Fil d'Ariane
LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE SE PENCHE SUR LA SITUATION AU PÉROU
Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale s'est penché, cet après-midi, sur la mise en œuvre de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale au Pérou en présence d'une délégation péruvienne. Le Comité a par ailleurs accepté la requête du Bélize de surseoir à l'examen de la situation dans ce pays en attendant qu'il présente un rapport. Le Comité avait prévu d'examiner la situation dans ces deux pays au titre de la procédure de bilan applicable aux pays qui accusent un important retard dans la présentation de leurs rapports.
Dirigée par le Président du Directoire de la compagnie pétrolière nationale (PERUPETRO S.A.), M. Daniel Antonio Saba de Andrea, la délégation péruvienne a assuré que le retard qu'accuse la présentation du rapport péruvien au Comité ne doit pas être interprété comme un manque de volonté politique de la part du Gouvernement. La délégation a fait part des nombreuses mesures prises par le Pérou afin de promouvoir la participation citoyenne et la protection de l'environnement dans le contexte des activités menées dans le pays dans le secteur des hydrocarbures.
Certains membres du Comité ont fait observer qu'au cours d'une réunion que les experts ont eue avec des représentants d'organisations non gouvernementales préalablement à la présente séance publique, les ONG ont présenté un tableau de la situation bien différent de celui qui émerge de la présentation faite cet après-midi par la délégation péruvienne.
La délégation a indiqué que le Pérou avait l'intention de présenter son rapport au Comité avant la fin de cette année.
Demain matin, à 10 heures, le Comité entendra un représentant du Haut Commissariat aux droits de l'homme, qui fera une présentation sur l'Index universel des droits de l'homme, une base de données conçue pour faciliter l'accès aux documents publiés par les sept organes conventionnels qui surveillent la mise en œuvre des principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme. Demain après-midi, à 15 heures, il entamera l'examen du rapport périodique de l'Autriche.
Examen de la mise en œuvre de la Convention au Pérou
M. EDUARDO PONCE VIVANCO, Représentant permanent du Pérou auprès des Nations Unies à Genève, a réitéré l'engagement de son pays en faveur du travail du Comité et d'une coopération avec cet organe. La Ministre de la justice péruvienne, lors de l'examen du Pérou par le Groupe de travail du Conseil des droits de l'homme chargé de l'examen périodique universel, a réitéré l'engagement du Pérou de se mettre à jour concernant la présentation des rapports dus par le pays aux organes de traités, a-t-il rappelé. Le retard qu'accuse la présentation du rapport dû au Comité par le Pérou ne doit pas être interprété comme un manque de volonté politique de la part du Gouvernement; il est plutôt imputable à une surcharge procédurale de travail liée au nombre de rapports que le pays doit présenter aux niveaux international et régional, a indiqué le Représentant permanent.
M. DANIEL ANTONIO SABA DE ANDREA, Président du Directoire de PERUPETRO S.A., a indiqué qu'il présidait la délégation péruvienne au nom du secteur de l'énergie et des mines. Il a rendu compte des efforts que déploie le Gouvernement pour promouvoir la participation citoyenne et la protection de l'environnement. Ainsi, a-t-il assuré, les activités d'extraction au Pérou se font-elles désormais en garantissant le droit à la vie et à la santé et en protégeant l'environnement, ce qui, il est vrai, n'a pas toujours été le cas par le passé. Aujourd'hui, il n'y a plus de rejet d'hydrocarbures dans le fleuve Corrientes, a assuré M. Saba de Andrea. Il existe aujourd'hui une norme juridique grâce à laquelle ces pratiques préjudiciables ont été éliminées, a-t-il fait valoir.
La Constitution péruvienne garantit le droit à la propriété pour les communautés paysannes et natives, dont les droits coutumiers sont également reconnus, a poursuivi M. Saba de Andrea. Au Pérou, l'État garantit le droit à l'égalité de tous devant la loi, a-t-il en outre souligné, ajoutant que personne ne peut faire l'objet d'une discrimination pour quelque raison que ce soit.
Concernant la situation des Achuars, Quechuas et Urarinas dans la région du fleuve Corrientes, M. Saba de Andrea a souligné qu'elle est liée aux lots d'hydrocarbures 1AB et 8 qui ont commencé leurs activités dans les années 1970. L'État péruvien ayant reconnu l'existence de niveaux importants de pollution dans le fleuve Corrientes, il créa en septembre 2006 une Commission multisectorielle chargée d'étudier la situation socioenvironnementale de la population affectée et de proposer des mécanismes pour l'améliorer. Parallèlement, fut approuvé un Plan d'action socioenvironnemental visant à améliorer les conditions socioéconomiques des populations affectées. Ces deux instruments bénéficient d'un suivi mensuel des progrès réalisés, avec la participation effective de l'État et des organisations autochtones représentatives de la population.
M. Saba de Andrea a ensuite fourni des informations sur les contrats d'hydrocarbures en voie d'exploration en vue de l'exploitation des lots 104 et 106. S'agissant du lot 104, pour lequel un contrat de licence a été souscrit en avril 2005 avec l'entreprise Burlington Resources Peru Limited, une étude préalable d'impact environnemental est en cours, a-t-il indiqué. Pour le lot 106, a ajouté M. Saba de Andrea, l'étude préalable d'impact environnemental est en voie d'élaboration. Aucune activité d'hydrocarbures, qu'elle soit d'exploration ou d'exploitation, ne peut être menée sur un lot pétrolier sans l'implication de la population locale lors de la réalisation des études d'impact préalables, a assuré M. Saba de Andrea. La participation citoyenne dans les activités d'hydrocarbures a été officialisée en tant que politique d'État par le biais d'un règlement normatif ouvrant des espaces de dialogue et d'implication locale dès le stade de la négociation, a-t-il ajouté.
MME SONIA LOU ALARCÓN, avocate au Bureau général de gestion sociale du Ministère de l'énergie et des mines du Pérou, a souligné que le Pérou garantit la protection des droits des peuples autochtones, quelle que soit la modalité d'organisation de ces peuples ou communautés. En mai dernier, un nouveau règlement de participation citoyenne a été adopté pour les activités dans le secteur minier, a-t-elle souligné.
La Constitution reconnaît le droit de propriété des peuples autochtones sur les terres où ils habitent, a rappelé Mme Alarcón. Si préjudice il y a à l'issue d'un projet, il doit y avoir indemnisation à l'issue d'un processus impliquant les deux parties, a-t-elle souligné.
Mme Alarcón a en outre fait part du récent décret adopté au Pérou portant approbation du nouveau règlement environnemental pour les exploitations minières. L'approbation de l'étude environnementale n'implique pas en soi le droit de posséder des terres et d'en tirer profit, a précisé Mme Alarcón.
Mme Alarcón a par ailleurs indiqué que l'État péruvien partage plusieurs des préoccupations qui ont été exprimées par le Défenseur du peuple dans son rapport extraordinaire. C'est précisément pour cela qu'a été créé un Ministère de l'environnement, a-t-elle fait valoir.
M. CÉSAR SARASARA ANDREA, Conseiller auprès de la Confédération des nationalités amazoniennes du Pérou (CONAP), a indiqué que son organisation ne ménagerait aucun effort pour continuer à promouvoir le dialogue tripartite entre l'État péruvien, les entreprises et les peuples autochtones. Il convient de veiller à ce que les autochtones comprennent bien ce que sont les entreprises et les types de négociation en jeu, faute de quoi ils ne seront que des mendiants, a-t-il souligné. Les peuples autochtones ont besoin d'une autonomie économique qui, seule, leur permettra de se doter de leurs propres institutions, a-t-il ajouté. Il a souligné que l'Amazonie n'est plus ce qu'elle était: de nos jours, il n'y a plus d'animaux comme ceux qu'avait pour habitude de mettre en avant pour cette région le National Geographic; il n'y a même plus de nourriture.
Un membre du Comité s'est félicité de la présence d'une délégation péruvienne, aujourd'hui, devant le Comité. Il s'est réjoui des mesures que prend le Gouvernement péruvien pour protéger l'environnement et, plus globalement, «le droit de la nature». En ce qui concerne l'impact du rejet d'hydrocarbures, il a souligné que ce type de rejet ne touche pas seulement les sols et les sous-sols, mais également l'air, avec des conséquences pour l'effet de serre. Du fait de la circulation de l'air, cet impact sur l'air a des conséquences nationales mais aussi transnationales, a rappelé l'expert. Il s'est enquis des mesures prises par le Pérou pour promouvoir l'énergie durable, solaire ou éolienne par exemple, qui, à un moment ou un autre, devra se substituer aux hydrocarbures.
Un autre membre du Comité a indiqué qu'au cours d'une réunion que les experts ont eue avec des représentants d'organisations non gouvernementales préalablement à la présente séance publique, les ONG ont présenté un tableau de la situation bien différent de celui qui émerge de la présentation faite cet après-midi par la délégation péruvienne. Les ONG ont en particulier insisté sur l'importance que revêt à leurs yeux l'application correcte de l'accord tripartite passé en l'État, les entreprises et les communautés autochtones.
Un expert a souhaité savoir si les consultations menées auprès des autochtones sont faites au préalable, en toute connaissance de cause et en toute bonne foi, comme le veut la Convention n°169 de l'Organisation internationale du travail sur les droits des peuples indigènes et tribaux.
Un autre expert a souligné que le débat d'aujourd'hui est crucial: il porte sur le conflit entre l'intérêt que peuvent représenter les activités d'hydrocarbures ou minières pour répondre aux besoins économiques d'un pays et l'impératif de protection des populations rurales et autochtones. En la matière, seul le dialogue peut fournir la clef, a souligné l'expert. Lorsque aucun accord ne peut être conclu et que les revendications des populations concernées semblent sérieuses, l'État et les entreprises sont-ils disposés à renoncer à l'exploitation ou bien la pression de l'intérêt économique est-elle toujours la plus forte, a souhaité savoir cet expert?
La délégation a indiqué que le Pérou avait l'intention de présenter son rapport au Comité avant la fin de cette année, de manière à ce qu'il puisse être examiné lors de la prochaine session de cet organe.
Procédure de bilan applicable au Bélize
Exposant la situation en ce qui concerne le Bélize, le Secrétaire du Comité, M. TORSTEN SHACKEL, a rappelé que le Comité n'a encore jamais reçu de rapport initial de ce pays, pas plus que n'ont été fournies par le pays les informations qui lui ont été demandées concernant la population autochtone maya. Dans une lettre adressée récemment au Comité, le Bélize explique qu'il y a eu des élections cette année dans le pays, ce qui a retardé la préparation du rapport attendu par le Comité, et lui demande donc d'accepter un report de l'examen de la situation du pays.
Aussi, le Comité a-t-il décidé d'accéder à cette requête et de demander au Haut Commissariat aux droits de l'homme s'il serait en mesure d'aider le Bélize dans la rédaction de son rapport dû au Comité.
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
CRD08022F