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Examen du Canada au CRPD : les experts s’intéressent en particulier à l’aide médicale à mourir, ainsi qu’à l’application de la Convention dans le contexte du fédéralisme canadien

Compte rendu de séance

 

Le Comité des droits des personnes handicapées (CRPD, selon l’acronyme anglais) a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport soumis par le Canada au titre de la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

Au cours du dialogue noué entre les experts membres du Comité et la délégation canadienne venue soutenir ce rapport, un expert a jugé louables les nombreuses mesures prises par le Canada pour faciliter la vie quotidienne des personnes handicapées. Plusieurs questions ont porté sur les conditions d’application de la Convention dans le contexte du fédéralisme canadien. Un expert a relevé qu’au Canada, trois provinces sur dix - deux sur dix a par la suite corrigé la délégation - n’ont pas adopté de législation concernant l’accessibilité et que, selon les organisations de personnes handicapées, il n’est pas clair si la Convention s’applique aussi aux Premières Nations canadiennes. Cet expert a par ailleurs souhaité savoir à quel point les organisations de personnes handicapées étaient impliquées dans le système fédéral complexe du Canada, avant de souligner que leur participation devait être garantie par la loi.

Il a par ailleurs été regretté que les provinces n’apportent pas les mêmes niveaux de soutien et de réhabilitation aux personnes handicapées, les familles devant parfois attendre jusqu’à deux ans avant d’obtenir les services de réadaptation dont elles ont besoin. Plusieurs experts ont estimé que l’aide financière accordée aux personnes handicapées au Canada était insuffisante.

Des membres du Comité ont par ailleurs demandé si la loi sur l’aide médicale à mourir (AMM) avait été précédée d’une analyse de son incidence potentielle sur les femmes. Un expert a jugé choquant, dans le même contexte, que le handicap soit considéré comme une indication, ou un critère, des « douleurs mentales ou psychologiques qu’une personne ne peut plus tolérer » – autrement dit qu’il soit un motif pour obtenir l’AMM. Une experte a estimé que les effets disproportionnés de l’échec à fournir des services adaptés aux personnes handicapées pouvait amener ces personnes à recourir à l’AMM.

Un expert a d’autre part regretté que l’on assiste au Canada à une augmentation des détentions et traitements involontaires de personnes ayant un handicap psychosocial. Le Comité, a ajouté cet expert, est préoccupé par la stérilisation forcée de personnes handicapées, en particulier de femmes et filles autochtones, noires et racialisées. De plus, au Canada, les femmes et filles handicapées sont davantage exposées à la violence que les hommes handicapés, a regretté cet expert.

Un autre expert s’est interrogé sur la mesure dans laquelle les personnes handicapées pouvaient à participer à la vie politique et publique canadienne, compte tenu d’une loi sur la tutelle qui – a-t-il ajouté – restreint l’exercice de ce droit.

Présentant le rapport de son pays, M. Elisha Ram, Sous-Ministre adjoint principal au Département de l’emploi et du développement social du Canada, a mis en avant l’importance que son pays accorde à la participation de la communauté des personnes handicapées à l'élaboration de politiques, programmes et initiatives plus efficaces. Dans ce contexte, a-t-il indiqué, le Gouvernement a simplifié le principe clef « Rien sur nous, sans nous » en « Rien sans nous », estimant en effet que l'engagement doit s'étendre au-delà des initiatives propres au handicap ou à l'accessibilité. « Rien sans nous » est un principe directeur du premier Plan gouvernemental d'action pour l'intégration des personnes handicapées et ce principe a été ancré dans la Loi canadienne sur l'accessibilité, a précisé M. Ram.

Le chef de délégation a ensuite relevé que les personnes handicapées étaient toujours confrontées à des taux comparativement plus élevés de pauvreté et de chômage, de même qu’à des difficultés de logement. Pour cette raison, la Loi sur l'équité en matière d'emploi vise à assurer l'égalité dans les milieux de travail sous réglementation fédérale en corrigeant les conditions de désavantage subies par les groupes désignés, et en particulier par les personnes handicapées, a-t-il indiqué. Dans le cadre d'une réponse à plus long terme, a-t-il ajouté, le Gouvernement a lancé en 2022 son Plan d'action pour l'inclusion des personnes handicapées, qui s'appuie sur la Convention et comprend des piliers sur la sécurité financière, l'emploi, ainsi que les communautés accessibles et inclusives, et une approche moderne des personnes handicapées. Les principales mesures prises à ce jour comprennent l'élaboration de la nouvelle Prestation canadienne pour les personnes handicapées, qui devrait être lancée cette année, et la Stratégie d’emploi pour les Canadiens et Canadiennes handicapés, a précisé M. Ram.

De plus, avec l'entrée en vigueur de la Loi canadienne sur l'accessibilité en 2019, le Gouvernement défend un changement systémique dans des domaines prioritaires tels que l'emploi, le bâti ou encore la conception et la prestation des programmes et services. D’autre part, pour favoriser la prise de décision assistée dans la mesure du possible, des fonds ont été alloués en 2019 à des organisations de personnes handicapées pour aider le Gouvernement à mieux connaître les obstacles rencontrés par les personnes handicapées dans l'exercice de leur pouvoir décisionnel. Le Canada a récemment reçu le rapport final et s'emploie actuellement à en évaluer les conclusions et les prochaines étapes, a indiqué M. Ram.

Le Gouvernement entend les préoccupations concernant la possibilité pour les personnes en situation de handicap vulnérables qui ne sont pas en danger de mort imminent de demander et d'obtenir une « aide médicale à mourir », lorsque leur souffrance découle de besoins non satisfaits, tels que des services et aides sanitaires et sociaux inadéquats, une souffrance psychosociale ou spirituelle, ou de la stigmatisation sociale et du désespoir. Le Gouvernement reconnaît qu'il s'agit là d'une question complexe et très sensible pour la communauté des personnes handicapées, a assuré M. Ram.

Complétant cette présentation, Mme Charlotte-Anne Malischewski, Présidente intérimaire de la Commission canadienne des droits de la personne, s’est dite encouragée par l’adoption de lois relatives à l'accessibilité, au logement et aux aides financières, mais a estimé que l'approche du Canada en matière de droits des personnes handicapées doit être améliorée, le pays devant notamment honorer le principe « Rien sans nous ». Les personnes handicapées ne se sentent en effet pas entendues, en particulier celles qui sont en prison, qui vivent en institution ou qui sont sans abri, a-t-elle précisé.

Mme Malischewski a ensuite relevé que trop de personnes handicapées au Canada n'ont pas accès aux aides et aux services de base dont elles ont besoin pour vivre dans la dignité, notamment pour ce qui concerne les soins de santé, les médicaments et les équipements. Le manque de logements adéquats et accessibles continue de les contraindre à vivre dans des conditions dangereuses et inacceptables, a-t-elle souligné.

« Face à d'immenses inégalités systémiques », certaines personnes handicapées se tournent vers l'AMM parce qu'elles estiment ne pas avoir d'autres options, a en outre mis en garde Mme Malischewski.

La délégation canadienne était également composée, entre autres, de représentants des Ministères canadiens de l’emploi et du développement social ; des affaires mondiales ; de la justice ; du patrimoine canadien ; des services aux autochtones ; de l’immigration, des réfugiés et de la citoyenneté ; et des statistiques. Les gouvernements provinciaux de la Saskatchewan, du Manitoba et du Québec étaient aussi représentés.

Au cours du dialogue, la délégation a notamment précisé que la Convention s’appliquait à toutes les personnes handicapées vivant au Canada, y compris aux Premières Nations, aux Inuits et aux métis. Elle a par ailleurs indiqué que les personnes qui envisagent de recourir à l’AMM doivent être informés par des professionnels qualifiés de moyens alternatifs pour réduire leurs souffrances, et a précisé les critères qui doivent être remplis pour avoir accès à l’AMM.

Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport du Canada et les rendra publiques à l’issue de sa session, le 21 mars prochain.

 

Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l’examen du rapport de l’Union européenne.

 

Examen du rapport du Canada

Le Comité est saisi du rapport valant deuxième et troisième rapports périodiques du Canada (CRPD/C/CAN/2-3), établi sur la base d’une liste de points à traiter qui avait été soumise par le Comité.

Présentation du rapport

Présentant le rapport de son pays, M. ELISHA RAM, Sous-Ministre adjoint principal au Département de l’emploi et du développement social du Canada, a d’abord précisé que la collaboration en matière de droits des personnes handicapées au Canada était assurée par le Forum des ministres fédéral, provinciaux et territoriaux des services sociaux, lequel comprend également le Comité consultatif des personnes en situation de handicap.

M. Ram a ensuite mis en avant l’importance que son pays accorde à la participation de la communauté des personnes handicapées à l'élaboration de politiques, programmes et initiatives plus efficaces. Dans ce contexte, a-t-il indiqué, le Gouvernement a simplifié le principe clef « Rien sur nous, sans nous » en « Rien sans nous », estimant en effet que l'engagement doit s'étendre au-delà des initiatives propres au handicap ou à l'accessibilité. « Rien sans nous » est un principe directeur du premier Plan gouvernemental d'action pour l'intégration des personnes handicapées et ce principe a été ancré dans la Loi canadienne sur l'accessibilité, a précisé M. Ram.

Le Canada est fier d'avoir travaillé aux côtés de la communauté des personnes handicapées dans l'élaboration et la négociation de la Convention, a poursuivi M. Ram. Il a rendu hommage à Steven Estey et Laurie Beachell, deux défenseurs des personnes handicapées disparus récemment, avant d’ajouter que le Canada investit activement dans la prochaine génération de jeunes leaders handicapés.

M. Ram a relevé que les personnes handicapées étaient toujours confrontées à des taux comparativement plus élevés de pauvreté et de chômage, de même qu’à des difficultés de logement. Pour cette raison, la Loi sur l'équité en matière d'emploi vise à assurer l'égalité dans les milieux de travail sous réglementation fédérale en corrigeant les conditions de désavantage subies par les groupes désignés, et en particulier par les personnes handicapées, a indiqué le chef de délégation.

Dans le cadre d'une réponse à plus long terme, a-t-il ajouté, le Gouvernement a lancé en 2022 son Plan d'action pour l'inclusion des personnes handicapées, qui s'appuie sur la Convention et comprend des piliers sur la sécurité financière, l'emploi, ainsi que les communautés accessibles et inclusives, et une approche moderne des personnes handicapées. Les principales mesures prises à ce jour comprennent l'élaboration de la nouvelle Prestation canadienne pour les personnes handicapées, qui devrait être lancée cette année, et la Stratégie d’emploi pour les Canadiens et Canadiennes handicapés, a précisé M. Ram.

De plus, avec l'entrée en vigueur de la Loi canadienne sur l'accessibilité en 2019, le Gouvernement défend un changement systémique dans des domaines prioritaires tels que l'emploi, le bâti ou encore la conception et la prestation des programmes et services. Le rôle de la Commission canadienne des droits de la personne en tant qu'organisme de surveillance de l’application de la Convention est officiellement reconnu par la Loi, a fait savoir M. Ram. Il a ensuite présenté plusieurs progrès réalisés en matière d'accessibilité à différents niveaux de gouvernement.

Pour surmonter les obstacles croisés auxquels sont souvent confrontées les personnes handicapées, a en outre indiqué M. Ram, le Gouvernement adopte une approche qui dépasse les différences biologiques et socioculturelles pour prendre en compte d'autres facteurs, et en particulier le handicap. Ainsi, les femmes handicapées étant confrontées à des taux de violence sexiste deux à trois fois plus élevés que les femmes non handicapées, le Gouvernement a lancé en 2022 le Plan d'action national pour mettre fin à la violence fondée sur le sexe, qui reconnaît les obstacles spécifiques auxquels sont confrontées, notamment, les personnes handicapées 2SLGBTQI+.

D’autre part, pour favoriser la prise de décision assistée dans la mesure du possible, des fonds ont été alloués en 2019 à des organisations de personnes handicapées pour aider le Gouvernement à mieux connaître les obstacles rencontrés par les personnes handicapées dans l'exercice de leur pouvoir décisionnel. Le Canada a récemment reçu le rapport final et s'emploie actuellement à en évaluer les conclusions et les prochaines étapes, a indiqué M. Ram.

Conformément aux principes de la Convention, le Canada défend la dignité inhérente, l'autonomie individuelle et l'indépendance des personnes en situation de handicap dans toutes ses activités, a poursuivi le chef de délégation. Dans certains domaines du droit, cependant, il est nécessaire de trouver un équilibre entre ces droits et principes et d'autres intérêts et valeurs tout aussi importants, mais concurrents, notamment la nécessité de protéger les personnes vulnérables, a-t-il fait remarquer. À cet égard, le Gouvernement entend les préoccupations concernant la possibilité pour les personnes en situation de handicap vulnérables qui ne sont pas en danger de mort imminent de demander et d'obtenir une « aide médicale à mourir », lorsque leur souffrance découle de besoins non satisfaits, tels que des services et aides sanitaires et sociaux inadéquats, une souffrance psychosociale ou spirituelle, ou de la stigmatisation sociale et du désespoir. Le Gouvernement reconnaît qu'il s'agit là d'une question complexe et très sensible pour la communauté des personnes handicapées, a assuré M. Ram.

M. Ram a par ailleurs mentionné le lancement en 2024 d’un Plan de logement qui trace une approche ambitieuse pour relever les défis de l'offre de logements et de leur abordabilité. Le Gouvernement fournit des fonds aux provinces et aux territoires par l'intermédiaire du programme « Investissement dans le logement abordable », afin de proposer des solutions propices à une vie autonome et sûre pour les personnes handicapées, entre autres, a-t-il précisé.

Complétant cette présentation, MME CHARLOTTE-ANNE MALISCHEWSKI, Présidente intérimaire de la Commission canadienne des droits de la personne, s’est d’abord dite encouragée par l’adoption de lois relatives à l'accessibilité, au logement et aux aides financières. Cependant, l'approche du Canada en matière de droits des personnes handicapées doit être améliorée, a estimé Mme Malischewski, le pays devant notamment honorer le principe « Rien sans nous ». Les personnes handicapées ne se sentent en effet pas entendues, en particulier celles qui sont en prison, qui vivent en institution ou qui sont sans abri, a-t-elle précisé.

Mme Malischewski a ensuite relevé que trop de personnes handicapées au Canada n'ont pas accès aux aides et aux services de base dont elles ont besoin pour vivre dans la dignité, notamment pour ce qui concerne les soins de santé, les médicaments et les équipements. Le manque de logements adéquats et accessibles continue de les contraindre à vivre dans des conditions dangereuses et inacceptables, a-t-elle souligné.

« Face à d'immenses inégalités systémiques », certaines personnes handicapées se tournent vers l'AMM parce qu'elles estiment ne pas avoir d'autres options, a mis en garde Mme Malischewski. Elle a estimé que les personnes handicapées méritaient d'en savoir plus sur la manière dont la Convention est appliquée au Canada. Elle s’est en outre dite préoccupée par l'absence de progrès du pays dans l’application des recommandations du Comité.

Questions et observations des membres du Comité

Le Comité avait confié l’examen du rapport du Canada à un groupe de travail composé de trois de ses membres : Mme Rosemary Kayess, M. Markus Schefer et M. Floyd Morris.

Coordonnatrice de ce groupe de travail, MME KAYESS a précisé que le dialogue serait encadré par l'article premier de la Convention, qui définit son but et son objectif : assurer la pleine et égale jouissance de tous les droits de l'homme et de toutes les libertés fondamentales par toutes les personnes handicapées, et promouvoir le respect de leur dignité intrinsèque. Mme Kayess a souligné l’importance de faire en sorte que, dans les États fédérés comme le Canada, l’application de la Convention s'étende à toutes les régions sans aucune limite ni exception.

Mme Kayess a ensuite estimé que les effets disproportionnés de l’échec à fournir des services adaptés aux personnes handicapées pouvaient amener ces personnes à recourir à l’AMM. Elle a en outre insisté sur la nécessité d’éviter l’isolement social des personnes handicapées.

Mme Kayess a par ailleurs regretté que le lien entre racisme environnemental et handicap soit négligé par les politiques publiques.

L’experte a par ailleurs voulu savoir quelles formations étaient dispensées au niveau fédéral et à celui des provinces afin que les juges ne considèrent plus le handicap comme un problème médical.

M. SCHEFER s’est interrogé sur les conditions d’application de la Convention dans le contexte du fédéralisme canadien. Il a relevé que trois provinces sur dix au Canada n’ont pas adopté de législation concernant l’accessibilité. Il ne suffit pas d’interpréter la Charte canadienne des droits et des libertés au regard de la Convention, car cette Charte ne tient pas compte de certains droits couverts par la Convention et qui relèvent des droits économiques, sociaux et culturels, a-t-il souligné.

L’expert a par ailleurs souhaité savoir à quel point les organisations de personnes handicapées étaient impliquées dans le système fédéral complexe du Canada. Leur participation doit être garantie par la loi, a-t-il insisté.

M. Schefer a indiqué que, selon les organisations de personnes handicapées, il n’est pas clair si la Convention s’applique aussi aux Premières Nations canadiennes. De même, les organisations regrettent que le Canada ne dispose pas de statistiques relatives aux effets des programmes visant les personnes handicapées.

Au Canada, les femmes et filles handicapées sont davantage exposées à la violence que les hommes handicapés, a ensuite relevé M. Schefer. Il a demandé s’il existait un mécanisme destiné à faire participer les femmes et les filles handicapées aux décisions politiques les concernant.

L’expert a par ailleurs relevé qu’il était envisagé d’étendre les possibilités de suicide assisté aux enfants handicapés. Il a demandé si les enfants handicapés étaient dûment consultés sur toutes les questions qui les concernent, et s’ils bénéficiaient de mesures de soutien suffisantes. Il a en outre regretté que les enfants ne soient pas considérés comme prioritaires dans la loi sur l’accessibilité.

M. Schefer a regretté que l’on assiste au Canada à une augmentation des détentions et traitements involontaires de personnes ayant un handicap psychosocial. Il a par ailleurs regretté que les personnes migrantes au Canada ayant des troubles psychosociaux puissent être placées en détention ; et que, en raison d’exigences légales excessives, certaines personnes handicapées ne puissent obtenir un permis de résidence au Canada, notamment les personnes atteintes du syndrome de Down.

Le Comité, a ajouté cet expert, est préoccupé par la stérilisation forcée de personnes handicapées, en particulier de femmes et filles autochtones, noires et racialisées.

M. Schefer s’est interrogé sur la stratégie de désinstitutionnalisation menée par le Canada et sur le soutien communautaire accordé aux personnes handicapées, en particulier autochtones.

M. MORRIS a demandé combien de personnes handicapées avaient pu profiter de la nouvelle offre canadienne de services de justice par vidéo. L’expert a en outre voulu savoir si l’intégralité des émissions (télévisées) en français et en anglais étaient effectivement accompagnées de sous-titres, comme le prévoit la réglementation.

M. Morris a par ailleurs demandé combien d’élèves handicapés étaient inscrits dans le système scolaire primaire et secondaire canadien, et de quels aménagements raisonnables et technologies d’assistance ces enfants, en particulier les enfants autochtones, bénéficiaient dans ce contexte. L’expert s’est en outre interrogé sur l’existence d’un mécanisme national de contrôle de l’application de l’éducation inclusive.

M. Morris a ensuite jugé louables les nombreuses mesures prises par le Canada pour faciliter la vie quotidienne des personnes handicapées. Il a néanmoins demandé dans quelle mesure les personnes handicapées pouvaient participer à la vie politique et publique, compte tenu d’une loi sur la tutelle qui, a-t-il ajouté, restreint l’exercice de ce droit.

D’ autres membres du Comité ont demandé si la loi sur l’aide médicale à mourir avait été précédée d’une analyse de son incidence potentielle sur les femmes. La mort assistée est relativement fréquente chez les femmes handicapées, a relevé une experte. Un expert a jugé choquant, dans le même contexte, que le handicap soit considéré comme une indication, ou un critère, des « douleurs mentales ou psychologiques qu’une personne ne peut plus tolérer » – autrement dit qu’il soit un motif pour obtenir l’AMM.

Il a par ailleurs été regretté que les provinces n’apportent pas les mêmes niveaux de soutien et de réhabilitation aux personnes handicapées, les familles devant parfois attendre jusqu’à deux ans avant d’obtenir les services de réadaptation dont elles ont besoin . Les enfants autochtones, les enfants vivant hors des villes ou encore les enfants nouvellement arrivés au Canada sont particulièrement concernés, a-t-il été souligné.

D’autres questions ont porté sur les conditions d’accès des personnes handicapées aux moyens d’assistance technologique ; sur l’harmonisation des lois fédérales et provinciales en matière d’accessibilité ; ou encore sur la formation à la Convention et à l’approche du handicap fondée sur les droits dispensée aux fonctionnaires.

Une experte a demandé ce que le Canada faisait pour mettre un terme à l’envoi d’armes qui seront utilisées dans des conflits, en particulier à Gaza où le conflit a entraîné des milliers de handicaps. D’autres experts ont en outre fait remarquer que le Canada exportait toujours des armes vers les États-Unis, lesquels sont le principal fournisseur d’armes d’Israël.

Une experte s’est enquise des mesures prises pour que des personnes handicapées ne soient pas obligées de recourir à l’AMM faute de soutien adéquat.

Plusieurs experts ont estimé que l’aide financière accordée aux personnes handicapées au Canada était insuffisante. 

Il a par ailleurs été demandé ce qui en était de la reconnaissance par le Canada de la langue des signes et du droit de vote des personnes atteintes du syndrome de Down.

Réponse de la délégation

La Convention s’applique à toutes les personnes handicapées vivant au Canada, y compris aux Premières Nations, aux Inuits et aux métis, a indiqué la délégation.

La délégation a expliqué que le fédéralisme canadien empêchait que la Convention soit appliquée par le biais d’un seul texte de loi. Ses dispositions sont appliquées aux différents niveaux de gouvernement par des textes et règlements. Tous les actes des différents gouvernements canadiens sont contrôlés par la Cour suprême afin d’assurer qu’ils respectent les droits fondamentaux des personnes handicapées, et d’autres protections ont été instituées par le biais de règlements, a souligné la délégation.

Les ministres concernés à tous les niveaux collaborent, de plus, sur toutes les questions relatives aux droits des personnes handicapées. Des forums de responsables sont organisés au sujet de l’accessibilité ou encore des besoins de santé mentale des personnes handicapées, a-t-il été précisé.

La délégation a par ailleurs indiqué que le Plan d'action pour l'intégration des personnes handicapées au niveau fédéral contenait des dispositions relatives à l’accès au marché au travail, et que le Gouvernement fédéral s’efforçait de moderniser l’approche de ses programmes afin de mieux répondre aux besoins des personnes handicapées.

La délégation a notamment fourni des renseignements concernant la manière dont le Manitoba et la Saskatchewan ont légiféré en matière de vie autonome des personnes handicapées, en particulier s’agissant de l’accessibilité des services, des emplois, des logements, des transports et de l’information. Seules deux provinces sur dix, et non trois [comme cela a été dit par un membre du Comité], n’ont pas adopté de loi sur l’accessibilité, a tenu à préciser la délégation.

Dans le cadre du respect du principe « Rien sans nous », le Gouvernement finance les activités des organisations de personnes handicapées, y compris leur venue à Genève pour le présent examen [du rapport du Canada], a poursuivi la délégation. La loi stipule que les organisations doivent être consultées au moment d’élaborer les lois et règlements relatifs à l’accessibilité. Entièrement transversal, le principe « Rien sans nous » ne répond pas uniquement à un engagement politique ponctuel, a assuré la délégation.

La délégation a expliqué que les questions relatives à l’accessibilité étaient traitées à plusieurs niveaux de responsabilité au Canada, précisant que l’accessibilité des locaux scolaires relève ainsi des provinces. Le Gouvernement s’efforce de parvenir à un consensus national et à une plus grande cohérence à l’échelle du pays s’agissant de ces questions.

Le Gouvernement du Canada reconnaît le droit des personnes handicapées de participer à la société, a insisté la délégation. Il a lancé plusieurs initiatives pour faciliter l’accès des personnes handicapées aux technologies d’assistance, y compris par le biais de crédits fiscaux et du remboursement de certaines dépenses.

L’avis de toute personne pouvant être touchée par une mesure prise au niveau fédéral est recueilli, y compris s’agissant des enfants handicapés, a assuré la délégation. Le Gouvernement est prêt à discuter avec les organisations de personnes handicapées des moyens d’améliorer la situation à cet égard, a-t-elle ajouté.

La délégation a d’autre part mentionné les mesures prises par les autorités pour protéger les femmes et les filles handicapées contre la violence, dans le cadre d’un plan d’action national sur dix ans.

La délégation a précisé que la question de l’aide médicale à mourir (AMM) faisait l’objet d’un vaste débat dans la société canadienne, en particulier sous l’angle de la protection des personnes vulnérables. Le Gouvernement effectue un suivi de la question, les professionnels de la santé devant signaler toutes les demandes d’AMM afin de pouvoir tirer des conclusions. On constate en l’état que les femmes sont davantage exposées à des maladies chroniques, a-t-il été précisé.

La loi concernant les soins de fin de vie du Québec (2015) a été modifiée en 2024, a-t-il été précisé : depuis cette date, les personnes qui présentent une déficience physique grave et qui souhaitent obtenir une aide à mourir doivent être aidées à prendre des décisions éclairées, être informées des conséquences d’une telle décision et être orientées vers des ressources appropriées. Les personnes ayant un handicap mental ne peuvent bénéficier des dispositions de cette loi.

Le Gouvernement est conscient que les personnes handicapées n’ont pas toujours accès à tous les services dont elles ont besoin, a ajouté la délégation, avant d’indiquer qu’il est engagé à prendre en compte, dès le départ, les besoins des personnes handicapées dans tous les aspects de ses plans et programmes.

Revenant par la suite sur les questions relatives à l’AMM, la délégation a précisé que les personnes qui envisagent de recourir à l’aide médicale à mourir doivent être informés par des professionnels qualifiés de moyens alternatifs pour réduire leurs souffrances. Deux médecins doivent vérifier que la personne concernée a sérieusement évalué ces alternatives. Plusieurs critères doivent être remplis [pour avoir accès à l’AMM] : avoir 18 ans ou plus ; avoir la capacité de décider et d’exprimer son consentement ; formuler une demande volontaire sans pression extérieure ; et avoir un problème médical grave, autrement dit une maladie ou un handicap incurables.

Les personnes qui souffrent de maladie mentale sont provisoirement exclues de l’application de la loi sur l’AMM ; et le Gouvernement canadien ne travaille pas à une extension de l’application de la loi aux moins de 18 ans, a par ailleurs souligné la délégation.

Le Gouvernement, conscient que les personnes handicapées sont les plus vulnérables aux changements climatiques, a mis en place des politiques pour remédier au racisme environnemental de même qu’à l’injustice environnementale, a poursuivi la délégation. Elle a fait état de l’adoption d’un plan pour atténuer les effets des changements climatiques sur les personnes handicapées et pour que les interventions en cas d’urgence soient accessibles aux personnes handicapées, y compris s’agissant de l’accès aux refuges.

De plus, le Gouvernement fait tout pour aider les personnes handicapées et les personnes aidantes à se préparer, chez elles, aux situations d’urgence. D’autres initiatives dans ce domaine et dans la planification d’urgence, prises dans la Saskatchewan, ont été décrites.

La délégation a ensuite présenté des exemples de réglementations destinées à garantir la capacité des personnes handicapées à prendre des décisions concernant leur vie personnelle, telle que l’exigence que les tuteurs remettent des comptes annuels à un tribunal. Il y aura toujours des cas où il est impossible de déterminer la volonté d’une personne, raison pour laquelle le pays maintient la possibilité de prise de décision assistée, ainsi que sa réserve à l’article 12 de la Convention, a-t-il été précisé.

Le Canada investit beaucoup dans la participation et l’intégration des personnes handicapées au sein de la communauté, un volet de l’action du Gouvernement étant axée sur leur accès au logement.

Le Canada applique un système de contrôle des exportations d’armes parmi les plus solides au monde, basé sur l’évaluation des risques définie par le Traité sur le commerce des armes, a affirmé la délégation. S’agissant de Gaza, le Canada a suspendu l’octroi de nouveaux permis d’exportation d’armes vers Israël en attendant une évaluation du risque que ces marchandises soient utilisées à des fins contraires aux objectifs de politique étrangère du Canada, a-t-il été précisé. De même, les marchandises qui transitent par les États-Unis vers un autre pays sont soumises à une autorisation d’exportation vers cet autre pays, a-t-elle ajouté.

Au Canada, les traitements involontaires en santé mentale sont de dernier recours et basés sur le principe du « moins restrictif possible », a expliqué la délégation, avant de souligner que toute personne traitée involontairement a le droit de contester la décision et de faire appel devant les tribunaux.

Le Canada ne place en détention des personnes migrantes ayant des problèmes de santé mentale que si elles présentent un danger ou un risque de fuite, a d’autre part expliqué la délégation, précisant qu’il s’agit d’une mesure de dernier recours qui s’accompagne d’un suivi médical.

Le Code pénal du Canada interdit toute les formes d’intervention médicale forcée : en particulier, la stérilisation forcée peut entraîner une peine de quarante ans de prison, a par ailleurs indiqué la délégation.

S’agissant de l’accès des personnes handicapées à l’information, la délégation a indiqué que le service vidéo évoqué par M. Morris était gratuit et offert à toutes les personnes au Canada, mais qu’il n’était pas possible de dire combien de personnes handicapées en bénéficient.

Toutes les diffusions médiatiques gérées par le niveau fédéral, privées et publiques, doivent être accessibles et accompagnées de sous-titres. L’autorité chargée des normes d’accessibilité au Canada vient d’adopter les mêmes normes que celles appliquées en Europe, a-t-il par ailleurs été indiqué.

Il n’y a pas de ministère de l’éducation au niveau fédéral, l’éducation étant surtout de la responsabilité des provinces et territoires canadiens, a précisé la délégation.

Des exemples de modalités d’éducation inclusive et d’intégration des enfants handicapés ont été donnés s’agissant du Québec et de la Saskatchewan : mise à disposition d’assistants personnels et d’orthophonistes ; aides financières pour aider les écoles à acheter l’équipement nécessaire ; aide personnelle au logement et au transport ; ou encore octroi de bourses.

D’autre part, a indiqué la délégation, le Gouvernement, responsable de la fourniture de l’éducation dans les réserves, a collecté des statistiques sur l’accès des jeunes autochtones handicapés à l’école. Il applique une nouvelle approche de l’enseignement primaire et secondaire adaptée aux besoins des élèves des Premières Nations, y compris ceux ayant des handicaps lourds, avec une adaptation des programmes et des conditions matérielles.

D’autres questions des experts ayant porté sur l’emploi des personnes handicapées, la délégation a notamment précisé que le recours aux ateliers protégés était en recul au profit d’une aide à l’intégration des personnes handicapées dans le marché de l’emploi.

La délégation a fait état d’autres mesures destinées à combattre la pauvreté parmi les personnes handicapées, notamment l’octroi de subventions fédérales complémentaires pour améliorer leur niveau de vie, ainsi que pour remédier à la précarité en matière de logement. Au niveau provincial, ont notamment été mentionnés des programmes de complément de revenu adaptés aux besoins des personnes handicapées.

La délégation a fait état de l’existence de réseaux destinés à soutenir les personnes handicapées dans l’exercice du droit de vote. Ont aussi été citées des mesures prises au Québec pour, notamment, faciliter le vote des personnes à mobilité réduite.

La délégation a fourni d’autres explications concernant, notamment, l’aide à la participation des personnes handicapées au monde du sport et le soutien aux familles ayant des enfants handicapés.

Remarques de conclusion

MME MALISCHEWSKI a insisté sur le fait que les échanges de la Commission [qu’elle préside par intérim] avec les communautés avaient mis en évidence l’ampleur des problèmes rencontrés par les personnes handicapées au Canada. La société civile estime en particulier que le soutien qui lui est accordé est superficiel, et plaide pour que les personnes handicapées soient consultées à chaque étape des processus. Mme Malischewski a recommandé que le Canada adopte un nouveau cadre de protection des droits de la personne et qu’il l’applique de manière coordonnée au niveau national.

M. RAM a notamment fait savoir que, face aux inégalités qui ont une incidence disproportionnée sur des groupes particuliers, comme les personnes autochtones, les femmes et les Canadiens noirs, ainsi que les personnes racisées en situation de handicap, le Canada continuerait d'appliquer et d'améliorer son approche intersectionnelle en matière de conception de programmes et de politiques, ainsi que ses efforts d’engagement avec les parties prenantes, les partenaires et les détenteurs de droits.

Enfin, M. SCHEFER a exprimé sa reconnaissance à la délégation pour son interaction positive pendant le dialogue, et a salué les contributions importantes de la société civile canadienne. Le dialogue a montré que l’État partie s’engage à contribuer au changement en faveur des personnes handicapées, a relevé l’expert, qui a toutefois recommandé que le Canada se concentre sur le changement des cadres qui refusent encore le droit à l’autonomie des personnes handicapées. De plus, une approche intersectorielle est nécessaire pour tenir compte de la diversité des personnes handicapées, a recommandé l’expert.

 

 

 

Ce document produit par le Service de l’information des Nations Unies à Genève est destiné à l'information ; il ne constitue pas un document officiel. 

Les versions anglaise et française de nos communiqués sont différentes car elles sont le produit de deux équipes de couverture distinctes qui travaillent indépendamment. 

 

 

 

CRPD25.005F