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LA CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT ENTEND L’ADMINISTRATEUR DU DÉPARTEMENT NATIONAL DE SÉCURITÉ NUCLÉAIRE DES ÉTATS-UNIS

Compte rendu de séance
Elle entend également des déclarations de l’Algérie, de la Pologne, de la Malaisie et de l’Iran

La Conférence du désarmement a entendu, ce matin, une déclaration de l’Administrateur du Département national de sécurité nucléaire des États-Unis, M. Thomas D’Agostino, ainsi que des interventions de l’Algérie, de la Pologne, de la Malaisie et de l’Iran.

M. D’Agostino a souligné qu’en 2007, avec cinq ans d’avance, les États-Unis avaient achevé la réduction de leur stock d’armes nucléaires initialement annoncée pour 2012. Aussi, au mois de décembre dernier, le Président Georges W.Bush a-t-il annoncé de nouvelles réductions à venir. M. D’Agostino a ensuite insisté sur les mesures concrètes prises par son pays en matière de démantèlement des armes nucléaires et de retraitement des matières fissiles, ainsi que sur les programmes mis en place par les États-Unis pour assurer la sécurité des matières nucléaires et radiologiques de par le monde et pour assurer la détection et la dissuasion des transferts illicites de matières nucléaires. Malgré ces efforts considérables, la prolifération s’est aggravée, a poursuivi M. D’Agostino. Le TNP reste un élément central de notre régime de non-prolifération, a-t-il souligné.

Il est évident que l’avenir de l’environnement sécuritaire n’est pas favorable, a déclaré M. D’Agostino. Il faut donc veiller à ce que l’arsenal de dissuasion des États-Unis corresponde aux besoins de sécurité de leurs alliés et veiller à ce que d’autres ne mettent pas au point des armes nucléaires au moment où les Etats-Unis, eux, réduisent leur stock de ces armes, a-t-il souligné. Signer un traité d’interdiction des matières fissiles est un objectif réalisable et souhaitable pour la Conférence et les États-Unis sont donc toujours favorables au texte présenté devant cette Conférence en 2006, a fait savoir M. D’Agostino.

Ce matin, l’Algérie et la Malaisie sont intervenues pour rappeler la priorité absolue que constitue, selon elles, le désarmement nucléaire. La Pologne, pour sa part, a indiqué que son pays assigne une claire priorité au lancement, sans condition préalable, de la négociation sur un traité d’interdiction de la production de matières fissiles à des fins d’armement.

Au registre du désarmement nucléaire, a relevé l’Algérie, on peut certes constater des réductions des arsenaux nucléaires par les puissances nucléaires dans le cadre d’accords multilatéraux ou de décisions unilatérales. Mais ces mesures ne répondent pas aux critères d’irréversibilité, de transparence et de vérification arrêtés par consensus par les États parties au TNP en 2000, a souligné l’Algérie. La Malaisie a, elle aussi, rappelé que les réductions en matière de déploiement et de statut opérationnel des armes nucléaires ne sauraient se substituer à de véritables réductions qui soient irréversibles et visent l’élimination totale de ce type d’armes.

La Malaisie et l’Algérie ont en outre indiqué attendre avec intérêt la proposition devant être prochainement soumise par le Gouvernement russe au sujet de la prévention d’une course aux armements dans l’espace.

L'Iran a pour sa part rappelé le droit inaliénable de tout État membre du TNP de produire de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques et a souligné que, s'agissant de l'Iran, l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) n’a pas constaté d’indication de détournement de matières nucléaires à des fins d’armement.

En fin de séance, la Conférence a accepté la demande de participation à ses travaux en tant qu’observateur émanant de la Guinée.

Lors de sa prochaine séance plénière publique, mardi prochain 12 février, à 10 heures, la Conférence entendra le Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, M. Sergey Lavrov.


Aperçu des déclarations

M. THOMAS D’AGOSTINO, Administrateur du Département national de sécurité nucléaire des États-Unis, a fait part des mesures importantes prises par son pays en ce qui concerne les questions inscrites aux points 1 et 2 de l’ordre du jour de la Conférence, s’agissant donc de la cessation de la course aux armements nucléaires et du désarmement nucléaire.

Signer un traité d’interdiction des matières fissiles est un objectif réalisable et souhaitable pour la Conférence et les États-Unis sont donc toujours favorables au texte présenté devant cette Conférence en 2006, a-t-il poursuivi. En 2004, a rappelé M. D’Agostino, le Président des États-Unis a annoncé que le pays allait réduire considérablement son stock d’armes nucléaires d’ici 2012. En 2007, avec cinq ans d’avance, ces réductions étaient achevées, de sorte que le 18 décembre dernier, le Président Bush a annoncé de nouvelles réductions à venir, a souligné M. D’Agostino.

M. D’Agostino a souligné que pour alléger les tensions internationales et la confiance, il faut renforcer le désarmement. Nous avons beaucoup progressé pour satisfaire nos engagements en vertu de l’article VI du Traité de non-prolifération nucléaire (TNP), a-t-il déclaré. À l’heure actuelle, il n’y a pas de course aux armements d’un point de vue global et l’on est pour l’instant davantage préoccupé par la course régionale aux armements, a-t-il indiqué.

M. D’Agostino a ensuite insisté sur les mesures concrètes prises par son pays en matière de démantèlement des armes nucléaires et de retraitement des matières fissiles. Il a notamment mis l’accent sur les mesures importantes prises par son pays pour démanteler ses ogives nucléaires. Les États-Unis ont cessé depuis bien des années de produire de l’uranium fortement enrichi et du plutonium, a-t-il ajouté.

Il est évident que l’avenir de l’environnement sécuritaire n’est pas favorable, a poursuivi M. D’Agostino. Il faut donc veiller à ce que l’arsenal de dissuasion des États-Unis corresponde aux besoins de sécurité de leurs alliés et veiller à ce que d’autres ne mettent pas au point des armes nucléaires au moment où les Etats-Unis, eux, réduisent leur stock de ces armes, a-t-il souligné. Une fois qu’auront été pleinement mises en œuvre les exigences du Traité de Moscou, se posera la question d’envisager une commission des deux parties (États-Unis et Fédération de Russie) pour examiner la situation nucléaire d’un point de vue global, a-t-il par ailleurs indiqué.

M. D’Agostino a réitéré la volonté des États-Unis de respecter leur engagement de ne pas procéder à des essais nucléaires souterrains. Les États-Unis – a-t-il ajouté – estiment qu’il serait utile, comme cela a été proposé au Congrès lundi dernier, de procéder à un effort d’étude sur une ogive fiable de remplacement, appelée à remplacer les ogives qui avaient été conçues durant la guerre froide.

M. D’Agostino a par ailleurs attiré l’attention de la Conférence sur les programmes mis en place par son pays pour, entre autres, assurer la sécurité des matières nucléaires et radiologiques de par le monde et pour assurer la détection et la dissuasion des transferts illicites de matières nucléaires.

Malgré ces efforts considérables, la prolifération s’est aggravée, a poursuivi M. D’Agostino. Le TNP reste un élément central de notre régime de non-prolifération, a-t-il souligné.

M. IDRISS JAZAÏRY (Algérie) a déclaré que le régime de non-prolifération et de désarmement, en particulier nucléaire, traverse une crise grave qui risque de saper la paix et la stabilité internationales. Il est regrettable que la Conférence du désarmement, paralysée par l’amalgame entre consensus et unanimité, se confine dans l’impuissance, alors que la conjoncture en matière de sécurité nous interpelle pour apporter des réponses qui soient à la mesure des menaces qui nous guettent. « Le blocage de la Conférence n’est pas un épiphénomène », a souligné M. Jazaïry. « Il n’est en fait qu’une manifestation de la situation qui caractérise toute l’œuvre du désarmement multilatéral depuis plusieurs années », a-t-il affirmé.

Notre première priorité doit être le désarmement nucléaire, eu égard aux effets dévastateurs des armes nucléaires, a poursuivi M. Jazaïry. Force est de constater, cependant, que le régime de non-prolifération et de désarmement nucléaires, dont le TNP est la pierre angulaire, est en proie à de graves difficultés, a-t-il ajouté. Le risque de prolifération nucléaire subsiste. Au registre du désarmement nucléaire, on peut constater, certes, des réductions des arsenaux nucléaires par les puissances nucléaires dans le cadre d’accords multilatéraux ou de décisions unilatérales. Mais ces mesures – à l’instar de celles annoncées ce matin par M. D’Agostino – ne répondent pas aux critères d’irréversibilité, de transparence et de vérification arrêtés par consensus par les États parties au TNP en 2000. La capacité d’autodestruction nucléaire de l’humanité demeure entière, a insisté M. Jazaïry, s’inquiétant par ailleurs de l’affinement de politiques sécuritaires reposant sur le maintien de la stabilité par la dissuasion nucléaire.

C’est dans ce cadre d’ensemble que le traité d’interdiction de la production de matières fissiles à des fins d’armement doit être négocié, a poursuivi M. Jazaïry. En effet, un tel instrument doit s’inscrire dans une logique de non-prolifération verticale et de désarmement, a-t-il affirmé. Un tel traité devrait par ailleurs être universel et non discriminatoire dans sa portée en même temps qu’effectif et vérifiable dans son application. Tout aussi importante est l’entrée en vigueur du Traité sur l’interdiction complète des essais nucléaires, a ajouté M. Jazaïry, félicitant à cet égard la Malaisie et la Colombie pour leur ratification récente de ce Traité.

Jamais la mise en place d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient n’a été aussi urgente, notamment dans le contexte très tendu qui prévaut actuellement, a par ailleurs déclaré M. Jazaïry. Il est navrant de constater que cet objectif n’a pu être réalisé du fait du refus d’un seul pays de la région, Israël, de ratifier le TNP et de soumettre ses installations nucléaires au régime de garanties de l’AIEA. L’Algérie accorde la plus haute importance à la question des garanties de sécurité à donner aux États non dotés d’armes nucléaires, les mettant à l’abri de l’emploi ou de la menace d’emploi de ces armes, a ajouté M. Jazaïry. Les assurances que nous recherchons atténueraient l’asymétrie sécuritaire, en principe provisoire, entre les pays nucléaires et non nucléaires, a-t-il expliqué. Aussi, a-t-il indiqué que l’Algérie renouvelait son appel à la Conférence pour la mise en place d’un organe subsidiaire en vue de négocier un instrument international juridiquement contraignant sur les garanties négatives de sécurité. Il serait également urgent de mettre en place un organe subsidiaire pour mener des discussions devant conduire, à terme, à des négociations en vue de mettre l’espace extra-atmosphérique à l’abri de toute tentation de militarisation. « Nous attendons avec intérêt la proposition qui nous sera soumise par le Gouvernement russe à ce sujet dans les prochains jours », a fait savoir M. Jazaïry.

M. Jazaïry a par ailleurs déclaré que la proposition présidentielle CD/2007/L.1 offre l’avantage de reprendre les quatre questions principales, à savoir le désarmement nucléaire, le traité sur l’interdiction des matières fissiles, les garanties de sécurité négative et l’arrêt de la course aux armements dans l’espace. Elle s’inscrit, du point de vue de l’Algérie, dans la filiation des propositions précédentes. Nous ne pouvons ignorer cette proposition et remettre le compteur à zéro, a affirmé M. Jazaïry. Nous n’avons pas entendu, du moins jusqu’à présent, une seule délégation rejeter catégoriquement cette proposition, a-t-il insisté.

Nous reconnaissons le droit de chaque pays membre de formuler les préoccupations en rapport avec sa sécurité nationale, a souligné M. Jazaïry. Par contre, a-t-il aussitôt ajouté, nous devons éviter les démarches amalgamant le droit de résistance contre l’occupation, reconnu par les Nations Unies, et le terrorisme ; un tel amalgame risque en effet de retarder et de compliquer davantage nos travaux. Il n’est pas admissible d’empêcher plus longtemps la société civile de participer aux travaux de la Conférence, a également souligné M. Jazaïry.

M. ZDZISLAW RAPACKI (Pologne) a rappelé que cela fait deux ans qu’a été mis en place au sein de la Conférence le mécanisme de coopération étroite initié par les six Présidents de la session de 2006 et désormais connu sous le nom de « P6 ». Depuis lors, le niveau de confiance parmi les membres de la Conférence s’est accru, a-t-il affirmé. Il convient donc de se concentrer sur les principales questions inscrites à l’ordre du jour de la Conférence afin de préserver ce mouvement positif, a poursuivi M. Rapacki. Nous devons éviter d’introduire dans les délibérations de cette instance un esprit destructeur qui pourrait nous entraîner à l’écart de la structure sécuritaire mondiale, a-t-il déclaré. Le projet de décision présidentielle CD/2007/L.1 associé aux documents CRP.5 et CRP.6 nous a amenés tout près d’un consensus et a insufflé à la Conférence un élan qu’il ne faut pas gaspiller, a poursuivi le représentant polonais. De l’avis de la Pologne, ce projet constitue un compromis extrêmement bien rédigé.

M. Rapacki a souligné que son pays assigne une claire priorité au lancement, sans condition préalable, de la négociation sur un traité d’interdiction de la production de matières fissiles à des fins d’armement. Cet instrument, qui revêt une dimension de désarmement nucléaire tout autant que de non-prolifération, reste le chaînon manquant de l’architecture de sécurité nucléaire. À l’instar de l’Union européenne, la Pologne est également disposée à engager une discussion de fond sur les autres questions figurant dans la projet de décision L.1, en particulier sur le désarmement nucléaire et sur la prévention de la guerre nucléaire. M. Rapacki a par ailleurs fait savoir que son pays avait engagé les préparatifs en vue d’une visite à la Conférence du Sous-Secrétaire d’État au Ministère des affaires étrangères de la Pologne.

MME HSU KING BEE (Malaisie) a rappelé que le désarmement nucléaire reste une priorité absolue pour son pays. À cet égard, a-t-elle ajouté, il convient de souligner que les réductions en matière de déploiement et de statut opérationnel des armes nucléaires ne sauraient se substituer à de véritables réductions qui soient irréversibles et visent l’élimination totale de ce type d’armes. Clairement, cela signifie que, conformément aux engagements souscrits en vertu du Traité de non-prolifération nucléaire (TNP), les mesures de désarmement et de non-prolifération doivent être promues concomitamment. Or, en réalité, cela n’a pas été le cas, a déploré la représentante de la Malaisie, relevant que l’accent est davantage mis sur la non-prolifération.

Mme Hsu King Bee a indiqué que son pays restait préoccupé et troublé par les informations relatives au développement de nouveaux types d’armes nucléaires, plus sophistiqués, en remplacement des stocks anciens, ainsi que par les informations relatives à une amélioration qualitative des arsenaux nucléaires existants dans les stocks des États dotés d’armes nucléaires. Ces développements, associés à l’annonce de nouvelles doctrines de défense stratégique reprenant l’idée d’un recours en premier à l’arme nucléaire, constituent une réinterprétation unilatérale des engagements souscrits dans le cadre du TNP. Une telle régression ne fait que renforcer la perception selon laquelle l’existence d’armes nucléaires est essentielle pour le maintien de la paix et de la sécurité, ce qui constitue une menace pour le régime associé au TNP et pour l’ensemble de l’humanité. Aussi, la Malaisie exhorte-t-elle les États dotés de l’arme nucléaire à abandonner de telles doctrines nucléaires et à se joindre aux efforts de la communauté internationale afin de mettre en place une nouvelle structure de sécurité globale par le biais de réductions graduelles des armes nucléaires existantes devant mener à leur élimination totale.

Mme Hsu King Bee a par ailleurs fait savoir que son pays avait déposé, le 8 janvier dernier, son instrument de ratification au Traité sur l’interdiction complète des essais nucléaires.

En dépit du fait que le projet de décision présidentielle CD/2007/L.1 ne réponde pas à ses attentes, la Malaisie a fait preuve de souplesse et s’est dite disposée à travailler étroitement avec les membres de la Conférence en se joignant au consensus sur ce document, a d’autre part indiqué la représentante. Bien que le désarmement nucléaire reste notre priorité absolue et en attendant des négociations sur une convention relative aux armes nucléaires, un traité d’interdiction de la production des matières fissiles à des fins d’armement reste – tout comme le Traité d’interdiction complète des essais nucléaire – l’une des prochaines étapes essentielles pour prévenir la prolifération des armes nucléaires et parvenir à un véritable désarmement nucléaire.

Mme Hsu King Bee a indiqué que sa délégation attendait avec impatience la présentation, la semaine prochaine, par le Ministre russe des affaires étrangères, d’un projet de traité sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace.

M. MOHAMMAD TAGHI HOSSEINI (Iran) a rappelé que son pays est membre du TNP et a assuré que toutes ses activités nucléaires pacifiques sont soumises aux garanties de l’AIEA. Tous les États membres du TNP ont le droit inaliénable de produire de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques, a-t-il rappelé. Il a souligné que l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) n’a pas constaté d’indication, en Iran, de détournement de matières nucléaires à des fins d’armement.


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