Aller au contenu principal

LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE RAPPORT DU NIGER

Compte rendu de séance

Le Comité des droits de l'enfant a examiné, aujourd'hui, le deuxième rapport périodique présenté par le Niger sur les mesures prises par ce pays pour donner effet aux dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant.

Présentant le rapport de son pays, la Ministre de la femme et de la protection de l'enfant du Niger, Mme Barry Bibata Gnandou, a attiré l'attention du Comité sur les progrès enregistrés par le Niger. Elle a ainsi fait observer que le taux de mortalité infantile est passé de 123‰ (1993-1998) à 81‰ (2006); que le taux brut de scolarisation est passé de 37,3% (2001) à 62,6% (2008); et que la prévalence des mutilations génitales féminines est passée de 4,5% (1998) à 2,2% (2006). Elle a également indiqué que le Gouvernement a créé une Commission nationale de lutte contre la traite des enfants, assortie d'un Plan d'action national qui a permis le rapatriement et la réhabilitation de plusieurs enfants victimes du trafic transfrontalier. Pour autant, beaucoup de défis restent à relever, s'agissant notamment de la lutte contre l'exploitation des enfants et les violences à leur encontre, de l'amélioration de la qualité de l'éducation, de la scolarisation des jeunes filles ou encore de la prise en charge nutritionnelle des enfants, a reconnu la Ministre. Le Niger a la volonté de protéger ses enfants et ses femmes, a insisté Mme Gnandou à l'issue de cette journée de dialogue; elle a toutefois attiré l'attention sur les contraintes, tant financières qu'en termes de ressources humaines, qui pèsent sur cette volonté.

La délégation du Niger était également composée de représentants du Ministère des affaires étrangères et de la coopération; du Ministère de l'éducation nationale; du Ministère de la fonction publique et du travail; du Ministère de la santé publique; du Cabinet du Premier Ministre; et de la Mission permanente du Niger auprès des Nations Unies à Genève.

La délégation a répondu aux questions posées par les membres du Comité s'agissant notamment de la place de la Convention dans l'ordre juridique interne; de la Commission nationale des droits de l'homme; des violences à l'égard des femmes et des enfants; des questions de santé et d'éducation; des adoptions; du travail des enfants; de la justice pour mineurs; ou encore du pluralisme juridique.

S'agissant de cette dernière question, le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Niger, M. Kamel Filali, s'est dit préoccupé par le fait que l'application de la Convention est loin d'être réalisée en raison du pluralisme juridique qui prévaut dans le pays. Il s'est néanmoins félicité des progrès accomplis en ce qui concerne, en particulier, l'enregistrement gratuit des naissances, la prévention et le contrôle du VIH/sida et la lutte contre les mutilations génitales féminines.

Présentant en fin de journée des observations préliminaires, la corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Niger, Mme Kamla Devi Varmah, a précisé que les recommandations que le Comité adoptera ultérieurement à huis clos avant de les rendre publiques à l'issue de sa session, le vendredi 12 juin prochain, devraient porter, entre autres, sur l'établissement de la définition de l'enfant, l'âge du mariage et la responsabilité pénale. Elle a en outre attiré l'attention sur l'importance que revêtent les questions relatives aux soins de santé de base et à l'accès à l'eau potable, ainsi que sur la nécessité de faire connaître la Convention aux enfants du pays.


Le Comité entamera demain matin, à 10 heures, l'examen du rapport périodique de la Roumanie (CRC/C/ROM/4).
Présentation du rapport

MME BARRY BIBATA GNANDOU, Ministre de la femme et de la protection de l'enfant du Niger, a précisé que le rapport de son pays est le fruit d'une large concertation entre le Gouvernement, la société civile et les partenaires du développement et qu'il a fait l'objet d'une vulgarisation dans toutes les régions du Niger. Elle a souligné que les observations formulées par le Comité en 2002, lors de l'examen du rapport initial du Niger, ont fait l'objet d'un suivi à travers la mise en place d'un plan de suivi des recommandations que le Comité avait alors adoptées.

Entre autres progrès enregistrés par son pays, la Ministre a souligné que d'importants investissements en faveur des enfants ont été réalisés. Les taux de mortalité infantile et infantilo-juvénile sont passés, respectivement, de 123‰ et 172‰ au cours de la période 1993-1998 à 81‰ et 126‰ en 2006 ; le taux brut de scolarisation est passé de 37,3% en 2001 à 62,6% en 2008 ; la prévalence des mutilations génitales féminines a connu une baisse, passant de 4,5% en 1998 à 2,2% en 2006 ; et des textes ont été adoptés instituant la gratuité de la consultation prénatale et des soins aux enfants de 0 à 5 ans. La Ministre a par ailleurs indiqué que le Gouvernement nigérien a créé une Commission nationale de lutte contre la traite des enfants, qui s'est dotée d'un Plan d'action national dont la mise en œuvre a permis le rapatriement de plusieurs enfants victimes du trafic transfrontalier, ainsi que leur réhabilitation.

Mme Gnandou a ensuite attiré l'attention sur le Programme de protection judiciaire et juvénile adopté par le Niger, qui a permis, d'une part, de développer un partenariat entre les acteurs intervenant en faveur des enfants en danger et, d'autre part, d'améliorer les performances en matière de prise en charge des enfants. Elle a aussi fait part de l'adoption d'une politique nationale d'état civil qui vise à assurer une meilleure couverture du pays et à rehausser, entre autres, le taux d'enregistrement des enfants à la naissance.

En dépit des progrès enregistrés, la Ministre a reconnu que beaucoup de défis restent à relever, s'agissant notamment de la lutte contre l'exploitation des enfants et les violences à leur encontre; de l'amélioration de la qualité de l'éducation; de la scolarisation des jeunes filles; ou encore de la prise en charge nutritionnelle des enfants. Relever ces défis exigera un renforcement de la mobilisation des ressources à tous les niveaux, a souligné Mme Gnandou. Au regard de la volonté politique, de l'engagement des acteurs et du dynamisme de la coopération internationale, elle s'est dite optimiste quant à l'amélioration de la situation des droits de l'enfant au Niger dans les années à venir.

Le deuxième rapport périodique du Niger (CRC/C/NER/2) indique notamment que le pays est partie à l'Accord multilatéral de coopération en matière de lutte contre la traite des enfants en Afrique de l'Ouest, signé à Abidjan le 27 juillet 2005. En outre, un projet de loi sur la traite des personnes est en préparation par le Gouvernement, fait savoir le rapport. Il souligne par ailleurs que la loi portant modification du Code pénal a, dans le souci de mieux protéger les enfants, institué de nouvelles infractions, concernant notamment les mutilations génitales féminines et le crime d'esclavage. Le rapport indique aussi que des actions de renforcement des capacités en matière de connaissance des droits de l'enfant et de formulation des projets sont menées chaque année au bénéfice de l'ensemble des acteurs susceptibles de contribuer à une meilleure protection de l'enfance. D'autre part, en vue de parachever l'harmonisation de la législation existante et du droit coutumier avec la Convention, un projet de code de l'enfant a été élaboré. Le rapport indique par ailleurs qu'un cadre de coordination a été créé en matière de justice juvénile en vue d'une meilleure prise en charge de l'enfance en difficulté. Un service central de protection des mineurs - ou brigade des mineurs - vient d'ailleurs d'être créé au sein de la police. Le rapport précise que le Comité national pour la survie, la protection et le développement de l'enfant créé en 1991 dans le but de coordonner les actions en faveur de l'enfance a été maintenu et qu'une étude en vue de sa redynamisation est envisagée. Un nouveau Plan d'action national pour la survie, la protection et le développement de l'enfant a été élaboré pour la période 2006-2010. Il a pour objectifs de promouvoir et assurer une existence saine aux enfants; de leur assurer une éducation et des soins de santé de qualité; et de les protéger contre tout acte de maltraitance et d'exploitation.

Le rapport indique qu'en dépit des efforts déployés par l'État pour rendre effectives les dispositions de la Convention, les actions entreprises se heurtent à des obstacles généraux. Le pluralisme juridique, tout d'abord, crée une situation de conflit des droits, la confrontation entre le droit étatique et le droit traditionnel faisant obstacle à l'instauration d'un ordre juridique effectif; mieux, elle conduit en pratique à une application sélective des dispositions de la Convention en ce que chaque membre du corps social invoque, en fonction de la situation, le type de règles qui l'arrange. Parmi les autres obstacles figure l'inadéquation entre les moyens et les missions du Ministère chargé de la protection de l'enfant. En effet, précise le rapport, le budget alloué à ce dernier représente seulement un peu plus de 0,02 % du budget de l'État, tandis que son personnel est très insuffisant en nombre et nécessite un renforcement de capacités dans plusieurs domaines. Le rapport reconnaît que l'harmonisation du droit national avec les dispositions de la Convention n'a pas encore concerné tous les aspects visés par cet instrument. Le Code de l'enfant, qui devrait mettre fin au pluralisme juridique en matière de droits de l'enfant, en est encore au stade de projet, souligne le rapport.


Examen du rapport

Observations et questions des membres du Comité

M. KAMEL FILALI, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Niger, a remercié le Niger pour la présentation de son deuxième rapport périodique, tout en indiquant que celui-ci a été soumis avec un retard significatif, puisqu'il devait être présenté en 1997. Il a noté que le Niger est un pays dont la croissance démographique reste très élevée, avec un taux de fécondité de huit enfants par femme. Il a souligné que les principales difficultés que rencontrent les enfants du Niger sont un accès limité aux services sociaux de base et la pauvreté endémique. Cet état des lieux difficile ne doit en aucun cas nous amener à conclure que rien ne se fait, a ajouté M. Filali, se félicitant des progrès accomplis s'agissant notamment de l'enregistrement gratuit des naissances, de la prévention et du contrôle du VIH/sida et de la lutte contre les mutilations génitales féminines.

Le rapporteur s'est toutefois dit préoccupé par le fait que l'application de la Convention est loin d'être réalisée en raison du pluralisme juridique qui prévaut au Niger. Comment faire pour sortir de ce qui paraît être une impasse, a-t-il demandé? Saluant la mise en place d'une Commission en vue de l'harmonisation des lois avec les conventions internationales auxquelles le pays est partie, il a invité la délégation à donner plus d'informations sur cet organe.

M. Filali a également souhaité avoir des précisions sur la Commission nationale des droits de l'homme et s'est notamment enquis de la conformité de cette institution avec les Principes de Paris. Est-elle habilitée à recevoir des plaintes, a-t-il également demandé ?

Enfin, M. Filali a attiré l'attention sur le recours aux châtiments corporels dans les écoles coraniques. Des inspections sont-elles réalisées et des condamnations ont-elles été prononcées à ce sujet, a-t-il demandé?

MME KAMLA DEVI VARMAH, corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Niger, a pour sa part demandé un complément d'informations sur les mesures précises prises par le pays en faveur de l'enregistrement des naissances. Elle s'est également enquise du suivi médical apporté aux mères infectées par le VIH/sida. La corapporteuse a aussi demandé des détails sur les efforts déployés en matière d'éducation des fillettes dans les zones les plus pauvres. Qu'en est-il de l'âge minimum du mariage, a-t-elle par ailleurs demandé? Enfin, elle s'est enquise des mesures prises par le Gouvernement en vue d'éradiquer totalement les châtiments corporels.

Une autre experte s'est interrogée sur les efforts déployés par le Niger pour sensibiliser la population à la Convention. Comment les enfants connaissent-ils leurs droits?

Un membre du Comité a souhaité savoir si les dispositions de la Convention étaient directement applicables. Cet expert s'est dit préoccupé par l'existence, au Niger, de trois sources de droit: le droit positif, le droit coutumier et la charia. Existe-t-il une définition commune de l'enfant dans ces trois systèmes, a-t-il demandé?

Quel est le statut réel du Comité national pour la survie, la protection et le développement de l'enfant, a pour sa part demandé un expert? Notant que cette dernière institution joue un rôle crucial pour la coordination des politiques relatives aux enfants, il a souhaité savoir si ce Comité dispose d'un budget suffisant et des ressources humaines adéquates.

Une experte s'est enquise de la coopération des autorités avec la société civile, souhaitant obtenir davantage d'informations sur la participation de la société civile à l'élaboration des politiques et programmes en faveur des enfants. Constatant qu'il y a beaucoup d'organisations non gouvernementales (ONG) actives au Niger, un autre expert s'est demandé si le pays a, lors de l'élaboration de son rapport, tenu compte des remarques des ONG au sujet de la situation des droits de l'enfant.

Faisant remarquer que le Niger est frappé par la pauvreté voire l'extrême pauvreté, qui touchent avant tout les femmes et les enfants, un expert s'est enquis des axes d'intervention du Gouvernement pour combattre la pauvreté. Quels programmes ont-ils été mis en place en vue de la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement?

Une experte a fait part de ses préoccupations face à la malnutrition chronique qui touche 39% de la population et serait responsable de 60% des morts d'enfants de moins de 5 ans.

Une autre experte a souhaité savoir s'il existe un Plan national visant à éradiquer la violence à l'égard des filles, y compris les mutilations génitales féminines. Sur un même registre, un autre membre du Comité s'est demandé si les personnes qui, comme les médecins, se trouvent en contact avec d'éventuelles victimes de violence ont le devoir de signaler les cas de violence. Existe-t-il des mécanismes accessibles pour dénoncer des violences et porter plainte, a demandé une experte?

En matière d'éducation, un expert a dit avoir appris qu'il n'y a pas assez d'argent pour acheter des bureaux dans les écoles et que les salaires des enseignants ont été réduits. Le budget alloué à l'éducation est-il suffisant, s'est-il interrogé?

Renseignements complémentaires fournis par la délégation

S'agissant de la place de la Convention dans l'ordre juridique interne du Niger, la délégation a indiqué qu'en vertu de la Constitution, une fois ratifiée, une norme internationale s'impose et est applicable sur l'ensemble du territoire national. Ainsi, la Convention peut-elle être invoquée par toute personne et doit être appliquée, a souligné la délégation.

Évoquant la situation générale dans le pays, la délégation a attiré l'attention sur la vitalité de la démocratie nigérienne. Elle a rappelé que des élections libres et transparentes se sont déroulées en 1993, ouvrant la voie à un processus démocratique qui a été interrompu à trois reprises par des coups d'État. Toujours pour illustrer la vitalité de cette démocratie, la délégation a fait valoir que le Niger a été le premier pays africain à expérimenter la cohabitation. En outre, le pays a déjà fait usage de la motion de censure contre le Gouvernement.

La délégation a par ailleurs attiré l'attention sur la décentralisation qui prévaut au Niger et qui, pour être effective, exige des moyens. Les services décentralisés sont chargés de la mise en œuvre des directives édictées au niveau national.

Le pluralisme juridique qui prévaut au Niger nous préoccupe également, a assuré la délégation, précisant que des solutions à ce problème sont recherchées. Précisément, le Gouvernement cherche à mettre un terme à ce pluralisme en faisant adopter un code de l'enfance, a souligné la délégation. À cet égard, la délégation a indiqué que le projet de code de l'enfance est aujourd'hui à l'étude au niveau du Secrétariat général du Gouvernement, ce qui signifie que le projet de code a déjà été avalisé par un atelier regroupant les différentes composantes de la nation et qu'il est maintenant soumis à l'appréciation d'un comité spécial. Les réalités socioculturelles du Niger ne peuvent pas être cachées, a toutefois souligné la délégation, faisant référence à l'ancrage des coutumes qui entrave la mise en place d'un tel code de l'enfance. La délégation a néanmoins assuré que le pays n'a pas pour autant baissé les bras et qu'une fois adopté, ce code mettra fin au pluralisme juridique pour tout ce qui a trait à l'enfance. La délégation a tenu à rassurer le Comité quant au contenu du projet de code de l'enfance qui, a-t-elle assuré, va dans la droite ligne de la Convention.

Pour ce qui est des questions touchant aux femmes, la délégation a indiqué que le Gouvernement a repris un projet de code du statut personnel qui devrait lui aussi mettre un terme au pluralisme existant s'agissant de ces questions. La réflexion sur ces questions doit être mûrie, a insisté la délégation, précisant que le Gouvernement s'efforce d'adopter une démarche précautionneuse.
S'agissant des questions de santé, la délégation a souligné que la situation sanitaire de la mère et de l'enfant, bien que préoccupante, a connu une amélioration ces dernières années. Elle a notamment rappelé que le Gouvernement a adopté une feuille de route pour lutter contre la mortalité maternelle et infantile. Un Plan national en matière de santé génésique a également été mis en place. Aujourd'hui, tous les centres de santé proposent des produits contraceptifs, a souligné la délégation, précisant que le Gouvernement a décrété la gratuité de la planification familiale. En outre, des programmes de santé génésique sont mis en place pour les jeunes à travers tout le pays et il existe des centres d'information à leur intention. Par ailleurs, des initiatives de prévention de la transmission du VIH/sida de la mère à l'enfant ont été lancées.

Pour ce qui est de la malnutrition, la délégation a assuré que des efforts sont déployés afin de combattre ce problème. Il existe une véritable volonté politique de lutte contre la malnutrition, a assuré la délégation, soulignant qu'un département spécial, chargé uniquement de la malnutrition, a été créé au sein du Ministère de la santé. La délégation a par ailleurs fait part d'une initiative sur le suivi de la croissance des enfants, qui met la population à contribution afin de déceler les problèmes.

Toutes les violences à l'égard des femmes et des enfants sont prises en charge, a par ailleurs assuré la délégation. Elle a précisé que le Code pénal a été modifié pour tenir compte des nouvelles formes de violence contre les femmes et les enfants. Toutes les violences sont punies par le code pénal, a-t-elle insisté. Elle a également fait part de la mise sur pied d'un plan national de lutte contre la violence à l'égard des femmes et des enfants. La délégation a souligné que la société nigérienne n'est pas une société de dénonciation; dès lors, l'activisme est essentiel pour sensibiliser la population et faire comprendre que dénoncer des violences sert à protéger les victimes, a-t-elle expliqué. La délégation a ajouté qu'une compagnie téléphonique s'est dite prête à offrir une ligne de téléphone gratuite pour les cas de violence. Il s'agit maintenant d'organiser tout le service qui suivra ces appels afin d'apporter une réponse systématique.

En ce qui concerne les questions d'éducation, la délégation a précisé que ce n'est pas le Ministère de l'éducation nationale qui paie les enseignants. Le budget national est structuré en différentes rubriques de dépenses et les budgets des ministères sont pour leur part des budgets de fonctionnement. La délégation a souligné que la progression du budget alloué à l'éducation se fait en fonction des besoins nouveaux; il convient ici de rappeler le taux de natalité extrêmement élevé qui prévaut au Niger. La délégation a fait part de la mise en place d'un programme présidentiel spécial qui a pour objectif de bâtir des infrastructures pour les écoles et les dispensaires. Le financement de ce programme est assuré par les ressources dégagées suite à l'annulation de la dette du Niger dans le cadre de l'Initiative en faveur des pays pauvres très endettés, a-t-elle précisé.

La délégation a fait remarquer qu'en dépit de toute sa bonne volonté, le Niger ne peut agir que dans le cadre des ressources dont il dispose. Avec des ressources limitées, le Niger a déjà fait beaucoup, a-t-elle ajouté.

Invitée à donner quelques précisions sur les types d'enseignement proposés au Niger, la délégation a expliqué qu'il existe des écoles publiques, privées, communautaires et coraniques. Les écoles publiques sont gratuites, a-t-elle précisé. Elle a assuré que l'enseignement est surveillé et encadré dans tous les établissements et que des inspections sont régulièrement menées, y compris dans les écoles coraniques.

En réponse à une question relative à la mendicité des enfants qui vont à l'école coranique, la délégation a fait part de la signature, entre dix pays, d'un accord multilatéral relatif à la traite des enfants talibés. La police, la gendarmerie, les travailleurs sociaux et les juges ont été formés pour faire face à ce problème et participent à la lutte contre ce trafic, a-t-elle indiqué.

S'agissant du travail des enfants, la délégation a souligné que le Niger a ratifié les deux principales conventions de l'Organisation internationale du travail relatives à cette question, à savoir la Convention n°138 sur l'âge minimum d'admission à l'emploi et la Convention n°182 sur l'élimination des pires formes de travail des enfants. La délégation a expliqué que l'âge minimum du travail a été fixé à 14 ans et que les conditions dans lesquelles les enfants peuvent travailler sont strictement codifiées. Il est interdit d'employer un enfant de moins de 12 ans et entre 12 et 14 ans, l'enfant ne peut effectuer que des travaux légers qui n'entravent pas sa scolarisation, a ensuite précisé la délégation.

En matière de justice des mineurs, la délégation a expliqué qu'aucune peine ne peut être infligée à un enfant de moins de 13 ans. Jusqu'à cet âge, l'enfant ayant commis une infraction n'est pas condamné car il est considéré comme irresponsable. Cela n'empêche pas que d'autres mesures puissent être prises, comme par exemple des soins psychologiques obligatoires. À partir de 14 ans, on cherche à évaluer la capacité de discernement de l'enfant ayant commis une infraction, a ajouté la délégation. S'agissant de la privation de la liberté, les conditions de détention sont moins pénibles pour les enfants que pour les adultes, a souligné la délégation, précisant que les enfants sont, bien entendu, séparés des adultes. L'emprisonnement des enfants en conflit avec la loi reste l'exception, a ajouté la délégation.

En ce qui concerne l'adoption, la délégation a indiqué qu'elle n'est accordée qu'en dernier recours au Niger; l'éligibilité des parents à adopter l'enfant est alors dûment vérifiée. Pour ce qui est des adoptions internationales, des garde-fous sont également prévus, a ajouté la délégation, rappelant qu'un dossier doit être rempli qui est ensuite dûment étudié; ce n'est qu'une fois que tout a été vérifié que l'adoption est accordée. Même après l'adoption, a ajouté la délégation, le Niger conserve un droit de regard sur l'adoption et exige que lui soit présenté un rapport chaque année, photos à l'appui. Parfois, une personne dûment mandatée par le Ministère concerné se déplace pour constater les conditions de vie dans lesquelles les enfants adoptés évoluent, a précisé la délégation.

Interrogée sur les relations du Niger avec la société civile, la délégation a assuré que le Gouvernement travaille en parfaite harmonie avec la société civile. À chaque fois que le Gouvernement discute d'un texte important - comme le code de l'enfance ou l'étude sur les orphelins et autres enfants vulnérables -, la société civile est consultée et est associée à l'élaboration dudit texte, à sa validation et aux campagnes de sensibilisation visant à le faire accepter auprès de la population.

La Commission nationale des droits de l'homme est totalement indépendante, a par ailleurs assuré la délégation. Comme cette Commission n'est pas encore représentée sur l'ensemble du territoire, des mesures ont été prises pour éviter que certaines régions ne soient pénalisées de ce point de vue. La Commission nationale des droits de l'homme dispose de sa propre indépendance économique, puisqu'elle possède son propre budget, a ajouté la délégation. Cette Commission dispose en outre d'une division spécialement consacrée aux droits des femmes et des enfants. La Commission nationale a la possibilité de mener des investigations; mais une fois la justice saisie, ce n'est plus elle qui s'occupe de l'affaire, a précisé la délégation.


Observations préliminaires

Présentant des observations préliminaires, MME KAMLA DEVI VARMAH, corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Niger, a estimé que le dialogue d'aujourd'hui a permis de cerner les insuffisances et de disposer d'un état des lieux de la situation actuelle des droits de l'enfant au Niger. Elle a souligné que les recommandations du Comité devraient permettre au Gouvernement de disposer d'orientations pour introduire de nouvelles législations, de nouvelles institutions, de nouveaux mécanismes et de nouvelles études afin d'assurer la mise en œuvre des droits énoncés dans la Convention. Ces recommandations, a-t-elle précisé, porteront notamment sur l'établissement de la définition de l'enfant, l'âge du mariage ou encore la responsabilité pénale. La corapporteuse a également attiré l'attention sur l'importance que revêtent les questions liées aux soins de santé de base et à l'accès à l'eau potable, ainsi que sur la nécessité de faire connaître la Convention aux enfants du pays.

Concluant cette journée de discussion, MME BARRY BIBATA GNANDOU, Ministre de la femme et de la protection de l'enfant du Niger, a remercié le Comité pour la franchise du dialogue qui s'est noué aujourd'hui. Elle a indiqué avoir pleinement conscience que toutes les questions qui ont été posées aujourd'hui ont pour objectif de permettre au Niger de mettre en œuvre une politique de bien-être pour ses enfants. Aussi, a-t-elle assuré que son Gouvernement prendrait dûment en considération les recommandations que le Comité va formuler à l'issue de cette session. Le Niger a la volonté de protéger ses enfants et ses femmes, a insisté la Ministre. Elle a toutefois attiré l'attention sur les contraintes, tant financières qu'en termes de ressources humaines, qui pèsent sur cette volonté.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

CRC09021F