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LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LES QUESTIONS DE RACISME, DE DISCRIMINATION RACIALE ET DE XÉNOPHOBIE

Compte rendu de séance
Il tient un dialogue interactif avec la Présidente-Rapporteuse du Groupe de travail d'experts sur les personnes d'ascendance africaine et débat des «normes complémentaires»

Le Conseil des droits de l'homme a tenu, cet après-midi, un dialogue interactif avec la Présidente-Rapporteuse du Groupe de travail d'experts sur les personnes d'ascendance africaine, Mme Mirjana Najcevska, avant de tenir son débat général sur les questions relatives au racisme, à la discrimination raciale, à la xénophobie et à l'intolérance qui y est associée. Il a été saisi dans ce cadre des rapports du Groupe de travail intergouvernemental sur l'application de la Déclaration et du Programme d'action de Durban et du Comité spécial sur l'élaboration de normes complémentaires.

Le rapport du Groupe de travail d'experts sur les personnes d'ascendance africaine porte sur la visite que le Groupe a effectuée en Équateur du 22 au 26 juin 2009. La Présidente-Rapporteuse a félicité l'Équateur pour son attitude ouverte au dialogue et estimé que le pays est conscient des problèmes et résolu à lutter contre la discrimination et le racisme. Le rapport du Groupe de travail sur sa visite aux États-Unis sera présenté au Conseil lors de sa session de septembre. L'Équateur est intervenu en tant que pays concerné. Les représentants des États-Unis, du Soudan (au nom du Groupe arabe), de la Libye et du Mouvement international de la jeunesse et des étudiants pour les Nations Unies ainsi que le Défenseur du peuple de l'Équateur sont intervenus dans le cadre du dialogue interactif avec Mme Najcevska.

Présentant le rapport du Comité spécial sur l'élaboration de normes complémentaires, M. Idriss Jazaïry a indiqué qu'après deux ans passés au poste de Président-Rapporteur du Comité spécial, il avait le sentiment d'une tâche non accomplie et pense que cet état de fait est dû aux positions extrêmement polarisées au sein du Comité spécial, ce qui est semble être imputable aux différences fondamentales de perception quant à la notion de «lacune» justifiant la nécessité de rédiger des normes complémentaires. M. Mohamed Siad Doualeh a pour sa part présenté le rapport du Groupe de travail intergouvernemental sur l'application de la Déclaration et du Programme d'action de Durban, qu'il préside.

Près d'un an après la Conférence d'examen de Durban, les délégations ont constaté que, dans l'ensemble, les résultats de la lutte contre la discrimination raciale restent très modestes, comme en témoigne la persistance de plusieurs pratiques discriminatoires, alors que la période écoulée depuis la Conférence de Durban de 2001 a vu l'avènement de nouvelles formes de racisme. Face aux nouvelles formes de racisme et de discrimination raciale, les délégations se sont interrogées et prononcées sur la nécessité d'élaborer des normes complémentaires. Plusieurs intervenants ont souligné que de telles normes permettraient de répondre aux manifestations contemporaines de racisme, de renforcer les actions entreprises pour éradiquer ces fléaux et de réparer les injustices subies par certaines populations. Les États ont alors été appelés à s'engager dans les travaux du Comité spécial sur l'élaboration de normes complémentaires. D'autres intervenants ont en revanche émis des inquiétudes quant au concept de diffamation des religions et se sont opposés à l'élaboration d'un instrument fondé sur ce concept. L'expérience des législations nationales qui appliquent des concepts tels que la diffamation de la religion suggère qu'un éventuel instrument international sur la diffamation de la religion ne ferait qu'accroître l'oppression contre les minorités religieuses, a-t-il été souligné. Une ONG a mis en garde contre le danger de réécrire le droit international relatif aux droits de l'homme dans un sens qui soumette la liberté d'expression à l'interprétation du sacré par l'État, et a souligné l'importance de reconnaître la complémentarité de la liberté de religion et de la liberté d'expression.

Les délégations des États suivants ont fait des déclarations: Espagne (au nom de l'Union européenne), Nigéria (au nom du Groupe africain), Pakistan (au nom de l'OCI), Suisse (au nom de plusieurs autres pays), Indonésie, Argentine (au nom du Brésil), Chine, Qatar, Arabie saoudite, Égypte, Fédération de Russie, Cuba, Norvège, États-Unis, Afrique du Sud, Algérie, Venezuela, Koweït, Singapour, Saint-Siège, Libye, Arménie, Union africaine, Azerbaïdjan, Iran, Syrie, Iraq et Turquie.

De très nombreuses organisations non gouvernementales ont également participé à ce débat: Union des juristes arabes (au nom égalementde l'Organisation internationale pour l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale et de l'Union des avocats arabes); Rencontre africaine pour la défense des droits de l'homme (au nom également de Interfaith International et Al-Hakim Foundation); Nord-Sud XXI; Fraternité Notre Dame; Becket Fund for Religious Liberty; Comité international pour le respect et l'application de la charte africaine des droits de l'homme et des peuples; Interfaith International; Union internationale humaniste et laïque; Charitable Institute for Protecting Social Victims; Organization for Defending Victims of Violence; Institute for Women Studies and Research; Indian Council of South America; United Nations Watch; Cairo Institute for Human Rights Studies; Association pour l'éducation d'un point de vue mondial; European Union of Public Relations; Commission to Study the Organization of Peace; Mouvement international contre toutes les formes de discrimination; Indian Council of Education; Mouvement international de la jeunesse et des étudiants pour les Nations Unies; Pax Romana; Union mondiale pour le judaïsme libéral; Libération; et le Mouvement indien «Tupaj Amaru».


Demain matin, à 9 heures, le Conseil entamera l'examen des questions relatives à l'assistance technique et au renforcement des capacités en portant son attention sur le rapport de l'expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Somalie, avec lequel il tiendra un dialogue interactif.


Examen du rapport du Groupe de travail d'experts sur les personnes d'ascendance africaine

MME MIRJANA NAJCEVSKA, Présidente du Groupe de travail d'experts sur les personnes d'ascendance africaine, a présenté le rapport du Groupe de travail portant sur sa visite en Équateur du 22 au 26 juin 2009. Elle a dans ce contexte tenu à remercier le Gouvernement équatorien de son invitation et de son aide tout au long de cette visite. Elle a salué son attitude ouverte au dialogue, consciente des problèmes et résolue à lutter contre la discrimination et le racisme. Le Groupe de travail est particulièrement impressionné par la nouvelle Constitution, adoptée en 2008, qui permet des avancées notables dans le domaine de la promotion et la protection des droits de l'homme des personnes les plus vulnérables, dont les personnes d'ascendance africaine. Le Groupe de travail se félicite également de la création d'un Groupe pour le développement afro-équatorien.

Aucun pays n'est exempt de racisme, a poursuivi Mme Najcevska, ajoutant qu'en Équateur, le racisme ne se manifeste pas ouvertement, mais est plutôt enraciné dans le passé colonial du pays. Au cours de sa visite, les experts ont constaté que les personnes d'ascendance africaine se sentent discriminées. Les problèmes qu'ils affrontent sont liés notamment au manque d'accès aux services de base, comme le logement, les soins de santé et l'éducation; les taux de chômage et de représentation des personnes d'ascendance africaine au sein des centres de détention sont élevés; et les personnes d'ascendance africaine font parfois l'objet de représentation négative dans les médias. De toutes les questions touchant les personnes d'ascendance africaine, les experts ont constaté que la pauvreté est la plus pernicieuse: ils estiment que le haut degré de pauvreté qui caractérise ces personnes résulte d'une marginalisation historiquement ancrée. La Présidente du Groupe de travail a également attiré l'attention du Conseil sur la situation des femmes d'ascendance africaine, particulièrement touchées par la pauvreté et qui affrontent toute une série de problèmes dans l'accès à la santé et à l'éducation.

Lors de sa visite, le Groupe de travail a constaté les ressources importantes allouées par le Gouvernement aux services sociaux ces deux dernières années, en particulier en faveur des secteurs les plus pauvres de la société. Il reconnaît que ces efforts auront un impact positif sur les personnes d'ascendance africaine. Toutefois, les experts suggèrent de prévoir des investissements spécifiques visant les communautés afro-équatoriennes. Notant par ailleurs la représentation parfois négative des personnes d'ascendance africaine dans les médias, le Groupe de travail recommande au Gouvernement de lutter contre les stéréotypes négatifs et de promouvoir un changement d'attitude au sein de la société. Il souligne le rôle joué par la société civile dans la lutte contre la discrimination et exhorte le Gouvernement à prendre des mesures pour renforcer la participation des organisations et mouvements de personnes d'ascendance africaine. Enfin, l'Équateur est invité à continuer d'adopter une législation qui permet d'éliminer la discrimination structurelle dont a souffert la population équatorienne d'ascendance africaine. À cette fin, le Groupe de travail recommande notamment: l'adoption d'une loi spécifique sur la non discrimination; le lancement d'une campagne de sensibilisation au multiculturalisme; l'adoption de mesures pour combler l'écart au niveau de l'éducation entre personnes d'ascendance africaine et le reste de la population; l'établissement d'un centre d'études afro-équatoriennes; et la création, au sein du Bureau du Médiateur, d'un sous groupe consacré aux questions relatives aux personnes d'ascendance africaine.

Avant de conclure, Mme Najcevska a indiqué que le Groupe de travail avait effectué une visite aux États-Unis en janvier dernier. Le rapport de cette visite sera présenté au Conseil des droits de l'homme lors de sa session de septembre, a-t-elle précisé. Elle a remercié ce pays d'avoir invité le Groupe de travail, ainsi que de son excellente coopération avec les experts lors de la visite.

Le rapport du Groupe de travail d'experts sur les personnes d'ascendance africaine (A/HRC/13/59) décrit la visite qu'il a réalisée en Équateur au mois de juin 2009.

Déclaration du pays concerné par le rapport du Groupe de travail

M. MAURICIO MONTALVO (Équateur) s'est félicité que le Groupe de travail ait reconnu l'engagement et la détermination de son pays dans la lutte contre le racisme et la discrimination. Il s'est également félicité que le Groupe de travail ait salué, non sans éloges, la Loi sur les droits collectifs des Afro-équatoriens adoptée en 2006 – laquelle a permis la création du Conseil national de développement afro-équatorien. En octobre 2008, a poursuivi le représentant équatorien, l'Équateur a adopté sa nouvelle Constitution, qui reconnaît le caractère plurinational de l'État. Le représentant a par ailleurs relevé que le Groupe de travail a attiré l'attention sur un certain nombre de problèmes que, selon ce Groupe, rencontre l'Équateur en ce qui concerne sa population d'ascendance africaine – problèmes sur lesquels le pays est actuellement en train de travailler. L'Équateur a pris bonne note des recommandations du Groupe de travail, qui sont sérieusement examinées par le Gouvernement et sont certainement d'une grande utilité pour promouvoir et améliorer la condition de la population afro-équatorienne, a indiqué le représentant. Il a notamment précisé que le Gouvernement œuvre à l'application de mesures d'action affirmative dans le domaine de l'éducation, en faveur des jeunes afro-équatoriens. Il s'efforce également de mettre en place des mécanismes d'inclusion et d'accès à l'emploi en faveur des Afro-équatoriens.

Débat interactif

MME ANNA CHAMBERS (États-Unis) a dit apprécier le travail du Groupe de travail et l'a remerciée de sa visite dans son pays en janvier 2010, visite qui a été l'occasion d'évoquer avec franchise les succès et les difficultés rencontrés par les États-Unis dans leur action en faveur des personnes d'ascendance africaine. Les États-Unis apprécient le professionnalisme des membres du Groupe de travail et rendent hommage en particulier au génie créatif et intellectuel du Professeur Rex Nettleford, membre du Groupe de travail, malheureusement décédé durant sa visite aux États-Unis.

M. HAMZA AHMED (Soudan au nom du Groupe arabe) a déploré la persistance, dans certains pays, d'une discrimination au quotidien qui doit être éliminée, de même que les sentiments qui la nourrissent. La Déclaration et le Programme d'action de Durban mentionnent explicitement la nécessité de lutter contre toutes les formes de discrimination et de racisme, a observé le représentant, qui a déploré à cet égard le manque de progrès du Groupe de travail chargé d'élaborer des normes complémentaires à la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Le Groupe arabe estime que le projet soumis à ce sujet par le Groupe africain constitue une bonne base de travail. Le représentant a d'autre part déploré la décision de la Suisse d'interdire la construction de minarets, estimant que cette décision reflète des prises de position très inquiétantes de la part de groupes aux idées extrémistes. Le Groupe arabe demande donc à la Suisse de revenir sur cette décision. Le représentant a par ailleurs dénoncé les tentatives d'Israël de séparer les populations juive et arabe, ainsi que l'accaparement par ce pays de lieux saints musulmans. Ce comportement nourrit la haine et la discrimination et est une contravention flagrante aux grands principes défendus par les Nations Unies.

M. ADEL SHALTUT (Libye) a pris note des recommandations formulées par le Groupe de travail à l'attention de l'Équateur. Il a constaté que le Gouvernement équatorien a pris des mesures importantes en faveur des personnes d'ascendance africaine, en témoignent son initiative pour le développement global de la population d'ascendance africaine et sa campagne de lutte contre l'analphabétisme. Il a appuyé les recommandations du Groupe de travail portant sur l'adoption d'une loi sur la non-discrimination. Il a également apprécié l'accent mis sur la situation des femmes d'ascendance africaine.

M. T. GUTIERREZ (Défenseur du peuple de l'Équateur) a remercié le Groupe de travail pour la présentation de son rapport sur sa visite en Équateur. Il a relevé que ce rapport reconnaît les efforts déployés par le Gouvernement équatorien afin de mettre en place les conditions propres à surmonter les situations sociales d'origine historique qui limitent la pleine participation de la population noire dans la vie du pays dans des conditions de non-discrimination et de plein respect des droits humains individuels et collectifs de cette population. L'Équateur est un pays ouvert et pluraliste, a-t-il souligné, faisant observer que la nouvelle Constitution reconnaît et protège cette diversité en promouvant des mécanismes d'intégration interculturelle. Il n'en demeure pas moins vrai que, comme le signale le rapport du Groupe de travail d'experts, persistent des éléments troublants liés à la pauvreté et à l'ignorance d'importants secteurs de la population, y compris la population d'origine noire. Le bureau du Défenseur du peuple est en train de préparer pour les prochains mois une campagne contre la discrimination qui sera appuyée par le Programme des Nations Unies pour le développement, a indiqué le Défenseur du peuple de l'Équateur; dans ce contexte, a-t-il précisé, sera soulignée la discrimination pour des raisons ethniques, en particulier contre la population noire.

M. JAN LONN (Mouvement international de la jeunesse et des étudiants pour les Nations Unies) a félicité les membres du Groupe de travail de leurs travaux très utiles et à ce titre très bien accueillis par les organisations non gouvernementales. Le représentant a voulu savoir quelles mesures ont été prises pour consulter les bureaux nationaux du Haut Commissariat des droits de l'homme au moment de l'élaboration du programme 2011 du Groupe de travail, demandant aussi quelles ressources supplémentaires pourraient être dégagées pour appuyer son action.

Conclusion

MME MIRJANA NAJCEVSKA, Présidente du Groupe de travail d'experts sur les personnes d'ascendance africaine, s'est réjouie que le Gouvernement d'Équateur compte prendre des mesures pour mettre en œuvre certaines des recommandations formulées par le Groupe de travail. Elle a rappelé que la partie la plus délicate est toujours de mettre en œuvre les législations, les politiques et les mesures. D'autre part, Mme Najcevska s'est dite attristée par le décès de son collègue, l'expert M. Nettleford. Elle a souligné que ses contributions ont été hautement reconnues. Ce que le Groupe de travail peut faire aujourd'hui de mieux pour lui rendre hommage est de mettre en œuvre ses recommandations et défendre l'esprit de ses recommandations. Se tournant ensuite vers le Médiateur du peuple de l'Équateur, elle l'a encouragé à travailler à la mise en place d'une unité spécifique qui permettra d'assurer une meilleure protection des droits de la population afro-équatorienne.


Le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance qui y est associée

Présentations de rapports

M. MOHAMMED SIAD DOUALEH, Président du Groupe de travail intergouvernemental sur la mise en œuvre effective de la Déclaration et du Programme d'action de Durban, a présenté au Conseil des droits de l'homme le rapport de la septième session du Groupe de travail. La finalisation du document a renforcé l'engagement des États dans la lutte contre le racisme, a estimé le Président du Groupe de travail. Le rapport présente le cadre le plus sérieux à l'heure actuelle pour lutter contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance. Ces phénomènes concernent des millions de personnes de façon quotidienne et leur dénient les principes de base de l'égalité. La haine ethnique peut détruire les communautés et les vies individuelles.

Le président du Groupe de travail a rappelé que le Groupe avait tenu sa septième session du 5 au 16 octobre 2009, six mois après la Conférence d'examen de Durban et l'adoption de son rapport final. Le Groupe de travail a décidé d'accorder suffisamment de temps aux parties prenantes et États membres afin qu'ils fassent part des expériences et bonnes pratiques dans la mise en œuvre de la Convention et de la Déclaration et du Programme d'action de Durban. Il a été convenu qu'au début de la session le Groupe de travail examinerait les progrès observés depuis les sessions précédentes. M. Siad Douale a souligné l'importance d'élaborer des plans de lutte contre la discrimination et l'intolérance, et que la participation de tous est indispensable. Le Groupe de travail a invité les organes de contrôle concernés à augmenter leur participation au cours des sessions du Groupe de travail.

En conclusion, le Président du Groupe de travail a indiqué que le Groupe de travail s'était engagé à améliorer ses méthodes de travail. Il a, à cet égard, demandé au Secrétariat de distribuer la documentation pertinente au moins six mois avant le début des sessions afin d'avoir une bonne synergie avec les parties prenantes et les autres mécanismes de défense des droits de l'homme. Le Groupe de travail s'est engagé à maintenir un dialogue ouvert avec les experts en matière de migrations d'emploi et de travail des enfants. En tant que président, il a été demandé à M. Siad Douale d'élaborer des conclusions, et il a l'intention de lancer des consultations à cet égard dès que possible. Il a espéré que le travail important du Groupe de travail se poursuivra dans un esprit de dialogue et de consensus.

Le Conseil est saisi du rapport de la septième session (octobre 2009) du Groupe de travail sur l'application effective de la Déclaration et du Programme d'action de Durban (A/HRC/13/60, à paraître en français).

M. IDRISS JAZAÏRY, Président-Rapporteur du Comité spécial sur l'élaboration de normes complémentaires, a présenté le rapport du Groupe concernant sa deuxième session, qui s'est tenue à Genève du 19 au 30 octobre 2009 en indiquant que cette session avait fourni l'occasion de consolider l'élan suscité par la Conférence d'examen de Durban et de se concentrer sur le défi consistant à traiter plus efficacement du racisme, de la discrimination raciale et de la xénophobie, y compris sous leurs formes contemporaines. M. Jazaïry a indiqué que, conformément à la feuille de route sur l'élaboration de normes complémentaires adoptée par consensus à l'issue de la première session du Comité, il avait préparé un document final compilant les contributions reçues des États Membres et des groupes régionaux, en se fondant sur une approche orientée vers les victimes. Ce document était censé servir de base pour les discussions durant la deuxième session du Comité, mais tel n'a pas été le cas, a poursuivi le Président-Rapporteur du Comité spécial, expliquant que des délégations avaient exprimé leur insatisfaction face à ce document final: certaines attendaient de lui qu'il présente un projet d'instrument devant être négocié durant cette seconde session; d'autres délégations estimaient que les questions qu'elles jugeaient importantes n'avaient pas été dûment reflétées dans le document final. Aussi, M. Jazaïry a-t-il indiqué avoir alors décidé de changer d'approche afin de surmonter ces réserves en consultant intensivement les États Membres pour identifier une nouvelle liste de questions à discuter durant la deuxième session.

Après plusieurs consultations, cette nouvelle liste fut élaborée et les questions qui y figuraient ont été examinées, à savoir: plaidoyer et incitation à la haine raciale, ethnique, nationale et religieuse; législation anti-discrimination complète; discrimination fondée sur la religion ou la croyance; mise en place, désignation ou maintien de mécanismes nationaux ayant compétence pour protéger contre la discrimination et prévenir la discrimination; génocide; crimes de haine; éducation aux droits de l'homme; mise en œuvre des normes existantes; impunité pour les actes de racisme, de discrimination raciale et de xénophobie; fourniture d'une aide juridique gratuite aux victimes; mesures intérimaires dans l'intérêt des victimes; dialogue interculturel et interreligieux; procédures de surveillance du Comité pour l'élimination de la discrimination raciale; non-discrimination dans la fourniture d'une aide aux victimes de catastrophes naturelles; protection des migrants contre les pratiques racistes, discriminatoires et xénophobes; protection des réfugiés, des personnes retournant dans leur pays et des personnes déplacées internes contre les pratiques racistes et discriminatoires; profilage racial, ethnique et religieux et mesures de lutte contre le racisme; racisme dans les technologies modernes d'information et de communication; et réparation et recours pour les victimes de racisme, de discrimination raciale et de xénophobie.

M. Jazaïry a indiqué qu'après deux ans au poste de Président-Rapporteur du Comité spécial, il a le sentiment d'une tâche non accomplie et pense que cet état de fait est dû aux positions extrêmement polarisées au sein du Comité spécial, ce qui semble être imputable aux différences fondamentales de perception quant à la notion de «lacune» justifiant la nécessité de rédiger des normes complémentaires. Nombreux sont ceux qui pensent que des lacunes existent dans le cadre juridique international actuel en matière de lutte contre le racisme et, selon eux, le mandat du Comité spécial n'est pas de savoir si de telles lacunes existent mais bien d'élaborer les normes complémentaires requises. Pour d'autres, en revanche, étant donné qu'existent déjà de nombreux instruments internationaux couvrant largement le racisme sous toutes ses formes, il n'y a pas de lacune prouvée qui justifierait l'élaboration de nouvelles normes. Du point de vue de ces derniers, les seules lacunes qui existent ont trait au défaut d'application des instruments existants. Analysant ces deux perceptions, M. Jazaïry s'est dit d'avis que la notion de lacune substantielle ne devrait pas préjuger de l'existence d'un vide juridique absolu. Bien entendu, en l'absence d'un vide absolu, aucune lacune ne peut être trouvée et donc aucun protocole ne serait nécessaire; mais si cette approche étroite de la notion de lacune avait été appliquée ailleurs, il n'y aurait jamais eu aucun protocole pour aucun autre instrument international de droits de l'homme, a fait observer le Président-Rapporteur du Comité spécial.

M. Jazaïry a souligné que les nouvelles normes devant être incluses dans les protocoles que les résolutions du Conseil appellent de leurs vœux seraient d'une pertinence toute particulière pour les formes contemporaines de racisme qui sont devenues un défi majeur dans les pays industrialisés, en particulier en Europe. En conclusion, il a suggéré que son successeur à la présidence du Comité spécial soit désigné dès après la présente session du Conseil plutôt que d'attendre la prochaine réunion du Comité, en novembre 2010. Il a également invité toutes les parties à accorder à son successeur l'espace qui ne lui a pas été accordé, à lui, pour exercer une véritable direction intellectuelle et à l'investir de toute leur confiance afin que le Comité spécial parvienne à un résultat fructueux.

Le Conseil est saisi du rapport concernant la deuxième session (octobre 2009) du Comité spécial ayant pour mandat d'élaborer des normes complémentaires (A/HRC/13/58 et A/HRC/13/CRP.1 - ce dernier en anglais uniquement) au sujet du suivi et de la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d'action de Durban.

Autres rapports

Au titre de ce point de l'ordre du jour, le Conseil est en outre saisi du rapport de la Haut-Commissaire sur l'application de la résolution du Conseil sur la «Lutte contre la diffamation des religions» (A/HRC/13/57), qui contient des informations sur les mesures prises pour faire face aux actes de violence, aux pratiques discriminatoires, au profilage, à la stigmatisation, aux stéréotypes désobligeants fondés sur la religion ou la conviction, à la profanation des lieux de culte et de spiritualité, aux actes visant des symboles religieux, à l'incitation à la haine religieuse et aux cas d'intolérance religieuse, notamment d'islamophobie et d'antisémitisme. Le présent rapport contient des informations fournies par des États parties et des organisations régionales.

Débat général

MME LORETTA CARRILLO MODDERMAN (Espagne au nom de l'Union européenne) a affirmé que l'Union européenne était résolue à lutter contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance qui y est associée. Le racisme prend plusieurs formes, a-t-elle poursuivi, et affecte de nombreuses personnes partout dans le monde. L'Union européenne condamne toute tentative de différencier, exclure ou privilégier sur la base de la couleur, de l'orientation sexuelle, du sexe, de l'âge, de l'ascendance, de l'ethnie ou de la nationalité; elle invite tous les États à examiner les meilleures pratiques de leur région respective; au niveau international, elle demande aux États parties à la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale de s'engager à mettre en œuvre les dispositions de ce texte; elle invite enfin les États qui ne l'ont pas encore fait à ratifier cette Convention.

En ce qui concerne le travail du Comité spécial sur l'élaboration de normes complémentaires, la représentante de l'Union européenne a relevé l'importance de permettre à tous les États de participer et d'exprimer leurs opinions sur cette question. L'Union européenne est d'avis que les normes complémentaires doivent avant tout servir de guide pour la mise en œuvre des obligations internationales, sans saper ni dupliquer les normes existantes. Toute norme complémentaire devrait répondre à un besoin spécifique identifié par le Comité spécial, dans le cadre d'un processus qui privilégie le consensus, a précisé la déléguée. Mme Carrillo Modderman a regretté, à cet égard, que le rapport de la session d'octobre ne reflète pas exactement les points sur lesquels les délégations se sont entendues. Elle s'est dite déçue que les parties prenantes n'aient pas été consultées dans le processus de révision qui a rompu l'équilibre délicat auquel les délégations étaient parvenues. Elle a réitéré l'opposition de l'Union européenne au concept de «diffamation des religions» et à l'élaboration d'un protocole facultatif reflétant ce concept.

M. OSITADINMA ANAEDU (Nigéria au nom du Groupe africain) s'est félicité des mesures immédiates prises pour mettre en place les dispositions de la Déclaration et du Programme d'action de Durban, saluant le rôle du Groupe de travail intergouvernemental dans ce domaine. Le Groupe africain a apprécié la manière dont les faits ont été présentés par l'ambassadeur M. Siad Douale et a approuvé ses recommandations. Le travail des mécanismes de suivi des Déclaration et Plan d'action de Durban revêt une importance immense pour le Groupe africain, a assuré le représentant nigérian, qui s'est déclaré frappé par le fait qu'aucun progrès n'ait été réalisé en raison du manque de volonté des délégations, et préoccupé par les lacunes identifiées. Le Groupe africain accorde une grande importance à la reconnaissance des manifestations contemporaines du racisme. M. Anaedu a réaffirmé l'engagement du Groupe africain à la réalisation de la vision de la Déclaration des droits des peuples autochtones. Le Groupe africain est ouvert à des consultations avec tous les États membres et parties prenantes sur cette question.

M. ZAMIR AKRAM (Pakistan au nom des États membres de l'Organisation de la Conférence islamique - OCI) a rappelé que l'adoption du document final de la Conférence d'examen de Durban a été l'expression de l'engagement renouvelé de la communauté internationale dans la lutte contre le racisme. Ce document, a-t-il précisé, a apporté une contribution significative en identifiant des nouvelles formes de discrimination et d'intolérance, comme les stéréotypes négatifs et le profilage fondé sur la religion. Ce document a également réaffirmé l'article 4 de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, article relatif à la condamnation de toute propagande. M. Akram a souligné que l'OCI se réjouit de travailler au développement du régime juridique international en la matière et estime que le travail du Comité spécial est, à cet égard, d'une cruciale importance. Sur ce dernier point, il s'est félicité du rapport présenté par M. Jazaïry et estime que ce document reflète bien les propositions des délégations: il constitue par conséquent la version finale pour l'OCI. Par ailleurs, l'OCI regrette que ce rapport n'ait pas été publié dans sa totalité. Pour le représentant, il est en effet regrettable que des rapports qui ne font pas l'objet d'une demande formelle soient publiés dans toutes les langues officielles sans limite budgétaire, tandis que des rapports importants d'organes intergouvernementaux sont confrontés aux obstacles bureaucratiques. S'agissant des travaux futurs du Comité spécial, l'OCI rappelle la nécessité de reconnaître l'importance des manifestations contemporaines de discrimination raciale: la communauté internationale doit, dès lors, travailler sur un Protocole facultatif qui permette de combattre ces manifestations, a souligné M. Akram.

Le représentant pakistanais a enfin fait part de sa préoccupation face aux stéréotypes stigmatisant les musulmans. La diffamation de l'Islam et de ceux qui ont embrassé cette religion continue, sous le couvert de la liberté d'expression, de l'ethos démocratique et séculaire, tant dans le secteur privé que dans le secteur public, a-t-il souligné. Il a fait remarquer à ce propos que ce sont les sociétés qui s'autoproclament tolérantes, civilisées et multiculturelles qui sont victimes de ces attitudes xénophobes. Malheureusement, ces mêmes sociétés refusent de reconnaître et de s'atteler à ce problème, a-t-il ajouté.

MME BARBARA FONTANA (Suisse, au nom de plusieurs autres pays composant le «Groupe transrégional sur les normes complémentaires») a indiqué ne pas être convaincue de la nécessité d'élaborer des normes complémentaires sous forme d'un protocole additionnel, à ce stade. Tout en le disant disposé à travailler sur des questions telles que la discrimination fondée sur la religion ou la conviction, la représentante a souligné que le «Groupe transrégional» n'était pas prêt à engager le débat sur certaines idées lancées dans ce forum et dans d'autres, selon lesquelles les religions seraient des sujets de droits de l'homme. Le Groupe estime qu'il est prématuré et controversé d'envisager l'élaboration d'un document juridiquement contraignant, a-t-elle ajouté. Il faudrait plutôt traiter des importantes questions de fond qui sont ici en jeu en adoptant un processus davantage consensuel, a-t-elle affirmé.

M. DICKY KOMAR (Indonésie) a réaffirmé le soutien de l'Indonésie, pays multiethnique et multireligieux, à la Déclaration et au Programme d'action de Durban, tout en soulignant les difficultés auxquelles leur mise en œuvre est confrontée. Il est nécessaire pour ce faire de créer des partenariats et une coopération entre les mécanismes internationaux des droits de l'homme, les États et les organisations des droits de l'homme. Le délégué indonésien a fait remarquer que son pays avait adopté les recommandations du rapport destinées aux États membres en incorporant des mesures antidiscrimination dans son Plan d'action national et dans sa législation, notamment sa loi anti-discrimination votée en 2008. L'acceptation de ce projet de loi n'est qu'un des multiples exemples de l'alignement de la législation indonésienne sur le droit international, a déclaré le représentant. Ce dernier a demandé des précisions au président du Groupe de travail sur les conditions de la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d'action de Durban au niveau national, étant donné que les États membres sont souvent confrontés à des défis qui leur sont propres. Il a également demandé au Comité spécial sur l'établissement de normes complémentaires de jouer un rôle important en définissant de manière plus précise les contours du débat sur les questions religieuses.

M. SEBASTIÁN ROSALES (Argentine, s'exprimant également au nom du Brésil) a réaffirmé l'engagement des deux pays à la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d'action de Durban. Il a rappelé que le Groupe de travail intergouvernemental sur l'application effective de la Déclaration et du Programme d'action de Durban a été créé pour identifier les moyens de mieux lutter contre le racisme, la discrimination raciale et la xénophobie. Tant dans le processus d'examen de Durban en 2009 que dans le cadre du Groupe de travail, les délégations ont la possibilité d'exprimer leurs opinions et de suggérer des moyens d'améliorer le travail de ce mécanisme. Le représentant argentin a souligné que sa délégation et celle du Brésil avaient participé activement aux débats et fait des propositions pour améliorer le Groupe de travail. Il s'est réjoui que ces contributions figurent dans son rapport final et a espéré qu'elles seront mises en œuvre à la prochaine session du Groupe de travail.

M. KE YOUSHENG (Chine) a affirmé que le Groupe de travail intergouvernemental sur l'application de la Déclaration et du Programme d'action de Durban était un outil essentiel à la disposition du Conseil. Historiquement, le racisme est lié à l'esclavage et découle de cette pratique, a rappelé le représentant. La protection et la promotion des droits de l'homme doivent être intégrales et équilibrées; il faut veiller à ne pas mettre l'accent sur certains droits en en éludant d'autres. Les êtres humains naissent tous égaux en dignité et en droit; or le racisme bafoue tous les droits de l'homme, a souligné le représentant chinois. Depuis la Conférence de Durban, en 2001, la communauté internationale a pris certaines mesures en matière de lutte contre le racisme et la discrimination raciale, mais la situation est loin d'être parfaite, a fait observer le représentant chinois. En effet, la haine raciale persiste de par le monde et la xénophobie et la discrimination contre les migrants continuent d'exister, a-t-il souligné.

M. KHALID FAHAD AL-HAJRI (Qatar) s'est félicité du rapport du Comité spécial sur les normes complémentaires et a insisté sur le fait que la Déclaration et le Programme d'action de Durban sont des éléments importants pour renforcer le dialogue entre les cultures et les religions. Il faut intensifier les campagnes médiatiques et les campagnes de sensibilisation contre les menaces visant les groupes confessionnels, a prôné le représentant du Qatar. Ce dernier a fermement condamné les actes de violence et d'incitation à la haine motivés par la religion de leurs victimes. Le représentant qatarien s'est également dit préoccupé par le fait que soient véhiculées des images stéréotypées des religions qui favorisent la violence. Si la volonté politique existe et que règne un climat idoine, on pourra réellement promouvoir la liberté de religion et de conviction, a-t-il estimé.

M. KHALID MOHAMMAD KARAKUTLY (Arabie saoudite) a regretté que les incidents racistes et de discrimination raciale vont croissant dans de nombreuses régions du monde, d'où la nécessité de prendre des mesures pour contrer ces phénomènes. Il a tout particulièrement déploré que des groupes politiques et médiatiques véhiculent une image négative des religions. Il a rappelé que son pays attachait une grande importance à la lutte contre la discrimination raciale. L'Arabie saoudite interdit la création d'organisations à caractère raciste; toute personne publiant et diffusant du matériel incitant à la haine est sanctionnée, a-t-il insisté. Toute personne est considérée sur un pied d'égalité en Arabie saoudite, a ajouté le représentant saoudien, qui a conclu son intervention en soulignant l'importance d'encourager le dialogue entre toutes les cultures et religions afin de promouvoir la tolérance.

MME MONA ELBAHTIMY (Égypte) a souligné que la lutte contre le racisme constitue une priorité pour tous les pays africains. Il convient de mobiliser toutes les ressources politiques nécessaires pour lutter contre la résurgence du racisme. Si chacun a le droit d'avoir une opinion, il faut se souvenir que chacun a également des devoirs et des responsabilités, a rappelé la représentante égyptienne. Elle a fait part de son inquiétude face aux stéréotypes négatifs associés aux religions qui empêchent l'exercice des droits de l'homme dans ce domaine. Elle a estimé que les ateliers que le Haut Commissariat aux droits de l'homme doit organiser pour parvenir à une meilleure compréhension des cadres législatifs, des pratiques judiciaires et des politiques nationales concernant le concept d'incitation à la haine, seront utiles pour évaluer les lacunes existantes, normatives ou relatives à la mise en œuvre, et contribuer aux efforts permettant de renforcer l'efficacité des instruments juridiques internationaux existants.

M. ROMAN KASHAEV (Fédération de Russie) s'est étonné que soixante-cinq ans après la défaite du nazisme, des voix s'élèvent encore pour justifier les actes des tenants de cette doctrine. De nos jours, certaines conditions favorisent les actes de nature fasciste et nazie, cela ne peut que susciter l'inquiétude, a ajouté le représentant. La Russie déplore la résurgence en Europe d'organisations néofascistes et néonazies, coupables d'actes contraires à l'ordre public, a poursuivi le représentant russe. Il a estimé que le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme doit faire en sorte que l'on n'admette plus ce genre de manifestations. Il a demandé au Rapporteur spécial et au Conseil des droits de l'homme de prendre toutes les mesures qui s'imposent à cet égard. Le représentant a espéré que la Déclaration et le Programme d'action de Durban fourniront des instruments de lutte contre la résurgence de ces manifestations néfastes et que le Conseil des droits de l'homme jouera un rôle prépondérant dans la lutte contre le racisme.

M. JUAN ANTONIO QUINTANILLA ROMÁN (Cuba) a affirmé que la démocratie et la réalisation effective des droits de l'homme ne peuvent coexister avec le racisme et la discrimination raciale. Il a souligné qu'il n'existe aucune race supérieure, mais bien une seule et indivisible race humaine. Cependant, des manifestations de discrimination persistent sur la base de la couleur de peau, de l'ethnie, de la nationalité ou de la religion, a-t-il constaté. Plus préoccupant encore, pour la délégation cubaine, l'émergence de nouvelles et perfides manifestations de racisme et de discrimination raciale apparaissent dans diverses parties du monde, et en particulier dans les pays du Nord. Ces pays, a poursuivi le représentant cubain, abritent des associations et des partis politiques qui se fondent sur les discriminations raciales et qui abusent de la liberté d'expression au détriment de la dignité des autres. Le délégué a également déploré que les nouvelles technologies comme Internet soient utilisées pour diffuser des idées fondées sur la supériorité et la haine raciale. Selon lui, il manque à plusieurs puissances occidentales la volonté politique de progresser sur la voie tracée par la Conférence de Durban. Appuyant le travail du Comité spécial sur l'élaboration de normes complémentaires, il a invité les pays, en particulier ceux du Nord, à se joindre à ses travaux.

M. GEIR SJØBERG (Norvège) a rappelé que le concept de non-discrimination se trouve au cœur des droits de l'homme, la promotion de la non-discrimination étant l'un des buts des Nations Unies, conformément à l'article premier de la Charte. La discrimination nourrit la méfiance, le ressentiment, la violence, le crime et l'insécurité et n'est d'aucun bénéfice pour la société, a-t-il poursuivi. Il a souligné que la Norvège restait pleinement engagée en faveur de la lutte contre le racisme, la discrimination raciale et la xénophobie et accorde une grande importance au suivi de la Déclaration et du Programme d'action de Durban ainsi qu'au suivi du document final de la Conférence d'examen de Durban. Il a souligné que le Gouvernement norvégien était en train d'intensifier ses activités dans ce domaine par le biais du plan d'action visant la promotion de l'égalité et la prévention de la discrimination ethnique (2009-2012). Il a par ailleurs fait observer que durant la dernière décennie, les canaux de communication, au lieu de s'élargir, ont été limités – une décennie empreinte d'une rhétorique du «eux» contre «nous», une version en noir et blanc de la vision du monde, ce qui a rendu le monde encore plus dangereux. Ce qu'il faut, c'est davantage de canaux permettant d'entrer en contact, davantage de discussions et davantage de forums pour le dialogue, a souligné le représentant norvégien.

MME EILEEN CHAMBERLAIN DONAHOE (États-Unis) s'est déclarée consciente que la société américaine, fière de sa diversité, n'est pas à l'abri de l'intolérance et des discriminations. Le Conseil des droits de l'homme et le Comité spécial sur l'élaboration de normes complémentaires apporteront une contribution importante à la lutte contre l'intolérance et les discriminations, notamment raciales. Il ne s'agit pas seulement de rédiger des lois mais d'éliminer le racisme au terme d'une lutte de tous les instants. Le Ministère américain de la justice mène cette lutte quotidiennement. En octobre 2009, le Président Obama a signé une «loi de protection contre les crimes de haine» qui élargit la portée de la loi fédérale aux crimes motivés par la haine et supprime les entraves aux enquêtes sur de tels délits. Des études de cas sont menées par le Ministère sur les discriminations en matière d'emploi et de logement.

M. LUVUYO NDIMENI (Afrique du Sud) a regretté que peu de progrès aient été accomplis par le Comité spécial sur l'élaboration de normes complémentaires, en dépit des efforts inlassables de son Président-Rapporteur. Il a fait observer que le message transmis par le Conseil aux victimes de racisme et de discrimination raciale montre malheureusement à ces derniers que leur situation n'est pas reconnue. À l'heure où la communauté internationale célèbre le dixième anniversaire de l'adoption de la Déclaration et du Programme d'action de Durban, le représentant sud-africain a exhorté le Conseil à supprimer les phénomènes racistes et discriminatoires dans toutes les sociétés. Le représentant sud-africain a souligné à quel point il importe que tous les États s'engagent dans le dialogue, en dépit de leurs divergences, apprennent les uns des autres et parviennent à des compromis.

M. BOUALEM CHEBIHI (Algérie) a salué la dextérité avec laquelle l'ambassadeur Siad Douale a dirigé les travaux de la septième session du Groupe de travail sur la mise en œuvre effective de la Déclaration et du Programme d'action de Durban mais a regretté que la durée consacrée aux travaux de fond ait souffert des blocages liés à la désignation du Président-Rapporteur. Les conclusions et recommandations adoptées par le Groupe de travail bénéficient du soutien de l'Algérie, en particulier celles liées à l'organisation de ses futures sessions. Celles-ci devront mettre l'accent sur les bonnes pratiques en matière de mise en œuvre de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, de la Déclaration et du Plan d'action de Durban et du Document final de la Conférence d'examen de Durban. La délégation algérienne, qui a activement participé aux discussions du Groupe de travail sur les thèmes des migrants, des enfants et de l'emploi dans le cadre de la mise en œuvre de la Déclaration et le Programme d'action de Durban, examinera de manière constructive les conclusions et recommandées par la présidence en la matière. Concernant les travaux du Comité spécial sur l'élaboration de normes internationales complémentaires en matière de racisme, la délégation algérienne a insisté sur la nécessité de répondre à l'instruction contenue dans le paragraphe 19 du programme d'action de Durban de renforcer et d'actualiser les instruments internationaux en matière de racisme par l'élaboration de normes complémentaires visant à appréhender les manifestations contemporaines du racisme. Le représentant a enfin regretté qu'en dépit des efforts du président du Comité spécial, la mise en œuvre du mandat de ce mécanisme ait été l'otage de la polarisation liée au déni de l'existence de lacunes de protection en matière de manifestations contemporaines de racisme et aux différences fondamentales dans l'interprétation de la notion de «lacunes de protection».

M. EDGARDO TORO CARREÑO (Venezuela) a souligné que le Groupe de travail d'experts sur les personnes d'ascendance africaine, le Groupe de travail intergouvernemental sur l'application de la Déclaration et du Programme d'action de Durban et le Comité spécial sur l'élaboration de normes complémentaires effectuent un travail de grande valeur en faveur de la lutte contre le racisme et la discrimination raciale. Il a insisté sur l'impérieuse nécessité qu'il y a, selon son pays, à élaborer des normes complémentaires afin de renforcer les actions entreprises pour éradiquer ces fléaux.

M. JARRAH JABER AL-SABAH (Koweït) a dit partager l'opinion d'autres délégations concernant la nécessité d'œuvrer pour la tolérance religieuse et de lutter contre la diffamation des religions. Le Koweït estime nécessaire de renforcer les efforts nationaux pour lutter contre la discrimination raciale et le racisme. Le Koweït se félicite des efforts déployés par la communauté internationale à cet égard. Le pays s'est, lui-même, résolument engagé dans ce domaine aux plans national, régional et international. Enfin, le représentant du Koweït a salué les projets visant le renforcement et l'échange entre les cultures, ainsi que les dialogues entre les civilisations.

M. YORK CHOR TAN (Singapour) a indiqué que des ressortissants du monde entier vivent et travaillent à Singapour, un pays qui préconise l'harmonie raciale et religieuse ainsi que la tolérance dans les espaces communs. Singapour organisera les Jeux olympiques de la jeunesse du 14 au 26 août 2010 et accueillera à cette occasion 5000 jeunes du monde entier. Le Gouvernement entend accompagner les Jeux d'un vaste programme culturel et informatif contre le racisme à destination de la jeunesse. Le délégué de Singapour a insisté sur le rôle du sport dans le dépassement des différences ethniques et religieuses.

M. SILVANO TOMASI (Saint-Siège) a souligné que les cas de plus en plus fréquents de ridiculisation des religions, de manque de respect à l'égard de personnalités et symboles religieux, de discriminations voire de meurtres d'adeptes de religions minoritaires, ainsi que la considération négative généralisée dont fait l'objet la religion dans le domaine public, portent préjudice à la coexistence pacifique et heurtent la sensibilité de pans considérables de la famille humaine. La protection du droit à la liberté religieuse revêt une importance particulière étant donné que les valeurs religieuses constituent un pont entre et vers tous les droits de l'homme. La dignité humaine, en fait, est enracinée dans l'unité des aspects spirituel et matériel de la personne. L'expérience au regard des législations nationales qui appliquent des concepts tels que la diffamation de la religion suggère qu'un éventuel instrument international sur la diffamation de la religion ne ferait qu'accroître l'oppression contre les minorités religieuses.

M. ADEL SHALTUT (Libye) a observé qu'en dépit des progrès réalisés depuis l'adoption de la Déclaration et du Programme d'action de Durban, le racisme existe toujours. Le représentant a déploré que le peuple palestinien continue de souffrir de l'occupation israélienne. Il a regretté qu'en dépit des instruments signés pour lutter contre le racisme et des nombreuses résolutions adoptées par les Nations Unies, Israël persiste à vouloir créer un État purement juif. Quel type de paix peut-on espérer obtenir face à un tel racisme, s'est-il demandé? Outre Israël, le représentant libyen a également fustigé certaines pratiques de la Suisse et notamment la décision de ce pays d'interdire la construction de minarets. Les minarets, a-t-il expliqué, ont toujours été associés aux mosquées et guident le croyant vers la mosquée. L'interdiction des minarets rend plus difficile d'identifier les lieux de culte, a souligné le représentant expliquant que, par conséquent, les croyants musulmans vivant en Suisse sont privés de leur liberté d'accès à leurs lieux de culte.

MME SATENIK ABGARIAN (Arménie) a affirmé que l'Arménie plaide depuis toujours en faveur de l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale dans toutes les sociétés. La représentante a constaté avec regret l'existence de situations où les pratiques discriminatoires et les menaces de recours à la force ont libre cours. Le génocide se trouve à l'extrémité du spectre des formes de discrimination institutionnalisée, a-t-elle rappelé, tandis que l'impunité risque d'en permettre la réapparition. Le négationnisme est désormais au cœur des discours de haine, s'est alarmée la représentante de l'Arménie, souhaitant que le Conseil demande la rédaction d'un rapport d'analyse des différentes législations nationales et supranationales en matière de lutte contre la négation des crimes contre l'humanité et des génocides.

M. GEORGES-REMI NAMEKONG (Union africaine) a rappelé que la lutte contre le racisme, la discrimination raciale et la xénophobie est l'une des préoccupations majeures de la Commission de l'Union africaine. Le continent africain avait accueilli avec beaucoup d'espoir la Conférence d'examen de Durban, pensant qu'elle renforcerait la Déclaration et le Programme d'action de Durban, a indiqué le représentant; mais force est de constater que les résultats obtenus dans le combat contre la discrimination raciale mené depuis 2001 restent très modestes au vu de la persistance de nombre de pratiques discriminatoires. L'avènement de nouvelles manifestations de racisme et la montée des tendances d'intolérance et d'incitations à la haine dans plusieurs régions du monde viennent confirmer cette réalité. Les hésitations qui continuent de marquer les travaux du Groupe de travail intergouvernemental sur l'application de la Déclaration et du Programme d'action de Durban et du Comité spécial sur l'élaboration de normes complémentaires sont regrettables et inquiétantes, a poursuivi le représentant de l'Union africaine, rappelant que les processus de Durban et de révision de Durban, ainsi que les résolutions de ce Conseil, prescrivent tous l'élaboration de normes complémentaires pour une protection adéquate des victimes du racisme et la préservation de leurs droits. L'Union africaine appelle la communauté internationale à faire de la prochaine Coupe du monde de football, qui se déroulera en Afrique du Sud, l'occasion de transmettre un message de paix et d'acceptation de l'autre.

M. HABIB MIKAYILLI (Azerbaïdjan) a exprimé sa préoccupation face à la montée des actes de discrimination religieuse, en particulier les stéréotypes négatifs visant les religions. Pour le représentant, des mesures devraient être prises au niveau national, mais également au niveau international. Il a, dans ce contexte, apporté le soutien de son pays à la résolution de l'Organisation de la Conférence islamique sur la lutte contre la diffamation des religions. Le délégué a également rappelé que le document final adopté lors de la Conférence d'examen de Durban réaffirme que toute incitation à la haine raciale et religieuse doit être interdite par la loi. Il a soutenu le travail effectué par le Comité spécial sur l'élaboration de normes complémentaires, en particulier concernant les questions de l'occupation étrangère, de l'épuration ethnique, de la protection des réfugiés, des personnes déplacées et de la discrimination fondée sur la religion.

M. ASADOLLAH ESHRAGH JAHROMI (Iran) a estimé que la Conférence d'examen de Durban avait marqué un tournant dans l'engagement de la communauté internationale en faveur de la lutte contre le racisme, les discriminations raciales et la xénophobie. Le représentant a demandé que soient prises des mesures concrètes au niveau national, régional et international dans ce domaine, et a requis une action résolue de la part des membres de la communauté internationale. Le représentant iranien a également déploré la tendance croissante à l'islamophobie et à la discrimination contre l'Islam dans certains pays européens. L'interdiction récente de construire des minarets est ainsi un signe d'intolérance à l'égard des musulmans. Le représentant a incité à lutter contre toutes les formes contemporaines de racisme et de discrimination raciale. L'Iran attache par ailleurs beaucoup d'importance au mécanisme de suivi de la Déclaration et le Programme d'action de Durban, a assuré son représentant. Celui-ci a estimé que le mandat tel qu'il figure dans cette résolution est essentiel: appliquer le mandat du Comité spécial est donc de la plus haute importance. La situation catastrophique des personnes vivant sous occupation dans les territoires occupés arabes de Palestine et du Golan syrien mérite une attention particulière, a-t-il conclu.

M. ABDULMONEM ANNAN (Syrie) a insisté sur l'importance que revêtent les documents issus de la Conférence de Durban et de la Conférence d'examen de Durban pour relever les défis du racisme, notamment pour ce qui a trait à la liberté d'expression et à son exploitation, par certains, pour attiser la haine raciale. La question qui se pose à chacun est la suivante: jusqu'à quand resterons-nous silencieux face aux pratiques racistes commises par Israël, au vu et au su de tous, contre les habitants des territoires arabes occupés? Le représentant syrien a par ailleurs attiré l'attention sur l'importance de l'élaboration de normes complémentaires et de la mise en œuvre des recommandations du Groupe de travail sur les personnes d'ascendance africaine pour réparer les injustices subies par certaines populations.

M. HUSSEIN AL-ZUHAIRY (Iraq) a apprécié les efforts déployés par le Conseil pour lutter contre les formes de discrimination raciale et de racisme, et notamment contre la diffamation des religions. Pour le représentant iraquien, il est nécessaire de prendre des mesures pour contrer les pratiques discriminatoires et racistes; il faut punir les actes motivés par la prétendue supériorité d'une race sur une autre; il faut enfin contrer la culture de haine et l'incitation à la haine, notamment à l'encontre de certaines religions.

MME ASU DURMUS (Turquie) a estimé que le racisme, sous toutes ses formes, continue d'empêcher la mise en œuvre des droits et libertés fondamentaux. La Conférence d'examen de Durban a été une réelle occasion de renouveler l'engagement collectif à lutter contre le racisme, comme en témoigne l'adoption de son Document final, a estimé la représentante turque. Ce Document, ainsi que le Déclaration et le Programme d'action de Durban de 2001, doivent servir de base à l'élaboration de politiques contre le racisme dans le monde entier. La représentante turque a ensuite félicité le travail réalisé par le Comité spécial sous l'égide de son Président-Rapporteur. La représentante a néanmoins déploré que le rapport du Comité spécial n'ait été publié que sous forme d'un document à distribution limitée, car il reflète des positions importantes exprimées durant les réunions de travail du Comité spécial. Il faudrait désormais donner la priorité aux mesures axées sur la prévention en matière de lutte contre toutes les formes de racisme, a ajouté la déléguée turque, qui a demandé le renouvellement du mandat du Comité spécial.

Organisations non gouvernementales

M. ELIAS KHOURI (Union des juristes arabes, au nom également del'Organisation internationale pour l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale et de l'Union des avocats arabes) a estimé que la communauté internationale devait se donner les moyens d'appliquer réellement la Déclaration et le Programme d'action de Durban. Le représentant a déploré les vestiges de pratiques anciennes qui transparaissent dans les sociétés où se manifeste le racisme. Il s'est en outre dit consterné par la discrimination institutionnelle et systématique dont est victime le peuple palestinien.

M. BIRO DIAWARA (Rencontre africaine pour la défense des droits de l'homme, au nom également de Interfaith International et Al-Hakim Foundation) s'est demandé au nom de quelle croyance les albinos sont tués dans certains pays d'Afrique. Il a déploré que ces pratiques perdurent en Tanzanie, au Burundi et en République démocratique du Congo où les enfants albinos sont victimes de discrimination, abandonnés, vendus et parfois tués à des fins de sorcellerie. Le représentant a demandé au Conseil d'adopter des mesures appropriées pour protéger ces personnes vulnérables.

MME MARGREET WEWERINKE (Nord-Sud XXI) a estimé qu'il ne fallait pas fermer les yeux devant les causes historiques de la discrimination raciale, comme le découpage de l'Afrique réalisé à la conférence de Berlin en 1884. La discrimination insidieuse contre les Palestiniens continue à se manifester aujourd'hui, même si elle a toujours été à l'avant-plan des préoccupations des Nations Unies. Plus récemment, la Déclaration et le Programme d'action de Durban ont représenté une étape décisive et Nord Sud XX invite la communauté internationale à évaluer les résultats au vu des objectifs évoqués à l'ouverture de la Conférence de Durban.

MME SABINE LEGRAND (Fraternité Notre Dame) a affirmé qu'en France, des centaines de milliers de personnes appartenant à des minorités sont considérées comme des citoyens de seconde catégorie. Elle a attiré l'attention du Conseil sur la préparation à ce propos d'une nouvelle «liste noire» préconisée par la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires: l'État, sous prétexte de lutter contre les sectes, entend en réalité restreindre les libertés fondamentales, a déclaré la représentante de la Fraternité Notre Dame.

M. LINDSAY BENNETT GRAHAM (Becket Fund for Religious Liberty) a observé que la question de la diffamation des religions divise la communauté internationale depuis une décennie. Certaines parties prenantes n'admettent pas qu'il s'agit là d'un véritable problème, a-t-il regretté, d'autres ne souhaitent pas mettre en œuvre de solutions créatives et pragmatiques à ce problème. Le représentant a estimé qu'il ne s'agissait pas là d'un problème Nord-Sud ou Est-Ouest, ni d'une question spécifiquement régionale. Il a relevé avec amertume que le Comité spécial sur l'élaboration de normes complémentaires n'avait pas accompli la moitié du travail prévu lors de sa dernière session, et qu'il semble qu'une certaine dynamique s'est cassée à Genève. Les pays européens doivent reconnaître le problème de la discrimination religieuse; les pays latino-américains doivent, eux, admettre qu'ils ne sont pas immunisés contre le racisme et contre l'abus de lois trop restrictives. Les États-Unis pourraient enrichir ce débat des leçons retenues de l'action du mouvement pour les droits civils.

M. MAURICE KATALA (Comité international pour le respect et l'application de la charte africaine des droits de l'homme et des peuples - CIRAC) a fait quelques suggestions au Comité spécial pour l'élaboration des normes internationales, afin de favoriser la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d'action de Durban. Il a notamment proposé de trouver une alternative à la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, dont on sait depuis longtemps qu'elle ne sera jamais ratifiée par les États d'accueil. Il a également demandé qu'une politique humaine en matière de migrations et d'asile soit mise sur pied, et que les définitions du «réfugié» soient harmonisées pour tenir compte notamment des critères de pauvreté et d'environnement. Enfin, le représentant a demandé que l'expulsion des migrants mineurs et des réfugiés politiques soit interdite.

M. SAYYED-MOHAMMAD MUSAWI (Interfaith International) s'est présenté comme citoyen iraquien de naissance, ajoutant appartenir à la famille humaine sans frontière. Il a attiré l'attention du Conseil sur le sort des musulmans chiites de nombreux pays signataires de la Déclaration universelle des droits de l'homme, mais dans lesquels les chiites continuent de souffrir de discrimination en raison de leur foi. Il a plaidé en faveur d'une initiative internationale afin de lutter contre la discrimination à l'encontre des chiites dans de nombreux pays.

M. ROY W. BROWN (Union internationale humaniste et laïque) a attiré l'attention du Conseil sur un rapport concernant les restrictions apportées à la religion de par le monde. Ce rapport montre que 64 États, abritant 70% de la population mondiale, imposent des restrictions plus ou moins importantes à l'égard des religions, souvent au détriment des minorités religieuses. Les taux les plus élevés de restrictions gouvernementales se trouvent en Chine, au Viet Nam, en Iran et en Arabie saoudite; l'Inde pose, par contre, peu de restrictions gouvernementales mais on y enregistre une forte hostilité sociale à l'égard des minorités religieuses. Ce rapport, a poursuivi le représentant, montre clairement que plusieurs des pays qui appuient les résolutions de lutte contre la diffamation des religions figurent parmi ceux qui respectent le moins la liberté de religion.

MME MARYAM SAFARI (Charitable Institute for Protecting Social Victims) a dénoncé la nouvelle vague d'islamophobie qui s'est répandue en Occident après les attentats du 11 septembre 2001. Elle a souligné que les comportements agressifs à l'encontre des musulmans constituent une préoccupation majeure de son Institut. Aussi, a-t-elle demandé à tous les gouvernements de s'abstenir d'adopter des lois discriminatoires et des prises de position revenant à insulter les adeptes d'autres religions et à violer leurs droits.

M. MAHMOUDREZA GOLSHANPAZHOOH (Organization for Defending Victims of Violence) a souligné que depuis les attaques du 11 septembre 2001, des mouvements extrémistes marginaux s'attaquent, dans les pays occidentaux, aux migrants et à l'Islam. Bien souvent, les sites Internet et les médias n'œuvrent pas en vue de rapprocher les croyants, mais au contraire de susciter des dissensions entre eux. La publication de caricatures du prophète Mahomet est contraire au dialogue et à la paix entre les civilisations. Le représentant a demandé l'interdiction de tous les actes fondés sur la discrimination raciste et la haine, ainsi que celle des activités suscitant la crainte et la haine des autres religions.

MME PARICHEHRE SHAHSAVAND (Institute for Women Studies and Research) a souligné que le monde islamique était confronté à de très nombreuses attaques contre sa culture et contre ses convictions religieuses. La représentante a observé que l'islamophobie inhibe le développement d'une société juste, caractérisée par l'inclusion sociale et la diversité culturelle; l'islamophobie aggrave les troubles sociaux, avec des coûts élevés pour les économies et pour les systèmes de justice. Pour la représentante, il faut prendre des mesures positives et des mesures aux niveaux national, régional et international pour remédier aux dégâts causés par l'islamophobie.

M. RONALD BARNES (Indian Council of South America) a regretté que, comme l'indique le paragraphe 132 du rapport du Comité spécial sur l'élaboration de normes complémentaires, un bloc de pays occidentaux considère que la quatrième Convention de Genève protège les personnes sous occupation étrangère et qu'il n'est donc point besoin de normes complémentaires à cet égard. En fait, le besoin de normes complémentaires est impérieux.

MME CINDY TAN (United Nations Watch) a demandé au Conseil de poursuivre la lutte contre le racisme et la discrimination en utilisant les outils à sa disposition: sessions extraordinaires, résolutions et commissions d'enquêtes. Elle a attiré son attention sur les défis qui sont selon elle les plus urgents: la soumission des femmes, notamment en Arabie saoudite; la discrimination contre les minorités ethniques, raciales et religieuses, notamment en Iran; et les actes de discrimination à l'encontre des travailleurs migrants, notamment en Jamahiriya arabe libyenne où, selon des rapports du Comité pour l'élimination de la discrimination raciale et de Human Rights Watch, deux millions de migrants noirs africains sont victimes de discrimination raciale.

MME LAILA MATAR (Cairo Institute for Human Rights Studies) a souligné que les tentatives d'intégrer le concept de diffamation des religions dans des instruments contraignants des Nations Unies justifient les craintes des organisations non gouvernementales: le Comité spécial débat maintenant de la nécessité de réécrire le droit international de droits de l'homme afin de soumettre la liberté d'expression à l'interprétation des États de ce qu'ils considèrent comme «sacré». Pourquoi le Conseil continue-t-il d'ignorer les appels de nombreuses organisations non gouvernementales de toutes les régions du monde, ainsi que des experts de droits de l'homme, qui demandent la reconnaissance de la complémentarité de la liberté de religion et de la liberté d'expression, a demandé la représentante. Des alternatives raisonnables ont été proposées, mais certaines délégations semblent les ignorer, a déploré la représentante. Selon elle, le concept de diffamation des religions relève davantage de la politique que de la véritable protection des croyants.

M. DAVID LITTMAN (Association pour l'éducation d'un point de vue mondial) a dénoncé les agissements de l'Organisation de la Conférence islamique, du Pakistan et du l'Iran d'abord dans l'affaire du blasphème – dont il a été démontré qu'elle était basée sur des fondements erronés; puis dans le débat autour de la diffamation des religions, seul l'islam étant finalement concerné par les résolutions proposées sur cette dernière question; enfin dans la création du monstre de l'islamophobie, suscité 197 ans après Frankenstein, et dont on ne peut que s'étonner du succès, a déclaré M. Littman.

M. STÉPHAN CICCOLI (European Union of Public Relations) a rappelé que l'Asie du Sud est une des régions les plus pauvres du monde: 500 millions de personnes y vivent sous le seuil de pauvreté, tandis que 260 millions d'habitants n'y disposent pas d'installations sanitaires de base. Cette région est considérée comme un «bouillon de culture ethnique», a dit le représentant, il est donc naturel que l'on y constate une compétition perpétuelle pour l'accès aux ressources. Plusieurs groupes y sont victimes de discrimination en raison du manque de transparence et de responsabilité en matière de gouvernance. Ces groupes se réfugient donc dans des attitudes non démocratiques. Dans certains cas, les divisions - politiques, de caste ou de classe – exercent des pressions vers la désintégration des États. Il y a des réussites, comme l'Inde, où une volonté politique forte, appuyée par des mesures de discrimination positive, ont entraîné une meilleure participation au processus démocratique. Le Conseil des droits de l'homme devrait prendre note de ces efforts.

M. R. K.JOSHI (Commission to Study the Organization of Peace) a déploré les attaques contre les lieux de culte, l'incitation à la haine religieuse, le déni de liberté de culte et l'interdiction du port de symboles religieux constatés dans plusieurs pays. Pour le représentant, c'est l'éducation qui détermine comment une société va évoluer et si elle sera régressive ou progressive. Il a, dans ce contexte, déploré que certaines écoles religieuses musulmanes inculquent la haine et la discrimination. La haine favorise la haine, la violence entraîne la violence et la discrimination génère la discrimination, a-t-il souligné.

M. DAISUKE SHIRANE (Mouvement international contre toutes les formes de discrimination) a lancé un appel en faveur de la révision du procès de M. Kazuo Ishikawa, condamné à tort en 1963 pour un meurtre qu'il n'avait pas commis. Le représentant a déclaré que M. Ishikawa, qui appartient à la communauté stigmatisée des buraku, a été victime d'une discrimination fondée sur son ascendance. Le représentant a par ailleurs attiré l'attention du Conseil des droits de l'homme sur l'insécurité à laquelle sont confrontés les défenseurs sri-lankais des droits de l'homme qui participent aux sessions du Conseil des droits de l'homme.

MME JASJIT KAUR (Indian Council of Education) a estimé que le droit de choisir sa religion au même titre que d'autres aspects de l'existence humaine, ainsi que l'exercice libre et sans limite de ce droit, sont à la base d'une véritable démocratie. La communauté internationale des droits de l'homme doit veiller à ce que les personnes appartenant aux différentes religions puissent nouer un véritable dialogue. La représentante a ajouté qu'il était essentiel d'écouter ce que les peuples ont à dire, et qu'il est malheureux que des manquements aux droits fondamentaux se produisent également dans les pays démocratiques où les gouvernants deviennent sourds aux problèmes et plaintes de leurs administrés.

M. JAN LONN (Mouvement international de la jeunesse et des étudiants pour les Nations Unies) a accueilli avec satisfaction les deux décisions prises par l'Assemblée générale le 18 décembre 2009: celle de proclamer 2011 «Année internationale des personnes d'ascendance africaine» et celle de commémorer le dixième anniversaire de l'adoption de la Déclaration et du Programme d'action de Durban. Il a estimé que ces deux célébrations permettront de promouvoir la lutte contre le racisme et de mieux comprendre les origines du racisme et de la discrimination. Il a demandé au Conseil de marquer ces deux événements importants par des activités spéciales.

M. KUMAR SATYENDRA (Pax Romana) a souligné que le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, M. Githu Mugai, a réaffirmé que la discrimination fondée sur la caste était une forme de discrimination raciale. Le représentant de Pax Romana a plaidé en faveur de l'inscription de la question des castes à l'ordre du jour du Conseil et de l'adoption d'une résolution demandant au Conseil de tenir un débat sur cette question.

M. DAVID LITTMAN (Union mondiale pour le judaïsme libéral) s'est indigné de l'expérience qu'ont vécu plusieurs diplomates européens qui se sont rendus à Damas et ont été choqués de voir beaucoup de publications judéophobes et antisémites dans plusieurs librairies ou hôtels. Il a exprimé la crainte que l'on enseigne le contenu de certains de ces livres dans des écoles musulmanes en Europe.

M. DIPMONI GAYAN (Libération) a attiré l'attention du Conseil sur les pratiques de discrimination raciale qui persistent, notamment en Inde. Il a souligné que la Constitution indienne et certaines des lois de ce pays sont basées sur la discrimination raciale. Les politiques du Gouvernement indien ignorent les États du Nord-Est de l'Inde. Enfin, les races ne sont pas toutes représentées de manière équitable au Parlement, a souligné le représentant.

M. LÁZARO PARY (Mouvement indien «Tupaj Amaru») a rappelé que le système colonial, avide de richesses, a mis sur pied l'esclavage, la traite des esclaves et la croisade d'extermination des peuples autochtones. Après le 11 septembre 2001, le racisme et la discrimination raciale à l'encontre des musulmans, des Arabes, des autochtones et des Latinos ont pris des proportions dramatiques, dans le cadre de la croisade contre le terrorisme, a-t-il poursuivi. Le monde a ainsi succombé à une spirale de la violence. Dans cette croisade contre le terrorisme, a ajouté le représentant, les mouvements de libération se voient catalogués comme terroristes. Les luttes légitimes des peuples autochtones en Amérique latine sont criminalisées, a-t-il insisté. Il a attiré l'attention sur la nécessité de transformer l'ordre économique international actuel, qui est profondément raciste, absolument insoutenable et moralement condamnable.

Conclusion du Président-Rapporteur du Comité spécial sur l'élaboration de normes complémentaires

M. IDRISS JAZAÏRY, Président-Rapporteur du Comité spécial sur l'élaboration de normes complémentaires, a remercié tous les participants qui ont contribué au débat et a rappelé que le Conseil des droits de l'homme a consacré beaucoup d'énergie, pendant cette session, à parler de la promotion et de la protection des droits de l'homme des victimes sur le terrain. Mais, en même temps, d'autres activités sont importantes, comme par exemple l'activité normative, sur lesquelles le Conseil des droits de l'homme n'est pas aussi efficace.

M. Jazaïry a repris l'affirmation du délégué d'une organisation non gouvernementale qui a affirmé que les questions de droits de l'homme ne sont pas «un problème Nord-Sud». À cet égard, le rapport du Comité spécial indique quels ont été les problèmes qu'il a rencontrés en matière d'élaboration de normes, a précisé M. Jazaïry. Le travail du Comité spécial doit consister en l'élaboration de textes juridiquement contraignants, a-t-il en outre estimé.

Comment concilier la liberté d'expression et la protection de la dignité et de la sécurité des groupes vulnérables, a-t-il été demandé par d'autres délégations. «Si j'avais la réponse à cette question, je serai très heureux», a fait savoir M. Jazaïry. Un premier atelier sur cette question a été organisé en 2009, concernant l'article 20 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques concernant la liberté d'expression et ses limitations. Il serait utile que le Haut Commissariat organise d'autres ateliers, réunissant des participants reflétant mieux la diversité des points de vue dans le monde réel, a observé le Président-Rapporteur.

Enfin, il serait bon de se mettre d'accord sur le travail à venir d'ici la prochaine session du Comité spécial en novembre prochain, a ajouté M. Jazaïry. Ce dernier a jugé nécessaire que le prochain Président du Comité spécial jouisse d'une confiance plus grande, afin qu'il soit réellement en mesure de promouvoir de nouvelles idées et de trouver de nouveaux compromis. En conclusion, M. Jazaïry a estimé que des progrès ont été faits depuis le début des travaux du Comité spécial: en effet, le début de ses travaux était marqué par un véritable déni du problème des formes contemporaines du racisme et de la discrimination.

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La documentation relative à la présente session du Conseil, notamment les rapports du Haut Commissariat et des Rapporteurs spéciaux et autres mécanismes du Conseil, est disponible sur la page Internet consacrée à la documentation de la treizième session du Conseil: http://www2.ohchr.org/english/bodies/hrcouncil/13session/reports.htm

Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

HRC10/043F