Aller au contenu principal

LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LES MOYENS DE PROTÉGER LES ENFANTS DE LA VIOLENCE SEXUELLE

Compte rendu de séance

Le Conseil des droits de l'homme a conclu, cet après-midi, sa réunion annuelle consacrée aux droits de l'enfant, qui portait cette année sur la question spécifique de la lutte contre la violence sexuelle à l'égard des enfants. La réunion-débat de cet après-midi a porté plus spécialement sur la protection des enfants contre les violences sexuelles et sur la prévention et les réponses à apporter.

Le débat a été ouvert par M. Ibrahim Salama, Chef de la Division des traités au Haut Commissariat aux droits de l'homme, qui a fait observer que le Comité des droits de l'enfant avait constaté que les mesures prises par les États sont plus réactives que préventives. La prévention de la violence à l'encontre des enfants doit se faire de manière globale et multisectorielle et s'accompagner de la collecte de données et d'une meilleure sensibilisation du public. Mme Susana Villarán de la Puente, membre du Comité des droits de l'enfant, a notamment proposé de fixer un âge minimum au mariage et aux relations sexuelles et d'empêcher que les enfants soient accusés de crimes alors qu'ils sont victimes. Il faut garantir le droit des enfants à être écoutés, a-t-elle également souligné à l'instar d'autres intervenants.

M. Victor Karunan, Chef du département développement et participation des adolescents du Fonds des nations Unies pour l'enfance (UNICEF), a indiqué que l'UNICEF soutenait un certain nombre d'initiatives prises par les enfants eux-mêmes, un facteur très important de la prise de conscience du fléau. Il a rappelé que la participation des enfants et des jeunes est un droit fondamental reconnu par la Convention sur les droits de l'enfant.

Mme Najat M'jid Maalla, Rapporteuse spéciale sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie impliquant des enfants, a elle aussi souhaité que les enfants soient plus systématiquement associés à l'élaboration de programmes de sensibilisation et de prévention. Elle a également souhaité un renforcement de la coopération policière transnationale et des échanges d'informations et d'expertise, ainsi que l'extension des codes de conduites adoptés par certaines entreprises. Elle a en conclusion souligné que des études montrent que les auteurs d'abus sexuels sur enfants ne sont pas tous des malades mentaux ou des pervers; il existe une importante dimension «consumériste» et d'importants enjeux financiers, a-t-elle fait observer.

Mme Eliana Restrepo, Directrice adjointe de l'organisation PLAN international de Colombie, a souligné qu'il fallait briser le silence et dénoncer les violations afin d'obliger l'État à remplir son rôle, à développer des capacités de protection. Il faut aussi modifier les schémas culturels qui entraînent une acceptation tacite des violences sexuelles, a-t-elle affirmé, avant de préconiser des actions de sensibilisation concertées, qui permettent d'augmenter le taux de dénonciation, soulignant à cet égard le rôle indispensable des médias et des enfants eux-mêmes.

Mme Maud de Boer-Buquicchio, Secrétaire générale adjointe du Conseil de l'Europe, a expliqué que le Conseil de l'Europe fournit à tous les pays une assistance pour élaborer leurs propres stratégies nationales intégrées de protection des enfants contre des violences. Il prépare actuellement une campagne paneuropéenne pour combattre les violences sexuelles contre les enfants.

Au cours du débat, la plupart des intervenants ont fait observer que les violences sexuelles contre les enfants affectent garçons et fillettes dans toutes les sociétés, riches ou pauvres. Plusieurs ont insisté sur le rôle protecteur de la famille et souhaité le renforcement des liens familiaux, alors que d'autres ont rappelé que la grande majorité des violences sexuelles contre les enfants sont commises au sein de la famille, et souvent dans la maison même où ils habitent. Le rôle de l'Internet a été évoqué à la fois comme un risque, mais aussi comme un possible moyen de défense par le biais des réseaux d'information.

De nombreux orateurs ont fait observer qu'au-delà des mesures répressives, qui doivent être renforcées afin de lutter contre toute forme d'impunité, il fallait avant tout renforcer la protection des enfants. Beaucoup ont insisté sur la nécessité de faire pleinement participer les enfants eux-mêmes aux programmes de protection et de prévention. Plusieurs ont aussi insisté sur la nécessité de changer en profondeur des schémas culturels et les mentalités qui favorisent les abus sexuels contre les enfants.

Les représentants des délégations suivantes ont participé au débat: Espagne (au nom de l'Union européenne), Paraguay, Sénégal, Slovaquie, Israël, Afrique du Sud, Belgique, Pérou, Pays-Bas, Lituanie, Maroc, Maldives (au nom également de Maurice), Colombie, Qatar, République de Corée, Norvège, Pakistan, Brésil, Algérie, Indonésie, Pologne, Portugal, Émirats arabes unis, Inde, Argentine (au nom du MERCOSUR), Bangladesh, Costa Rica, Japon, Finlande, Thaïlande, Saint-Siège, Panama, Slovénie, Iran, Liechtenstein et Égypte. Le représentant de ECPAT International a également pris la parole.


Le Président de Timor-Leste, M. Ramos Horta, s'adressera à la Conférence demain matin à 10 heures. Le Conseil se penchera ensuite sur les rapports qui lui sont soumis par la Rapporteuse spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l'homme et la Rapporteuse spéciale sur la liberté de religion ou de conviction.


Lutte contre la violence sexuelle à l'égard des enfants: prévention et réponses

Déclaration liminaire

M. IBRAHIM SALAMA, Chef du Service des traités au Haut Commissariat aux droits de l'homme, a rappelé que, selon l'étude des Nations Unies sur la violence à l'égard des enfants, toutes les violences contre les enfants peuvent être évitées. La meilleure manière de réduire l'incidence de cette forme de violence consiste à investir dans la prévention, a précisé M. Salama. Pour sa part le Comité des droits de l'enfant promeut depuis longtemps l'idée selon laquelle la prévention des violations représente l'une des garanties les plus efficaces de protection des droits de l'enfant et de lutte contre toutes les formes de violence et d'exploitation. Cependant, le même Comité a souvent observé que les mesures prises par les États sont réactives plutôt que préventives. La prévention de la violence à l'encontre des enfants doit être une démarche globale et multisectorielle; elle doit s'accompagner de la collecte de statistiques ventilées permettant une meilleure sensibilisation au problème ainsi que la formulation de programmes efficaces. Il est également impératif que les responsables de la violence contre les enfants soient poursuivis et traduits en justice par les forces de l'ordre et les systèmes judiciaires, de manière à ce qu'il soit mis fin à leur impunité et qu'ils soient tenus de rendre compte de leurs actes.

M. Salama a estimé que le débat organisé ce jour évaluera la réaction de la communauté internationale aux évolutions rapides de l'exploitation sexuelle des enfants. Le débat sera en particulier axé sur les efforts consentis pour atteindre les objectifs de la Déclaration et du Plan d'action de Rio pour prévenir et éradiquer l'exploitation sexuelle des enfants et des adolescents, a-t-il précisé. Il sera également tenu compte de la nécessité d'assurer la pleine participation des enfants aux stratégies et mesures de prévention de la violence, ainsi que le prévoit l'article 12 de la Convention relative aux droits de l'enfant, a suggéré M. Salama.

Exposés

MME SUSANA VILLARÁN DE LA PUENTE, membre du Comité des droits de l'enfant, a estimé que pour lutter contre les violences sexuelles faites aux enfants, il convient d'éliminer l'écart entre normes politiques et réalité. Tout d'abord, il faut établir des normes nationales, régionales et internationales. Elle a fait remarquer qu'au niveau national, il n'existe pas de définition universelle des violences sexuelles et on utilise plutôt le terme de viol. Pour sa part, le droit international des droits de l'homme définit les violences sexuelles comme une torture. L'article 7 du statut de Rome de la Cour pénale internationale définit le viol, l'esclavage sexuel, la prostitution forcée, la grossesse forcée, la stérilisation forcée et toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable comme un crime contre l'humanité.

En ce qui concerne la création de mécanismes juridiques adaptés et efficaces pour prévenir la violence et protéger les enfants, l'experte a préconisé de se pencher sur le caractère intégral des normes dans le cadre du droit pénal international. Cela suppose des défis qui doivent être relevés par les États de manière à faire en sorte que la responsabilité des États -et des personnes selon les cas- soit véritablement engagée et qu'aucune place ne soit laissée à l'impunité. Mme Villarán de la Puente a énuméré les mesures suivantes qui devraient être prises dans ce cadre: adopter des mesures juridiques; définir un âge minimum au mariage et pour les relations sexuelles; démystifier l'argument selon lequel les jeunes filles arrivent à maturité physique à un âge plus jeune que les garçons; empêcher que les enfants puissent être criminalisés alors qu'ils sont victimes; élaborer des procédures adéquates compte tenu de l'approche des droits de l'enfant; et définir des protocoles pour les enfants de moins de 18 ans. L'experte a relevé l'importance que les programmes mis au point dans ce domaine soient assortis de budgets et de ressources spécialisées pour prévenir les cas de violence sexuelle. En tenant compte du cadre culturel, il faut s'attaquer aux causes profondes de cette violence et garantir le droit des enfants à être écoutés. Il faut une coordination et adopter des mesures spéciales pour les groupes vulnérables et renforcer les systèmes nationaux de justice afin de ne pas transformer les enfants de nouveau en victimes, alors qu'ils cherchent à accéder à la justice. Une vision sans action, ce n'est qu'un rêve, mais une action sans vision, c'est un cauchemar, a conclu Mme Villarán de la Puente.

M. VICTOR KARUNAN, Chef de l'Unité de développement et participation des adolescents (ADAP) du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), a estimé honteux de constater que des enfants soient soumis à des violences sexuelles compromettant gravement leur bien-être et leur avenir. Les garçons sont davantage victimes de violences physiques tandis que 150 millions de jeunes filles sont soumises, chaque année, à des violences sexuelles, a-t-il rappelé, soulignant que ce n'est que récemment que la portée du problème a commencé à attirer l'attention des décideurs politiques. Il a fait observer que les initiatives prises par les enfants eux-mêmes ont constitué un facteur très important de cette prise de conscience. Le Fonds des nations Unies pour l'enfance (UNICEF) soutient nombre de ces initiatives, a-t-il rappelé. La participation des enfants et des jeunes est un droit fondamental reconnu par la Convention relative aux droits de l'enfant. Le fait de consulter les enfants est nécessaire pour garantir que les mesures prises en leur faveur répondent bien à leurs besoins.

M. Karunan a également constaté que dans la région d'Asie du Sud-est, des enfants sont à l'origine d'un véritable travail de sensibilisation auprès d'adultes responsables qui ont, suite à ces démarches, mis sur pied des réseaux de protection des enfants. En Inde, par exemple, des enfants sont à l'origine de larges consultations, au niveau des districts d'un État, au sujet des conséquences des châtiments corporels infligés dans les écoles. Au terme de ces consultations ont été formulés des modèles d'éducation et de sensibilisation à ce problème, qui ont abouti à l'interdiction des châtiments corporels dans les établissements scolaires de cet État. Pour le représentant d'UNICEF, le soutien accordé à ces initiatives doit s'appuyer notamment sur la prise en compte de l'intérêt supérieur de l'enfant, sur le principe de l'égalité des chances pour les garçons et les filles, ainsi que sur un suivi attentif. Les messages transmis doivent être simples et viser des changements de comportements chez les adultes. Enfin, les initiatives menées par les enfants doivent être intégrées aux mesures prises par les autorités pour mettre un terme à la violence contre les enfants.

MME NAJAT M'JID MAALA, Rapporteuse spéciale sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, a présenté les résultats du troisième Congrès mondial contre l'exploitation sexuelle des enfants et des adolescents qui a réuni, en novembre 2008, plus de 3000 personnes à Rio de Janeiro, dont les représentants de 137 États. Elle a rappelé que le Congrès, qui a adopté une déclaration et lancé un appel à l'action pour prévenir et éliminer l'exploitation sexuelle des enfants et des adolescents, a constaté une importante recrudescence de certaines formes d'exploitation sexuelle des enfants et des adolescents perpétrées à travers l'Internet et les nouvelles technologies, ainsi que de la traite des enfants et du tourisme sexuel. En outre, le Congrès a souligné la vulnérabilité croissante de certains enfants à l'exploitation sexuelle du fait de la pauvreté, des inégalités sociales, de la discrimination, de l'abus de drogue et d'alcool, de la dégradation de l'environnement, du VIH/sida, des déplacements de populations, des conflits armés et d'autres situations d'urgence, entre autres. Le Congrès de 2008 a également adopté un plan d'action constitué de 73 recommandations dont une partie ont pour échéance 2013, a souligné Mme Maala, qui a rappelé qu'un certain nombre d'instruments internationaux ou régionaux pertinents ne sont toujours pas ratifiés et que certaines législations nationales ne définissent pas clairement ou ne criminalisent pas toutes les formes d'exploitation sexuelle des enfants ou encore n'établissent pas une compétence extraterritoriale à l'égard de toutes les infractions d'exploitation sexuelle des enfants.

L'impunité et la corruption continuent à sévir et l'accès sans discrimination à des services de police et de justice garantissant protection et confidentialité n'est pas toujours garanti, a constaté Mme Maala. De même, de nombreux pays ne disposent toujours pas de système accessible pour signaler les cas d'exploitation sexuelle. Il reste aussi à faire des progrès pour renforcer les services nationaux de protection de l'enfance ou en créer de nouveaux, ainsi qu'en matière de coopération intersectorielle pour créer une véritable chaîne de protection. Pour la Rapporteuse spéciale, la participation des enfants dans l'élaboration de programmes de sensibilisation et de prévention devrait être systématisée à tous les stades d'élaboration des stratégies car, a-t-elle rappelé, si les enfants sont des victimes de l'exploitation sexuelle, ils font également partie de la solution. Elle a également préconisé un renforcement de la coopération policière transnationale et un meilleur échange d'informations et d'expertise, puisque l'exploitation sexuelle transcende les frontières. Si certaines entreprises, notamment de télécommunications ainsi que les banques, ont adopté des codes de conduite, ces initiatives gagneraient à être élargies à un plus grand nombre d'entreprises et inclure notamment le tourisme, le transport et les différents secteurs des médias et de la communication, a souligné Mme Maala.

MME MAUD DE BOER-BUQUICCHIO, Secrétaire générale adjointe du Conseil de l'Europe, a rappelé que le mois passé, une des principales informations diffusées par les médias au niveau international avait été le scandale autour des allégations sur des abus sexuels atroces commis sur environ 30 enfants par deux enseignants d'une école d'excellente réputation de Berlin entre 1975 et 1983. On estime que plus de cent victimes ont gardé le silence pendant 30 ans. Ils étaient sans doute terrifiés par les conséquences possibles de leurs témoignages pour eux-mêmes comme pour leurs familles, ainsi que par l'idée de ne pas être crus, a estimé la Secrétaire adjointe du Conseil de l'Europe. D'autres scandales dans des institutions qui se sont déroulés au Portugal, en Irlande ou au Canada, mettant en cause des prêtres, ont montré que ce type d'actes peut se dérouler partout.

Mme De Boer-Buquicchio a expliqué que le Conseil de l'Europe a focalisé son attention sur les droits des enfants et la protection des enfants devant différents types de violences. L'élimination des violences sexuelles est un des mandats du programme «Construire une Europe pour et avec les enfants». Dans le cadre de ce mandat, le Conseil de l'Europe envisage la question des violences sexuelles sous quatre angles. Premièrement, la Convention de Lanzarote, couvrant toutes les formes de violences sexuelles, a tout d'abord été élaborée, a rappelé Mme de Boer-Buquicchio. Deuxièmement, une assistance pour élaborer des stratégies nationales intégrées en vue de protéger les enfants des violences est offerte à tous les pays. Troisièmement, les droits des enfants sont intégrés dans un certain nombre de domaines liés à la prévention des violences sexuelles. Quatrièmement, une campagne paneuropéenne pour combattre les violences sexuelles contre les enfants est en préparation. Plus concrètement, la Secrétaire adjointe du Conseil de l'Europe a expliqué que la Convention de Lanzarote est un traité juridiquement contraignant particulièrement novateur et ouvert à ratification. Ce texte préconise notamment l'adoption d'une approche multidisciplinaire et coordonnée entre les différentes agences au niveau local; la sensibilisation à l'attention des enfants eux-mêmes; la nécessité que le public et les professionnels fassent rapport auprès des autorités compétentes de tous les actes de violences sexuels remarqués; et l'importance de minimiser la victimisation de l'enfant dans le cadre de la procédure judiciaire. Mme de Boer-Buquicchio a appelé à la mise en place de politiques et de cadres institutionnels, à la recherche d'une culture du respect de l'enfant, à la mise en place de systèmes de collecte et de recherche, et au développement et au renforcement de la coopération internationale.

MME ELIANA RESTREPO, Vice-Directrice de PLAN International Colombie, a déclaré que les témoignages d'enfants sont généralement ignorés dans les débats autour de la protection de leurs droits. Elle a insisté sur l'importance d'approcher le problème de la violence sexuelle en prenant en compte les valeurs et schémas culturels, notamment ceux prédisposant à ce phénomène. Il est urgent d'envisager des démarches globales, impliquant les autorités, la société civile, la communauté, la famille et les enfants eux-mêmes dans la recherche de solutions globales, a-t-elle souligné. La visibilité des problèmes de violence sexuelle et la sensibilisation dans ce domaine comptent parmi les premières étapes à cet égard: il faut briser le silence, dénoncer les violations afin d'obliger l'État à remplir son rôle et à mettre au point des moyens de protection; et, surtout, il faut modifier les schémas culturels qui entraînent une acceptation tacite des violences sexuelles.

Mme Restrepo a indiqué qu'un autre volet de la recherche de solutions consiste à procéder dans tous les segments de la société à une sensibilisation aux problèmes de la violence contre les filles. Les campagnes menées ces dernières années en Colombie avec la participation de la société civile et des organisations de l'État ont montré qu'une action concertée permet d'augmenter le taux de dénonciation de 20% à 30%, a-t-elle souligné, ajoutant que l'engagement des médias aux côtés des initiateurs de telles campagnes est indispensable, de même que la création d'une véritable culture de l'information, permettant de connaître les situations nationales et d'en assurer le suivi. Tous ces processus doivent absolument engager la participation des enfants eux-mêmes, ce qui implique un renforcement des capacités de protection et d'interaction des différents acteurs concernés. Enfin, la participation des écoles dans la création d'environnements démocratiques et non violents est la pierre de touche de la prévention de la violence sexuelle contre les enfants, a conclu Mme Restrepo.

Débat

M. JAVIER GARRIGUES (Espagne au nom de l'Union européenne) a affirmé que la violence contre les enfants n'est jamais justifiable; la défense de leur intégrité et de leur dignité est par conséquent une priorité. Le représentant a déclaré que l'Union européenne préparait une nouvelle directive pour lutter contre la pornographie infantile et en aggraver la répression. Faire participer les enfants à la prévention des violations est fondamental et il faut considérer les enfants comme des titulaires de droits, y compris de droits à réparation quand ils ont été victimes, a souligné le représentant de l'Union européenne. Il a demandé aux panélistes de donner des exemples d'initiatives prises par les enfants, ainsi que leurs résultats. Il a souhaité savoir quelles devraient être les priorités dans les années à venir et quel bilan pouvait être tiré des mesures déjà prises.

M. FEDERICO A. GONZALEZ (Paraguay) a estimé que la réunion annuelle sur les droits de l'enfant offrait aujourd'hui aux États l'occasion de renouveler leur engagement en matière de lutte contre les violences sexuelles faites aux enfants. Il a relevé l'importance d'insister sur l'obligation de dénoncer les faits. À cet égard, la législation paraguayenne oblige toute personne à dénoncer les cas de violence aux autorités compétentes. En 2009, la police nationale a formé une division spéciale chargée de ces questions. D'autre part, un Plan national de prévention et d'élimination des sévices sexuels frappant les enfants et les adolescents a été mis sur pied.

M. ABDUL WAHAB HAIDARA (Sénégal) a expliqué que son pays avait recours à la répression au travers d'un arsenal juridique renforcé par une loi qui intègre la prévention de la traite et de l'exploitation des enfants. Le Sénégal a mis en place des structures spécifiques chargées de la prise en charge des questions liées à la violence, à la traite et à l'exploitation des enfants. Leur action bénéficie d'un soutien au niveau le plus élevé, comme en témoigne la création d'une cellule d'appui pour l'enfance sous l'égide de la présidence de la République, a souligné le représentant sénégalais. Grâce aux efforts combinés de l'État et de la société civile, y compris les chefs coutumiers et les dirigeants des principales communautés religieuses, des résultats encourageants en matière de protection des enfants ont été obtenus. C'est le cas pour ce qui est de l'abandon des mutilations génitales féminines et de la modernisation progressive des écoles d'enseignement coranique, a indiqué le délégué.

MME JANKA DIVINCOVA (Slovaquie) a estimé que le fait de débattre de la violence sexuelle contre les enfants permet de dissiper certains mythes autour de ce problème, par exemple la question du mensonge des enfants dans ce domaine. Elle a relevé l'importance de n'épargner aucun effort pour condamner les violences sexuelles, quelles que soient les cultures et les religions. Ce que l'on sait de la violence sexuelle contre les enfants dépend de la manière de définir cette violation de leurs droits, a-t-elle souligné. La représentante slovaque a également estimé crucial de susciter un environnement au sein duquel les enfants ont confiance en eux et deviennent moins facilement les victimes de violences sexuelles.

M. WALID ABU-HAYA (Israël) a déclaré que son pays, qui est d'ailleurs partie à la Convention relative aux droits de l'enfant et à ses Protocoles facultatifs, est déterminé à promouvoir les droits de l'enfant dans tous les domaines. La protection des enfants contre les violences sexuelles est un élément essentiel de la politique d'Israël, qui a adopté de nouvelles mesures législatives qui aggravent les peines pour les crimes et délits sexuels commis contre les mineurs et au sein de la famille. Le représentant a ajouté que les enfants victimes sont protégés, y compris à l'égard de leurs parents quand ces derniers sont suspects.

MME BEULAH NAIDOO (Afrique du Sud) a indiqué que son pays a créé un ministère chargé de centraliser l'action en faveur des droits des enfants. Le pays a aussi mis sur pied un réseau de sécurité sociale au profit de 12 millions d'enfants, avec l'aide de partenaires internationaux. Pour la représentante sud-africaine, les programmes destinés à l'enfance doivent tenir compte des besoins spéciaux des filles, en particulier dans les situations de conflit.

M. XAVIER BAERT (Belgique) a annoncé qu'au cours de la présidence belge de l'Union européenne, la Reine Paola sera l'hôte d'une conférence organisée par le Ministre de la justice, Child Focus et Missing Children Europe à Bruxelles, les 17 et 18 novembre 2010, conférence consacrée aux enfants disparus et aux enfants victimes d'exploitation via internet. L'évolution des nouvelles technologies de l'information et de la communication exige de nouveaux moyens de prévention, de protection et de poursuite, a-t-il rappelé. Il a par ailleurs attiré l'attention sur l'engagement de son pays qui contribue en effet à plusieurs programmes d'organisations non gouvernementales, ainsi qu'au fonds de stabilisation et de redressement à l'Est de la République démocratique du Congo sur la thématique des violences sexuelles.

M. CARLOS SIBILLE RIVERA (Pérou) a indiqué que son pays avait adopté des plans nationaux et des mesures de protection des enfants, citant notamment le programme «ligne 100», un service téléphonique qui permet de répondre aux besoins émotionnels des enfants et de fournir des conseils à des professionnels. Ce service gratuit qui fonctionne dans tout le pays, 24 heures sur 24, a reçu plus de 17 000 appels en 2009, a expliqué le représentant. Il a en outre indiqué qu'une campagne de sensibilisation des enfants a été lancée sur les risques liés à l'utilisation d'Internet et sur les moyens d'éviter de s'exposer à des violences sexuelles et à la pornographie infantile.

MME NYNKE B. WIJMENGA (Pays-Bas) a notamment déclaré que son pays avait pris des mesures concrètes de lutte contre la pornographie impliquant des enfants et le tourisme sexuel. Le mandat du rapporteur national sur la traite des êtres humains a été élargi pour prendre en compte la lutte contre la pédopornographie. L'an dernier, un groupe de travail sur la pornographie mettant en scène des enfants a été mis sur pied aux Pays-Bas pour identifier les problèmes et proposer des solutions. Une campagne de sensibilisation au problème de l'exploitation sexuelle des enfants, et de ses conséquences juridiques, a en outre été lancée à l'aéroport d'Amsterdam.

M. JONAS RUDALEVICIUS (Lituanie) a indiqué que le bureau du médiateur pour les enfants de son pays avait mené une étude et organisé un débat à l'échelle nationale sur les sévices sexuels infligés aux enfants, afin d'envisager des solutions au niveau local et national. Des formations pour les personnes s'occupant d'enfants ont été mises sur pied, axées sur l'identification des problèmes de violences sexuelles. Selon le délégué lituanien, les mesures suivantes sont à recommander: réhabilitation effective et complète pour les victimes; éducation du grand public; accès des enfants à autant d'informations que possible sur les options qui s'offrent à eux; éducation des enfants sur les questions ayant trait aux relations familiales et à la sexualité; renforcement de la formation du personnel des institutions liées à l'enfance; et incitation à dénoncer les cas de violences sexuelles.

M. OMAR HILALE (Maroc) a affirmé que son pays attachait une grande importance aux droits de l'enfant et s'est engagé à protéger et promouvoir ces droits tant au plan national qu'international. Le Maroc a ainsi adopté un Plan d'action national de l'enfant 2006-2011 baptisé «Maroc digne de ses enfants». La politique du Maroc est renforcée par l'engagement personnel de la Princesse Lalla Meryem, présidente de l'Observatoire national des droits de l'enfant, a ajouté M. Hilale. Il a cité plusieurs mesures prises par son pays, citant entre autres la création d'unités de protection de l'enfance qui répondent aux normes internationales; le lancement de campagnes nationales de lutte contre la violence à l'égard des enfants; la mise en place d'un numéro de téléphone vert d'écoute; ou encore une stratégie nationale de protection des mineurs migrants non accompagnés.

MME IRUTHISHAM ADAM (Maldives, au nom également de Maurice) a déclaré que les Maldives et Maurice ont tous deux ratifié la Convention relative aux droits de l'enfant. Compte tenu de leur statut de petits pays insulaires dotés de ressources limitées, ces pays sont néanmoins confrontés à des problèmes spécifiques pour la mise en œuvre des dispositions de cet instrument. Cela étant, les Maldives ont adopté une Charte de droits de l'enfant visant l'inclusion de tous les droits et principes de la Convention dans le droit national. Une ligne téléphonique d'assistance gratuite a été créée à l'intention des enfants, qui a reçu déjà 400 appels. La déléguée a voulu savoir quelles dispositions précises devraient être intégrées aux textes de loi nationaux afin d'améliorer concrètement la vie des enfants.

MME BEATRIZ LINARES CANTILLO (Colombie) a indiqué que dans son pays, 86% des victimes de sévices sexuels sont des enfants de moins de 18 ans, dont la majorité sont des jeunes filles. Dans ce contexte, elle a relevé l'importance de créer un mécanisme de plainte directe, pour permettre aux victimes d'obtenir réparation. Elle a précisé qu'il existe à présent en Colombie une loi offrant un accès direct des enfants qui peuvent, dès lors, exiger des actes quant à la garantie de leurs droits.

M. KHALED FAHAD AL-HAJRI (Qatar) a affirmé que les droits de l'enfant qatarien sont au cœur de la législation sur les droits de l'homme et des politiques nationales. Le Qatar dispose de lois qui assurent la protection des droits de l'enfant, notamment contre les violences sexuelles. Le représentant a également indiqué que le système judiciaire de son pays accorde une large place à la protection des droits de l'enfant.

M. DONG JO KIM (République de Corée) a fait savoir que des scandales récents de violence sexuelle dans son pays ont entraîné des appels pour la prise de mesures plus dures contre les auteurs de tels actes. Le Gouvernement a présenté plusieurs projets de lois à ce sujet, notamment pour ce qui concerne le port de systèmes de localisation par les personnes condamnées pour des actes de violence sexuelle. Mais les mesures prises après la commission des actes de violence ne sont pas suffisants pour protéger les enfants: il faut donc agir pour changer les mentalités, a observé le représentant, demandant aux panélistes des exemples précis de systèmes préventifs.

M. BAARD HJELDE (Norvège) a indiqué que son pays avait mis en place un plan d'action global contre les abus physiques, fondé sur la prévention et l'assistance. Afin de lutter contre les violences sexuelles faites aux enfants commises par des employés du service d'assistance à l'enfance, toutes les personnes travaillant avec de jeunes doivent obtenir un certificat de la police, a-t-il indiqué à titre d'exemple. Au niveau international, la Norvège appuie le personnel des Nations Unies qui œuvre à éliminer les viols de guerre et soutient le déploiement de conseillers pour les enfants dans le cadre des missions de maintien de la paix. La représentante a conclu son intervention en rappelant que les enfants ne doivent pas être perçus comme des victimes mais doivent participer de manière active à ces processus qui les impliquent directement.

M. SAEED SARWAR (Pakistan) a estimé que la tendance à l'augmentation des abus sexuels, qui touche toutes les sociétés, est inquiétante et exige que soient rapidement prises des mesures à tous les niveaux. Le Pakistan a mis en place un plan d'action national pour la protection de l'enfance, dont une partie aborde la question des violences sexuelles, a-t-il expliqué. En collaboration avec le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), le Pakistan prépare actuellement une étude visant à collecter des informations sur le phénomène, qui permettront ensuite de prendre des mesures politiques. Selon le représentant pakistanais, un renforcement des liens familiaux permettait de lutter contre les violences sexuelles; il s'est prononcé en faveur d'un contrôle parental accru.

M. THEO NOTEN (ECPAT International) a notamment déclaré que l'étude des Nations Unies sur la violence à l'encontre des enfants montre que cette violence peut être prévenue par des mesures ciblées. Les enfants sont des victimes faciles, en particulier pendant les guerres, et du fait du développement technique de l'information, a-t-il constaté. Il a à cet égard relevé l'urgence de prendre des mesures pour prévenir les abus commis par le biais d'Internet. La coordination des mécanismes de protection des Nations Unies et régionaux doit être facilitée et appuyée, tandis que les États doivent rapidement adopter des plans de lutte contre la violence sexuelle exercée sur les enfants, a-t-il également préconisé.

MME MARCIA USTRA SOARES (Brésil) a déclaré que son Gouvernement avait systématiquement investi dans des programmes de protection des enfants, notamment contre les violences sexuelles. Un agenda a été établi dans ce sens en 2007. Dès 2003, un service téléphonique gratuit a été mis en place pour recueillir des informations sur des cas de violences sexuelles contre les enfants. La représentante brésilienne a souligné que son pays considérait la coopération internationale comme fondamentale pour lutter contre les violences sexuelles à l'encontre des enfants et avait pris des initiatives dans le cadre d'une coopération entre pays sud-américains.

MME SIM MELLOUH (Algérie) s'est dit préoccupée par le nombre croissant de violences sexuelles visant des enfants de par le monde, ajoutant qu'une action urgente s'imposait. La protection des enfants est une priorité pour le Gouvernement algérien qui a fait de nombreux efforts pour établir les bases juridiques de la protection de l'enfance, en ratifiant la Convention relative aux droits de l'enfant et ses deux Protocoles facultatifs, la Charte arabe des droits de l'homme et la Charte africaine sur le bien-être de l'enfant. La législation algérienne protège l'enfant contre toute forme d'abandon, de vente, de traite ou d'exploitation sexuelle et économique. Un juge des mineurs peut déterminer le placement immédiat de l'enfant dans une institution de protection de l'enfance. La déléguée algérienne a enfin cité comme facteur positif le niveau élevé d'inscription scolaire en Algérie (97% selon l'UNICEF).

MME SRI PARDINA PUDIASTUTI (Indonésie) a fait valoir que son pays prenait actuellement plusieurs mesures pour assurer la mise en œuvre de ses plans nationaux d'élimination de la violence contre les enfants: accélération de la ratification du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant, concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants; sensibilisation communautaire; et diffusion intensifiée des Plans dans tout le pays. Des lacunes importantes demeurent dans le domaine de la mise en œuvre des politiques. Le Gouvernement indonésien est néanmoins en train d'intensifier ses efforts pour améliorer la situation, notamment par le biais de campagnes médiatiques et de la formation des forces de police à la question de la criminalisation des actes de violence commis contre des enfants.

MME MALGORZATA SKORKA (Pologne) a lancé un appel aux États qui ne l'ont pas encore fait de ratifier la Convention relative aux droits de l'enfant et ses deux Protocoles. La représentante polonaise a estimé que l'élimination des violences sexuelles faites aux enfants passe par une sensibilisation au problème. Des campagnes nationales ont été réalisées en Pologne, avec un large éventail de parties prenantes. Les autorités et la société civile permettent une prévention efficace des enfants contre toutes formes de violences. Au printemps 2009, un centre national de prévention pour les victimes de la traite, qu'elles soient polonaises ou étrangère, a été ouvert. Un programme national pour contrer la violence dans les ménages a été adopté. Le nouveau programme scolaire 2009-2010 traite de la sécurité des enfants dans les écoles et dans le contexte d'Internet. Enfin, la Pologne invite les pays à contribuer les résultats de leurs programmes et leurs meilleures pratiques au niveau international.

MME CARLA CASTELO (Portugal) a fait valoir les mesures prises par son pays dans le cadre de la mise en œuvre de son Initiative en faveur des enfants et des adolescents, sur la base des dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant et des recommandations du Comité des droits de l'enfant. Outre des mesures générales, telles que l'organisation de campagnes médiatiques de lutte contre la violence faite aux enfants, une action ciblée est menée en matière d'éducation sexuelle et d'instauration d'une politique de «tolérance zéro» envers la violence à l'égard des femmes et la discrimination sexiste. Des spécialistes d'Internet sont formés à l'utilisation d'un outil permettant de déterminer avec plus de certitude les abus subis par des enfants victimes de crimes sexuels.

M. OBAID SALEM SAEED AL ZAABI (Émirats arabes unis) a déclaré que son pays avait pris des mesures pour protéger notamment les enfants dans les régions défavorisées où la pauvreté augmente les risques de violences sexuelles encourus par les enfants. Les Émirats arabes unis ont adopté un plan global dont les orientations générales respectent les normes internationales des droits de l'enfant et reposent sur la coopération internationale tout en étant fondées sur les traditions séculaires de la population, a expliquée le représentant. Il a mis l'accent sur la coopération interrégionale pour mieux protéger les enfants vivant dans des zones de conflit armé ou qui subissent les effets des catastrophes naturelles.

M. ACHAMKULANGARE GOPINATHAN (Inde) a expliqué que son pays avait adopté, dès 1998, un plan d'action pour lutter contre la traite et l'exploitation commerciale des femmes et des enfants, qui est en passe d'être mis à jour. Un programme complet sur la prévention de la traite et la réhabilitation et la réinsertion des victimes a été adopté à cet égard, en collaboration avec l'UNICEF. Par ailleurs, le représentant indien a indiqué qu'un volet important du plan général d'action pour l'enfance en 2005 était consacré à la protection contre les violences sexuelles, grâce à une stratégie de prévention. Le soutien du secteur privé est mobilisé, notamment celui des médias, a ajouté le représentant indien.

M. ERNESTO S. MARTÍNEZ GONDRA (Argentine au nom du MERCOSUR) a déclaré que la Convention relative aux droits de l'enfant devait être le cadre de référence majeur pour toute action publique en faveur des enfants et des adolescents, compte tenu du contexte familial et communautaire. À cet égard, les pays du MERCOSUR travaillent intensément à des échanges de bonnes pratiques dans le domaine de la prévention de la traite des enfants, de la lutte contre la pornographie sur Internet impliquant des enfants et pour la préparation d'un troisième congrès mondial sur l'exploitation des enfants au travail.

MME NAHIDA SOBHAN (Bangladesh) a insisté sur la nécessité de mettre l'accent sur la prévention. Elle a rappelé que la plupart du temps, les victimes n'osent pas signaler leur agression car elles craignent des représailles de la part de leur agresseur. Elle a aussi rappelé que les enfants pauvres sont particulièrement exposés aux violences et à l'exploitation, surtout quand les familles éclatent. Au-delà des violences sexuelles, il ne faut pas oublier la lutte contre les violences à l'égard des enfants en général, a ajouté la représentante, estimant qu'il fallait identifier les causes profondes de vulnérabilité des enfants, concevoir des stratégies de prévention réalisables et renforcer la sensibilisation de la population et des enfants eux-mêmes.

MME EUGENIA GUTIÉRREZ RUIZ (Costa Rica) a indiqué qu'en 2007 a été adoptée une réforme du code pénal par le biais d'une loi de renforcement de la lutte contre les violences sexuelles à l'égard des mineurs, avec des sanctions plus lourdes contre les auteurs de tels actes. Les cas de violences sexuelles dans les situations de conflits armés préoccupent beaucoup la délégation du Costa Rica qui préconise de renforcer les juridictions nationales quand les violences sexuelles sont utilisées comme armes de guerre. La déléguée costaricienne a également demandé aux panélistes quels seraient à leur avis les moyens les plus appropriés pour lutter contre les violences sexuelles dans les pays où cela est toléré pour des raisons culturelles.

M. TAKASHI TAKASHIMA (Japon) a évoqué l'action internationale de son pays, d'abord par la collaboration au Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés, ensuite par l'aide internationale accordée à des pays tels que le Sénégal, par exemple, en coopération étroite avec les Nations Unies. Rappelant que le Japon a accueilli le deuxième Congrès mondial sur l'exploitation sexuelle des enfants en 2001, le représentant a demandé aux panélistes quels pourraient être les thèmes du quatrième congrès. Il a en outre précisé que son pays collaborait avec l'UNICEF en vue de mieux comprendre les mesures qu'il pourrait prendre, au niveau national et international, pour donner encore plus de visibilité à la Convention relative aux droits de l'enfant.

M. PEKKA METSO (Finlande) a souligné que, selon un sondage effectué en Finlande en 2008, deux enfants sur trois ont déjà expérimenté une certaine forme de violence. Il a relevé l'importance des aspects de prévention et de détection qui, selon lui, exigent une approche intégrée et transversale. Il faut fournir aux enfants des outils afin de mieux les préparer à se protéger eux-mêmes contre la violence. Le délégué de la Finlande a enfin demandé au panel quelles sont les bonnes pratiques en matière de formation des personnes qui travaillent avec les enfants afin d'améliorer la détection de cas de violence.

MME EKSIRI PINTARUCHI (Thaïlande) a déclaré que les violences sexuelles contre les enfants représentent un problème sérieux pour les garçons comme les fillettes, touchent tous les pays et comportent des aspects transnationaux. La Thaïlande a adopté un certain nombre de lois pour protéger les enfants des violences sexuelles et des violences familiales. Toutefois, ces efforts devraient être renforcés, a-t-il souligné, relevant notamment l'importance de prévenir les violences sexuelles avant d'avoir à les guérir. La Thaïlande reconnaît le rôle positif joué par la Convention relative aux droits de l'enfant et son Comité et estime que la nomination d'une Représentante spéciale du Secrétaire général sur la violence à l'encontre des enfants constitue un progrès.

M. SILVANO TOMASI (Saint-Siège) a rappelé les propos de Benoît XVI qui affirmait que les abus sexuels commis contre des enfants sont des crimes odieux. Cette condamnation sans équivoque s'accompagne d'une stigmatisation religieuse, puisque le Pape a également qualifié ces actes de «péchés», constituant une offense au regard de Dieu et de la dignité humaine, a précisé son représentant. Il a rappelé que ces dernières années, des membres du clergé catholique ont été accusés d'abus contre des enfants et a affirmé qu'il n'y a pas d'excuse à ces comportements qui ont, d'ailleurs, été sanctionnés par des tribunaux. Les institutions de l'église ont pris des mesures concrètes pour traiter les conséquences de ces actes, dont les auteurs sont suspendus et traités selon les normes du droit civil aussi bien que du droit canon, a assuré le représentant.

M. ALBERTO NAVARRO BRIN (Panama) a indiqué que l'exploitation sexuelle et commerciale des enfants constitue un délit grave au Panama, depuis la promulgation de la loi n°16 en 2004, qui prévoit des condamnations jusqu'à 15 ans de prison et l'allocation d'un fonds spécial pour mener des enquêtes sur ces délits. Ce fonds vise aussi à financer des programmes de formation et de soins aux victimes, a-t-il précisé. Le représentant panaméen a demandé des compléments d'information aux panélistes sur la manière de renforcer les procédures de plainte à l'échelle locale et internationale dans les cas de violences sexuelles à l'égard des enfants.

MME ANJA MARIJA CIRAJ (Slovénie) a déclaré que son gouvernement avait adopté un programme décennal (2006-2016) d'action en faveur des enfants et des adolescents, axé sur la prévention de la violence sexuelle contre les enfants ainsi que sur l'assistance aux victimes de tels actes. L'exploitation sexuelle des enfants est traitée par le Code pénal slovène. Des projets ont été lancés pour faire face aux abus commis par le biais d'Internet; un projet de reconnaissance et de protection des victimes de la traite des êtres humains existe depuis plusieurs années. La Slovénie est aussi très active en matière de protection des enfants contre la violence sexuelle au plan régional et international, dans le cadre du Conseil de l'Europe.

M. ASADOLLAH ESHRAGH JAHROMI (Iran) a déclaré que son pays, qui est partie à la Convention relative aux droits de l'enfant et à ses Protocoles facultatifs, attache une importance toute particulière à la protection des enfants et s'est engagé à lutter contre toutes les formes de violences sexuelles à leur encontre. Il a dénoncé une augmentation du nombre des violences sexuelles contre les enfants en Europe. Il a estimé que l'occupation, la présence de forces militaires à l'étranger, la guerre et les conflits armés contribuent aux violences sexuelles commises contre les enfants. Il a également estimé qu'il fallait se pencher sur le rôle des médias et des technologies modernes comme l'Internet. Enfin, il a souhaité un renforcement du rôle fondamental de la famille comme élément de base de la société et a souhaité une plus grande promotion des valeurs éthiques dans toute stratégie de protection.

M. GEORG SPARBER (Liechtenstein) a appelé à se concentrer sur la prévention et les mécanismes d'alerte précoce contre les violences sexuelles faites aux enfants. Il a expliqué que son pays avait mis en place un groupe d'experts pluridisciplinaire, dont les membres sont spécialisés en droit, médecine, psychologie et psychothérapie. Ce groupe d'experts, a-t-il poursuivi, œuvre à nouer des liens entre les systèmes d'aide existants et fournit des programmes de formation aux professionnels. Il a également indiqué que le groupe a élaboré des normes et standards à appliquer dans les cas de violence sexuelle.

M. AHMED IHAB GAMALELDIN (Égypte) a souligné que la question de la violence sexuelle contre les enfants doit être abordée à titre prioritaire par la communauté internationale. Il a en effet fait valoir que ce phénomène est accentué aujourd'hui par les technologies modernes qui banalisent les pratiques immorales. «On ne devrait pas s'étonner de la généralisation d'une certaine perversité», a-t-il souligné. Il a souhaité savoir, de l'avis des panélistes, quels sont les moyens les plus efficaces de lutte contre les effets néfastes de l'Internet.

Réponses et conclusions des panélistes

MME VILLARÁN DE LA PUENTE a attiré l'attention du Conseil sur l'importance de faire en sorte que toutes les mesures complexes dont il a été question aujourd'hui soient rapidement mises en œuvre. Cela est d'autant plus urgent en ce qui concerne les violences sexuelles, qui constituent un problème complexe qui a des formes émergentes, a noté l'experte. Elle a également souligné l'importance de «l'aspect prévention», estimant qu'il faut agir avant, car après le coût sera beaucoup plus important pour la société. Pour Mme Villarán de la Puente, les espaces fondamentaux sont la famille et l'école. Il faut donc former des familles protectrices et non des familles qui abandonnent leurs enfants; pour cela, il faut des politiques publiques. Il faut également agir au niveau des communautés, là où la prévention est la plus efficace et donne des résultats plus importants. Il faut en outre agir au niveau du système de santé et des programmes sociaux. Enfin, les enfants eux-mêmes doivent participer pleinement au processus.

L'experte du Comité des droits de l'enfant a estimé en conclusion que les États devaient s'assurer que les recommandations du Comité des droits de l'enfant, fondées sur la Convention et ses protocoles facultatifs, soient prises en charge dans les législations nationales, car elles sont une ressource utile pour les politiques de chaque pays. Les systèmes régionaux sont également extrêmement utiles, a-t-elle ajouté. Mme Villarán de la Puente a ensuite répondu aux questions sur la manière de protéger l'intérêt supérieur de l'enfant lorsque les criminels sont des enfants. Elle a préconisé de privilégier, à la répression et aux châtiments, la réinsertion des mineurs délinquants et la réparation pour les victimes. C'est le seul moyen d'aborder ce type de questions en évitant des récidives, a-t-elle conclu.

M. KARUNAN a observé que les initiatives prises par les enfants sont généralement efficaces au plan local, certaines ayant des effets au niveau national. La difficulté consiste à déterminer les conditions du passage réussi d'un niveau à l'autre. Il vaut aussi la peine d'étudier les initiatives ayant permis la création de liens internationaux entre campagnes nationales organisées par des enfants. Pour M. Karunan, le problème demeure la sensibilisation des enfants à leurs droits. Il a également noté qu'Internet peut avoir un impact négatif sur les enfants, tout en contribuant aussi à l'établissement de liens entre enfants de différents pays autour de la promotion de leurs droits. Des études sont en cours pour envisager l'utilisation à cette fin d'autres outils de communication auxquels les enfants ont accès, tel le téléphone portable.

Le représentant du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) a indiqué en fin de séance qu'il importe d'agir sur la demande afin de mieux lutter contre l'exploitation des enfants. Des initiatives coordonnées devront être prises par la société civile et les pouvoirs publics. Il ne suffit pas de consulter les enfants, mais aussi de les intégrer aux mesures prises en leur faveur. Il faudra aussi se pencher de manière plus approfondie sur les causes profondes de la violence sexuelle contre les enfants. Pour M. Karunan, les Nations Unies constituent une excellente plateforme de partage de bonnes pratiques dans ce domaine. Les médias et le secteur privé doivent enfin être associés plus étroitement encore à l'action contre la violence sexuelle.

MME MAALA a pour sa part expliqué qu'on trouve des exemples de bonnes pratiques sur la protection des enfants contre les violences sexuelles un peu partout mais qu'elles sont en général sectorielles. Les bonnes pratiques en matière de politiques d'ensemble sont très rares, a-t-elle déclaré, estimant que l'une des raisons tient à l'évolution constante des risques, dont il faut tenir compte. Selon Mme Maala, il est nécessaire d'avoir une approche transversale qui incorpore l'adhésion à des instruments juridiques internationaux, d'une part, et des politiques nationales accessibles, qui luttent contre la corruption et l'impunité et qui permettent d'identifier les victimes actuelles ou potentielles, d'autre part. Il faut aussi assurer la prise en charge à long terme et pluridisciplinaire des enfants victimes. Il faut en outre consulter les enfants en permanence et non pas ponctuellement. Mme Maala a aussi estimé que les entreprises avaient un rôle important à jouer.

La Rapporteuse spéciale sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants a souligné que des organisations non gouvernementales œuvraient à la transformation de normes sociales ou culturelles qui tolèrent encore les abus sexuels ou la violence contre les enfants. Elle a ajouté qu'il s'agit là d'un processus à très long terme qui demande un travail de fond avec la communauté, mais est très efficace. Elle a mis en garde contre toute confusion entre valeurs occidentales et valeurs tout court. Elle a déclaré qu'il existait très peu d'études sur les profils des «demandeurs» qui abusent sexuellement des enfants mais que celles qui existent montrent que les auteurs de tels abus sexuels ne sont pas tous des malades mentaux ou des pervers. Il existe une importante dimension «consumériste» et de gros enjeux financiers, a-t-elle fait observer.

MME DE BOER-BUQUICCHIO a abordé la question de la stratégie intégrée adoptée par le Conseil de l'Europe en matière de lutte contre les violences sexuelles faites aux enfants, en suivant une approche du bas vers le haut, inclusive, fondée sur la coopération avec des pays pilotes qui se sont portés volontaires. Des processus similaires ont été mis en place dans d'autres régions en dehors d'Europe, a-t-elle précisé. Elle a souligné que le Conseil de l'Europe souhaite que l'Union européenne prenne en compte ses directives et ratifie la Convention de Lanzarote, qui est le seul instrument juridique international qui couvre toutes les violences sexuelles faites aux enfants. Elle a rappelé que cette Convention a été ratifiée par 47 États membres du Conseil de l'Europe avec une définition qui pourrait s'appliquer partout dans le monde. La Convention de Lanzarote est ouverte à des pays non européens et constitue une norme importante sur les dangers que fait peser Internet en matière d'abus sexuels, a insisté Mme de Boer-Buquicchio.

La Secrétaire générale adjointe du Conseil de l'Europe a estimé qu'après ce débat une des plus grandes opportunités à saisir est le développement des mécanismes de prévention auprès des enfants mais aussi auprès des parents. Elle a pris bonne note des remarques sur la justice des mineurs, quant au fait que les enfants qui commettent des délits sont quand même des enfants. Mme de Boer-Buquicchio a en conclusion cité l'une de ses phrases favorites: «les enfants ne sont pas des mini êtres humains avec des mini droits, ce sont des personnes vulnérables avec des maxi besoins et qui nécessitent une maxi attention».

MME RESTREPO a quant à elle relevé l'importance des programmes de prévention, qui font partie intégrante des mesures favorisant le contrôle, par les enfants, de leur propre sort: en effet, en leur apprenant à repérer les personnes pouvant constituer un risque pour eux, on prévient les violences. Il importe aussi de renforcer les services psychologiques destinés à venir en aide aux victimes, a souligné Mme Restrepo, ajoutant que les programmes aidant les parents et les enseignants à mieux tenir compte des droits des enfants sont aussi utiles. En outre, le secteur privé, au sens large – chauffeurs de taxis, hôteliers, etc. – doivent être associés aux mesures de lutte contre la violence à l'encontre des enfants.

La représentante de PLAN International a souligné que les mesures les mieux à même de changer les perceptions quant à la nocivité de certaines pratiques tiennent à une meilleure prise de conscience des droits dont jouissent les enfants. L'éducation des enfants doit également être orientée sur des schémas moins compétitifs. Il faut réfléchir à la manière d'atteindre tous les secteurs, formels et informels, a-t-elle conclu.

__________

La documentation relative à la présente session du Conseil, notamment l'ordre du jour annoté (A/HRC/13/1), est disponible sur la page Internet consacrée à la documentation de la treizième session du Conseil: http://www2.ohchr.org/english/bodies/hrcouncil/13session/reports.htm


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

HRC10/024F