Examinant le rapport du Zimbabwe, le CERD se dit préoccupé par le fait que les meurtres du Gukurahundi, pour lesquels il n’y a pas eu reddition de comptes, demeurent une source de tensions ethniques
Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD) a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport soumis par le Zimbabwe au titre de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.
S’agissant des événements violents [connus sous le nom de Gukurahundi] qui ont entraîné la mort d’environ 20 000 personnes, pour la plupart parlant le ndebele, tuées par les forces gouvernementales au début des années 1980 dans les provinces du Matabeleland et des Midlands, le Comité est préoccupé par le fait que ces meurtres demeurent une source de tensions ethniques, qu’il n’y a pas eu de reddition de comptes pour ces décès et que des milliers de survivants, dont beaucoup restent traumatisés, continuent d’attendre que justice soit faite. Le Comité est également préoccupé par les informations selon lesquelles la Commission nationale pour la paix et la réconciliation (CNR) n’a pas contribué efficacement à la réconciliation. C’est ce qu’a indiqué une experte du Comité à l’ouverture du dialogue noué entre les membres du Comité et la délégation zimbabwéenne venue présenter le rapport du pays.
Le Comité est par ailleurs préoccupé par les informations faisant état d’un manque général de représentation adéquate des minorités ethniques dans les organes de prise de décision politique du Zimbabwe, y compris au niveau régional, a poursuivi l’experte.
Le Comité est aussi préoccupé par les informations selon lesquelles les tensions historiques entre la majorité de langue shona et la minorité parlant le ndebele ont entraîné la marginalisation politique des Ndebele par le Gouvernement dirigé par les Shona, a ajouté l’experte.
L’experte a également souligné que le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles la redistribution des terres dans l’État partie a favorisé des personnes liées au parti au pouvoir, ce qui a eu pour conséquence que certains groupes ethniques ont été favorisés dans ce processus, tandis que d’autres ont été victimes de discrimination.
En outre, a fait savoir l’experte, le Comité est préoccupé par les informations faisant état d’une impunité généralisée pour les fonctionnaires qui commettent des violations des droits de l’homme, ce qui peut amener les victimes de discrimination raciale à hésiter à porter plainte contre des fonctionnaires.
Un autre expert a, quant à lui, relevé que la question de l’apatridie n’était pas couverte par le rapport présenté par le Zimbabwe, alors même qu’il y aurait dans ce pays environ 300 000 personnes exposées au risque d’apatridie – un chiffre qu’a réfuté la délégation au cours du dialogue.
Présentant le rapport de son pays, M. Ziyambi Ziyambi, Ministre de la justice et des affaires juridiques et parlementaires du Zimbabwe, a notamment souligné qu’en 2013, le Zimbabwe a adopté et promulgué une nouvelle Constitution qui contient des dispositions telles que l’interdiction de toute forme de discrimination, y compris sur la base de la race, de la nationalité, de la couleur, de la tribu, de l’origine ethnique ou sociale. Les lois ont été progressivement alignées sur cette Constitution, permettant ainsi aux citoyens de faire valoir leurs droits chaque fois qu’il y a des violations. La Constitution contient en outre des dispositions conformes à la définition de la discrimination raciale telle qu’elle est énoncée dans la Convention.
Le Gouvernement est en train d’aligner la Loi sur la citoyenneté du Zimbabwe et la Loi sur l’immigration sur la Constitution afin de donner plein effet à la Convention, a d’autre part indiqué M. Ziyambi.
Le Ministre a ensuite souligné certains défis qui ont entravé la pleine jouissance des droits découlant de la Convention dans son pays. Il a ainsi dénoncé les mesures coercitives unilatérales illégales, toujours en place, imposées au Zimbabwe par un certain nombre de puissances occidentales. Ces mesures ont un impact négatif sur chaque Zimbabwéen et sapent gravement les efforts visant à assurer la pleine protection et la promotion des droits acquis dans le cadre de la Convention, a-t-il affirmé.
Outre M. Ziyambi, la délégation zimbabwéenne était composée notamment de représentants des Ministères des finances et du commerce ; des affaires étrangères et du commerce international ; du transport et du développement des infrastructures ; des affaires des femmes, des petites et moyennes entreprises et du développement communautaire ; des terres, de l’agriculture, de l’eau et des pêcheries ; de l’éducation primaire et secondaire ; du service public, du travail et du bien-être social ; des affaires intérieures et du patrimoine culturel. Elle comprenait également des représentants du Cabinet, de la Police et du Procureur général.
Durant le dialogue, la délégation a notamment déclaré qu’il n’y aucune forme de discrimination à l’encontre d’une quelconque minorité ou des populations « blanches » au Zimbabwe, soulignant que cette pratique est interdite par la Constitution et la législation du pays et que des politiques sont menées pour donner effet à ces principes. Le pays ne travaille pas sur une base ethnique mais bien sur une base (géographique) régionale, a expliqué la délégation.
Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport du Zimbabwe et les rendra publiques à l’issue de sa session, le 30 août prochain.
Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l’examen du rapport du Suriname.
Examen du rapport du Zimbabwe
Le Comité était saisi du rapport valant cinquième à onzième rapports périodiques du Zimbabwe (CERD/C/ZWE/5-11).
Présentation du rapport
M. Ziyambi Ziyambi, Ministre de la justice et des affaires juridiques et parlementaires du Zimbabwe, a indiqué que le Gouvernement continue d’appliquer des mesures constitutionnelles, législatives, administratives et autres pour éliminer toutes les formes de discrimination raciale . Le Gouvernement est également guidé par les droits énoncés dans la Déclaration universelle des droits de l’homme et dans les principaux traités internationaux et régionaux relatifs aux droits de l’homme auxquels le pays est partie afin d’éliminer la discrimination raciale sous toutes ses formes, a-t-il déclaré.
Le Ministre a ensuite présenté au Comité les nouveaux développements de son pays dans le domaine de la lutte contre la discrimination raciale. En 2013, a-t-il précisé, le Zimbabwe a adopté et promulgué une nouvelle Constitution qui contient des dispositions telles que l’interdiction de toute forme de discrimination, y compris sur la base de la race, de la nationalité, de la couleur, de la tribu, de l’origine ethnique ou sociale. Les lois ont été progressivement alignées sur cette Constitution, permettant ainsi aux citoyens de faire valoir leurs droits chaque fois qu’il y a des violations.
La Constitution contient des dispositions conformes à la définition de la discrimination raciale telle qu’elle est énoncée dans la Convention. L’article 56 interdit de traiter toute personne de manière injustement discriminatoire pour des motifs tels que la race, la tribu, le lieu d’origine, l’origine nationale ou ethnique, les opinions politiques, la couleur, la croyance ou le sexe, a précisé le Ministre.
Le Gouvernement est en train d’aligner la Loi sur la citoyenneté du Zimbabwe et la Loi sur l’immigration sur la Constitution afin de donner plein effet à la Convention, a poursuivi M. Ziyambi. Tous les citoyens, sans distinction, bénéficient sur un pied d’égalité des droits, privilèges et avantages de la citoyenneté tels qu’ils sont inscrits dans nos lois, a fait valoir le Ministre.
À l’indépendance du pays, le Gouvernement a hérité un système foncier reflétant l’héritage racialement biaisé d’un siècle d’occupation coloniale, d’oppression et d’injustice raciale, a poursuivi M. Ziyambi. Quelque 4500 agriculteurs colons possédaient 12,5 millions d’hectares sur un total de 15 millions d’hectares de terres arables, tandis que 7,4 millions d’indigènes zimbabwéens ne possédaient que 2,5 millions d’hectares, a-t-il rappelé. La guerre de libération de 15 ans menée contre le colonialisme de peuplement reposait principalement sur la récupération et la restitution de la terre aux personnes à qui elle avait été prise de force, a-t-il souligné.
Au cours de la période 2002-2013, et afin de corriger le déséquilibre racial hérité dans les schémas de propriété foncière, le Gouvernement s’est lancé dans un vaste programme de réforme agraire qui a notamment permis l’acquisition obligatoire de terres agricoles à des fins de réinstallation. En entreprenant ce programme, le Gouvernement a été guidé par un programme de redistribution clairement équitable, a déclaré M. Ziyambi.
La loi sur l’éducation contient des dispositions qui tiennent compte des intérêts des groupes minoritaires à jouir du droit à l’éducation sans discrimination, a ensuite indiqué le Ministre. Pour ce qui concerne l’admission dans une école, la loi interdit toute discrimination – fondée sur la race, la tribu, l’origine géographique ou ethnique, les opinions politiques, la couleur, la croyance ou encore le sexe – à l’égard de tout enfant en ce qui concerne l’admission dans une école. En termes de moyen d’enseignement, toutes les langues du pays sont maintenant enseignées dans les écoles, a ajouté le Ministre.
La Constitution établit cinq commissions indépendantes qui jouent un rôle prépondérant dans le soutien à la démocratie et à la bonne gouvernance. Parmi ces commissions, figurent la Commission des droits de l’homme du Zimbabwe, la Commission nationale pour la paix et la réconciliation et la Commission pour l’égalité des sexes au Zimbabwe. L’un des rôles de ces commissions consiste notamment à soutenir et à ancrer les droits de l’homme, à renforcer la démocratie et à veiller à ce qu’il soit remédié aux injustices raciales. Ces commissions sont habilitées par la Constitution à enquêter et à tirer des conclusions sur les cas de discrimination raciale dans divers aspects de leur mandat, a expliqué le Ministre.
Après avoir présenté les progrès accomplis au cours de la période considérée, M. Ziyambi a souligné certains défis qui ont entravé la pleine jouissance des droits découlant de la Convention. Il a ainsi dénoncé les mesures coercitives unilatérales illégales, toujours en place, imposées au Zimbabwe par un certain nombre de puissances occidentales. Ces mesures ont un impact négatif sur chaque Zimbabwéen et sapent gravement les efforts visant à assurer la pleine protection et la promotion des droits acquis dans le cadre de la Convention, a-t-il affirmé.
Le Ministre a par ailleurs dénoncé le rapport parallèle qui a été présenté par une coalition - Crisis in Zimbabwe Coalition - et ses alliés de la société civile. Le rapport se caractérise par de fausses déclarations, de fausses informations et une série d’inexactitudes concernant l’adéquation du cadre juridique et la mise en œuvre de la Convention au Zimbabwe. Il s’agit d’un rapport conçu pour dépeindre le Zimbabwe comme un pays sans loi, pour le discréditer et pour induire délibérément en erreur ce Comité, a-t-il déclaré le Ministre. Il a également fait part de son objection à l’utilisation du terme « massacres » lorsqu’il est fait référence aux troubles qui se sont produits dans certaines parties du pays peu après l’obtention de l’indépendance souveraine en 1980. Il a rappelé qu’il s’agissait d’une question politique qui a été réglée en 1987 avec la signature de l’Accord d’unité.
Questions et observations des membres du Comité
Mme Gay McDougall, corapporteuse du Comité pour l’examen du rapport du Zimbabwe, a déclaré qu’à titre personnel, à l’époque, elle avait célébré l’indépendance du Zimbabwe et qu’elle comprenait les défis à relever pour les pays anciennement colonisés. Ces pays prennent des mesures d’unité nationale, a-t-elle insisté. Elle a assuré que le Comité allait tenir compte de cette histoire dans le cadre de cet examen.
Malgré le fait que des dispositions interdisant la discrimination raciale existent dans la Constitution et dans la législation de l’État partie, l’experte a relevé que les dispositions de la loi sur la prévention de la discrimination ne sont pas suffisamment complètes car elles sont limitées à certains domaines. En outre, la définition de la discrimination raciale dans la Constitution et dans la loi du pays n’inclut pas les motifs de « filiation » et la loi n’est pas claire pour ce qui est de savoir si elle englobe la discrimination indirecte.
S’agissant des événements violents [connus sous le nom de Gukurahundi] qui ont entraîné la mort d’environ 20 000 personnes, pour la plupart parlant le ndebele, tuées par les forces gouvernementales au début des années 1980 dans les provinces du Matabeleland et des Midlands, le Comité est préoccupé par le fait que ces meurtres demeurent une source de tensions ethniques, qu’il n’y a pas eu de reddition de comptes pour ces décès et que des milliers de survivants, dont beaucoup restent traumatisés, continuent d’attendre que justice soit faite. Le Comité est également préoccupé par les informations selon lesquelles la Commission nationale pour la paix et la réconciliation (CNR) n’a pas contribué efficacement à la réconciliation.
En outre, le Comité a eu connaissance de rapports selon lesquels les autorités de l’État empêchent les survivants des atrocités du Gukurahundi et leurs proches de se livrer à des activités commémoratives et de pleurer ceux qui sont morts ou ont disparu à la suite des attaques, notamment en détruisant ou en enlevant des plaques commémoratives, et en empêchant l’exhumation des victimes du Gukurahundi.
Le Comité est par ailleurs préoccupé par les informations faisant état d’un manque général de représentation adéquate des minorités ethniques dans les organes de prise de décision politique du Zimbabwe, y compris au niveau régional, a poursuivi l’experte.
Le Comité est aussi préoccupé par les informations selon lesquelles les tensions historiques entre la majorité de langue shona et la minorité parlant ndebele ont entraîné la marginalisation politique des Ndebele par le Gouvernement dirigé par les Shona. Dans ce contexte, le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles les autorités gouvernementales fournissent depuis des décennies moins d’assistance et d’investissements sociaux et économiques aux régions, comme dans le Matabeleland, où la population se compose principalement de locuteurs du ndebele et d’autres minorités ethniques, ce qui se traduit par des niveaux de vie plus bas et des taux de pauvreté plus élevés dans ces régions.
Mme McDougall a également indiqué que le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles la redistribution des terres dans l’État partie a favorisé des personnes liées au parti au pouvoir, ce qui a eu pour conséquence que certains groupes ethniques ont été favorisés dans ce processus, tandis que d’autres ont été victimes de discrimination.
Dans ce contexte, le Comité a eu connaissance de rapports selon lesquels les agriculteurs blancs continuent d’être ciblés, harcelés et menacés d’expulsion.
Le Comité est aussi préoccupé par les informations selon lesquelles les moyens de subsistance et le mode de vie traditionnel de certaines communautés autochtones, y compris les Doma et les Tshwa San, sont menacés, en partie à cause de l’expropriation des terres qu’elles utilisent traditionnellement et des interdictions de chasse sur ces terres, a indiqué Mme McDougall.
Le Comité est en outre préoccupé par les stéréotypes discriminatoires encore diffusés dans le pays et qui ont des effets néfastes sur certaines communautés autochtones, a-t-elle poursuivi.
Le Comité a eu connaissance de rapports indiquant qu’il y a eu peu de progrès, dans la pratique, dans l’utilisation des langues minoritaires dans les écoles et que de nombreux enfants des communautés minoritaires ne peuvent pas recevoir une éducation dans leur langue, a par ailleurs souligné l’experte.
S’agissant des données statistiques, Mme McDougall a insisté sur la nécessité de collecter des données ventilées par groupes ethniques afin de pouvoir se rendre compte de la réalité de la discrimination sur le terrain.
Mme McDougall a en outre indiqué que le Comité avait reçu des rapports selon lesquels, comme durant la période coloniale, la majorité des femmes noires sur le marché du travail sont piégées dans le secteur informel et dans le travail domestique, où les salaires sont bas et les conditions de travail mauvaises, et où il n’y a pas de sécurité sociale, de soins de santé ni de couverture pour l’indemnisation des travailleurs. Dans ces deux secteurs, les femmes sont confrontées à un traitement raciste déshumanisant similaire à celui d’avant l’indépendance, de la part d’employeurs et de clients d’identités raciales ou ethniques différentes. Selon d’autres informations, un nombre important de jeunes femmes sont victimes de la traite des zones rurales vers les zones urbaines pour devenir des travailleuses domestiques, a en outre fait observer l’experte.
Mme McDougall a ajouté que le Comité a eu connaissance d’informations laissant apparaître que les « lois sur le vagabondage » servent d’impulsion au profilage par la police et que l’application des règlements COVID a parfois donné lieu à des abus policiers.
Le Comité est en outre préoccupé par les informations faisant état d’une impunité généralisée pour les fonctionnaires qui commettent des violations des droits de l’homme, ce qui peut amener les victimes de discrimination raciale à hésiter à porter plainte contre des fonctionnaires.
Mme McDougall a par ailleurs relevé que la structure de la Commission zimbabwéenne des droits de l’homme ne garantit pas sa pleine indépendance et qu’elle n’a pas les ressources nécessaires pour s’acquitter pleinement de son mandat.
M. YEUNG SIK YUEN YEUNG KAM JOHN, corapporteur du Comité pour l’examen du rapport du Zimbabwe, a souhaité en savoir davantage sur le nombre d’affaires portées devant les tribunaux pour discrimination.
L’expert a aussi souhaité savoir si, à la suite de la modification apportée à la loi sur les organisations illégales, une organisation avait été déclarée illégale en vertu de cette loi.
Il a aussi demandé à la délégation de fournir des statistiques sur les plaintes enregistrées devant les tribunaux ou toute autre institution nationale pour des actes relevant du discours ou du crime de haine raciale, y compris sur Internet et par le biais des médias.
M. Yeung Sik Yuen a par ailleurs souhaité en savoir davantage sur la procédure d’octroi de la nationalité au Zimbabwe. Il a en outre indiqué que le Comité a pris connaissance de rapports qui soulignent un certain nombre de domaines dans lesquels les migrants ont du mal à jouir de leurs droits fondamentaux, notamment les migrants sans papiers, y compris les mineurs, qui seraient placés dans des centres de détention avec des criminels condamnés, souvent pour des périodes prolongées et dans de mauvaises conditions matérielles.
L’expert a poursuivi en relevant que la question de l’apatridie n’était pas couverte par le rapport présenté par le Zimbabwe alors même qu’il y aurait dans ce pays environ 300 000 personnes exposées au risque d’apatridie. Les personnes apatrides n’ont pas la possibilité de travailler, d’ouvrir un compte bancaire, d’acheter une maison, de démarrer une entreprise ou de former des mariages légalement reconnus, s’est-il inquiété.
M. Yeung Sik Yuen a ensuite évoqué la situation des descendants de personnes tuées dans les conflits du Gukarahandi dans les années 1980, en faisant observer que les survivants qui n’ont pas de papiers d’identité ont été invités à produire les certificats de naissance de leurs parents décédés lors de leur demande de citoyenneté zimbabwéenne, bien que les certificats de décès des personnes tuées n’aient jamais été délivrés par les autorités de l’État.
L’expert s’est enquis des mesures prises par le Zimbabwe pour veiller à ce que les dispositions de la Constitution qui peuvent contribuer à prévenir l’apatridie soient reflétées dans la législation et les règlements et soient effectivement appliquées dans la pratique.
Plusieurs experts se sont en outre inquiétés du fait que les victimes des exactions passées ne puissent obtenir réparation et justice en raison de l’amnistie générale.
Une experte a demandé s’il était vrai qu’au Zimbabwe, il n’y a pas d’écoles gratuites obligatoires, comme le laisse entendre le rapport du pays.
Réponses de la délégation
La délégation a expliqué que les données de la population d’origine africaine ne sont pas ventilées en fonction de l’appartenance à tel ou tel groupe ethnique ; le pays y a renoncé il y a très longtemps. Ainsi, il n’existe pas de Shona ou de Ndebele au Zimbabwe, mais bien des groupes selon l’origine géographique, a insisté la délégation. C’est pour cette raison que les données mentionnent les personnes d’origine africaine et les autres. La délégation a donc souligné qu’elle pouvait fournir de nombreuses données statistiques par province, mais non selon l’appartenance ethnique, l’origine ethnique des personnes n’étant pas demandée lors des recensements, seules les catégories liées à la couleur – noire, métisse ou blanche – étant recensées.
Il n’y a aucune forme de discrimination à l’encontre d’une quelconque minorité ou des populations « blanches » au Zimbabwe, a poursuivi la délégation, soulignant que cette pratique est interdite par la Constitution et la législation du pays et que des politiques sont menées pour donner effet à ces principes. Le pays ne travaille pas sur une base ethnique mais bien sur une base (géographique) régionale.
Auparavant les personnes métisses n’étaient pas considérées comme citoyennes à part entière, mais la situation a maintenant changé, a ensuite souligné la délégation, après avoir rappelé le principe de non-discrimination inscrit dans la Constitution du pays. La personne qui préside la Commission d’attribution des terres est elle-même métisse, a fait valoir la délégation.
S’agissant de la représentation politique des minorités, la législation prévoit une répartition des sièges au Parlement selon les provinces. Six sièges par province sont réservés aux femmes, a précisé la délégation.
Le cadre constitutionnel prévoit la participation égale des citoyens quelle que soit l’origine ethnique, a ajouté la délégation.
Les autorités veillent à donner des documents civils et d’identité à l’ensemble des personnes présentes sur son territoire, notamment pour lutter contre l’apatridie, a ensuite indiqué la délégation.
Jusqu’à aujourd’hui, personne n’a été déchu de sa nationalité, a par ailleurs souligné la délégation.
La délégation a par la suite réfuté les allégations selon lesquelles 300 000 personnes seraient susceptibles d’être apatrides au Zimbabwe. Elle a ajouté que de nombreux réfugiés, notamment mozambicains, ne veulent pas perdre leur nationalité d’origine.
S’agissant de la répartition des terres, grâce à la réforme agraire non discriminatoire qui a été menée, plus de 365 000 familles ont été réinstallées. Il n’y a aucune attribution de terres sur base ethnique. Le système ne tient pas compte des origines. Tous les citoyens peuvent et doivent avoir accès à la terre, a insisté la délégation.
Seize langues officielles du pays sont enseignées dans les écoles selon les régions où elles sont parlées, comme le prévoit la loi sur l’éducation. La gratuité de l’enseignement primaire est déjà mise en œuvre. Le taux d’alphabétisme au Zimbabwe est l’un des plus élevés d’Afrique, a fait valoir la délégation. Le pays peut être très fier de ses accomplissements dans le domaine de l’éducation, a-t-elle estimé, faisant observer qu’il y a des établissements d’enseignement supérieur dans toutes les régions du pays.
En ce qui concerne la Commission nationale pour la paix et la réconciliation, la délégation a rappelé que le pays avait connu des conflits, et notamment la guerre de libération qui s’est terminée en 1980 avec un accord. Elle a également rappelé que l’ancien Président Mugabe avait mis en place une politique de réconciliation nationale et de pacification ainsi qu’une amnistie générale. Lorsque la deuxième République a été promulguée en 2017, le nouveau Président a reconnu que tout n’avait pas été réglé s’agissant des conflits du passé. La Commission pour la paix et la réconciliation n’a pas le mandat de mener des enquêtes, a souligné la délégation. Les leaders communautaires et traditionnels ont été invités à aborder ces questions pour clore la question, a-t-elle précisé. En raison de l’amnistie générale qui a été déclarée à l’époque, il n’est pas possible d’entamer des poursuites pour les événements survenus lors de ces conflits du passé, a expliqué la délégation.
La délégation a estimé qu’il n’avait pas d’appels à la haine sur des bases ethniques ou raciales au Zimbabwe, mais plutôt des discours de haine entre les différents représentants de partis politiques. Il y a des cas de discours ou de crimes de haine politique mais pas aux motifs de la race ou de l’origine ethnique, a insisté la délégation. Il n’existe pas de parti politique qui représente un groupe ethnique ou racial particulier au Zimbabwe.
La délégation a rappelé que depuis 2001, le pays subit des sanctions et que les effets de ces sanctions nuisent à l’économie formelle. L’économie est freinée, nombre d’entreprises officielles ont dû fermer depuis le début des sanctions et les personnes licenciées ont dû trouver un mode de survie dans l’économie informelle.
En réponse aux commentaires d’une experte selon lesquels un nombre important de jeunes femmes seraient victimes de la traite des zones rurales vers les zones urbaines pour devenir des travailleuses domestiques, la délégation a affirmé que ce phénomène n’existait pas ou en tous cas pas de manière organisée.
Les travailleuses domestiques ont des salaires qui sont déterminés par les autorités, a d’autre part indiqué la délégation. Il n’y a pas de salaire minimum global au Zimbabwe mais des salaires minima par secteur.
Le Conseil qui décide des conditions de travail a une composition tripartite, intégrant des représentants des travailleurs, des entreprises et de l’État.
Le Zimbabwe a élaboré des lignes directrices pour les travailleuses domestiques qui veulent se rendre à l’étranger pour travailler ou qui travaillent dans le pays. Tous les travailleurs domestiques peuvent s’adresser à une antenne de l’État dans les provinces pour porter plainte sur ses conditions de travail.
La délégation a assuré qu’il n’y avait pas de profilage racial de la part des forces de police au Zimbabwe.
En réponse aux commentaires d’une experte faisant état d’une impunité généralisée pour les fonctionnaires qui commettent des violations des droits de l’homme, la délégation a fait valoir que différentes campagnes avaient été organisées afin d’informer la population sur les possibilités de porter plainte dans de tels cas.
La délégation a par ailleurs indiqué que l’État veillait à la représentation égale des fonctionnaires – en fonction de leur origine géographique et non pas de leur origine ethnique. Ce mode de répartition est appliqué dans le recrutement des forces de police.
Les agents pénitentiaires et ceux des forces de police suivent des formations sur les droits de l’homme et plus particulièrement sur la non-discrimination, a d’autre part indiqué la délégation.
La délégation a par ailleurs informé le Comité qu’un projet de loi visant la création d’un mécanisme de plainte indépendant pour dénoncer des agissements de la police et des forces de l’ordre était à l’examen devant le Parlement.
Les lois de portée générale protègent les droits de l’ensemble des citoyens, y compris des défenseurs des droits de l’homme, et il n’est dès lors pas nécessaire de prévoir des mesures spécifiques pour ces derniers, a affirmé la délégation.
La délégation a déclaré qu’aucune organisation non gouvernementale ( ONG) n’a été interdite au Zimbabwe, avant d’ajouter que ces organisations devaient s’en tenir à leur mandat. Les autorités contrôlent effectivement que les ONG ne s’adonnent pas à des activités illégales comme le blanchiment d’argent, a indiqué la délégation.
La délégation a par ailleurs indiqué qu’il existait un bureau d’ aide juridictionnelle au Zimbabwe, accessible pour les minorités et les personnes vulnérables. Un système de tribunaux mobiles a également été mis en place afin que les juges se déplacent dans les zones rurales pour y rendre justice, avec la possibilité d’avoir accès à un interprète dans les langues vernaculaires.
La délégation a d’autre part affirmé que la Commission nationale des droits de l’homme – qui est l’institution nationale des droits de l’homme – était indépendante et a précisé que le pouvoir exécutif ne participait pas à ses délibérations. Quant à l’indépendance financière de cette institution, la délégation a rappelé que les sanctions financières pesaient lourdement sur le fonctionnement des agences de l’État, y compris de cette Commission.
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CERD22.013F