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CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME: LA HAUT-COMMISSAIRE AUX DROITS DE L'HOMME ATTIRE L'ATTENTION SUR DES SITUATIONS PARTICULIÈREMENT PRÉOCCUPANTES

Compte rendu de séance
Le Ministre de la justice du Kenya s'adresse au Conseil

Le Conseil des droits de l'homme a entendu cet après-midi la Haut-Commissaire aux droits de l'homme, Mme Navi Pillay, qui a attiré son attention sur des situations qu'elle estime particulièrement préoccupantes. Le Ministre de la justice du Kenya s'est en outré adressé au Conseil en fin de séance.

Mme Pillay a notamment déclaré que la réussite de la Conférence d'examen de Durban contre le racisme, la discrimination raciale et la xénophobie a montré de manière exemplaire ce que les États sont capables de réaliser ensemble. L'une des priorités qui ont émergé de cette Conférence est la protection des droits de l'homme des migrants dans le contexte des nombreux défis auxquels est confrontée la communauté internationale à l'heure actuelle: crises économique et financière, changement climatique, traite des êtres humains, lutte contre le terrorisme. Les droits des migrants doivent être défendus aussi bien dans les pays d'origine que de transit et de destination. Le mépris des droits fondamentaux, de même que les pratiques discriminatoires sont souvent à l'origine de ces conflits, a souligné Mme Pillay, qui a rappelé que le Conseil des droits de l'homme est l'un des principaux forums pour rappeler aux États leurs obligations en matière de protection des civils et de respect des droits de l'homme et de l'état de droit.

La Haut-Commissaire a exprimé sa préoccupation s'agissant des situations des droits de l'homme en Afghanistan, au Pakistan, en Iraq, dans le territoire palestinien occupé, en Colombie, en Somalie, en République démocratique du Congo, au Soudan, au Tchad et au Népal. Quant à la session extraordinaire du Conseil des droits de l'homme consacrée la semaine dernière à la situation à Sri Lanka, malgré le climat difficile dans lequel il s'est déroulé, il était important de dresser le bilan de la responsabilité des violations des droits de l'homme commises, étant donné que l'accès des travailleurs humanitaires et des médias indépendants est interdit dans la zone de conflit.

La délégation de Sri Lanka, intervenant à titre de pays concerné, a déclaré que le pays privilégiait le retour à la stabilité et a souligné que la question des responsabilités sera posée mais en donnant la priorité au processus national. Les autres délégations concernées par le compte rendu de Mme Pillay ont également pris la parole: Afghanistan, Pakistan, Iraq, Israël, Palestine, Colombie, Somalie, République démocratique du Congo, Soudan, Tchad et Népal.

Les représentants des pays suivants ont ensuite participé au débat interactif qui s'est tenu avec la Haut-Commissaire: Cuba (au nom du Mouvement des pays non-alignés), Égypte (au nom du Groupe africain), Pakistan (au nom de l'Organisation de la Conférence islamique), République tchèque (au nom de l'Union européenne et pays associés), Argentine, Inde, Fédération de Russie et Indonésie.

En fin de séance, M. Mutula Kilonzo, Ministre de la justice et des affaires constitutionnelles du Kenya, a réaffirmé l'engagement de son gouvernement en faveur de la promotion et de la protection des droits de l'homme, guidé par une vision des droits de l'homme devant s'appliquer à tous les aspects de la vie des individus. Cette démarche est d'autant plus nécessaire que le Kenya traverse une période difficile issue de la crise postélectorale qui a éclaté en 2007 et qui a mis sur le devant de la scène des différences et tensions ethniques fondamentales concernant les inégalités et l'accès à la justice. Dans une large mesure, le critère de l'appartenance ethnique est un défi important pour de nombreux pays en voie de développement. Le Ministre a ajouté que les droits de l'homme ne pourront progresser que par le biais d'un dialogue constructif et collectif. Dans ce contexte, il a déploré que le Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires, M. Philip Alston, se soit efforcé de déstabiliser les autorités kenyanes, en tentant de diviser les membres du Gouvernement de coalition.


Demain à 10 heures, le Conseil achèvera son dialogue avec Mme Pillay. Il se penchera ensuite sur les rapports du Secrétaire général et de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme, qui seront présentés par la Haut-Commissaire adjointe.


Échange de vues avec la Haut-Commissariat aux droits de l'homme

Présentation de la Haut-Commissaire

MME NAVI PILLAY, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, a d'abord attiré l'attention sur la réussite de la Conférence d'examen de Durban contre le racisme, la discrimination raciale et la xénophobie, qui a montré de manière exemplaire ce que les États sont capables de faire ensemble pour relever l'un des principaux défis en matière de réalisation des droits de l'homme, notamment en condamnant le racisme sous toutes ses formes. L'une des priorités qui ont émergé de la Conférence d'examen est la protection des droits de l'homme des migrants dans le contexte des défis auxquels est confrontée la communauté internationale à l'heure actuelle: crises économique et financière, changement climatique, traite des êtres humains, lutte contre le terrorisme. Ces droits doivent être défendus aussi bien dans les pays d'origine que de transit et de destination. Les États devraient à cet égard ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et de leur famille, a rappelé Mme Pillay, de même que respecter leurs obligations de protéger et promouvoir la pleine jouissance de leurs droits économiques, sociaux et culturels, civils et politiques, par toutes les personnes placées sous leur juridiction. Ainsi que le Conseil des droits de l'homme l'a souligné à sa session de septembre 2008, la condition des civils dans les conflits armés demeurent extrêmement préoccupante. Leurs souffrances sont une caractéristique dramatique des conflits qui se déroulent dans de nombreuses régions du monde. Le mépris pour les droits fondamentaux, de même que les pratiques discriminatoires sont souvent à l'origine de ces conflits.

Ainsi, concernant l'Afghanistan, la Haut-Commissaire a souligné que on doit se préoccuper des pertes de vies des civils qui se poursuivent dans le contexte de la détérioration de la situation sécuritaire dans le pays. Le Gouvernement de l'Afghanistan et tous les États impliqués dans ce conflit doivent prendre des mesures pour protéger les civils, diligenter des enquêtes impartiales sur les décès de civils et assurer des recours judiciaires et des dédommagements à l'intention des victimes. S'agissant du Pakistan, le Haut-Commissaire a dit sa préoccupation devant la situation dans le Nord-Ouest du pays où, selon les informations, deux millions et demi de personnes ont fui leurs foyers et ont besoin de protection. Le Haut-Commissariat des droits de l'homme est prêt à aider le Pakistan à protéger les droits des populations déplacées. La situation en Iraq reste précaire, les civils y étant toujours exposés aux risques quotidiens d'attentats suicide, d'enlèvements et d'autres menées criminelles, a poursuivi la Haut-Commissaire.

Dans le territoire palestinien occupé, des informations dignes de foi font état de graves violations du droit international humanitaire et des droits de l'homme par toutes les parties durant les opérations militaires à Gaza, il y a quatre mois, a souligné Mme Pillay. Ces allégations doivent faire l'objet d'enquêtes approfondies et indépendantes.

En Amérique latine, la Colombie est toujours une source de grande préoccupation. Le conflit qui fait rage dans ce pays depuis quarante ans a eu de très graves répercussions en termes humains, sociaux, économiques et politiques. Le Gouvernement colombien doit prendre toutes les mesures pour protéger les civils, réduire leurs souffrances et répondre à leur exigence de justice. En ce qui concerne la Somalie, la Haut-Commissaire s'est dite très inquiète de la situation à Mogadiscio et dans le centre et le sud du pays: le conflit a des répercussions sur la population civile, les travailleurs humanitaires, les défenseurs des droits de l'homme et les journalistes. Les combats doivent cesser, a demandé Mme Pillay.

La Haut-Commissaire s'est également inquiétée des conséquences tragiques, pour la population civile, de la poursuite des combats dans l'Est de la République démocratique du Congo. Toutes les parties au conflit doivent veiller à épargner les non-combattants. La communauté internationale, de son côté, doit s'efforcer de renforcer ses efforts de protection des civils qui ont déjà enduré des souffrances insupportables. Au Soudan, les attaques menées contre les civils par toutes les parties au conflit se poursuivent au Darfour, compromettant le droit à la vie, l'intégrité physique et la sécurité des civils. Les arrestations arbitraires, les détentions, les mauvais traitements et la torture visant les défenseurs des droits de l'homme, des travailleurs humanitaires et des collaborateurs des Nations Unies sont monnaie courante depuis juillet 2008. Les combats récents entre groupes armés et forces gouvernementales au Tchad ont contribué à la détérioration de la situation des droits de l'homme dans l'est de ce pays, des rapports faisant état de la mort de douzaines de civils.

La semaine dernière, la session extraordinaire du Conseil des droits de l'homme consacrée à la situation à Sri Lanka s'est déroulée dans un climat difficile. Néanmoins, le débat engagé à cette occasion est important, s'agissant notamment de la question de l'interdiction ou des restrictions à l'accès des travailleurs des droits de l'homme et des médias indépendants dans la zone de conflit. Un bilan complet de la responsabilité des violations des droits de l'homme commises par toutes les parties devrait être réalisé, a réitéré la Haut-Commissaire, qui a appelé à cette fin à la mise sur pied d'une commission d'enquête internationale. Une telle assistance a déjà permis au Népal de traverser une transition délicate, a fait valoir la Haut-Commissaire. Les événements politiques survenus dans le pays ont maintenant suscité de nouvelles difficultés qui devront également trouver une solution.

Dans ses résolutions portant sur la situation des civils dans les conflits armés, le Conseil de sécurité des Nations Unies a lancé des appels fermes pour la protection des droits de l'homme et du droit international humanitaire pendant les hostilités, ainsi que pour la prise de mesures complètes pour prévenir les conflits et garantir la mise en place d'institutions viables pendant les périodes de transition. Au nom des droits de l'homme fondamentaux et du droit international humanitaire, tous les États devraient répondre à ces appels, a estimé la Haut-Commissaire. Mme Pillay a conclu sa présentation en rappelant au Conseil des droits de l'homme qu'il est l'un des principaux forums pour rappeler aux États leurs obligations en matière de protection des civils et de respect des droits de l'homme et de l'état de droit.

Déclarations de pays concernés par le compte rendu de la Haut-Commissaire

M. NANGUYALAI TARZI (Afghanistan) a fait part de la grave préoccupation du Gouvernement afghan face à la perte de vies civiles qui continue de se produire dans son pays. Il a rappelé que le pays subit les affres de la guerre depuis plus de deux décennies. Aujourd'hui encore, la sécurité, le développement et le bien être des citoyens sont menacés par le terrorisme international. L'Afghanistan est engagé dans la lutte contre le fléau du terrorisme aux côtés de la communauté internationale. La majorité des pertes de vies civiles se produisent parce que les civils servent de boucliers humains aux groupes criminels ou sont tués dans des attentats ou directement de la main des dits groupes.

M. ZAMIR AKRAM (Pakistan) a indiqué que l'armée de son pays procédait à des opérations militaires contre les terroristes et que des mesures ont été prises en vue d'assurer la protection des populations, particulièrement des femmes et des jeunes filles. Si la situation a effectivement entraîné des déplacements, dans 80% des cas, les personnes concernées sont hébergées par des proches, a-t-il indiqué. Le représentant du Pakistan a assuré que son pays était pleinement conscient de sa responsabilité de protéger la vie et le bien être de sa population tout en faisant progresser les droits de l'homme de ses citoyens.

M. FARIS ALANI (Iraq) a déclaré que depuis deux ans, la sécurité s'est améliorée en Iraq, comme en témoigne le retour de nombreux réfugiés dans leurs foyers, au terme d'une offensive lancée avec succès contre des forces terroristes. Cette amélioration de la situation sécuritaire a été saluée par les partenaires régionaux de l'Iraq. Les critiques contre le pays sont le fait d'intervenants qui veulent lui nuire, a estimé le représentant. La magistrature iraqienne jouit par ailleurs d'une crédibilité enviable; elle est intègre et indépendante; elle ne subit aucun diktat politique. D'autre part, la femme iraqienne, qui s'est beaucoup sacrifiée pour son pays, est un partenaire égale à l'homme dans la société iraqienne. Nombre d'entre elles participent à la vie publique aux plus hauts échelons.

M. AHARON LESHNO-YAAR (Israël) a rappelé que le Conseil a été créé pour promouvoir les respect universel des droits de l'homme, ce qui, vu la politisation des questions relatives aux droits de l'homme, est aisément oublié. Israël se réjouit par ailleurs de collaborer pleinement avec le Haut-Commissariat dans les enquêtes sur les allégations de violations de droits de l'homme qui auraient eu lieu lors de l'opération «Plomb durci». Israël a déjà partagé avec le Haut-Commissariat les conclusions de l'enquête qu'il a menée et qui portait sur cinq motifs de préoccupation. La levée des restrictions de mouvements dépend cependant directement de la sécurité. Israël reconnaît avoir un effort à faire pour permettre un renforcement de l'économie palestinienne, a déclaré le représentant, ajoutant que des permis de circuler ont été délivrés aux entrepreneurs palestiniens. Par ailleurs, il a rappelé que la bande de Gaza est toujours sous contrôle du Hamas, qui a retient en outre un soldat israélien en otage sans permettre au Comité international de la croix rouge de lui rendre visite. Le destin de Gaza n'est ainsi pas exclusivement entre les mains d'Israël.

M. IBRAHIM KHRAISHI (Palestine) a souligné que ce qu'il venait d'entendre de la part de la délégation israélienne l'étonnait, plus particulièrement lorsque celle-ci dit ne pas vouloir politiser les droits de l'homme. L'orateur a remercié Mme Pillay pour la préoccupation qu'elle montrait à l'égard de la population civile de Palestine. Ce dont nous discutons ici, c'est de la mise en œuvre du droit international humanitaire, a-t-il souligné, alors qu'Israël refuse d'assumer ses obligations juridiques internationales, en particulier la Quatrième Convention de Genève. Le représentant palestinien a noté que le pays continuait d'évoquer des territoires «contestés» alors que les résolutions de l'ONU établissaient clairement qu'il s'agissait de territoires occupés. Le droit international est contraignant pour Israël à cet égard, a-t-il ajouté. Le représentant a appelé la Haut-Commissaire à mettre en place une commission permanente qui veillerait à l'application des traités internationaux et enquêterait sur toute éventuelle violation de ceux-ci.

M. ANGELINO GARZÓN (Colombie) a déclaré que le Gouvernement de son pays apprécie le rapport de la Haut-Commissaire et réitère sa conviction que la population est victime de la violence endémique causée par des bandes armées associées à des trafiquants de drogue. L'État colombien souhaite, depuis de longues années, mettre un terme à cette violence insensée par le biais d'une discussion politique qui a en partie porté ses fruits, comme en atteste la démobilisation de certains groupes armés. Cependant, l'action d'autres groupes violents, irréductibles, entraîne des souffrances injustes pour la population. C'est dans ce contexte que le Gouvernement entend poursuivre une action en matière de droits de l'homme dans le cadre de ses institutions. La communauté internationale doit comprendre la dure réalité de violence à laquelle est confrontée la société colombienne. Les groupes armés illicites, s'ils souhaitent réellement prendre le chemin de la paix, doivent commencer par libérer les otages qu'ils détiennent. Le Gouvernement s'engage à continuer de lutter contre l'impunité d'auteurs de violations des droits de l'homme appartenant aux forces de l'ordre colombiennes, a assuré le représentant, qui a en outre fait savoir qu'un fonds d'indemnisation des victimes de ces violences est mis en place à l'heure actuelle.

M. YUSUF MOHAMED ISMAIL (Somalie) a expliqué qu'un acteur non étatique est décidé à renverser les institutions légitimes de son pays. Il a ajouté que la violence n'a rien à voir avec la religion, car toute la population est musulmane et éthniquement et culturellement très homogène. Un jour de combat à Mogadiscio coûte au moins 300 000 dollars, ce qui démontre bien un soutien financier extérieur, entre autres de la part de l'Érythrée, aux insurgés. En dépit de la détermination du pays à coopérer avec le Haut-Commissariat aux droits de l'homme afin de mettre en place l'aide dont le pays il a tant besoin, cela n'est pas encore en place. De grandes parties du nord du pays sont restées relativement stables; notamment le Somaliland et le Puntland. Une aide à ces provinces pourrait avoir un effet domino favorable sur le reste du pays.

M. SÉBASTIEN MUTOMB MUJING (République démocratique du Congo) a assuré que son gouvernement ne ménageait «aucun effort pour mettre un terme à la souffrance endurée par les populations martyres» dans l'Est du pays. Il a fait de la lutte contre l'impunité l'une de ses priorités même s'il est «parfois difficile de concilier le souci de la recherche de la paix avec les impératifs de la justice». La politique pénale congolaise vise à ce que les personnes reconnues coupables de graves violations des droits de l'homme «répondent effectivement de leurs actes devant les juridictions compétentes sans heurter le principe de l'imprescriptibilité des crimes internationaux». Il a assuré que son pays respectait bien tous ses engagements internationaux, ainsi que les accords de coopération judiciaire récemment conclus. C'est dans ce cadre qu'il faudra placer la coopération entre la République démocratique du Congo et les procédures spéciales qui peuvent viser le pays à tout moment, a déclaré le représentant. Il a réitéré l'appel au Haut-Commissariat aux droits de l'homme et à tous les pays épris de paix d'assister le gouvernement de son pays dans ses efforts de promotion et de protection des droits de l'homme.

Le représentant du Soudan a déclaré que son pays, depuis l'époque de l'ancienne Commission, n'a cessé d'être la cible d'allégations mensongères et trompeuses concernant sa situation en matière de droits de l'homme, ainsi qu'au Darfour. C'est pourquoi le Gouvernement entretient un dialogue direct avec la Haut-Commissaire, qu'il a invitée à se rendre au Soudan à sa plus proche convenance. Le représentant soudanais s'est dit par ailleurs fier d'un système judiciaire éprouvé, intègre et au-dessus de toute critique. Lors de son entretien avec la Haut-Commissaire, le Gouvernement soudanais a évoqué la question de la peine capitale, appliquée une seule fois, à l'encontre des meurtriers d'un journaliste. Le Soudan a communiqué le détail de la procédure judiciaire qui a précédé cette condamnation, procédure parfaitement conforme aux dispositions du droit international. La peine de mort ne peut pas être appliquée aux mineurs de moins de 18 ans, a assuré le représentant soudanais, qui a précisé que parmi les personnes jugées pour le meurtre précité, quatre étaient mineures et ont été jugées par un tribunal spécialisé. En ce qui concerne le Darfour et les attaques qui y sont menées contre des civils, le représentant a renvoyé au rapport de la mission hybride Nations Unies-Union africaine, qui atteste de l'amélioration de la situation. La communauté internationale ne tient aucun compte de l'action des groupes rebelles dans la région, a déploré le représentant, rappelant que l'un d'entre eux, le Mouvement pour l'égalité et la justice, a récemment lancé une attaque contre Khartoum. Le Soudan ne souhaite attaquer personne et n'entend que protéger sa population, a assuré le représentant.

M. MALLOUM BAMANGA ABBAS (Tchad) a déploré que la guerre sévisse dans l'Est du pays et a souligné que le Gouvernement a fourni la preuve de sa volonté d'appliquer les droits de l'homme et de promouvoir les libertés en créant un Ministère chargé de droits de l'homme en 2005. Les évènements de février 2008 ont donné lieu à des violations des droits de l'homme, ce qui été reconnu par le Gouvernement. Une commission d'enquête a été mise en place, composée de représentants de la société civile et d'observateurs internationaux. Ses conclusions permettront de déterminer les responsabilités. Un pool judiciaire composé de magistrats, d'experts et d'officiers de police est chargé de donner une suite judiciaire à l'enquête, a indiqué le représentant tchadien.

M. DAYAN JAYATILLEKA (Sri Lanka) s'est félicité de la session extraordinaire qui s'est tenue la semaine dernière tout en avouant ne pas être prêt à ce que l'exercice soit répété rapidement. Il a appelé l'attention du Conseil sur le fait qu'il y avait autant d'expériences de transition que de conflits armés et qu'aucune transition ne constituait un modèle parfait en soi. Il a cité les exemples de l'Espagne et des poursuites intentées contre les fascistes, ou encore celui du Cambodge avec le procès des ex-Khmers rouges. Les choses doivent donc être bien claires, a-t-il dit: Sri Lanka sait parfaitement que toute transition est différente, que les recherches de responsabilité sont différentes et que c'est à chaque pays de définir ses priorités. Sri Lanka privilégie le retour à la stabilité. La question des responsabilités sera posée mais en donnant la priorité au processus national. Le pays n'a connu ni dictature, ni occupation étrangère, a-t-il rappelé. L'armée d'un pays démocratique a dû combattre des milices séparatistes avec lesquelles celui-ci a vainement cherché à parvenir à un compromis. On ne peut renvoyer les deux parties dos à dos, de même que l'on ne peut mettre sur le même plan fascistes et antifascistes, a-t-il remarqué. L'orateur a rejeté l'idée que l'on puisse exiger un accès à quiconque venant de l'extérieur. C'est au Sri Lanka d'en décider, même si celui-ci a l'intention de permettre l'accès le plus large possible.

M. DINESH BHATTARAI (Népal) a déclaré que son pays a engagé une transition démocratique après un long conflit armé, dans le cadre fixé par l'accord de paix conclu en 2006 et la constitution provisoire du 15 janvier 2007. La concorde politique et la coopération guident l'esprit de cet exercice et le processus de paix. La maturation de la transition politique s'est manifestée la semaine dernière par l'élection d'un nouveau premier ministre par l'Assemblée constituante. Le Népal a accueilli la Haut-Commissaire lors de sa visite dans la région, en mars dernier. Le représentant népalais a estimé que les entretiens que Mme Pillay a eus avec des responsables du Gouvernement, des principaux partis politiques et des représentants de la société civile lui ont permis de constater par elle-même l'engagement de tout le pays pour le processus de transition démocratique.

Débat général

M. JUAN ANTONIO FERNÁNDEZ PALACIOS (Cuba au nom du Mouvement des pays non alignés) a déclaré que le Conseil des droits de l'homme était sur le point de terminer sa troisième année complète de travail. Malgré certaines critiques de ceux qui ont perdu certains privilèges dont ils jouissaient dans l'ancienne Commission, il ne fait aucun doute que, jusqu'à présent, le Conseil a connu une réussite. Au cours de ces trois années, le Conseil a été en mesure de poser les premiers jalons d'une nouvelle culture de travail, basée largement sur le dialogue direct et qui doit être consolidée à être entièrement basé sur les principes de dialogue, de transparence, de coopération et de non politisation. Le Mouvement des pays non alignés apprécient vivement les possibilités de dialogue direct avec la Haut-Commissaire. Par contre, il déplore les cas de manquements au code de conduite pour les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales. Il faut améliorer la synergie et l'interaction entre le Conseil et le Haut-Commissariat aux droits de l'homme, a poursuivi le représentant cubain. Cela contribuerait à renforcer la transparence, la coopération et les synergies dans les travaux des deux institutions, tout en tenant compte de leurs mandats respectifs. Les pays non alignés sont pleinement disposés à coopérer avec tous les acteurs pour rendre le Conseil et les Nations Unies un lieu où les principes de dialogue, de coopération et de la non-politisation prévalent.

MME HEBA MOSTAFA RIZK (Égypte au nom du Groupe africain) a dit son accord sur la priorité donnée aux migrants par Mme Pillay. Le Groupe africain a souvent noté que la criminalisation des migrants aboutissait souvent à ces violations des droits de l'homme. La représentante a souhaité avoir plus de détails sur les mesures que Mme Pillay comptait adopter dans les prochains mois, et en particulier sur le rôle du futur bureau de Bruxelles. Évoquant la conférence d'examen de Durban, elle a souligné la nécessaire volonté politique pour mettre en œuvre le document final qu a été adopté à cette occasion, ce processus se trouvant au centre des efforts internationaux contre le racisme. Elle a demandé des éclaircissements sur les mesures concrètes que la Haut-Commissaire prévoyait de prendre pour corriger le déséquilibre géographique au sein du personnel du Haut-Commissariat. Celui-ci doit montrer l'exemple en matière d'«action affirmative», a-t-elle souligné, afin de rétablir un équilibre qui s'avère essentiel si l'on veut qu'il conserve sa crédibilité.

M. ZAMIR AKRAM (Pakistan au nom de l'Organisation de la Conférence islamique) s'est notamment félicité de l'intérêt de la Haut-Commissaire pour la situation dans le territoire palestinien occupé, observant qu'il ne s'agit pas d'un conflit armé mais d'une situation d'occupation par une puissance étrangère. Le représentant a relevé qu'aucun pays n'est exempt de violations des droits de l'homme. Le Conseil s'est bien acquitté de ses nouvelles responsabilités, a estimé le représentant de l'OCI, qui a estimé que le mécanisme d'examen périodique universel s'est bien déroulé jusqu'ici. Il a regretté la déclaration officielle de la Haut-Commissaire au cours d'une réunion à Paris et concernant l'orientation sexuelle: il n'existe aucun instrument international faisant de ce thème une question de droits de l'homme, a rappelé le représentant de l'Organisation de la Conférence islamique.

M. TOMÁŠ HUSÁK (République tchèque au nom de l'union européenne et pays associés) a déclaré qu'il est nécessaire de limiter le nombre de demandes faites au Haut-Commissariat par Conseil et que celles-ci ont tendance à se multiplier. La lutte contre la discrimination et contre la violation des droits de l'homme est au cœur des préoccupations de l'Union européenne. Les violations lors de conflit armés sont particulièrement graves et toutes les situations mentionnées dans le rapport méritent être suivies de près. Les civils en situation de conflit et de post-conflit doivent jouir d'une protection particulière. Le représentant de l'Union européenne a reconnu les initiatives prises s'agissant du conflit à Sri Lanka et a salué le rôle que le Haut-Commissariat continue à jouer au Népal, de même que les visites effectuées sur le terrain.

M. HÉCTOR RAÚL PELÁEZ (Argentine) a assuré Mme Pillay de la collaboration la plus étroite de son pays. Il a confirmé l'accord de sa délégation quant à la priorité donnée à la question «éminemment importante» des migrants. Cette problématique doit être examinée dans le cadre de toutes les questions en suspens sur le plan international, dont la crise économique et financière internationale. Il a dénoncé en particulier la criminalisation de l'aide apportée aux immigrants illégaux, ainsi que les dispositions interdisant la fourniture de services de base en leur faveur, dans les domaines de la santé ou de l'éducation notamment. Ces mesures portent en effet atteinte à la dignité humaine et sont contraires au droit international humanitaire.

M. GOPINATHAN ACHAMKULANGARE (Inde) a déclaré que la session extraordinaire consacrée à Sri Lanka, dont s'est félicitée la Haut-Commissaire, a eu pour résultat une décision intergouvernementale reflétant un consensus. Il serait prudent de prendre en compte les résultats de cette session plutôt que les propositions qui n'ont pas été acceptées par les membres du Conseil lors de la session, a estimé le représentant indien.

M. GRIGORY LUKIYANTSEV (Fédération de Russie) a déclaré avoir apprécié les conclusions de la conférence d'examen de Durban. Le document est une plateforme pour combattre les formes modernes de racisme. Le représentant russe a lancé un appel aux États pour qu'ils traduisent en justice ceux qui se rendent coupables de violations du droit international humanitaire. Les problèmes des relations entre le Conseil et le Haut-Commissariat doivent être réglés dès à présent. Il a aussi lancé un appel pour l'intégration des valeurs traditionnelles dans les droits de l'homme.

M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) a indiqué que sa délégation appréciait le caractère direct et l'accessibilité du Haut-Commissariat. Il a toutefois souhaité que ces relations soient encore améliorées et suggéré que des consultations avec le Conseil aient lieu à cette fin. Le représentant indonésien a regretté que certains choisissent de politiser les débats dans l'enceinte des droits de l'homme et indiqué que le même principe d'impartialité valait pour le Conseil et pour le personnel du Haut-Commissariat. Concernant les droits des migrants, l'orateur a souligné que la récente crise économique avait aggravé la situation et appelé le Conseil à veiller à leur respect. Trois ans après la création du Conseil, on peut se targuer d'un certain nombre de réalisations dont le succès de la Conférence d'examen de Durban, même si celui-ci aurait pu être plus considérable si certains pays n'avaient pas choisi de s'exclure d'eux-mêmes, a-t-il encore indiqué.


Déclaration du Ministre de la justice et des affaires constitutionnelles du Kenya

M. MUTULA KILONZO, Ministre de la justice et des affaires constitutionnelles du Kenya, a déclaré que son pays a lancé un processus de mise au point d'un plan complet d'action dans le domaine des droits de l'homme. La politique vise à informer les ministères, départements et autres acteurs au sujet de l'intégration des droits de l'homme dans la planification nationale. La politique réaffirme en outre l'engagement du Gouvernement en faveur de la promotion et de la protection des droits de l'homme. Le but ultime de cette politique est de doter le pays d'un cadre pour la promotion des droits de l'homme de tous les Kényans. Elle est guidée par une vision des droits de l'homme devant s'appliquer à tous les aspects de la vie des individus. Cette démarche est d'autant plus nécessaire que le Kenya traverse une période difficile issue de la crise postélectorale qui a éclaté en 2007. La violence qui s'est déchaînée à cette occasion a entraîné de graves violations des droits de l'homme, notamment des meurtres et des viols. Cette crise a mis sur le devant de la scène des différences et tensions ethniques fondamentales concernant l'inégalité et la justice. Dans une large mesure, le critère de l'appartenance ethnique est un défi important pour de nombreux pays en voie de développement, en particulier au Kenya, dont la population ne partage pas de fort sentiment national. Le futur du pays réside dans la reconnaissance et la célébration de la diversité et la nécessité d'édifier une nation forte et cohérente.

Le Kenya est partie à la plupart des instruments internationaux et régionaux des droits de l'homme. Le Gouvernement a réalisé de grands progrès pour le respect des droits de l'homme. Il a notamment créé une institution nationale des droits de l'homme conforme aux principes de Paris, a été inscrit au mécanisme d'examen par les pairs du Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD), a adopté une législation favorable aux droits de l'homme, institué un «ombudsman» pour les droits de l'homme, notamment. Des progrès importants ont aussi été accomplis en matière de droits économiques, sociaux et culturels. Un cadre politique et juridique de lutte contre la corruption a été adopté pour consolider ces acquis. Des obstacles demeurent: la pauvreté et l'inégalité, l'accès insuffisant à l'éducation et à la terre, et le chômage. Le Kenya se heurte encore à des problèmes structurels, notamment dans le domaine de la justice, dont la faiblesse est source d'impunité et de manque de confiance dans les institutions, a admis le Ministre. La Constitution nationale contient encore des dispositions qui compromettent la réalisation des droits de l'homme. Le Gouvernement a donc engagé une refonte constitutionnelle qui devrait être achevée à la fin de cette année, a fait valoir le Ministre. Le Gouvernement a aussi institué un cadre d'action à l'horizon 2030, comprenant des mesures d'ordre social en particulier, dans les secteurs clés que sont l'eau, l'environnement et l'éducation. C'est la combinaison de pauvreté, d'inégalité et de chômage qui est à l'origine de nombre des maux affligeant le Kenya, a observé le Ministre.

M. Kilonzo a enfin observé que les droits de l'homme ne pourront progresser que par le biais d'un dialogue constructif et collectif. Dans ce contexte, le Ministre a déploré que le Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires, M. Philip Alston, se soit efforcé de déstabiliser les autorités kényanes en tentant de diviser les membres du Gouvernement de coalition. Le Gouvernement du Kenya n'en soutient pas moins l'action des titulaires de procédures spéciales du Conseil des droits de l'homme, a conclu le Ministre.


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