Fil d'Ariane
LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION À L'ÉGARD DES FEMMES EXAMINE LE RAPPORT DU BOTSWANA
Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a examiné aujourd'hui les mesures prises par le Botswana pour se conformer aux dispositions de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.
Présentant - au nom du Ministre du travail et de l'intérieur - le rapport de son pays, M. Boometswe Mokgothu, Représentant permanent du Botswana auprès de l'Office des Nations Unies à Genève, a souligné que, depuis la ratification de la Convention en 1996, le Botswana a entrepris une analyse de son droit national afin d'identifier les textes de loi contenant d'éventuelles dispositions discriminatoires contre les femmes. Ce faisant, la première démarche a consisté à aligner la définition du terme «discrimination» figurant dans la Constitution sur celle de la Convention. En outre, a-t-il précisé, la ratification de la Convention n'entraîne pas l'inclusion automatique de ses dispositions en droit interne: elles doivent en effet être intégrées à travers des textes de loi approuvés par le Parlement. Aussi, quinze textes de lois affectant négativement la situation des femmes au Botswana ont ainsi été amendés conformément à cette procédure, parmi lesquels le Code pénal et le Code de procédure pénale, la loi sur le mariage ou encore la loi sur les retraites. M. Mokgothu a souligné que toutes les lois du Botswana doivent être conformes à la Constitution. Dans ce contexte, les chefs et autorités chargés de l'administration du droit coutumier respectent le caractère intangible et l'inviolabilité de la charte fondamentale.
Reste que certaines lois et pratiques coutumières sont toujours discriminatoires du point de vue du mariage, de la propriété, de l'héritage, de l'action civile et des droits de l'enfant, a poursuivi le Représentant permanent. L'intention du Gouvernement est de faire en sorte que le droit coutumier suive l'évolution positive du droit civil en vue d'une meilleure parité entre les sexes, a-t-il déclaré. D'autre part, le Représentant permanent du Botswana a indiqué que la loi de son pays criminalise les relations homosexuelles, compte tenu de la répugnance de la nation envers des actes traditionnellement considérés comme immoraux. Par ailleurs, les châtiments corporels sont prévus par la loi qui définit précisément les conditions de leur administration, dont les filles ne sont pas exemptées.
La délégation du Botswana était également composée de plusieurs représentants du Ministère des affaires étrangères et de la Directrice par intérim du Département des affaires féminines du Botswana. Elle a répondu aux questions soulevées par les experts du Comité s'agissant des moyens humains et financiers dont disposent les mécanismes chargés de concrétiser les droits des femmes et de la coordination de leur action; des dispositions discriminatoires du droit coutumier; de la lutte contre les violences faites aux femmes, contre le trafic de femmes et contre l'exploitation de la prostitution; de la participation des femmes à la vie politique et publique; des questions d'éducation, d'emploi et de santé; ou encore de la situation des femmes rurales.
Concluant ce dialogue, la Présidente du Comité, Mme Naéla Gabr, a souligné qu'au plan interne, le Département des affaires féminines du Botswana devra sans doute voir ses attributions et ses moyens renforcés, compte tenu, en particulier, de la prévalence de pratiques coutumières encore défavorables au plein respect des droits des femmes.
Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations et recommandations concernant le rapport examiné aujourd'hui, lesquelles seront alors adressées au Botswana avant d'être rendues publiques à l'issue de la session sur la page internet du Haut-Commissariat aux droits de l'homme consacrée aux travaux du Comité.
Lors de sa prochaine séance publique, lundi 1er février à 10 heures, le Comité entamera l'examen du rapport du Panama - dernier État partie encore à l'ordre du jour de cette session.
Présentation du rapport
Présentant son rapport au nom de M. PETER L. SIELE, Ministre du travail et de l'intérieur du Botswana, M. BOOMETSWE MOKGOTHU, Représentant permanent du Botswana auprès de l'Office des Nations Unies à Genève, a souligné que, depuis la ratification de la Convention en 1996, le Botswana a entrepris une analyse de son droit national afin d'identifier les textes de loi contenant d'éventuelles dispositions discriminatoires contre les femmes. Ce faisant, la première démarche a consisté à aligner la définition du terme «discrimination» figurant dans la Constitution sur celle de la Convention. En outre, a précisé le Représentant permanent, la ratification de la Convention n'entraîne pas l'inclusion automatique de ses dispositions en droit interne: elles doivent en effet être intégrées à travers des textes de loi approuvés par le Parlement. Quinze textes de lois affectant négativement la situation des femmes au Botswana ont ainsi été amendés conformément à cette procédure, parmi lesquels le Code pénal et le Code de procédure pénale, la loi sur le mariage ou encore la loi sur les retraites, a-t-il précisé.
M. Mokgothu a souligné que toutes les lois du Botswana doivent être conformes à la Constitution. Dans ce contexte, les chefs et autorités chargés de l'administration du droit coutumier respectent le caractère intangible et l'inviolabilité de la charte fondamentale. Reste que certaines lois et pratiques coutumières sont toujours discriminatoires du point de vue du mariage, de la propriété, de l'héritage, de l'action civile et des droits de l'enfant, a poursuivi le Représentant permanent. L'intention du Gouvernement est de faire en sorte que le droit coutumier suive l'évolution positive du droit civil en vue d'une meilleure parité entre les sexes, a-t-il déclaré. Des efforts sont consentis pour sensibiliser les membres du Comité consultatif du Parlement national (Ntlo ya Dikgosi) à la sexospécificité, au développement et aux droits de l'homme, a-t-il indiqué. Le Ntlo ya Dikgosi est en effet le gardien des principes et pratiques culturels et coutumiers; il importe donc que ses membres soutiennent toutes les mesures prises pour éliminer les pratiques néfastes ou discriminatoires, a-t-il expliqué.
Le Représentant permanent a par ailleurs assuré le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes que son pays a fait des progrès importants dans la lutte contre la violence envers les femmes, en particulier grâce à l'adoption de la loi sur la violence domestique, en 2008. Cette loi prévoit la protection des victimes de cette forme de violence. Depuis son adoption, la Police nationale, en collaboration avec le Département des questions féminines, a amélioré son dispositif de collecte de statistiques ventilées concernant la violence contre les femmes. Les statistiques policières montrent que l'essentiel de la violence contre les femmes est commis au sein du foyer conjugal. Le Gouvernement entend améliorer la collaboration entre les services de l'État chargé de l'action juridique, médicale, sociale et psychologique afin de venir en aide aux victimes, a précisé la délégation. Il travaille avec le Fonds de développement des Nations Unies pour la femme (UNIFEM) pour améliorer rapidement la capacité des prestataires de services à traiter la violence à la base, y compris par une action au niveau juridique.
D'autre part, le Représentant permanent du Botswana a indiqué que la loi de son pays criminalise les relations homosexuelles, compte tenu de la répugnance de la nation envers des actes traditionnellement considérés comme immoraux. Par ailleurs, les châtiments corporels sont prévus par la loi qui définit précisément les conditions de leur administration, dont les filles ne sont pas exemptées. Cependant, les châtiments corporels ne sont infligés qu'après un examen médical, a ajouté M. Mokgothu. Si le Botswana n'a pas ratifié la Convention internationale sur les droits des personnes handicapées, il n'en a pas moins accompli des progrès importants dans la prise en compte des difficultés rencontrées par ces personnes, a-t-il assuré. Le Conseil des personnes handicapées promeut leurs intérêts et coordonne les activités menées en leur faveur, tandis que la Présidence de la République se charge du contrôle de leurs besoins, a-t-il indiqué. Le Botswana est convaincu que l'application de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, qui bénéficie d'un fort engagement politique, ne pourra que renforcer l'harmonie et la cohésion sociales, ainsi que le développement du pays, a conclu M. Mokgothu.
Le document regroupement le rapport initial ainsi que les deuxième et troisième rapports périodiques du Botswana (CEDAW/C/BOT/3) indique que, conformément à la mission que s'était donnée le pays au moment de l'indépendance d'éliminer la faim, de réduire la pauvreté, d'assurer l'égalité d'accès aux ressources, à l'éducation, à la santé et à l'emploi, le Gouvernement a lancé plusieurs programmes en vue d'accroître les possibilités économiques et d'assurer une protection sociale. Les femmes bénéficient d'un accès égal à ces avantages sociaux, qui comprennent notamment un programme d'aide aux locataires pour l'accession à la propriété, des avances de fonds pour l'achat d'un véhicule automobile et un programme de mise en valeur des terres arables. L'abrogation de la loi sur l'autorité maritale a également ouvert davantage de possibilités aux femmes. Elles peuvent désormais prendre des décisions et diriger une entreprise en leur nom propre. La loi protège également les femmes contre la prérogative des hommes de prendre des décisions unilatérales en matière de patrimoine familial, ce qui auparavant se soldait au désavantage des femmes. Le rapport relève en outre que si la société botswanaise est modelée par des coutumes et des traditions, elle n'en est pas moins consciente que certaines pratiques coutumières perpétuent les rôles stéréotypés des hommes et des femmes et les préjugés. Sans chercher à déprécier la culture, le Gouvernement s'engage néanmoins à protéger les femmes contre toute pratique discriminatoire. En collaboration avec les organisations non gouvernementales et les organisations de la société civile, il apporte un soutien à des campagnes d'information et à la mise en œuvre de programmes d'éducation et de sensibilisation visant à atténuer les conséquences négatives de ces pratiques coutumières. Des programmes de sensibilisation ont été mis au point et exécutés afin d'influencer positivement la socialisation des garçons et des filles et de favoriser l'élimination des stéréotypes sexistes.
Le Botswana a manifesté sa ferme volonté politique d'éliminer toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes en créant des cadres et des mécanismes nationaux en vue de leur «garantir l'exercice et la jouissance des droits de l'homme et des libertés fondamentales». Il a notamment créé un Département des affaires féminines pleinement opérationnel au sein du Ministère de l'emploi et de l'intérieur. Afin d'assurer le respect des dispositions de la Convention dans l'ensemble de la fonction publique, le Gouvernement poursuit ses efforts d'intégration d'une perspective sexospécifique dans toutes les activités de développement économique et social. Des responsables de la coordination pour l'égalité des sexes ont été nommés dans chacun des ministères. Le Botswana a aussi adopté des «mesures spéciales» qui facilitent la promotion de l'égalité entre les hommes et les femmes en renforçant le pouvoir d'action sur les plans économique et social en vue de réduire la pauvreté. Des programmes mettant l'accent sur le renforcement du pouvoir économique tels que le programme de mise en valeur des terres arables et des initiatives d'appui à l'élevage du petit bétail ont été mis en place. Ces programmes sont censés assurer l'égalité des chances mais, dans les faits, les femmes ont toujours du mal à accéder aux ressources. Le Gouvernement, en collaboration avec d'autres parties prenantes et des organisations de la société civile, continuera d'encourager la création d'un environnement propice à la participation des femmes dans les institutions politiques telles que le Parlement, la Chambre des chefs et les autorités locales, indique le rapport.
Examen du rapport
Cadre général d'application de la Convention,
Un expert du Comité a demandé si les dispositions de la Convention étaient directement invocables devant les tribunaux. Cet expert s'est réjoui d'apprendre que la loi du Botswana stipule qu'une garantie constitutionnelle ne saurait être écartée par la coutume. Par quel mécanisme les femmes victimes d'une discrimination sur la base du droit coutumier peuvent-elles donc faire respecter leur droit en vertu de ce principe, compte tenu des difficultés matérielles que rencontrent de nombreuses femmes dans leurs démarches juridiques, a demandé l'expert? Une autre experte a demandé dans quelle mesure le droit coutumier, notoirement discriminatoire à l'égard des femmes, régit la vie quotidienne des citoyens du Botswana, en y jouant un rôle prépondérant par rapport au droit civil. Dans ce contexte, se pose ici encore la question de l'accès des femmes au système judiciaire, a-t-il été souligné.
Une experte a relevé que l'article 15.4 de la Constitution du Botswana contient des dispositions qui ne sont compatibles ni avec la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, ni avec les autres dispositions de cette même Constitution qui prohibent la discrimination.
Une experte a souhaité en savoir davantage sur les attributions et les moyens d'action du médiateur. Quelle est le degré de participation des femmes dans la «Chambre des chefs» et dans quelle mesure sont-elles associées à la révision du droit coutumier, a-t-il été demandé? Enfin, qu'en est-il des fonds destinés aux activités liées à la parité entre les sexes dans le budget national?
Une experte a demandé des précisions quant aux mécanismes chargés de concrétiser les droits des femmes – en particulier le Conseil national des femmes; de quels moyens humains et financiers disposent ces mécanismes pour s'acquitter de leur mission et qu'en est-il de la coordination de leurs actions - entre eux et avec les autres organes de l'État - ainsi que de leurs relations avec la société civile et les médias?
En réponse à cette première série de questions, la délégation du Botswana a indiqué que le droit coutumier semble avoir beaucoup d'éléments discriminatoires qui correspondent à l'état de la tradition telle que la conçoivent les chefs des nombreuses tribus; il est donc difficile de légiférer de manière uniforme. Pour autant, la Constitution est la loi tutélaire du pays, à laquelle toutes les autres lois sont soumises, a-t-elle rappelé. En cas de conflit, c'est elle - la Constitution - qui prévaudra devant les tribunaux, a-t-elle assuré. L'accès des femmes aux tribunaux est compliqué par le fait qu'elles ne disposent pas toujours des ressources nécessaires pour lancer des procédures, a poursuivi la délégation. Il n'existe pas encore de mécanisme d'aide juridique à l'intention des femmes, a-t-elle reconnu.
Les amendements apportés au droit coutumier doivent être soumis par le Parlement à la Chambre des Chefs, qui rend un avis, a par ailleurs expliqué la délégation.
Le Bureau du médiateur soumet lui aussi au Parlement les rapports qu'il établit au sujet des conflits des citoyens avec des représentants de l'État.
Les dispositions de la Convention, de même que celle de son Protocole facultatif, ne sont pas automatiquement intégrées au droit national: le Parlement doit, pour ce faire, adopter un projet de loi, a rappelé la délégation.
Les fonds disponibles n'étant pas suffisants, le Gouvernement n'envisage pas de transformer le Département des affaires féminines en un véritable ministère, a indiqué la délégation en réponse à une question du Comité. Mais cela ne devrait pas affaiblir ce Département qui, même s'il dépend actuellement du Ministère du travail et des affaires intérieures, n'en est pas moins actif. Le Ministère gère un nombre restreint de départements, ce qui lui permet d'accorder toute l'attention nécessaire à ceux qu'il chapeaute, a insisté la délégation. Elle a rappelé que le Département des affaires féminines est chargé de la coordination de toute l'action en faveur des femmes. Ses ressources humaines et financières ne lui permettent pas d'assumer pleinement sa mission, a-t-elle concédé. Des formations sont organisées pour renforcer les compétences de son personnel et le Département a décentralisé ses activités dans les districts du pays, a-t-elle toutefois fait valoir. Ce Département agit, au niveau de la politique générale des districts, dans une perspective pédagogique et d'intégration des droits des femmes dans les activités des comités de développement locaux, a précisé la délégation. Sa coopération avec la société civile est très bonne, des forums d'échanges d'expériences étant organisés sur une base trimestrielle avec des représentants du Département.
Le Conseil national des femmes a été créé pour conseiller le Ministre du travail en tenant compte des réalités du terrain, a poursuivi la délégation. Sa structure est en cours de révision suite à la prise de conscience du fait qu'il doit employer des personnes réellement informées quant à la situation des femmes. Cette révision devrait renforcer considérablement la capacité du Conseil à s'acquitter de son mandat. Par ailleurs, neuf «points focaux» chargés de l'intégration des droits des femmes ont été ouverts dans autant de ministères, a précisé la délégation.
Participation des femmes à la vie politique et publique
Une experte du Comité s'est enquise de la représentation des femmes aux niveaux parlementaire et ministériel. Constatant la très faible présence de femmes dans le pouvoir judiciaire, elle s'est également enquise des mesures envisagées pour remédier à cette situation. Cette même experte a demandé des détails sur la présence des femmes dans le kgotla (une tribune communautaire importante en matière de prise de décision). Qu'en est-il de l'existence d'éventuelles mesures temporaires spéciales dans le secteur privé, a-t-elle également demandé?
Une experte a rappelé que la Convention dispose de droits importants pour les femmes en matière de participation à la vie publique. Cette participation semble encore insatisfaisante au Botswana, a-t-elle déclaré, demandant à la délégation si le Gouvernement entendait prendre des mesures urgentes à cet égard.
Une autre experte s'est félicitée du fait que le Botswana n'ait émis aucune réserve à l'égard de la Convention lors de sa ratification de cet instrument, relevant par ailleurs que la représentation des femmes au sein du Gouvernement du pays a augmenté dans une proportion réjouissante. Elle a encouragé le Botswana à poursuivre ses efforts dans ce domaine. «Une société sans femmes est une société infâme», a poursuivi l'experte, estimant que des mesures supplémentaires pourraient être prises en faveur de la représentation des femmes dans le pouvoir judiciaire, notamment.
Une autre experte a fait observer que le Parlement ne compte que quatre femmes pour 58 hommes.
La délégation a indiqué que plusieurs membres de la Chambre des Chefs traditionnels sont des femmes, l'une d'entre elles ayant été nommée cheffe suprême de sa tribu. Rien n'empêche donc une femme de devenir membre de cette institution, dont certains membres sont élus alors que d'autres y siégent ès qualité. Les femmes sont également présentes dans l'institution locale du kgotla, selon une procédure fixée par le Gouvernement, a ajouté la délégation.
Le Président désigne en outre les membres du pouvoir judiciaire, a poursuivi la délégation. Rien n'explique réellement l'absence de femmes juges à la Cour d'appel, aucun obstacle formel ne s'opposant à leur présence, a-t-elle déclaré. Elles sont davantage présentes au niveau de la magistrature intermédiaire et on peut espérer que le jeu des promotions de carrière leur permettra d'atteindre progressivement les échelons supérieurs. Il convient à ce propos de relever que la filière de formation juridique est encore dominée par des stéréotypes favorisant la présence des hommes.
La délégation a ajouté que les instances judiciaires suprêmes du pays sont présidées par des juges ordinaires; ces postes sont mis au concours et les candidatures féminines sont examinées au même titre que les candidatures masculines, a-t-elle assuré. Pour ce qui est des campagnes électorales, il est admis que les candidats doivent disposer, au départ, des ressources nécessaires pour faire campagne et convaincre les électeurs dans le cadre d'une campagne compétitive, a-t-elle poursuivi; c'est ce qui explique par exemple qu'un candidat en faillite ne soit pas autorisé à concourir.
Le Botswana ne pratique pas le système de quotas; en effet, de telles mesures risquent de compromettre le jeu démocratique des élections, a par ailleurs déclaré la délégation. Par contre, un soutien technique est accordé aux femmes qui souhaitent déposer leur candidature, a-t-elle indiqué. Un «caucus» de femmes politiques organise de son côté des ateliers de formation avec la société civile.
L'implication des femmes dans la formulation des politiques est très importante pour la qualité de la gouvernance, a d'autre part déclaré la délégation. De nombreux forums législatifs existent qui s'appuient sur une importante participation des femmes et les femmes contribuent, de même, aux stratégies de développement locales. Les femmes sont donc prises en compte dans l'élaboration des politiques, a insisté la délégation.
Pratiques coutumières et lutte contre les stéréotypes
Une experte du Comité a relevé que le Botswana est une société encore très ancrée dans ses traditions patriarcales et que de fortes résistances y existent encore quant à l'émancipation des femmes, comme en témoigne la persistance dans la Constitution de dispositions discriminatoires à l'encontre de ces dernières. Certes, les pratiques culturelles sont longues à changer, mais cela relève avant tout de la volonté politique de concrétiser les changements indispensables par le biais d'une action aux niveaux juridique et réglementaire, a souligné l'experte. Les médias sont également appelés à assumer une responsabilité à cet égard, mais on peut s'interroger, à la lecture du rapport, sur leur rôle réel de ce point de vue, a-t-elle ajouté.
La délégation a répondu en assurant que son Gouvernement, avec la société civile, a accompli des pas de géants pour l'élimination des stéréotypes contre les femmes. Ainsi, grâce à une meilleure éducation, la plupart des femmes savent-elles, par exemple, qu'elles ne sont plus tenues de porter l'uniforme stigmatisant réservé aux veuves. Par contre, les médias sont très en retard dans le traitement de l'information relative aux femmes, notamment pour ce qui est des crimes commis contre les femmes - lesquels sont encore présentés sous un jour sensationnaliste qui compromet de fait l'action du Gouvernement. Des initiatives d'éducation ont cependant été prises qui ont déjà permis d'améliorer la situation par rapport à celle décrite dans le rapport, a assuré la délégation.
Le Ministère de l'éducation est actuellement chargé de l'élimination des stéréotypes sexistes dans les manuels scolaires, vaste entreprise nécessitant des ressources importantes, a ensuite précisé la délégation. De même, une réorganisation des filières d'enseignement a permis de les ouvrir toutes aux jeunes des deux sexes, a-t-elle ajouté.
D'autre part, le Botswana compte désormais un nombre accru de femmes dans la police et dans les forces armées nationales, y compris au niveau de l'encadrement, a fait valoir la délégation. Cette évolution est le fruit d'efforts intenses consentis par le Gouvernement au niveau de la formation et de la sensibilisation. Ces femmes jouent et assument un rôle de modèle auprès de la jeunesse, laquelle s'éloigne de plus en plus des conceptions traditionnelles de la femme, a précisé la délégation.
Lutte contre la violence à l'encontre des femmes, le trafic de femmes et l'exploitation de la prostitution féminine
Une experte du Comité a relevé que le droit du Botswana interdit la traite des êtres humains, tout en contestant que le territoire de ce pays est un point de départ du «commerce de la chair», comme le dit un rapport de l'Organisation internationale des migrations. Selon certains rapports, s'est inquiétée cette experte, la pauvreté amènerait certaines familles à utiliser leurs enfants comme travailleuses du sexe pour survivre. Le Gouvernement envisage-t-il de mener des études sur ces questions?
La délégation a confirmé que la prostitution, forcée ou volontaire, n'est pas autorisée au Botswana. Il est effectivement très probable que la prostitution soit exploitée du fait de la pauvreté ambiante, a-t-elle ajouté. Le Gouvernement prend très au sérieux son rôle dans la lutte contre la pauvreté, a souligné la délégation, précisant que le budget alloué aux programmes d'insertion des jeunes sur le marché du travail a été triplé, afin de prévenir le recours à la prostitution.
D'autre part, a poursuivi la délégation, la traite des êtres humains est un délit pénal au Botswana. Pour autant, il s'agit d'un domaine dans lequel les progrès sont encore minces, a-t-elle admis. Il n'existe pas de loi spécifique pour traiter ce problème, a ensuite souligné la délégation; aussi, un débat est-il maintenant ouvert et un projet de loi devrait être déposé avant longtemps sur le bureau du Ministère de la justice. Ce projet sera nécessairement précédé d'une évaluation approfondie de la situation, a indiqué la délégation.
La promotion de l'accès des femmes des régions rurales à la justice a donné lieu à un travail de sensibilisation des forces de police à la prise en charge des femmes victimes de violences sexistes, a par ailleurs indiqué la délégation ; les femmes peuvent également avoir recours au kgotla. Les statistiques montrent une croissance du nombre des plaintes déposées pour violence contre les femmes, ce qui témoignent des progrès réalisés en matière de formation, de sensibilisation et de prise en charge, a déclaré la délégation. Vingt-sept policiers de haut rang ont reçu une formation de coordinateurs régionaux pour toutes ces questions, a-t-elle précisé. Une loi adoptée en 2008 prévoit des mesures de protection en faveur de femmes victimes de violence conjugale, a-t-elle en outre rappelé. La question demeure des conditions d'accueil des femmes victimes, le Botswana ne comptant que deux foyers à cette fin, a reconnu la délégation; demeure également la question de l'accès aux voies de recours auprès des tribunaux.
Questions d'éducation, d'emploi et de santé
Une experte du Comité a demandé à la délégation de fournir, dans son prochain rapport, des statistiques plus détaillées sur les taux de scolarisation nette, afin de connaître le nombre d'enfants, et donc de filles, scolarisés par tranche d'âges. La même experte a demandé des précisions quant à la définition de l'expression «éducation non formelle» qui figure dans le rapport. Des précisions devraient également être apportées en ce qui concerne les taux de grossesses chez les adolescentes et les taux d'abandon scolaire des jeunes filles: existe-t-il une corrélation entre ces deux aspects? Le problème des grossesses semble en effet avoir un impact sur toute la scolarité des jeunes filles, a-t-il été observé.
Pour ce qui est des questions d'emploi, un membre du Comité a relevé que si le Botswana a ratifié plusieurs conventions de l'Organisation internationale du travail, des problèmes persistent en matière d'application du principe d'égalité de salaires entre les sexes, ainsi qu'en matière de discrimination au travail et de faible représentation des femmes dans certaines professions. Des informations complémentaires ont en outre été demandées au sujet de l'inspection du travail et de la lutte contre le harcèlement sexuel au travail dans les secteurs privé aussi bien que public.
D'un point de vue sanitaire, les femmes sont incontestablement affectées au plan psychologique par les effets de la discrimination ou de la violence conjugale, a fait observer une experte du Comité, avant de s'enquérir de statistiques sur ce phénomène. Par ailleurs, toutes les femmes vulnérables sont-elles prises en charge par les programmes de lutte contre le VIH/sida, a-t-elle demandé? Plusieurs expertes ont en outre fait observer que les avortements pratiqués dans des conditions risquées induisent un fort risque de mortalité maternelle. Par ailleurs, le grand nombre d'avortements suggère une faillite des programmes de santé génésique et de planification familiale, a-t-il été souligné. Quel est le degré de connaissance au sein de la population, et en particulier chez les femmes et les jeunes filles, des dispositions juridiques autorisant l'avortement sous certaines conditions, notamment médicales?
Une experte a souligné que le fait que la common law, qui prévaut au Botswana, soit conforme aux dispositions de la Convention n'empêche pas que des discriminations soient commises contre les femmes au titre du droit coutumier, comme on le constate en matière d'accès au crédit, par exemple, puisqu'une femme doit avoir l'accord de son mari pour obtenir un prêt bancaire. D'autres questions ont porté sur les obstacles à l'octroi d'allocations familiales aux femmes rurales ou chefs de famille; sur l'accès aux prestations sociales; et sur une éventuelle abolition des frais de scolarité primaire.
Relevant que les femmes rurales au Botswana sont particulièrement confrontées à la pauvreté, notamment du fait du chômage, une experte s'est enquise de la stratégie d'action dont s'est doté le Gouvernement pour faire face à ce problème. D'autres questions ont porté sur la place des femmes dans le secteur informel et dans l'industrie de l'extraction minière et sur la prévalence du VIH/sida chez les travailleuses domestiques.
La délégation a indiqué que la politique de réadmission des jeunes filles enceintes ayant quitté l'école a été modifiée dans le sens d'une réintégration beaucoup plus rapide de ces élèves, moyennant un avis médical. Le problème des grossesses fera l'objet d'une politique globale, qui doit encore faire l'objet d'une réflexion approfondie, a ensuite ajouté la délégation. Elle a par ailleurs fait savoir que des modules de formation destinés aux enseignants ont été mis en place afin de corriger le comportement discriminant de certains d'entre eux à l'égard des filles dans les salles de classe.
L'éducation informelle (ou non formelle) vise à réinsérer les enfants en échec scolaire dans le parcours scolaire classique et à permettre à de jeunes adultes de reprendre une scolarité interrompue prématurément, a poursuivi la délégation. L'incidence des châtiments corporels à l'école est exceptionnelle, a-t-elle en outre assuré.
Le paiement des frais de scolarité dépend de la capacité financière des parents, a par ailleurs indiqué la délégation. Les travailleurs sociaux sont chargés d'évaluer la capacité contributive des familles et aucun enfant ne saurait être privé de scolarisation en raison du manque de moyens de sa famille, a-t-elle assuré.
Pour ce qui est des questions d'emploi, la délégation a fait savoir que le secteur public du Botswana applique le principe de rémunération égale à travail égal, la question restant, il est vrai, ouverte pour ce qui est de la pratique dans le secteur privé. De même, si le harcèlement sexuel dans la fonction publique est puni, le secteur privé doit encore adopter des politiques correctives à cet égard, a-t-elle déclaré. Le Botswana applique des plans d'aide aux femmes entrepreneurs, avec des résultats mitigés, compte tenu de la modestie des projets lancés par des femmes, a par ailleurs indiqué la délégation.
Le département du travail s'est doté d'inspecteurs du travail habilités à enquêter sur les dénonciations de pratiques illégales, a souligné la délégation.
D'autre part, en vertu d'une loi récemment adoptée, les femmes mariées n'ont plus besoin d'obtenir l'autorisation de leur mari pour accéder au crédit, y compris au microcrédit, a fait valoir la délégation.
La délégation a souligné que le Ministère de la santé a lancé l'an dernier seulement un train de mesures en faveur de l'égalité entre les sexes dans le domaine de la santé. Les soins de santé sont prodigués à toutes les femmes, sur l'ensemble du territoire national et le dispositif atteint tous les groupes, y compris les minorités, les étudiants et les travailleurs du sexe. Les préservatifs sont librement disponibles, a ajouté la délégation. Le problème des avortements reste étroitement lié à l'éducation, un problème délicat pour les pouvoirs publics, qui éprouvent des difficultés à mesurer l'efficacité de leurs campagnes d'éducation et de sensibilisation.
La pauvreté chez les femmes rurales retient toute l'attention du Gouvernement, a par ailleurs assuré la délégation. La stratégie de réduction de la pauvreté est actuellement en cours de révision, avec pour objectif de déterminer comment aider les femmes à combler leur retard par rapport aux hommes, dont la situation au regard de la pauvreté est globalement meilleure. Le Gouvernement a introduit un dispositif autorisant certaines femmes à labourer gratuitement certains lopins de terre, l'objectif étant de lutter contre la malnutrition. Cette démarche s'inscrivait dans un plan de développement accéléré destiné à renforcer les infrastructures rurales à bref délai (eau potable, routes, dispensaires de santé, salles de classe); ce plan sera remplacé par les mesures normales prévues dans le cadre du dixième plan quinquennal, a indiqué la délégation.
Le Gouvernement s'apprête d'autre part à inscrire la prise en charge des femmes handicapées dans son programme de développement global ; la situation des femmes aveugles est à cet égard particulièrement préoccupante.
Mariage
Une experte du Comité a rappelé que l'article 16 de la Convention enjoint aux États de prendre des mesures pour supprimer les discriminations contre les femmes dans le mariage. Or, il apparaît qu'il existe toujours au Botswana des mesures discriminatoires issues du droit coutumier, notamment en ce qui concerne la garde d'enfants, l'âge du mariage et la polygamie. La première mesure à prendre à cet égard est l'enregistrement de tous les mariages devant les autorités civiles, a souligné l'experte, demandant des précisions sur les mesures prises pour assurer l'application des dispositions du droit civil. Une autre experte s'est étonnée de la mention dans le rapport du fait que, selon qu'elles sont mariées en vertu du droit coutumier ou du droit civil, les femmes ne bénéficient pas des mêmes prérogatives au regard, par exemple, de l'accès au crédit.
Si la majorité des femmes au Botswana vivent dans les régions rurales, la plupart des mariages se font devant les autorités civiles, le droit coutumier ne régissant qu'une petite minorité de couples, a précisé la délégation. Après l'abolition de la notion d'autorité maritale, le Gouvernement a informé les banques, notamment, de la teneur de la nouvelle loi, a-t-elle précisé. Concernant la polygamie, il ne s'agit que d'une coutume dont la pratique est moribonde; d'intenses efforts d'éducation ont en effet conduit à sa quasi-disparition, a assuré la délégation.
Concluant ce dialogue, M. BOOMETSWE MOKGOTHU, Représentant permanent du Botswana auprès de l'Office des Nations Unies à Genève, a assuré le Comité que son pays tiendrait le meilleur compte des observations qu'il a faites aujourd'hui.
La Présidente du Comité, MME NAÉLA GABR, a pour sa part relevé que ce dialogue avec le Botswana marque le début d'un processus et que ce pays pourra compter, au besoin, sur l'aide technique du Comité pour l'établissement de ses futurs rapports. Au plan interne, le Département des affaires féminines du Botswana devra sans doute voir ses attributions et ses moyens renforcés, compte tenu, en particulier, de la prévalence de pratiques coutumières encore défavorables au plein respect des droits des femmes, a ajouté la Présidente. Le Comité espère que la délégation aura à cœur, lorsqu'elle sera de retour dans son pays, de faire connaître la teneur des débats de ce jour auprès du public le plus large possible, a-t-elle déclaré.
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CEDAW10/012F