sur ces deux questions ont présenté hier après-midi leurs rapports: il s'agit du premier rapport de l'experte indépendante dans le domaine des droits culturels, (A/HRC/14/36) et du rapport annuel du Rapporteur spécial sur les droits des migrants (A/HRC/14/30, à paraître en français), ainsi que de ses rapports sur les missions qu'il a effectuées en Roumanie (A/HRC/14/30/Add.2) et au Royaume-Uni (A/HRC/14/30/Add.3).

Débat interactif

MME NICOLE RECKINGER (Union européenne) a remercié Mme Farida Shaheed de son premier rapport. Elle a observé, avec l'experte indépendante dans le domaine des droits culturels, que l'exercice des droits culturels était étroitement lié au pluralisme des opinions et donc des médias, deux domaines auxquels l'experte indépendante devrait s'intéresser de près. L'Union européenne estime d'autre part, tout comme l'experte, que la diversité culturelle ne doit pas être assimilée au relativisme culturel et que toutes les pratiques culturelles ne bénéficient pas ipso facto de la protection du droit international, une notion qui devrait être encore explicitée par l'experte indépendante.

L'Union européenne remercie aussi M. Jorge Bustamante, Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants, de son rapport. Elle estime que le respect du droit à la santé et au logement des migrants est particulièrement important. Sur ce point, la représentante a souhaité que le Rapporteur spécial fasse des recommandations sur la démarche à adopter pour la collecte de statistiques ventilées dans ce domaine, et sur les moyens d'évaluer la situation des groupes de migrants ayant des difficultés dans les domaines de la santé et du logement.

MME KHADIJA RACHIDA MASRI (Union africaine) a partagé avec le Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants la reconnaissance de la nécessité d'adopter une approche globale sur les droits de l'homme des migrants incluant le droit à la santé et le droit à un logement décent. La réalisation de ces droits est une condition nécessaire pour l'intégration effective des migrants dans les pays d'accueil, a-t-elle estimé. La représentante a également insisté sur l'obligation irréductible des États d'assurer les soins et le logement de base pour toutes les personnes se trouvant sous leur juridiction indépendamment de leur nationalité, de leur statut de migrant régulier ou irrégulier, de leur sexe ou de leur âge. Une attention particulière doit être accordée aux catégories vulnérables que sont les femmes et les enfants.

La déléguée de l'Union africaine a estimé que la question des migrants ne saurait être détachée d'une approche globale basée sur le développement en tant que droit humain, en amont comme en aval de l'acte de migration. Dans cette perspective, l'Union africaine a adopté une position commune sur la migration et le développement ainsi qu'un cadre de politique de migration pour l'Afrique à Banjul, en Gambie, en 2006, a-t-elle précisé. Elle a aussi porté une attention particulière à la fuite des cerveaux dans le cadre des migrations internationales. Il est très clair que les droits de l'homme des migrants dans toutes leurs ramifications ne sont que des facettes d'un droit plus générique, la protection des droits de l'homme et du droit au développement dans toute sa splendeur, a-t-elle conclu.

M. ABDUL WAHAB HAÏDARA (Sénégal) a déclaré que la vulnérabilité des migrants semblait s'aggraver dans le contexte de la crise économique et financière mondiale. Certains migrants sont condamnés à vivre dans des conditions difficiles et à accepter des travaux peu décents, a-t-il ajouté, demandant une réflexion collective sur la situation des migrants. Enfin, le représentant sénégalais a estimé que les recommandations du Rapporteur spécial semblent aller dans le bon sens pour contribuer positivement au développement harmonieux des sociétés d'accueil et d'origine et communiquera ses observations sur le projet de rapport de mission en temps opportun. Le Sénégal remercie par ailleurs l'experte indépendante sur les droits culturels pour la présentation de son premier rapport.

M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) s'est associé à l'opinion de Mme Shaheed selon laquelle il importe de promouvoir les droits culturels à tous les niveaux et de leur accorder la place qui leur revient parmi les autres droits de l'homme. L'Indonésie consent pour sa part des efforts importants pour promouvoir son patrimoine culturel auprès de sa jeunesse et s'associe aux recommandations de Mme Shaheed quant à la protection des droits culturels des personnes appartenant à des minorités. Le représentant a demandé à Mme Shaheed de fournir des recommandations sur la manière d'aborder la question de la protection des droits culturels sensibles ou controversés. Concernant le rapport de M. Bustamante, le représentant indonésien a observé que les droits des migrants prennent une importance particulière dans un contexte de mondialisation propice aux migrations. Il faut donc, dans ce contexte, garantir le droit à la santé et au logement des migrants, en particulier des femmes et des enfants: existe-t-il des pratiques exemplaires à cet égard, a-t-il demandé? L'Indonésie encourage enfin les États à dispenser des cours de langue aux migrants et à ratifier, s'ils ne l'ont encore fait, la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

M. GAGIK HOVHANNISYAN (Arménie) a remercié l'experte indépendante dans le domaine des droits culturels pour son travail, soulignant que son rapport montre la complexité inhérente à la délimitation et la définition des droits culturels dans le cadre des droits de l'homme en général. L'Arménie accorde une grande importance au renforcement et au développement des droits culturels et estime que chaque culture ou identité culturelle doit être respectée. Son représentant a rappellé que la protection des droits culturels était tout particulièrement importante pour les pays qui ont laissé un héritage au-delà des frontières nationales. Dans ce contexte, l'accès à l'héritage culturel est une condition nécessaire et essentielle pour la réalisation des droits culturels. Enfin, l'Arménie est d'avis que ce mandat a un rôle fondamental à jouer dans la lutte contre la destruction intentionnelle de sites culturels et le déni d'accès à des lieux culturels.

MME SITI HAJJAR ADNIN (Malaisie) a estimé que les droits culturels ne recevaient pas toute l'attention qu'ils méritent de la part de la communauté internationale et a jugé que l'experte indépendante abordait ces questions dans le cadre d'une approche large et inclusive. La délégation de la Malaisie a par ailleurs apprécié le fait que le Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants ait inscrit dans son rapport les bonnes pratiques mises en œuvre par plusieurs gouvernements et organisations internationales pour défendre le droit au logement et à la santé pour les migrants. Elle a également relevé l'importance de renforcer la coopération entre les pays d'origine, de transit et de destination, afin d'assurer la réalisation des droits des migrants à toutes les étapes du processus migratoire.

M. IDRISS JAZAIRY (Algérie) a souligné qu'il n'était pas facile d'identifier les droits culturels ni leur étendue. Il a rappelé l'importance de l'interaction entre universalité des droits de l'homme, responsabilité des États dans le domaine de la reconnaissance et de la mise en œuvre des droits culturels et nécessité de respecter la diversité culturelle. Il a estimé que la résolution 6/1, adoptée par le Conseil des droits de l'homme le 27 septembre 2007 et qui concerne l'obligation des parties à un conflit armé de prendre toute mesure nécessaire pour protéger et respecter les biens culturels, devait également être prise en compte. Il a notamment fait référence aux droits culturels et religieux des palestiniens. Concernant les droits des migrants, le représentant a estimé que le principe de non-discrimination est essentiel pour la réalisation du droit à la santé et à un logement décent et a rappelé que la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants est très claire sur ce point. En tant que pays d'origine, de transit et de destination des flux migratoires, l'Algérie a adhéré à cette Convention dont les dispositions font partie intégrante de son droit interne, a-t-il fait valoir, avant d'appeler à une ratification universelle de la Convention.

M. SAEED SARWAR (Pakistan, au nom de l'Organisation de la Conférence islamique - OCI) a estimé que la démarche de l'experte indépendante, Mme Shaheed, consistant à aborder les droits culturels selon une approche visant à protéger les droits de chaque personne aux niveaux individuel et communautaire, constituent une orientation utile. Les droits culturels, coutumes et pratiques doivent être protégés au niveau régional, national et international. Le délégué a par ailleurs remercié le M. Bustamante pour son rapport qui met en lumière la vulnérabilité des migrants. Il a souligné que les migrants souffrent de stress, d'anxiété et de dépression de manière plus importante que les ressortissants des pays qui les accueillent. Il a également mis l'accent sur les traitements discriminatoires dont souffrent certains groupes nationaux ou religieux, notamment depuis le 11 septembre 2001. Les gouvernements concernés doivent prendre toutes les mesures possibles pour lutter contre cet état de fait, a conclu le représentant de l'Organisation de la Conférence islamique.

M. CARLOS RAMIRO MARTÍNEZ ALVARADO (Guatemala) a déclaré que tout individu avait le droit de jouir du droit à la santé et à un logement décent, quelle que soit sa citoyenneté, sa nationalité ou son statut de migrant. Tous ces thèmes sont liés dans la mesure où un migrant a souvent un travail difficile et un logement inadéquat, éléments qui affectent sa santé, a-t-il fait observer. Le Guatemala respecte le droit souverain des États de définir et d'appliquer leurs propres normes mais celles-ci doivent respecter les besoins de tout être humain. Il existe toute une gamme d'instruments internationaux qui traitent du droit à la santé ou du droit à un logement décent, et le Guatemala s'y rallie, a souligné son représentant. Les femmes et les enfants migrants sont soumis à des aléas particuliers, a rappelé le représentant, soulignant que, souvent, les femmes subissent différentes formes de violence et que les conditions de vie des adultes affectent négativement leurs enfants.

M. WAMBEKE KEABETSWE MENE (Afrique du Sud) s'est félicité de la visite prochaine dans son pays du Rapporteur spécial, M. Bustamante, qui a prévu de s'y rendre dans le courant de cette année, Il a relevé, dans le rapport de l'expert, l'insistance sur l'importance du droit à la santé et au logement des migrants. La réalisation progressive de ces droits socioéconomiques est prévue par la Constitution sud-africaine, a indiqué le représentant, estimant qu'il revient à la communauté internationale et aux Nations Unies de remédier aux causes profondes des migrations irrégulières, dues à la faim, aux conflits et à la pauvreté. Le Gouvernement de l'Afrique du Sud est quant à lui déterminé à s'atteler aux raisons qui ont été à l'origine des déplorables agressions xénophobes commises en 2008 et 2009 dans le pays. Il a notamment adopté une loi interdisant les discours favorisant la haine raciale contre toute personne ou groupe de personnes. Le Gouvernement a également collaboré avec le Haut-Commissariat aux réfugiés à l'accélération des procédures d'octroi de l'asile aux migrants originaires du Zimbabwe.

M. EDGARDO TORO CARREÑO (Venezuela) a rappelé qu'en 2005 a été mis en place dans son pays le Ministère populaire pour la Culture et que les droits culturels sont un droit constitutionnel inaliénable du peuple vénézuélien. Il a relevé l'importance pour l'État de créer un cadre propice au développement humain et à la dignité ainsi qu'à la protection des droits culturels. Il a mis en évidence les efforts régionaux déployés dans ce domaine, citant notamment l'Alternative bolivarienne pour les peuples d'Amérique par laquelle les peuples ont souscrit à un projet supranational visant le respect de la diversité culturelle du continent sud-américain.

MME LIU KENFEI (Chine) a dit appuyer pleinement les principes présentés par l'experte indépendante pour l'accomplissement de son mandat dans le domaine des droits culturels. La Chine accorde une grande importance à la diversité culturelle, et dispose d'un fonds visant à préserver les droits culturels des différentes populations du pays. La Chine accorde également une grande importance aux droits des migrants, notamment dans le contexte du droit à la santé et à un logement adéquat. Les droits de l'homme des migrants doivent être activement défendus, notamment dans le contexte de la crise économique et financière, a rappelé la représentante chinoise. Elle a estimé que chaque pays pourrait apprendre beaucoup des autres dans ces domaines.

M. JEFFREY HEATON (Canada) a appuyé le principe de la protection de la diversité culturelle tel que préconisé par Mme Shaheed. Le Canada constate que la protection de la diversité est souvent exploitée aux fins de compromettre l'universalité des droits de l'homme et demande à l'experte indépendante de combattre toute entreprise de relativisme culturel. Le représentant a demandé à l'experte indépendante comment elle envisageait la protection des droits culturels des personnes souffrant d'une double discrimination fondée sur le sexe et sur le handicap, et comment elle compte favoriser la collaboration entre son mandat et les autres mécanismes des droits de l'homme qu'elle désigne, dans son rapport, comme autant de partenaires potentiels.

M. RESFEL PINO ÁLVAREZ (Cuba) a rappelé que le processus de création du mandat de Mme Shaheed a été long. Il a aussi mis en évidence certains éléments d'ostracisme qui ont été évoqués au moment de l'établissement de ce mandat. De par leur nature, les droits culturels peuvent être individuels ou collectifs, appartenant aux peuples ou communautés, a rappelé le délégué de Cuba, qui a apprécié la volonté de Mme Shaheed d'aborder dans son mandat les liens entre ces deux aspects. La diversité culturelle, loin d'affaiblir les valeurs universelles de la civilisation, constitue une force et une richesse, a-t-il souligné. Les craintes et les perceptions erronées sont, selon lui, le fait de certains pays et de certains centres hégémoniques. La mondialisation peut être une chance, selon le délégué cubain, qui a toutefois dénoncé l'accès asymétrique au développement et aux technologies de la communication. À ce sujet, le représentant a dénoncé une certaine forme d'hégémonie culturelle dans le cadre du processus de mondialisation qui, à son avis, menace l'identité culturelle de peuples marginalisés. Réagissant au rapport de M. Bustamante sur les droits des migrants, le représentant cubain a demandé que des mesures urgentes et efficaces soient prises par les pays d'accueil, en particulier les pays développés. Il a évoqué l'augmentation des violences faites contre les migrants en Europe et en Amérique du Nord depuis la crise financière. Il a également évoqué la nouvelle loi sur l'immigration dans l'État d'Arizona, qui a scandalisé le monde entier.

M. ARTURO HERNÁNDEZ BASAVE (Mexique) a expliqué que son pays avait revu sa législation concernant les migrants, notamment s'agissant de la lutte contre la traite des travailleurs migrants, des situations de mineurs séparés de leur famille, ainsi que de la question du rapatriement des migrants sans papiers. Le Mexique prépare un avant-projet de loi relatif à la migration afin de réglementer l'entrée et la sortie des personnes et le séjour des étrangers. Cette loi sera appliquée dans le cadre du respect et de la protection des droits de l'homme, a assuré le représentant, et ce, conformément aux dispositions des instruments de droit international auxquels le Mexique est partie. Il s'est par ailleurs inquiété de l'effet sur les droits de l'homme de la criminalisation de la migration clandestine, faisant allusion à une récente loi de l'État d'Arizona aux États-Unis. Le représentant s'est en outre félicité du premier rapport sur les droits culturels et a encouragé l'experte indépendante à fixer rapidement le cadre de son mandat. Il a rappelé que son pays avait appuyé avec enthousiasme la création de ce nouveau mandat de procédure spéciale.

M. ALEXANDRE GUIDO LOPES PAROLA (Brésil) s'est félicité du rapport de M. Bustamante qui contient des informations concrètes sur le sort des femmes et des enfants migrants. Le représentant s'est dit d'accord avec le Rapporteur spécial pour souligner l'importance du partage d'expériences sur les pratiques exemplaires en matière de droits des migrants, notamment en ce qui concerne deux droits dont la jouissance leur est trop souvent déniée: le droit à un logement adéquat et le droit à la santé. Au Brésil, celui-ci est garanti par le Système national unifié de santé, qui repose sur les principes d'universalité, d'égalité et d'intégralité. Les soins sont prodigués à toute personne, indépendamment de son statut au regard des lois sur l'immigration. Le Brésil estime en outre que la régularisation des migrants en situation irrégulière est une mesure importante pour garantir la protection de leurs droits, y compris leur droit au logement. C'est pour cela que le Brésil procède chaque année à des milliers de régularisations. De même, le Brésil garantit aux travailleurs migrants les mêmes droits qu'aux travailleurs locaux. Enfin, l'expérience du Brésil montre que c'est par l'éducation que l'intégration a ses plus grandes chances de réussite.

M. JOSÉ MARIA CAPON DUARTE E SILVA (Angola) a déclaré que son pays menait avec ses voisins une politique de bon voisinage en accord avec les principes du droit international et du droit international humanitaire. Toutefois, dans la défense de sa souveraineté et de son intégrité territoriale, le Gouvernement angolais se voit dans l'obligation d'établir dans un cadre légal le rapatriement des immigrés rentrés illégalement sur le territoire angolais, notamment dans le cadre du trafic de diamants, lorsque ces immigrés illégaux causent des dommages au niveau économique et environnemental. Il s'agit également de neutraliser d'éventuelles poches de tension ou de violence, dans le strict respect des droits de l'homme des migrants. Le représentant angolais a indiqué que son pays combattait la traite des êtres humains et les réseaux organisés qui agissent dans ce domaine. Le Gouvernement angolais condamne toutes les personnes impliquées dans des activités criminelles qui violent les droits des migrants, a-t-il assuré.

M. NESTOR CRUZ TORUÑO (Nicaragua) a estimé que la reconnaissance des droits culturels est fondamentale pour la reconnaissance et le respect de la dignité humaine: ces droits devraient faire partie intégrante des autres droits de l'homme. Il a également fait observer que la résolution de problèmes structurels comme la pauvreté requiert une vision globale de tous les droits de l'homme, y compris les droits culturels. Selon lui, le respect de la diversité et la reconnaissance de ces droits passent par la lutte contre la discrimination et l'intolérance. En ce qui concerne le rapport du Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants, le représentant nicaraguayen a fait part de sa préoccupation à l'égard de lois et politiques mises en œuvre dans certains pays de destination qui sapent les droits des migrants. Il a fait remarquer que des problèmes sérieux, comme ceux relevés par M. Bustamante s'agissant notamment de l'accès à des soins de santé, se posent en l'absence de politiques de migration qui accordent une attention et régularisent la situation de millions de migrants. En effet, de nombreux migrants sont obligés de vivre dans la clandestinité et sont privés d'accès à des soins de santé, puisqu'ils n'ont pas de permis de séjour, a-t-il souligné, ajoutant que dans l'intervalle les économies des pays de destination n'en continuent pas moins de bénéficier de la main-d'œuvre bon marché des travailleurs migrants.

M. ALEXEY GOLTYAEV (Fédération de Russie) a appuyé le mandat de l'experte indépendante dans le domaine des droits culturels. Il a estimé essentiel d'accorder toute son importance au rôle de la famille, de la société, de la culture et de la religion dans la formation des valeurs. Il a recommandé à Mme Shaheed d'étudier les bases culturelles des droits de l'homme et l'influence de ces valeurs sur le développement des droits de l'homme. Il a suggéré que l'experte indépendante participe à un séminaire consacré à la promotion des droits de l'homme dans le cadre d'un plus grand respect des valeurs de l'humanité, qui sera organisé en octobre prochain. Enfin, le représentant russe s'est félicité de l'attention que l'experte indépendante entend accorder aux droits culturels des apatrides, et notamment à la question de l'utilisation de leur langue maternelle.

M. CARLOS SIBILLE (Pérou) a souligné, à l'instar du Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants, la nécessité pour les États de reconnaître, dans les textes juridiques, le droit à la santé et au logement de tous, y compris les migrants. Les États sont également tenus de lever les obstacles à la jouissance par les migrants de leurs droits fondamentaux, et notamment la criminalisation des migrants en situation irrégulière, la limitation de l'accès aux services et l'obligation de dénoncer imposée aux fonctionnaires des pays d'accueil. Le représentant s'est dit d'autre part d'accord avec le principe défendu par Mme Shaheed selon lequel les droits culturels sont au cœur du développement, de la paix et du dialogue entre les peuples et les individus. Dans le même temps, le Pérou estime que toutes les pratiques culturelles ne sont pas toutes conformes au droit international.

MME EVGENIA BENIATOGLOU (Grèce) s'est réjoui que M. Bustamante mette l'accent sur le droit à la santé et le droit à un logement pour les migrants, notamment pour les femmes et les enfants migrants. En tant que pays d'accueil, la Grèce a accueilli 70% de tous les immigrants irréguliers entrés sur le territoire de l'Union européenne en 2009; le Gouvernement considère qu'il faut garantir l'exercice des droits de l'homme pour ces personnes; en Grèce, les mineurs ont accès aux services de santé même s'ils n'ont pas de passeport ou de permis de séjour: les hôpitaux, dispensaires et cliniques sont obligés de les recevoir. Enfin, la Grèce a récemment adopté une loi qui concernera 250 000 migrants qui, dans un avenir proche, recevront la nationalité grecque. Pour conclure, le représentant grec a invité le Rapporteur spécial à effectuer une visite dans son pays.

M. OSITADINMA ANAEDU (Nigéria au nom du Groupe africain) a déclaré que son groupe avait toujours milité pour les droits culturels, convaincu que l'universalité des droits de l'homme n'impose pas une norme culturelle unique, mais accorde plutôt une protection juridique minimum pour le respect de la dignité humaine. Le Groupe africain appuie la démarche dans laquelle s'inscrit l'experte indépendante, qui souhaite définir le cadre juridique et conceptuel de son mandat. Le représentant nigérian a estimé que les identités culturelles étaient multiples et a salué la liste des droits culturels implicites ou explicites dressée par Mme Shaheed à partir des instruments internationaux. D'autre part, le Groupe africain se félicite de ce que le Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants rappelle l'universalité des droits de l'homme et insiste, dans son rapport, sur les devoirs des États de respecter et protéger les droits de l'homme des migrants dans les domaines de la santé et du logement. Ceci est d'autant plus important que la crise actuelle tend à aggraver leur situation, a déclaré le représentant, qui a souhaité que tous les acteurs concernés prennent des mesures pour préserver ces droits des migrants.

MME LJUBICA PERIÆ (Bosnie-Herzégovine) a déclaré que son pays était résolument engagé dans la réalisation progressive des droits culturels, raison pour laquelle il a ratifié plusieurs instruments multilatéraux traitant directement ou indirectement de cette question. Au plan interne, le Gouvernement applique, avec l'aide de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, une stratégie interministérielle de politique culturelle. Ses autres démarches et initiatives en matière de droits culturels mettent l'accent sur le renforcement des capacités, sur la sensibilisation aux normes et processus de l'Union européenne, sur l'application des dispositions des instruments internationaux et enfin sur la coopération avec les médias.

MME NAHIDA SOBHAN (Bangladesh) a souligné que les droits culturels faisaient partie intégrante des droits de l'homme. Elle s'est félicitée que l'experte indépendante souhaite étudier plus avant les normes individuelles et collectives, ainsi que les pratiques en vigueur au sein des mécanismes des droits de l'homme des organisations régionales et internationales. La représentante du Bangladesh a par ailleurs insisté sur le respect de l'identité culturelle des migrants et de leur droit à participer à la vie culturelle. Elle a suggéré que Mme Shaheed s'intéresse aux signes précurseurs de la xénophobie et de la discrimination raciale, afin de veiller à ce qu'aucun jugement de valeur ne soit fait à l'encontre de telle ou telle culture ou pratique culturelle. Il conviendra d'aborder le rôle des médias qui tentent parfois d'imposer le jugement sur une culture, a estimé la déléguée. S'intéressant au rapport de M. Bustamante, elle a souligné que les migrants souffrent d'attitudes discriminatoires dans leur pays d'accueil; ces derniers doivent selon elle prendre toutes les mesures nécessaires pour contrecarrer les poussées xénophobes ou racistes. Le processus d'inscription empêche la pleine réalisation du droit au logement et à la santé car les migrants illégaux ont peur de s'inscrire sur les listes et d'être ainsi poussés au rapatriement.

MME MERCY YVONNE AMOAH (Ghana) a salué le rapport du Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants et a rappelé que les États devaient prendre des mesures pour assurer concrètement les droits des migrants à tous les stades du processus migratoire, que ce soit dans les États d'origine, de transit ou de destination. Il a constaté que le rapport faisait état de la multiplication de mesures restrictives prises envers les migrants, au motif d'une lutte contre l'immigration irrégulière et dans le but de favoriser les retours «volontaires», qui affectent leur droit à la santé et à un logement décent. Il s'est dit particulièrement préoccupé par la détention administrative d'enfants migrants ou encore par la situation de femmes migrantes soumises à l'exploitation de leur travail ou à la violence sexuelle. Il a souhaité que le Rapporteur spécial étudie spécifiquement ces points.

M. AKIRA MATSUMOTO (Japon) a déclaré que son pays était d'accord avec le point de vue de M. Bustamante concernant la défense par les pays hôtes des droits des migrants au logement décent et à la santé. Dans ce contexte, les États doivent coopérer et agir de concert pour garantir la protection des droits des migrants. Le Japon contribue, au niveau national et international, à plusieurs initiatives dans ce domaine, de même qu'il participe aux débats du Forum mondial sur les migrations et qu'il a noué un dialogue constructif avec le Rapporteur spécial, lors de sa visite.

M. PEDRO OYARCE (Chili) a estimé que les concepts de culture et de diversité devraient s'appliquer et se soumettre au principe de l'universalité et de la dignité de la personne. Il ne faut pas confondre identité avec spécification autonome, a-t-il analysé. En ce qui concerne les droits des migrants, le représentant chilien aimerait avoir l'appréciation du Rapporteur spécial sur la situation des groupes vulnérables comme les enfants. Il a jugé indispensable de protéger les droits de l'homme applicables à tous et dans toutes les circonstances. Il a demandé au Rapporteur spécial son avis sur le concept de la «criminalisation des migrants» en lien avec les droits de l'homme. Il a souhaité que les bonnes pratiques identifiées puissent contribuer à la définition des politiques publiques, fonction essentielle du mandat du Rapporteur spécial selon la délégation chilienne.

MME NATALIE KOHLI (Suisse) a demandé à Mme Shaheed quel sera l'impact, sur son examen de l'obligation de respecter et réaliser les droits culturels, des initiatives d'experts et de la société civile visant à définir des listes de droits culturels ou d'éléments normatifs des droits culturels. La Suisse regrette la tendance fâcheuse à concevoir la diversité culturelle comme justifiant la non-application de certaines normes de droits humains, autrement dit le relativisme culturel. La Suisse salue l'intention de Mme Shaheed d'accorder une attention particulière à la mise en œuvre du principe de non-discrimination et aux tensions et possibles solutions en cas de pratiques perpétrées au nom de la culture qui ont un impact négatif sur la jouissance des droits de l'homme.

M. HARI PRASAD ODARI (Népal) a jugé positif l'accent mis par Mme Shaheed sur la nécessité de reconnaître, respecter et mettre en œuvre les droits culturels et la diversité cultuelle des individus et des communautés. Il est en outre préoccupé par la question du respect des droits culturels des non-ressortissants, et notamment des travailleurs migrants et de leurs familles. Il a déclaré que le Népal était marqué par une grande diversité, avec 59 groupes ethniques et autant de langues, ainsi qu'une demi-douzaine de religions qui coexistent harmonieusement. C'est pourquoi la Constitution intérimaire du pays déclare le Népal État multiethnique, pluriculturel, plurireligieux et multilingue, où toutes les langues parlées sont reconnues comme langues nationales. En outre, a ajouté le représentant, la Constitution garantit la liberté d'expression et la libre pratique de sa religion. Les droits de l'homme sont universels et indivisibles et chaque État doit en assurer respect. Cela est vrai aussi pour les droits de l'homme des migrants et ce, à tous les stades du processus migratoire, a déclaré le représentant, pour qui les migrants jouent un rôle important dans le développement socioéconomique et contribuent à la diversité socioculturelle. Il a appelé les États à ne pas conditionner l'accès à la santé au statut migratoire de la personne.

M. JUAN HOLGUÍN (Équateur) s'est inquiété des méthodes de travail du Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants qui semble imposer son point de vue sur le choix des thèmes à aborder dans le cadre de son mandat. Il a estimé que la méthode prônée par M. Bustamante a pour effet de dissimuler certains des graves problèmes auxquels sont confrontés les migrants. En ce qui concerne les bonnes pratiques, le représentant équatorien a constaté que le Rapporteur spécial met en relief dans son rapport les législations en vigueur dans certains pays qui ne prennent pas en compte la spécificité du statut du travailleur migrant et a souhaité savoir si M. Bustamante a eu la possibilité de contrôler la mise en œuvre effective de ces dispositions. Il a estimé que les conclusions de M. Bustamante sont «superficielles et répétitives» en comparaison des rapports effectués par d'autres mandataires.

M. HÉCTOR RAÚL PELÁEZ (Argentine) a rappelé la très longue tradition d'accueil des immigrants de l'Argentine, qui s'est traduit dans un certain nombre de mesures concrètes au plan national. L'Argentine définit les droits des migrants sur la base de leur qualité d'êtres humains et non de leur statut migratoire, a-t-il expliqué. Il a cité diverses mesures qui prévoient la mise en ouvre d'un plan national visant une meilleure intégration des migrants, notamment des pays membres du Mercosur et des États associés qui représentent plus de 80% des immigrants en Argentine. L'objectif est de passer d'une politique restrictive volontariste à une politique ouverte pour les ressortissants des pays du Mercosur, afin d'éviter toute marginalisation des migrants et de mieux les intégrer au corps social, a expliqué le représentant.

M. MOHAMAD REZA GHAEBI (Iran) a remercié Mme Shaheed de son rapport qui, selon lui, souligne à juste titre que les droits culturels ont souvent été présentés comme secondaires par rapport à d'autres droits de l'homme. Ces droits n'en font pas moins partie des droits fondamentaux et permettent de mieux comprendre le principe de l'universalité des droits de l'homme, a-t-il souligné, rappelant que l'Iran avait soumis à l'Assemblée générale des Nations Unies une résolution portant sur la diversité culturelle et ses liens avec le principe d'autodétermination, en particulier. Le représentant iranien a par ailleurs relevé l'importance de promouvoir le dialogue interculturel; il a jugé essentiel le respect de la diversité culturelle pour ouvrir la voie à une meilleure compréhension entre les différentes cultures et civilisations.

MME MAYSA UREÑA MENACHO (Bolivie) a fait valoir que l'État plurinational de Bolivie reconnaissait dans sa Constitution les droits culturels. La diversité du peuple bolivien est protégée par la loi, a-t-elle précisé. Pour garantir ces droits, le Gouvernement dispose du Ministère des cultures. Parmi les objectifs de ce ministère figurent la mise en place de politiques publiques normatives, la promotion des 36 langues autochtones reconnues officiellement et la mise en valeur des droits culturels individuels et collectifs. Le Gouvernement bolivien considère que la valorisation des droits culturels est liée à l'élimination de toute forme de discrimination ou racisme, a ajouté la représentante. Elle a aussi estimé que le dialogue entre les cultures devait se renforcer. Concernant les droits de l'homme des migrants, la représentante bolivienne s'est félicitée de l'accent mis sur le droit à la santé et le droit au logement. Elle a encouragé le Rapporteur spécial à s'intéresser aux lois qui, dans certains pays développés, sont discriminatoires à l'égard des personnes migrantes sur la base de leur apparence physique ou de leur couleur de peau.

M. PETER WOOLCOTT (Australie) s'est félicité des liens établis par Mme Shaheed entre les droits culturels et la diversité culturelle. L'Australie est très attachée à la protection et à la promotion des cultures autochtones australiennes, y compris les quelque 145 langues autochtones, a-t-il expliqué, ajoutant que le Gouvernement avait pris des mesures pour protéger ces langues, menacées de disparition. L'Australie est aussi préoccupée par les besoins des migrants, notamment en matière de santé et de logement décent, a poursuivi le représentant, qui a rappelé que certains immigrants avaient parfois subi de mauvais traitements ou des tortures avant de quitter leur pays et avaient donc des besoins de santé spécifiques.

MME SHAIKHA S. JASEM MUBARAK AL ZAABI (Émirats arabes unis) a déclaré que son pays accordait la plus haute importance à la protection des droits des travailleurs migrants sur son territoire. Ces droits sont encadrés par la loi de manière précise. Le pays veille à ce que les travailleurs migrants bénéficient du même traitement que les travailleurs ressortissants du pays. Les Émirats arabes unis entendent par ailleurs poursuivre leur collaboration avec le Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants, a assuré la représentante.

M. OMAR HILALE (Maroc) a salué la pertinence des thèmes choisis par le Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants, à savoir le droit à la santé et à un logement convenable. Il a partagé l'avis de M. Bustamante quant à la responsabilité des États pour la réalisation de ces droits, indépendamment de la nationalité ou du statut d'immigration. Au Maroc, l'accès au logement et à la santé pour les migrants est assuré sans discrimination sur la base de plusieurs textes réglementaires, a-t-il expliqué. Le Maroc adopte une approche globale conciliant les textes de la loi et l'aspect humanitaire de la question de l'immigration. La délégation marocaine a par ailleurs apprécié l'approche de Mme Shaheed sur les droits culturels, en particulier s'agissant de l'importance de la coopération régionale et internationale. Le représentant du Maroc a fait part de la création d'un Institut royal de la culture Amazigh et l'adoption du tifinagh en tant qu'alphabet officiel de la langue amazighe, ainsi que son intégration dans les programmes scolaires, de même que le lancement d'une chaîne de télévision amazigh. Selon lui, il s'agit de signes tangibles de l'attention particulière accordée dans son pays à la promotion et protection des droits culturels. Dans le même esprit, le royaume a confirmé son engagement dans la promotion des droits économiques, sociaux et culturels à travers le lancement d'un projet de régionalisation prenant en compte les spécificités et les apports culturels de chaque région, y compris le Sahara marocain.

MME HEBA MOSTAFA RIZK (Égypte) a dit appuyer l'approche de l'experte indépendante dans le domaine des droits culturels, qui traite ces droits à la fois comme droits collectifs et comme droits individuels. Elle a également salué l'accent qui a été mis sur l'éducation comme véhicule de promotion et de protection des droits culturels, ainsi que sur la relation réciproque entre droits culturels et pauvreté. La représentante a par ailleurs demandé à Mme Shaheed des précisions sur les liens qu'elle a pu établir entre droits culturels et droit au développement; sur les moyens de les renforcer mutuellement; sur les responsabilités des acteurs non étatiques en matière de droits culturels; ainsi que sur la manière dont la discrimination à l'encontre des migrants peut affecter la jouissance de leurs droits culturels. Elle a souhaité que la protection des droits culturels en situation de conflit armé ne soit pas négligée. Concernant les droits des migrants, la représentante égyptienne a salué l'accent qui a été mis cette année par le Rapporteur spécial sur le droit à la santé et au logement décent. Elle a relevé que la criminalisation de l'immigration irrégulière entrave l'exercice de tels droits ainsi que le recours à la justice en cas de violations de ces droits.

M. JOHN C. MARIZ (États-Unis) a déclaré que son pays était résolument engagé en faveur de la protection des droits de l'homme de toutes les personnes, y compris les migrants. Les États-Unis reconnaissent en outre le droit souverain des États d'exercer un contrôle sur leur propre territoire et à réglementer l'admission et l'expulsion de ressortissants étrangers, ainsi que les conditions de leur jouissance des prestations publiques. Le représentant américain a par ailleurs félicité Mme Shaheed de son rapport, dans lequel elle montre de manière utile le lien entre les droits culturels et les autres droits de l'homme. Les États-Unis sont cependant préoccupés, entre autres aspects du rapport, par l'approche collective des droits culturels que l'experte indépendante entend adopter, les États-Unis étant d'avis que ces droits s'appliquent à des individus.

M. HABIB MIKAYILLI (Azerbaïdjan) a souligné qu'il n'existe pas de hiérarchie entre les droits de l'homme et a regretté que trop peu d'importance soit accordée aux droits culturels en tant qu'élément de la cohésion sociale. Le principe de non-discrimination constitue une base juridique importante sur laquelle l'experte indépendante devrait baser son travail, a-t-il estimé. Le délégué azerbaïdjanais s'est par ailleurs demandé si des séminaires allaient être organisés pour mieux définir la portée des droits culturels. L'Azerbaïdjan condamne les destructions du patrimoine culturel en situation de conflits armés, en particulier dans les territoires occupés. Son délégué se demande par conséquent si Mme Shaheed compte inclure ces questions au cœur de ses travaux.

MME MARIA TERESA C. LEPATAN (Philippines) a fait observer que la question du droit à la santé des migrants était traitée par l'Organisation mondiale de la santé et a suggéré que M. Bustamante examine les possibilités de synergies dans ce domaine. De nombreux migrants sont exposés à un risque accru de mauvaise santé du fait de leur travail et de leur statut, a-t-elle remarqué. Elle a préconisé d'améliorer leur santé, ce qui, a-t-elle souligné, permettra aussi d'améliorer la cohésion sociale et favorisera la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement. La représentante philippine a expliqué que son pays a signé plusieurs accords bilatéraux avec des pays d'accueil qui permettent aux citoyens philippins d'avoir accès à la protection sociale dans ces pays. Elle a proposé un partage d'expériences et de bonnes pratiques entre pays d'origine et d'accueil en matière de santé des migrants. Enfin, elle a suggéré de mettre fin aux pratiques qui nuisent à l'accès des migrants à la santé.

Institutions nationales des droits de l'homme et organisations non gouvernementales

MME JUDY MCGREGOR (Commission des droits de l'homme de la Nouvelle-Zélande) s'est félicitée des recommandations faites par M. Bustamante aux États s'agissant de la collecte de statistiques ventilées relatives aux droits au logement et à la santé. La représentante a pointé à cet égard des lacunes statistiques dans son propre pays, concernant la situation des migrantes handicapées, observant que d'autres États sont très certainement confrontés aux mêmes carences. Or, l'efficacité de l'action des institutions nationales de droits de l'homme dépend de l'existence de ces statistiques. La représentante a observé en outre que la crise économique pourrait avoir des répercussions sur la fourniture de logements sociaux par les gouvernements, au détriment en particulier des personnes migrantes: elle s'est donc félicitée de la recommandation de M. Bustamante concernant la sensibilisation des bailleurs à la notion de discrimination sur la base de la nationalité.

MME KATHARINA ROSE (Commission des droits de l'homme de l'Écosse) a apporté des informations supplémentaires au rapport de M. Bustamante consécutif à sa visite au Royaume-Uni. Elle a constaté que les lois nationales européennes ne tiennent pas compte du sort des sans-abris. La Commission appelle ainsi les autorités britanniques à créer un fonds d'urgence pour ces personnes qui ont un accès limité ou inexistant aux services publics. Elle s'inquiète qu'une nouvelle loi britannique demande aux migrants de «mériter» l'accès à ces droits. La représentante a, enfin, indiqué que la Commission écossaise des droits de l'homme a préparé un rapport sur les migrants d'origine est-européenne qui travaillent sur le territoire du Royaume-Uni et occupent malheureusement des emplois principalement non qualifiés.

MME CECILIA R.V. QUISUMBING (Commission des droits de l'homme des Philippines) a encouragé tous les détenteurs de mandat à interagir avec son organisation qui est, a-t-elle rappelé, indépendante. Elle a expliqué que certaines pratiques permettent aux communautés autochtones d'établir elles-mêmes leurs priorités dans le domaine des droits de l'homme, notamment leurs droits culturels. Elle a regretté que les rapports ne disent rien sur l'importance de ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

MME VITA DE WAAL (Planetary Association for Clean Energy, au nom de plusieurs autres organisations non gouvernementales1) a rappelé que seuls 83 pays ont ratifié la Convention sur la diversité biologique de 1993. Elle a, dans ce contexte, rappelé l'importance de l'adoption, par les grandes sociétés, de codes de conduite relatifs à la prise en compte et à la protection de l'environnement. Or, en 2010, année mondiale de la biodiversité, la côte de Louisiane est menacée par une marée noire risquant d'anéantir son écosystème; et l'on attend toujours, dans d'autres pays d'Amérique latine et d'Afrique ayant subi les effets de marées noires, que l'industrie pétrolière prenne des mesures de compensation et de réparation.

MME KIMBERLY IRISH (Human Rights Advocates) a estimé que les droits des migrants ont toujours été violés par les gouvernements. Elle a demandé aux États de protéger les droits des migrants, notamment ceux qui sont arrêtés de façon arbitraire. En Australie, à Sydney, Melbourne, Perth et Darwin, des centres de détention destinés aux immigrants violent les dispositions internationales, a souligné la représentante. Les migrants doivent être traités avec humanité et dignité, a-t-elle poursuivi, citant l'absence d'accès aux soins médicaux pour les migrants aux États-Unis qui, selon elle, montre que ce pays ne respecte pas ses engagements internationaux en la matière. Elle a enfin demandé à ce que soit analysé l'impact de l'emprisonnement sur les droits de l'homme des personnes immigrées.

MME MEGUMI FUMBAYASHI (Mouvement international ATD Quart Monde) a estimé que le premier rapport sur les droits culturels représente un excellent résumé, très équilibré, des aspects très complexes des droits culturels, et elle s'est félicitée que le rapport considère les droits culturels à la fois comme des droits individuels et collectifs. Elle a ajouté qu'en tant qu'organisation non gouvernementale travaillant avec des personnes qui vivent dans l'extrême pauvreté, ATD Quart-Monde a pu constater que des personnes sont privées de leurs droits culturels non du fait du groupe auquel elles appartiennent, mais en raison de leur statut socioéconomique. Elle a dit attendre une collaboration avec l'experte indépendante dans les domaines de la participation à la vie culturelle, de l'adaptabilité aux systèmes d'enseignement et du rôle des médias dans le respect de la diversité culturelle et l'intégration sociale.

MME LYDIA EVDOXIADI (Nord-Sud XXI, au nom également de l'Union des juristes arabes) a notamment déclaré que les droits culturels ont pour objectifs de préserver la culture des peuples, ce qui suppose un engagement à la préservation du patrimoine historique de l'humanité. La représentante a demandé à l'experte indépendante Mme Shaheed si elle comptait étudier les répercussions de l'invasion de l'Iraq par les États-Unis et ses conséquences sur la jouissance des droits culturels du peuple iraqien. La représentante a en outre dénoncé le pillage, en toute impunité, du patrimoine archéologique de l'Iraq par des collectionneurs européens et d'Amérique du Nord.

M. RONALD BARNES (Indian Council of South America) a estimé que beaucoup de peuple autochtones américains ont été exterminés depuis la découverte des Amériques par Christophe Colomb, leur empêchant d'exercer leur droit à l'autodétermination. La doctrine de la découverte trouve ses racines dans l'idée que la culture européenne est supérieure à toute autre forme d'expression culturelle. Il a déploré que le droit à l'autodétermination dans sa porté universelle ne soit pas exploré dans le rapport de l'Experte indépendante sur les droits culturels. Le représentant a estimé que les États-Unis et le Canada négligent l'importance des droits collectifs des peuples autochtones.

M. PHILIPPE DAM (Human Rights Watch) a attiré l'attention sur la situation des travailleurs migrants en Thaïlande, où vivent entre deux et trois millions de travailleurs migrants, dont la majorité est originaire du Myanmar. Il a expliqué que la plupart des difficultés de ces travailleurs migrants provient de l'approche sécuritaire adoptée par le gouvernement de Thaïlande, qui n'a pas de stratégie d'intégration à long terme des migrants. La politique de «vérification nationale» adoptée par un accord entre la Thaïlande et le Myanmar en 2003 a provoqué une hausse de la migration irrégulière, a expliqué le représentant, qui a souhaité que le Rapporteur spécial reçoive une invitation de la Thaïlande à se rendre dans ce pays.

Conclusions des titulaires de mandats sur les droits culturels et sur les droits des migrants

MME FARIDA SHAHEED, experte indépendante dans le domaine des droits culturels, a déclaré avoir pris bonne note des suggestions qui lui ont été faites pour la suite de son mandat. Les cultures sont dynamiques et complexes, en évolution permanente. Les négociations tenant compte de l'évolution et du milieu permettent de faire entendre la pluralité des voix des différentes entités culturelles. À cet égard, l'adoption d'une démarche visant à éviter les confrontations et assurer l'implication de la jeunesse dans des pratiques d'ouverture culturelle sont des moyens permettant de suivre le développement des pratiques culturelles, a souligné l'experte. Répondant à des préoccupations exprimées par certains intervenants, Mme Shaheed a assuré qu'elle contacterait les autres titulaires de mandats de procédures spéciales ces prochains mois afin d'éviter les doublons dans leurs activités respectives.

M. JORGE BUSTAMANTE, Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants, a remercié les délégations pour leurs commentaires, positifs ou non. Évoquant une affaire d'homicide de deux ressortissants de l'Équateur dans un autre pays d'Amérique latine, il a précisé qu'ils ont été tués en croyant qu'ils étaient mexicains, et qu'il a mentionné ces cas pour mettre en évidence les violences et discriminations se fondant sur l'apparence physique. M. Bustamante a également évoqué un commentaire de la délégation cubaine sur les liens entre la crise financière et les migrations et a précisé qu'une étude sur cette question a déjà été réalisée. Enfin, en ce qui concerne les données statistiques sur les migrations, M. Bustamante a souhaité que des règles soient fixées pour que les pays présentent des informations statistiques sur le marché du travail et la place qu'y jouent les travailleurs illégaux. La disponibilité de telles statistiques serait utile pour un respect plein et entier des droits de l'homme des migrants, y compris des sans-papiers, a-t-il souligné.



1Déclaration conjointe: Planetary Association for Clean Energy; Al-Hakim Foundation; (Nord-Sud XXI; et Susila Dharma International Association.


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HRC10/055F