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LE COMITÉ CONTRE LA DISCRIMINATION RACIALE EXAMINE LE RAPPORT DE L'EX-RÉPUBLIQUE YOUGOSLAVE DE MACÉDOINE

Compte rendu de séance

Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport périodique présenté par l'ex-République yougoslave de Macédoine sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

Mme Svetlana Geleva, Conseillère d'État au Ministère macédonien des affaires étrangères, a rappelé que des amendements ont été apportés à la Constitution du pays afin de définir les cadres juridiques concernant les «membres de communautés». Elle a par ailleurs rappelé que la Cour constitutionnelle défend les droits des individus contre toute discrimination à leur encontre. Mme Geleva a aussi indiqué que son pays accueillerait en octobre 2007 une conférence internationale sur le dialogue entre les cultures et les civilisations

La délégation de l'ex-République yougoslave de Macédoine était également composée du Représentant permanent de l'ex-République yougoslave de Macédoine auprès des Nations Unies à Genève, M. Gorgi Avramcev, ainsi que de représentants du Ministère des affaires étrangères; du Ministère des sciences et de l'éducation; du Ministère du travail et de la police sociale; du Ministère de la justice; du Ministère de la culture; du Ministère de l'intérieur. Elle a fourni des compléments d'information en ce qui concerne, notamment, la situation des Roms; l'utilisation des langues communautaires dans le cadre des procédures judiciaires; la nationalité des enfants nés d'un parent macédonien et d'un parent étranger; la situation des enfants des rues.

Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'ex-République yougoslave de Macédoine, M. José A. Lindgren Alves, a estimé que, bien qu'il ne semble pas exister dans la législation du pays de définition spécifique de la discrimination raciale, la Constitution décrit l'égalité des citoyens en des termes adéquats au regard de la Convention. M. Lindgren Alves a par ailleurs souhaité savoir sur quelle base légale la Macédoine avait prétendument accepté, en 2003, de livrer, à des agents des États-Unis, un citoyen allemand d'origine libanaise, M. Khaled al-Masri, détenu et interrogé pendant 23 jours par les autorités macédoniennes alors qu'il effectuait un voyage dans le pays.


Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport périodique du Liechtenstein (CERD/C/LIE/3).


Présentation du rapport macédonien

MME SVETLANA GELEVA, Conseillère d'État au Ministère macédonien des affaires étrangères, a indiqué que ce rapport contient les renseignements sur les mesures juridiques, administratives et autres prises par le pays pour garantir le respect des droits garantis par la Convention. Elle a rappelé que des amendements ont été apportés à la Constitution du pays afin de définir les cadres juridiques concernant les «membres de communautés». Mme Geleva a notamment précisé que le cinquième amendement à la Constitution de la République régit l'utilisation des langues communautaires. Mme Geleva a par ailleurs rappelé que la Cour constitutionnelle défend les droits des individus contre toute discrimination à leur encontre. Elle a en outre fait part de la création récente d'un théâtre en langue albanaise à Tetovo et de l'adoption d'une loi qui prévoit de nouveaux jours fériés considérés comme importants par différentes communautés. Mme Geleva a par ailleurs indiqué que son pays accueillerait en octobre 2007 une conférence internationale sur le dialogue entre les cultures et les civilisations.

Le rapport périodique de l'ex-République yougoslave de Macédoine (quatrième à septième rapports présentés en un seul document: CERD/C/MKD/7) signale qu'après 2001 et la signature de l'Accord-cadre d'Ohrid, des réformes de portée générale dans le domaine de la protection et de la promotion des droits des membres des diverses communautés nationales ont été engagées, principalement par le biais d'amendements à la Constitution. Ces amendements qui fixent le statut des membres des communautés nationales sont développés de façon plus détaillée dans des législations qui traitent, dans divers domaines, des différents aspects de l'application des droits des personnes issues de ces communautés. L'égalité des personnes issues des communautés nationales résulte de l'article 9 de la Constitution qui définit le principe de non-discrimination. Tout citoyen peut demander la protection des droits et libertés inscrits dans la Constitution devant les tribunaux ordinaires et la Cour constitutionnelle par le biais d'une procédure d'urgence. Le Code pénal définit comme une violation du principe d'égalité de tous les citoyens, tout comportement consistant à priver une personne des droits garantis par la Constitution, la loi ou un pacte international ratifié en se fondant sur des critères tels que le sexe, la race, la couleur de peau, l'origine ethnique ou sociale, l'affiliation politique ou sociale, la fortune ou la condition sociale, la langue ou autre caractéristique ou circonstance personnelle, ou à limiter ces droits, ou tout comportement visant, sur la base de ces critères, à accorder à des citoyens des privilèges incompatibles avec la Constitution, la loi ou un pacte international ratifié. Le Code pénal dispose en outre que sera punie pour incitation à la haine, à la discorde et à l'intolérance fondées sur des critères de race, de nationalité ou de religion, toute personne qui recourt à la force ou à la violence, compromet la sécurité des personnes et des biens, tourne en ridicule les symboles nationaux, ethniques ou religieux, profane des monuments et des sépultures ou utilise tout autre moyen dans le but d'inciter à la haine, à la discorde ou à l'intolérance fondée sur la nationalité, la race ou la religion. Tant dans le droit civil qu'administratif, il existe des dispositions visant à lutter contre la discrimination.

Depuis 2003, des données ont été réunies par le Médiateur sur l'appartenance ethnique des plaignants et les atteintes aux droits. En 2004, 75,50 % des plaignants appartenaient à la communauté macédonienne, 14,36% à la communauté albanaise, 0,18% à la communauté valaque et 1,94% n'ont pas fait état de leur origine ethnique. Sur le nombre total de demandes en 2004, à savoir 1959, 0,26% concernaient des atteintes aux droits des membres des communautés nationales. La Commission des relations intercommunautaires, constituée de 19 députés du Parlement (dont sept Albanais de souche et huit représentent respectivement les communautés turques, valaques, roms serbes et bosniaques), a été créée en vertu de l'article 78 de la Constitution. Dans les municipalités dont au moins 20% des habitants appartiennent à une communauté ethnique donnée, une commission des relations intercommunautaires est en cours de création. Afin d'insérer graduellement les Roms dans la société, le Gouvernement a notamment mis en œuvre la Stratégie nationale pour les Roms qui vise à promouvoir l'insertion des Roms dans le tissu socioéconomique et à renforcer leurs capacités à cet égard. Selon la loi portant modification de la loi sur la procédure pénale, la langue officielle utilisée dans les procédures pénales est le macédonien et son alphabet cyrillique. Toujours selon cette loi, toute autre langue officielle (et son alphabet) parlée par au moins 20% de la population peut être utilisée dans les procédures pénales. Sur les 120 membres que compte actuellement le Parlement de la République de Macédoine, 26 sont issus de la minorité albanaise, 3 de la minorité turque, 2 de la minorité bosniaque, 1 de la minorité valaque et 1 de la minorité rom. Les parlementaires issus des minorités nationales constituent 29,1 % de l'ensemble des députés et sont en forte augmentation par rapport aux dernières élections législatives de 1998 où seuls 27 députés (soit 22,5 % des parlementaires) issus des minorités.
Examen du rapport

Répondant à une liste de questions préalablement adressées à sa délégation, Mme Geleva a notamment reconnu que la législation macédonienne ne contient pas de disposition spécifique définissant la discrimination raciale dans les termes de l'article premier de la Convention. Toutefois, étant donné que la Convention fait partie du droit interne, comme tout accord international ratifié par le pays, la définition figurant à l'article premier de cet instrument est d'application directe.

S'agissant des questions d'asile, Mme Geleva a expliqué que depuis 2003, 2521 demandes d'asile ont été présentées; sur ce nombre, deux émanaient de ressortissants de la Bosnie-Herzégovine, une d'un ressortissant de la Turquie et toutes les autres émanaient de ressortissants de Serbie (tous originaires du Kosovo à l'exception de quatre). Jusqu'en 2007, 1389 personnes ont obtenu le droit d'asile ou ont été reconnus comme réfugiés ou comme bénéficiant d'une protection humanitaire.

En 2005, le bureau du Médiateur a reçu quatre plaintes sur des questions en rapport avec les droits des personnes appartenant à des communautés, a poursuivi Mme Geleva. Le Médiateur a conclu à une violation dans un de ces cas et l'institution pertinente a agi sur sa recommandation. Quant aux plaintes en matière de discrimination, le bureau du Médiateur en a reçu six et a conclu à une violation dans deux cas, sans toutefois qu'aucune action n'ait été entreprise par les autorités publiques.

La principale réalisation de la Stratégie en faveur des Roms réside dans la pleine implication de la communauté rom dans la préparation de cette stratégie et dans l'identification des besoins spécifiques des Roms, a par ailleurs indiqué Mme Geleva. En dépit de la forte volonté du Gouvernement de mettre en œuvre cette stratégie, le principal obstacle reste le manque de financement approprié, au regard de la situation économique générale du pays, a-t-elle reconnu. Eu égard à l'urgence de la situation, a par la suite précisé Mme Geleva, l'un des thèmes prioritaires de la Décennie et de la Stratégie en faveur des Roms est celle du logement.

En 2005, a par ailleurs fait valoir Mme Geleva, le pays a ratifié le Protocole additionnel à la Convention sur la cyber-criminalité pénalisant la diffusion de matériel raciste et xénophobe par le biais de systèmes informatiques.

La législation relative à l'utilisation des langues non majoritaires dans les procédures civiles, pénales et administratives est effectivement mise en œuvre dans la pratique quotidienne des tribunaux et autres institutions, a d'autre part souligné Mme Geleva. Elle a précisé n'avoir connaissance d'aucune plainte relative au non-respect de dispositions des lois relatives aux procédures pénale, civile ou administrative.

La représentante macédonienne a par ailleurs indiqué que «depuis l'adoption de la loi amendant la loi sur la nationalité, 6044 ressortissants étrangers se sont vu, au 21 février 2007, accorder la citoyenneté de la République de Macédoine»; sur ce nombre, 3356 étaient des Albanais, 985 des Serbes, 858 des musulmans, 403 des Roms et 103 des Bulgares, a-t-elle notamment précisé. Elle a ajouté que 517 demandes de naturalisation ont été rejetées, dont 274 pour des Albanais, 42 pour des Serbes, 72 pour des musulmans, 42 pour des Roms, 3 pour des Bulgares et 64 pour des Turcs.

Mme Geleva a indiqué qu'en 2000, le nombre de mariages mixtes s'élevait à 395 sur un total de 13 362 mariages; en 2005, la proportion était de 714 pour 13 913.

Les mariages religieux n'ont pas d'effet civil, a par ailleurs assuré Mme Geleva. L'âge minimum du mariage est de 16 ans, mais le consentement des parents est obligatoire à cet âge, a-t-elle précisé. D'un point de vue légal, le libre choix de l'époux est garanti. Toutefois, il arrive qu'il y ait dans certaines communautés traditionnelles des mariages arrangés qui sont considérés comme relevant de la sphère privée de la famille.

En ce qui concerne les questions d'éducation, Mme Geleva a notamment indiqué que le Ministère de l'éducation et les autorités locales autonomes prévoient des avantages financiers en faveur des enfants provenant de familles défavorisées. Des mesures sont en outre prévues pour faciliter l'accès des enfants rom aux niveaux secondaire et universitaire.

Mme Geleva a par ailleurs indiqué qu'il n'y avait pas dans le pays de cas de brutalité à motivation raciale qui ait été porté devant les tribunaux. Des recours, tant au civil qu'au pénal, sont prévus pour l'indemnisation, pécuniaire ou autre, des victimes d'actes de discrimination raciale, a-t-elle précisé.

En conclusion, Mme Geleva a fait valoir que, selon un récent sondage du Programme des Nations Unies pour le développement, seuls 8% des «Macédoniens ethniques» se disaient préoccupés par les questions de nature interethnique et seulement 1,3% des «Albanais ethniques». La population est en effet avant tout préoccupée par les questions économiques.

Observations et questions des membres du Comité

Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'ex-République yougoslave de Macédoine, M. JOSÉ A. LINDGREN ALVES, a jugé fort clair, approfondi et complet le rapport présenté par le pays. Néanmoins, ce rapport est difficile à comprendre pour quelqu'un qui ne connaît pas bien le pays, a-t-il ajouté. Il a estimé que l'ex-République yougoslave de Macédoine constitue un excellent cas d'école concernant un pays multiethnique des Balkans qui veut s'affirmer comme un pays viable et fait tout ce qu'il peut à cette fin. Il a si bien réussi que c'est aujourd'hui l'un des trois seuls États que l'Union européenne considère déjà comme étant un candidat acceptable pour négocier une intégration à l'Union.

Après avoir rappelé les conflits qui ont ravagé les Balkans, M. Lindgren Alves a souligné que fort heureusement, dans le cas de l'ex-République yougoslave de Macédoine, et contrairement à ce qui s'est passé ailleurs, la guerre n'a pas totalement éclaté à grande échelle, au moins en partie grâce à l'interférence à temps de l'Organisation du traité de l'Atlantique nord (OTAN) qui, peut-être pour la première fois, a vraiment travaillé dans ce cas pour la paix. Les accords d'Ohrid ont été acceptés par les parties au conflit en 2001, a rappelé l'expert. Il a relevé que le rapport du pays constitue, pour une large part, une explication détaillée de la manière dont les recommandations de l'OTAN, y compris celles figurant dans l'accord d'Ohrid, sont appliquées, en particulier pour ce qui a trait à la répartition des sièges entre les différentes communautés nationales dans les organes politiques, judiciaires et administratives de l'État et au niveau municipal. Ces recommandations ont certes beaucoup à voir avec les préoccupations du Comité, puisqu'elles sont directement en rapport avec l'objectif de non-discrimination; mais elles suivent toutefois ce que M. Lindgren Alves a considéré être le critère typiquement européen non pas d'intégration mais d'établissement d'un équilibre délicat entre les différentes communautés.

Bien qu'il ne semble pas exister dans la législation du pays de définition spécifique de la discrimination raciale, l'article 9 de la Constitution décrit l'égalité des citoyens en des termes adéquats au regard de la Convention, a par ailleurs estimé M. Lindgren Alves. De la même manière, a-t-il poursuivi, le Code pénal, notamment en son article 319, couvre les exigences de la Convention s'agissant de l'interdiction et de la punition de la discrimination raciale et de la propagande raciste.

M. Lindgren Alves s'est dit quelque peu perplexe face à la législation relative à l'utilisation des drapeaux, qui garantit le droit des communautés nationales à utiliser un drapeau qui leur permet d'exprimer leur identité et leurs spécificités; l'expert a jugé cette loi incompréhensible. Un Albanais ethnique en Macédoine peut-il légalement arborer un drapeau de l'Albanie voisine comme constituant son symbole national plutôt que le drapeau de la République, tout en restant considéré comme un citoyen loyal de l'État macédonien? N'y a-t-il pas là un facteur additionnel de division pour un pays qui a déjà fait l'expérience de sérieuses tensions interethniques?

Le programme de restitution des armes à l'État est-il achevé, a par ailleurs demandé M. Lindgren Alves?

Le rapporteur a par ailleurs souhaité savoir sur quelle base légale la Macédoine avait accepté, en 2003, de livrer à des officiers des États-Unis qui l'ont ensuite envoyé en détention en Afghanistan, un citoyen allemand d'origine libanaise, M. Khaled al-Masri, détenu et interrogé pendant 23 jours par les autorités macédoniennes sans fournir de raisons alors qu'il effectuait un voyage dans le pays. M. Lindgren Alves a rappelé que depuis l'hiver 2002, le Comité a publié une déclaration qui impose aux États parties et au Comité lui-même l'obligation de s'assurer que la lutte contre le terrorisme n'est pas détournée par des préjugés de race.

M. Lindgren Alves s'est en outre enquis du nombre de mariages interethniques dans le pays.

D'autre part, un citoyen d'origine ethnique albanaise peut-il choisir, sans courir de risques, de vivre au sein d'une communauté macédonienne slave? Et les Macédoniens slaves et orthodoxes peuvent-ils vivre dans une communauté albanaise ou musulmane sans se sentir menacés, a demandé M. Lindgren Alves?

Relevant que, selon le paragraphe 142 du rapport, «le Gouvernement de la République de Macédoine peut décider qu'il est obligatoire de se munir d'un visa pour voyager hors du territoire national ou dans certains pays étrangers», M. Lindgren Alves a souhaité savoir si cela signifiait qu'il existe des visas de sortie du pays. Si tel était le cas, cela ne rappellerait-il pas les restrictions que les régimes communistes imposaient à leurs citoyens, a demandé l'expert?

M. Lindgren Alves a relevé que selon une étude mentionnée au paragraphe 185 du rapport, il faut rechercher dans la tradition, la religion et la coutume les causes du taux d'abandon scolaire enregistré parmi les élèves des communautés rom et albanaise. Un État peut-il faire quoi que ce soit pour contrer ces traditions sans apparaître comme portant atteinte aux droits culturels, a demandé M. Lindgren Alves à l'intention de ses collègues du Comité?

Plusieurs membres du Comité ont par ailleurs relevé que diverses sources indiquent que les Roms continuent de faire l'objet de discriminations et ont souhaité en savoir davantage sur la situation des Roms macédoniens. Un expert a fait état de chiffres indiquant que la population rom constituerait entre 3,5 et 5,7% de la population totale, ce qui représente le double de ce que mentionne le rapport et ferait des Roms le troisième groupe ethnique après les Macédoniens et les Albanais.

Un expert a relevé que l'ex-République yougoslave de Macédoine a fait la déclaration prévue à l'article 14 de la Convention par laquelle elle reconnaît la compétence du Comité pour recevoir et examiner des plaintes individuelles. Il a par ailleurs salué la législation adoptée par le pays s'agissant des discriminations non seulement directes mais aussi indirectes dans le domaine de l'emploi.


Renseignements complémentaires et réponses de la délégation

En réponse aux questions qui ont été posées par les membres du Comité s'agissant des Roms, la délégation macédonienne a souligné que cette communauté a pris part aux plans d'action et à la stratégie élaborés dans le contexte de la Décennie en faveur des Roms. Pour la première fois, grâce à la proclamation de la Décennie, des projets exclusivement consacrés aux Roms, notamment dans le domaine de l'éducation, ont été mis en place. La délégation a par ailleurs reconnu la grave situation que connaît le pays s'agissant du logement des Roms; malheureusement, le Gouvernement ne dispose pas à l'heure actuelle des moyens nécessaires pour régler le problème. Les efforts déployés par le pays pour intégrer les Roms ne s'apparentent pas à un processus d'assimilation, a assuré la délégation.

Répondant à une question sur le nombre de Roms dans le pays, la délégation macédonienne a reconnu qu'il existe des différences entre les données officielles, qui font état de 54 000 Roms, soit 2,67% de la population totale, et les chiffres officieux avancés par certains, qui évaluent entre 80 000 et 130 000 le nombre de Roms dans le pays.

Les Roms macédoniens vivent mieux que ceux d'autres pays d'Europe, y compris que ceux de certains pays de l'Union européenne, a par ailleurs affirmé la délégation. Une initiative a été prise pour assurer une éducation secondaire en langue rom dans la seule municipalité où il y a une majorité d'enfants rom, a-t-elle poursuivi. Pour réduire le taux d'abandon scolaire parmi les Roms, un programme a été préparé en 2005 qui a été intégré dans la stratégie à l'horizon 2015 du Ministère de l'éducation, a poursuivi la délégation. Dans le cadre de ce programme, vont être étudiés les facteurs susceptibles d'être à l'origine des abandons scolaires des Roms; en fonction des résultats de cette étude, des programmes correctifs seront élaborés afin de prévenir l'abandon scolaire des Roms, a expliqué la délégation.

En ce qui concerne les réfugiés du Kosovo, la délégation a indiqué que la politique du Gouvernement est de les considérer comme des requérants d'asile et de leur permettre de rester aussi longtemps qu'ils ne peuvent pas rentrer chez eux. Le pays n'a pas l'intention d'expulser ces personnes ni de faire pression sur elles aussi longtemps qu'elles ne pourront pas rentrer chez elles, a assuré la délégation.

S'agissant des requérants d'asile déboutés, la délégation a indiqué que l'immense majorité des demandes d'asile rejetées concernent des Roms, des Ashkali et des Égyptiens. Ces refus s'expliquent généralement par le fait que les exigences devant accompagner la demande d'asile n'ont pas été respectées, a souligné la délégation.

La délégation a précisé que les Égyptiens sont des personnes affirmant être de souche égyptienne et être arrivées en Macédoine à l'époque d'Alexandre le Grand. Ces personnes se déclarent égyptiennes, comme la loi les y autorise, de sorte que les autorités ne peuvent que prendre cette déclaration comme un fait.

Répondant à une question sur la nationalité des enfants nés en ex-République yougoslave de Macédoine d'un parent macédonien et d'un parent étranger, la délégation a indiqué que, selon la législation en vigueur, cet enfant reçoit la nationalité macédonienne en vertu du principe d'origine. Si l'enfant est né dans le pays d'un parent qui, au moment de la naissance, était lui-même macédonien, cet enfant sera macédonien, sauf si les parents décident d'un commun accord que l'enfant prendra la nationalité du parent non macédonien.

S'agissant de l'utilisation des langues communautaires dans le cadre des procédures judiciaires, notamment durant les procès, la délégation macédonienne a rappelé que la Convention européenne des droits de l'homme et d'autres conventions ratifiées par le pays prévoient le droit de l'accusé d'être informé immédiatement et dans sa langue des motifs de son inculpation. De telles dispositions sont donc inclues dans le Code de procédure pénale de 1996. Le cinquième amendement à la Constitution, qui régit l'utilisation des langues communautaires, va même au-delà de ce que prévoient les normes internationales en la matière. Dans les débats judiciaires, la langue officielle est le macédonien, a ajouté la délégation; selon la loi, une autre langue est aussi utilisée dans les débats des tribunaux si elle est parlée par au moins 20% des citoyens.

En 2004, a rappelé la délégation, la réforme de la législation pénale, qui a porté tant sur le Code pénal que sur le Code de procédure pénale, a permis de transposer en droit interne les normes internationales dans ces domaines.

En ce qui concerne le processus de restitution des armes à l'État, la délégation a rappelé que les Balkans ont traditionnellement été une région où circulaient de nombreuses armes – des centaines de milliers selon certaines organisations non gouvernementales. La collecte des armes a d'abord été menée par l'OTAN avant que les autorités nationales ne prennent elles-mêmes le relais. Après l'adoption d'une législation visant à empêcher le port illicite d'armes, la situation s'est améliorée, le pays ayant adopté une loi stricte en la matière.

La délégation a par ailleurs reconnu que la législation prévoit des visas de sortie du territoire national; néanmoins, ce type de visa n'est pas utilisé dans les faits et n'est en fait prévu que pour des situations où, par exemple, il y aurait des épidémies, a expliqué la délégation.

En ce qui concerne le cas de M. Khaled al-Masri, la délégation a rappelé qu'une enquête avait été engagée afin d'en savoir davantage sur le contexte exact de l'enlèvement de cette personne.

Un expert ayant souhaité savoir si le problème des enfants des rues rom kosovars avait été résolu à Skopje, la délégation a reconnu l'existence d'un problème d'enfants des rues dans le pays, précisant que le Ministère chargé des affaires sociales s'attelle de manière prioritaire à cette question. L'un des groupes prioritaires visés par la politique d'inclusion sociale mise en place dans ce contexte est celui des enfants des rues et des membres de leurs familles, a indiqué la délégation. Un centre pour enfants des rues a été ouvert à Skopje, a-t-elle fait valoir. Le nombre d'enfants ayant recours aux services de ce centre ne cesse d'augmenter; en décembre 2005, ils étaient 500. Effectivement, ce problème touche essentiellement les Roms, a ajouté la délégation.

Observations préliminaires

Dans ses observations préliminaires, le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'ex-République yougoslave de Macédoine, M. JOSÉ A. LINDGREN ALVES, a jugé excellente la présentation de ce rapport. La délégation, extrêmement bien préparée, a apporté des informations très détaillées, a-t-il affirmé. Il a indiqué que les réponses fournies par la délégation ont même dépassé ses attentes. M. Lindgren Alves s'est réjoui que l'ex-République yougoslave de Macédoine soit un État séculier. Les armes sont certes répandues à travers le monde, mais bien des pays en comptent davantage encore que dans les Balkans, a fait observer M. Lindgren Alves, réagissant aux propos de la délégation selon lesquels les armes feraient en quelque sorte partie de la tradition de l'ex-République yougoslave de Macédoine.

Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

CERD0708F