Le Conseil se penche sur la jouissance des droits humains par les personnes albinisme et sur la question des obligations relatives aux droits de l’homme se rapportant aux moyens de bénéficier d’un environnement sûr, propre, sain et durable
Après avoir clos, en entendant plusieurs délégations*, son dialogue entamé ce matin avec le Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation, le Conseil des droits de l’homme a tenu, cet après-midi et jusqu’en début de soirée, un dialogue avec l’Experte indépendante sur l’exercice des droits de l’homme par les personnes atteintes d’albinisme, Mme Muluka-Anne Miti-Drummond. Le Conseil a ensuite engagé son dialogue avec le Rapporteur spécial sur la question des obligations relatives aux droits de l’homme se rapportant aux moyens de bénéficier d’un environnement sûr, propre, sain et durable, M. David R. Boyd.
Présentant son rapport thématique sur « les défenseurs des droits de l’homme s’occupant de questions relatives à l’albinisme », Mme Miti-Drummond a souligné que, comme beaucoup de défenseurs des droits de l’homme dans le monde, ceux qui travaillent sur l'albinisme continuent de faire face à des défis particuliers qui entravent leur travail : ils sont confrontés à des menaces et des attaques, des agressions, des intimidations et de la maltraitance, a-t-elle précisé. Selon l’Experte, la stigmatisation et la discrimination touchant les personnes atteintes d'albinisme sont encore exacerbées lorsque ces personnes s'engagent dans un travail de défense des droits humains. En outre, la visibilité du travail de ces défenseurs des droits de l’homme est également entravée par le manque de priorité accordée aux droits des personnes atteintes d'albinisme, que ce soit délibérément ou non, a poursuivi Mme Miti-Drummond. Dans ce contexte, a-t-elle affirmé, nous devons tous faire beaucoup plus pour renforcer les capacités et soutenir le travail des personnes atteintes d'albinisme en tant que défenseurs des droits de l’homme.
L’Experte indépendante a ensuite rendu compte de la visite qu’elle a effectuée à Madagascar du 20 au 30 septembre 2022, après quoi la délégation malgache a fait une déclaration, avant que nombreuses délégations** ne prennent part au dialogue avec l’Experte indépendante.
Le Conseil a ensuite entendu la présentation des quatre rapports qui lui étaient soumis par M. Boyd et qui portaient respectivement sur les femmes, les filles et le droit à un environnement propre, sain et durable ; le séminaire d’experts que le Rapporteur spécial a organisé sur le rôle des droits de l’homme et de la protection de l’environnement dans la prévention de futures pandémies ; et les visites que le Rapporteur a effectuées au Portugal et en Slovénie.
Présentant ses rapports, M. Boyd a notamment rappelé que la discrimination systémique entre les sexes persiste et a indiqué que la participation des femmes et des filles à la conception et à la mise en œuvre des politiques climatiques et environnementales se traduit par de meilleurs résultats. Des corrélations positives existent entre les taux de femmes occupant des postes d'autorité politique, les taux élevés de ratification des traités environnementaux, des normes environnementales plus strictes et des empreintes carbone plus faibles, a insisté M. Boyd.
Le Rapporteur spécial a par ailleurs indiqué que l’une des recommandations du séminaires d’experts qu’il a organisé les 24 et 25 octobre 2022 juge essentiel de s'attaquer aux facteurs environnementaux pour prévenir de futures pandémies.
M. Boyd a ensuite rendu compte des visites qu’il a effectuées au Portugal et en Slovénie, après quoi les délégations de deux pays ainsi que le Médiateur des droits de l’homme de la Slovénie ont fait des déclarations.
Le Conseil a ensuite engagé son dialogue avec le Rapporteur spécial en entendant les interventions de plusieurs délégations***.
Ce dialogue se poursuivra demain matin, à 10 heures.
En fin de séance ce soir, l’Arménie et l’Azerbaïdjan ont exercé leur droit de réponse.
Fin du dialogue avec le Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation
Aperçu du dialogue
Cet après-midi, plusieurs délégations se sont dites d’accord avec le Rapporteur spécial quant à la nécessité de créer les conditions nécessaires à la pleine jouissance du droit à l'alimentation et d’éliminer la violence dans tous les aspects des systèmes alimentaires. Le Rapporteur spécial a été prié de dire si la reconnaissance du droit à la solidarité internationale pourrait aider à démêler les mécanismes d'inégalité qui entraînent la violence dans les systèmes alimentaires.
L’utilisation de la faim comme d’une arme lors de conflits a été vivement dénoncée en tant que violation du droit international humanitaire. Des délégations ont plaidé pour la poursuite de l’Initiative céréalière de la mer Noire – mais, ont affirmé certains intervenants, la Fédération de Russie empêche l’acheminement des céréales.
Plusieurs délégations ont dénoncé les sanctions occidentales qui empêchent le Bélarus et la Fédération de Russie d’exporter leurs engrais, ce qui risque, a-t-il été affirmé, de provoquer la famine dans les pays en voie de développement. De plus, certaines mesures coercitives unilatérales portent gravement atteinte au droit à l’alimentation, surtout lorsque ces mesures font de l’alimentation une arme, a-t-il été affirmé.
L’« extractivisme » agricole a été dénoncé, de même que la financiarisation des marchés de denrées alimentaires. Une délégation a mis en garde contre la marginalisation des petits pêcheurs.
L’aide humanitaire d’urgence ne pouvant tout régler, des appels ont été lancés pour trouver des solutions aux causes profondes de l’insécurité alimentaire. Ces solutions, a-t-il été suggéré, sont à chercher parmi les populations rurales, c’est-à-dire au sein des personnes directement concernées, et devront être basées sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales (2019).
*Liste des intervenants : Panama, Irlande, Ukraine, Allemagne, Bélarus, Liban, Cambodge, Tchad, Italie, Commission nationale des droits de l’homme de l’Inde, Centre Europe Tiers Monde (CETIM), Swedish Federation of Lesbian, Gay, Bisexual and Transgender Rights (RFSL), China Foundation for Poverty Alleviation, Swiss Catholic Lenten Fund, Associazione Comunità Papa Giovanni XXIII, FIAN International, Sikh Human Rights Group, Right Livelihood Award Foundation, Asian-Pacific Resource and Research Centre for Women (ARROW) et Vaagdhara.
Réponses et remarques de conclusion du Rapporteur spécial
M. MICHAEL FAKHRI, Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation, a conclu la présentation de son rapport en soulignant que la grande question était de trouver le moyen d’enraciner la sécurité alimentaire dans les droits humains et en affirmant que le Conseil des droits de l’homme jouait à cet égard un rôle très important. La grande majorité des programmes alimentaires nationaux ne reposent malheureusement pas encore sur le droit humain à l’alimentation, a-t-il regretté. Il a recommandé, à cet égard, que les États demandent directement aux personnes concernées ce dont elles ont besoin et comment mieux les protéger.
Le Rapporteur spécial a mis en avant le rôle potentiellement très important du Comité de la sécurité alimentaire mondiale pour coordonner l’action mondiale dans ce domaine. M. Fakhri a enfin indiqué que son prochain rapport porterait sur la situation des pêcheurs dans le monde.
Dialogue avec l’Experte indépendante sur l’exercice des droits de l’homme par les personnes atteintes d’albinisme
Le Conseil est saisi du rapport thématique (A/HRC/52/36) de l’Experte indépendante sur l’exercice des droits de l’homme par les personnes atteintes d’albinisme – rapport intitulé « Défenseurs des droits de l’homme s’occupant de questions relatives à l’albinisme » – et du rapport concernant la visite de l’Experte à Madagascar (A/HRC/52/36/Add.1)
Présentation des rapports
MME MULUKA-ANNE MITI-DRUMMOND, Experte indépendante sur l’exercice des droits de l’homme par les personnes atteintes d’albinisme, a déclaré que le travail sur la défense des droits des personnes atteintes d'albinisme est relativement nouveau et a gagné beaucoup de terrain grâce à la création de ce mandat. Elle s’est dite encouragée par le fait qu’il y a un nombre croissant de personnes atteintes d'albinisme qui s'engagent activement dans le travail des droits de l'homme et qui apprennent et accumulent des compétences pour mieux défendre, promouvoir et protéger leurs droits.
Mais comme beaucoup de défenseurs des droits de l’homme dans le monde, ceux qui travaillent sur l'albinisme continuent de faire face à des défis particuliers qui entravent leur travail, a relevé l’Experte. Ils sont confrontés à des menaces et des attaques, des agressions, des intimidations et de la maltraitance, a-t-elle précisé. Selon l’Experte, la stigmatisation et la discrimination touchant les personnes atteintes d'albinisme sont encore exacerbées lorsque ces personnes s'engagent dans un travail de défense des droits humains. Les femmes défenseures des droits humains, en particulier celles atteintes d'albinisme, signalent des cas de harcèlement sexuel, en plus d’être ciblées en raison de mythes dangereux et d'idées fausses à leur sujet.
La visibilité du travail de ces défenseurs des droits de l’homme est également entravée par le manque de priorité accordée aux droits des personnes atteintes d'albinisme, que ce soit délibérément ou non, a poursuivi Mme Miti-Drummond. Dans ce contexte, a-t-elle affirmé, nous devons tous faire beaucoup plus pour renforcer les capacités et soutenir le travail des personnes atteintes d'albinisme en tant que défenseurs des droits de l’homme, car cela les aidera à devenir plus efficaces. L’Experte a indiqué que son rapport présente un certain nombre de bonnes pratiques qui peuvent être soutenues et mises en œuvre pour améliorer le travail des défenseurs des droits de l’homme travaillant sur l'albinisme.
Rendant par ailleurs compte de la visite qu’elle a effectuée à Madagascar du 20 au 30 septembre 2022, l’Experte indépendante a dit avoir constaté la bonne volonté des autorités malgaches et d'autres parties prenantes clés – parmi lesquelles les Nations Unies, les organisations de la société civile et les personnes atteintes d'albinisme – à travailler ensemble pour remédier au sort des personnes atteintes d'albinisme dans le pays, en particulier en ce qui concerne les attaques visant ces personnes.
Malheureusement, « je continue de recevoir des rapports tragiques sur des attaques qui se poursuivent, encore pas plus tard qu’il y a quelques jours », a indiqué Mme Miti-Drummond. Les derniers rapports concernaient l’enlèvement d'enfants atteints d'albinisme et le meurtre d'un homme adulte atteint d'albinisme, a-t-elle précisé. Madagascar est clairement toujours aux prises avec ces phénomènes et tragiquement, les enfants constituent la majorité des victimes, a-t-elle souligné. La plupart des attaques comprennent l'extraction des yeux des victimes, a-t-elle ajouté.
L’Experte indépendante a aussi dit être particulièrement préoccupée par la situation sécuritaire des personnes atteintes d'albinisme dans la partie méridionale du pays où de telles attaques sont fréquemment lancées. Cela est principalement dû aux mythes dominants et aux fausses croyances sur les personnes atteintes d'albinisme qui alimentent les attaques en premier lieu, mais aussi à l'éloignement de ces régions qui rend la détection et les enquêtes considérablement difficiles, a-t-elle expliqué. Dans ce contexte, le rapport fournit de nombreuses recommandations quant à la manière de lutter contre les crimes flagrants dans le pays. Parmi celles-ci, figure l'urgence de fournir une protection renforcée et des actions accélérées pour mettre fin aux attaques, notamment en s'attaquant aux superstitions et aux mythes dominants qui alimentent la discrimination à l'égard des personnes atteintes d'albinisme.
Pays concerné
La délégation de Madagascar a assuré que « les autorités malgaches prenaient très au sérieux la question de l’insécurité des personnes atteintes d’albinisme et ne ménageaient aucun effort pour mobiliser toutes les forces de l’ordre et tous les organes de l’État dans les régions et districts concernés, avec l’appui de la communauté locale, pour lutter contre ce phénomène sans précédent dans la Grande Île ». « Les attaques envers les personnes atteintes d’albinisme sont un phénomène assez nouveau à Madagascar », a affirmé la délégation. Elles puisent leurs sources dans des superstitions et croyances dangereuses, exacerbées par l’insécurité alimentaire et les effets des changements climatiques, a-t-elle précisé. « Ce type d’actes de violence est condamnable et les auteurs doivent être jugés et recevoir des sanctions prévues par la législation en vigueur », a souligné la délégation, avant d’assurer que « face aux attaques à l’encontre des personnes atteintes d’albinisme, les autorités malgaches ont procédé à l’arrestation et à la traduction en justice des auteurs de ces actes ».
Madagascar note avec intérêt les recommandations émises par l’Experte indépendante relatives à la place primordiale de l’éducation et de la sensibilisation des citoyens dès leur jeune âge à la promotion, au respect et au plein exercice des droits humains par les personnes atteintes d’albinisme. En effet, la méconnaissance par la société de cette affection rare est à l’origine de stigmatisation et de discrimination nuisant aux droits fondamentaux et au plein épanouissement au quotidien des personnes atteintes d’albinisme, a souligné Mme Miti-Drummond.
Aperçu du dialogue
La violence et les discriminations visant les personnes atteintes d’albinisme ne peuvent être tolérées et doivent être condamnées ; et les pays doivent adopter des mesures afin de protéger ces personnes et d’assurer l’obligation redditionnelle face à de tels actes, ont affirmé les délégations.
Une ONG a plaidé en faveur de l’instauration de visas humanitaires visant à protéger les personnes atteintes d’albinisme face au risque de trafic d’organes en Afrique. Mais la question de l’exercice des droits de l’homme par les personnes atteintes d’albinisme ne concerne pas uniquement les pays africains, a-t-il été souligné : tous les pays, y compris européens, sont concernés et doivent prendre des mesures vigoureuses pour renforcer les droits et la dignité de ces personnes.
Plusieurs délégations ont reconnu que la situation des personnes atteintes d’albinisme était « problématique » dans leur pays et ont rendu compte des mesures concrètes et positives prises pour y remédier. Parmi ces mesures, figurent l’adoption de plans d’action nationaux, des campagnes de sensibilisation (incluant la lutte contre les mythes et croyances nocives), des distributions de produits de protection solaire, l’accès aux traitements médicaux, la formation aux droits de l’homme, ainsi que l’intégration sociale des personnes atteintes d’albinisme – dont un certain nombre, a-t-il été indiqué, ont parfois été nommés à des hauts postes de responsabilité. A également été rappelée la célébration, le 13 juin de chaque année, de la Journée internationale de sensibilisation de l’albinisme.
Ont par ailleurs été salués l’adoption des Directives du Parlement panafricain sur les accusations de sorcellerie et d'agressions rituelle ainsi que le Plan d'action pour mettre fin aux attaques et à la discrimination contre les personnes atteintes d'albinisme, couvrant la période 2021-2031.
Que peut faire la communauté internationale pour mieux protéger les défenseurs des droits de l’homme qui défendent les personnes atteintes d’albinisme, a-t-il notamment été demandé à l’Experte indépendante ?
**Liste des intervenants : Portugal (au nom de la communauté des pays de langue portugaise), Belgique (au nom d’un groupe de pays), Union européenne, Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), Israël, Zambie, Chine, Venezuela, Iraq, Djibouti, République-Unie de Tanzanie, Malaisie, Afrique du Sud, Angola, Lesotho, Mozambique, Malawi, Panama, Nigéria, États-Unis, Algérie, Commission nationale indépendante du Burundi, Standing Voice, International, Service for Human Rights, Under the same sun, RADDHO, Congrès juif mondial, Interfaith International, Organisation mondiale contre la torture - OMCT et Plateform for Youth integration.
Réponses et remarques de conclusion de l’Experte indépendante
MME MITI-DRUMMOND a jugé très encourageant que de nombreux défenseurs et défenseuses des droits des personnes atteintes d’albinisme aient participé au débat. L’Experte indépendante a toutefois regretté que le monde des droits de l’homme méconnaisse encore les problèmes rencontrés par les personnes atteintes d’albinisme. Les organisations qui travaillent sur le sujet n’ont pas toujours conscience, elles-mêmes, qu’elles travaillent dans le domaine plus large de la défense des droits humains, et que leur action dépasse largement le simple bénévolat, a-t-elle observé.
Un meurtre est en effet une violation du droit à la vie, a rappelé Mme Miti-Drummond. Quand un jeune albinos ne va pas à l’école, il s’agit d’une violation du droit à l’éducation, à laquelle l’État peut remédier en fournissant aux enfants concernés les moyens et aménagements dont ils ont besoin, a-t-elle en outre souligné. Les défenseurs des droits des albinos doivent être intégrés aux discours sur les droits humains, a-t-elle ajouté. L’Experte a enfin recommandé que les personnes atteintes d’albinisme soient consultées pour les décisions qui les concernent.
Dialogue avec le Rapporteur spécial sur la question des obligations relatives aux droits de l’homme se rapportant aux moyens de bénéficier d’un environnement sûr, propre, sain et durable
Le Conseil est saisi de quatre rapports du Rapporteur spécial sur la question des obligations relatives aux droits de l’homme se rapportant aux moyens de bénéficier d’un environnement sûr, propre, sain et durable : sur « Les femmes, les filles et le droit à un environnement propre, sain et durable » (A/HRC/52/33); sur le « Résumé du séminaire d’experts sur le rôle des droits de l’homme et de la protection de l’environnement dans la prévention de futures pandémies (A/HRC/52/44) ; ainsi que sur les visites que le Rapporteur a effectuées au Portugal, (A/HRC/52/33/Add.1) et en Slovénie (A/HRC/52/33/Add.2).
Présentation des rapports
Présentant le premier de ces quatre rapports, M. DAVID R. BOYD, Rapporteur spécial sur la question des obligations relatives aux droits de l’homme se rapportant aux moyens de bénéficier d’un environnement sûr, propre, sain et durable, a déclaré qu’en dépit des progrès vers l'égalité entre les sexes dans certains États, la discrimination systémique persiste. Selon les chiffres disponibles, les femmes et filles représentent 70 % des pauvres du monde ; elles effectuent trois fois plus de travail de soins non rémunéré que les hommes ; et seulement 16% des ministres des gouvernements sont des femmes, a-t-il illustré. De plus, a-t-il ajouté, la crise environnementale mondiale a des impacts disproportionnés sur elles. Plus de 80 % des personnes déplacées par des catastrophes liées au climat sont des femmes et des filles, a précisé le Rapporteur spécial. Le manque d'accès à l'eau potable cause, quant à lui, la mort de 800 000 femmes chaque année et dans 80% des ménages qui manquent d'eau sur place, la tâche de la collecte de l'eau incombe aux femmes. En outre, du fait des responsabilités sexospécifiques en matière de cuisine, des millions de femmes et de filles meurent prématurément chaque année à cause de la pollution de l'air domestique due à des combustibles impurs et à des fourneaux inefficaces.
Pourtant, a observé le Rapporteur spécial, la participation des femmes et des filles à la conception et à la mise en œuvre des politiques climatiques et environnementales se traduit par de meilleurs résultats. Des corrélations positives existent entre les taux de femmes occupant des postes d'autorité politique, les taux élevés de ratification des traités environnementaux, des normes environnementales plus strictes et des empreintes carbone plus faibles, a souligné M. Boyd, indiquant que son rapport contient une annexe qui répertorie des centaines de bonnes pratiques dans plus de 100 États. Ce rapport contient également une série de recommandations aux États, les invitant par exemple à assurer l'accès universel à l'eau potable et à l'assainissement ; à donner aux femmes et aux filles les moyens de conserver, de protéger et de restaurer une biodiversité et des écosystèmes sains ; ou encore à éliminer la violence sexiste.
S’agissant de son rapport sur le rôle des droits de l’homme et de la protection de l’environnement dans la prévention de futures pandémies, M. Boyd a notamment précisé qu’il contient les recommandations issues du séminaire d'experts qu’il a organisé sur ce thème conformément à la résolution 46/7 du Conseil. L’une d’elles juge essentiel de s'attaquer aux facteurs environnementaux pour prévenir de futures pandémies, a souligné le Rapporteur spécial.
Rendant ensuite compte de ses deux visites de pays, le Rapporteur spécial a d’abord relevé que la Slovénie offre l’exemple de nombreuses bonnes pratiques liées à la conservation de la nature, avec plus de 40% des terres protégées, sa gestion des déchets solides et ses taxes environnementales qui génèrent des revenus substantiels. Elle est en revanche confrontée à des défis majeurs liés à l'énergie propre, à la qualité de l'air et aux points chauds toxiques, a souligné M. Boyd. Les inégalités en matière d'accès à l'eau et à l'assainissement continuent en outre d'affecter certaines communautés roms, a-t-il ajouté.
Le Portugal subit quant à lui, les conséquences dévastatrices de la crise climatique : sécheresse extrême, incendies de forêt qui font rage et vagues de chaleur meurtrières, a ensuite fait observer le Rapporteur spécial. À son crédit, a-t-il ajouté, le Portugal développe rapidement l'énergie éolienne et solaire et a fermé les deux dernières centrales électriques à charbon, démontrant la possibilité d'une transition rapide et réussie loin des combustibles fossiles. Les défis que rencontrent le pays incluent la qualité de l'air, la gestion des déchets et la mise en œuvre de lois strictes, a indiqué le Rapporteur spécial.
Pays concernés
Le Portugal a remercié le Rapporteur spécial pour sa visite en septembre dernier et les échanges fructueux qu’il a eus avec de nombreux interlocuteurs. Le Portugal a rappelé qu’il avait été l'un des premiers pays au monde à inscrire le droit à un environnement sain et durable dans sa Constitution, en 1976. Le Gouvernement prend au sérieux son obligation de respecter ce droit, tant dans ses aspects procéduraux que dans ses éléments matériels, comme la qualité de l’air et de l’eau ou l’alimentation produite de manière durable.
Au Portugal, a poursuivi la délégation portugaise, les effets négatifs des changements climatiques – vagues de chaleur, sécheresse, incendies de forêt, inondations, érosion côtière ou risque de désertification – influencent directement les droits de l'homme. C’est pourquoi le Portugal a adopté une loi sur le climat en 2021 et a été, la même année, le premier pays européen sans énergie nucléaire à abandonner le charbon. Cela étant, aucun pays n'a un bilan parfait et le Portugal reconnaît qu'il lui reste de nombreux défis à relever dans les domaines de la qualité de l'air, de l'agriculture ou encore de la gestion des déchets, a indiqué la délégation.
La Slovénie a dit avoir pris note des préoccupations du Rapporteur spécial concernant le statut de la communauté rom. Elle a souligné que les problèmes de logement de la communauté rom devaient être abordés de manière globale, au-delà de la seule question des raccordements à l'eau, et que la propriété des terrains où sont situés certains campements roms n’était pas encore réglementée. De plus, selon la législation nationale, l'approvisionnement en eau potable est un service public et la construction du réseau entraîne des coûts, tout comme le traitement et la distribution de l'eau, ce qui signifie que les utilisateurs du service public paient pour l'eau potable fournie, a rappelé la délégation slovène.
Par ailleurs, a poursuivi la délégation, la société civile – qui joue un rôle indispensable en Slovénie – peut s'exprimer sur les questions environnementales, comme on l'a vu lors du récent référendum concernant la loi sur l'eau. La liberté d'association est un droit garanti par la Constitution et l'absence de stratégie nationale spéciale pour les défenseurs des droits de l'homme, en particulier en matière d'environnement, ne limite pas leur champ d'action ni le cadre général de leur protection, a assuré la Slovénie L'expérience montre que les défenseurs des droits de l'homme dans le domaine de l'environnement sont bien protégés par le cadre réglementaire en vigueur.
Le Médiateur des droits de l’homme de la Slovénie a demandé aux autorités slovènes d’appliquer les recommandations du Rapporteur spécial, selon un calendrier clair, dans les domaines où le pays rencontre des difficultés, s’agissant en particulier de l’observation selon laquelle les lois et règlements sur l’environnement ont été rédigés avec une participation insuffisante du public, ou encore de la nécessité d’améliorer et de régulariser l’accès des Roms à l’eau.
Aperçu du dialogue
La place et le rôle des femmes et des filles en matière d’environnement propre, sain et durable ont été soulignés par de nombreuses délégations. Les femmes et les filles sont des moteurs du développement, des actrices du changement et des forces transformatrices dans la lutte contre les effets des changements climatiques et contre la pollution, a-t-il été affirmé. En dépit de cela, ont déploré les délégations, les femmes sont sous-représentées dans les processus politiques liés à l’environnement et moins de 2% des stratégies nationales sur l’environnement mentionnent les femmes et les filles. C’est pourquoi les États doivent, par une action urgente, lever tous les obstacles à la participation des femmes – et le rapport du Rapporteur spécial montre tout ce qui pourrait être accompli si tel était le cas, a-t-il été relevé.
Les réponses à trouver doivent adopter une approche sexospécifique, féministe et intersectionnelle ; elles doivent reconnaître la vulnérabilité des femmes et filles, mais aussi leur rôle potentiellement transformateur, a-t-il été souligné, d’aucuns rappelant que les femmes sont capables de prendre en main leur propre destin.
De nombreuses délégations ont décrit les mesures que leurs gouvernements prennent en la matière, s’agissant notamment de la promotion de la participation des femmes et filles aux divers niveaux des processus de prise de décisions, y compris par le biais de quotas, et de la création de mécanismes de réforme agraire et de distribution des terres en faveur des femmes.
Le Rapporteur spécial a été prié de dire comment progresser vers l’autonomisation et la promotion des femmes, y compris celles vivant en milieu rural, en tant que dirigeantes. Il lui a aussi été demandé de fournir des exemples de bonnes pratiques. M. Boyd a aussi été interrogé sur les prochaines étapes à suivre pour faire avancer la question du droit à un environnement propre, sain et durable, dans le contexte de sa reconnaissance internationale, et pour minimiser les effets intergénérationnels des changements climatiques.
Une délégation a estimé que la problématique du droit à un environnement sain, propre et durable n’était pas encore réglementée par le droit international des droits de l’homme, ce qui – selon cette délégation – rend la démarche du Conseil contreproductive.
*** Liste des intervenants : Lituanie (au nom d’un groupe de pays), Union européenne, Costa Rica (au nom d’un groupe de pays), Cote d’Ivoire (au nom du Groupe africain), Trinidad-et-Tobago (au nom de la Communauté des Caraïbes – CARICOM), Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), ONU Femmes, Équateur, France, Tunisie, Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), Suisse, Émirats arabes unis, Burkina Faso, États-Unis, République de Corée, Israël, Bahreïn, Colombie, Sierra Leone, Chypre, Paraguay, Luxembourg, Monaco, Chine, Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), Costa Rica, Togo, Slovénie, Inde, Pérou, Fédération de Russie, Cameroun, Maroc, Venezuela, Mexique, Arménie, Iraq, Pologne, Népal, Uruguay, Djibouti, Autriche, Royaume-Uni, Malaisie, Afrique du Sud, Soudan, Espagne, Maldives, Kazakhstan, Samoa et Kenya.
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