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LE COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS ACHÈVE LES TRAVAUX DE SA SESSION DE PRINTEMPS

Communiqué de presse
Il rend publiques ses observations finales concernant la France, le Bénin, la Bolivie et l'Inde

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a clos aujourd'hui les travaux de sa quarantième session, qui se tenait à Genève depuis le 28 avril, en rendant publiques ses observations finales concernant les rapports de la France, du Bénin, de la Bolivie et de l'Inde, examinés durant cette session.

Au cours de la séance de clôture, le Comité a par ailleurs adopté une déclaration sur la crise alimentaire mondiale dans laquelle il se dit extrêmement alarmé par la hausse rapide des prix alimentaires à travers le monde et par la forte hausse des prix de l'énergie qui ont précipité une crise alimentaire mondiale. Dans ce texte, le Comité exhorte tous les États à prendre immédiatement des mesures, individuellement et par le biais de l'aide internationale, afin d'assurer le droit de chacun d'être à l'abri de la faim, notamment en fournissant et en distribuant une aide humanitaire d'urgence sans discrimination. Il les exhorte en outre à limiter la hausse rapide des prix alimentaires, notamment en encourageant la production de produits alimentaires de base locaux aux fins de consommation locale, au lieu de détourner au profit de la production de biocarburants des terres arables qui pourraient servir à des semences alimentaires. Les États sont également exhortés à prendre des mesures pour lutter contre la spéculation sur les produits alimentaires. Le Comité prie instamment les États parties à traiter les causes structurelles de cette crise, notamment en révisant le régime de commerce mondial de l'Organisation mondiale du commerce afin d'assurer que les règles commerciales mondiales applicables à l'agriculture promeuvent au lieu de saper le droit de chacun d'être à l'abri de la faim.

Dans ses observations finales concernant la France, le Comité se félicite de la création de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, ainsi que de la reconnaissance du droit au logement en tant que droit opposable. Il note toutefois avec préoccupation la persistance d'une discrimination de facto largement répandue à l'encontre des personnes appartenant aux minorités raciales, ethniques et nationales - en particulier celles en provenance du Maghreb, de la Turquie et de l'Afrique noire. Le Comité recommande à la France de prendre toutes les mesures nécessaires pour limiter, autant que possible, le recours aux contrats de travail temporaires comme moyen d'encourager les entreprises à employer des personnes appartenant à des groupes vulnérables. Préoccupé par l'ampleur de la pauvreté en France, le Comité recommande au pays de renforcer ses efforts en matière de lutte contre la pauvreté, notamment en étendant le revenu de solidarité active actuellement expérimenté. La France est exhortée à prendre toutes les mesures appropriées pour réduire le phénomène de la ségrégation résidentielle fondée sur l'origine raciale, ethnique et nationale.

S'agissant du Bénin, le Comité accueille avec satisfaction les mesures législatives adoptées par le pays pour promouvoir l'égalité entre les hommes et les femmes et se félicite que l'enseignement maternel et primaire soit désormais gratuit dans les institutions d'éducation publique du pays. Préoccupé par le nombre élevé de personnes victimes de la traite à partir et à l'intérieur du Bénin, il recommande toutefois au Bénin d'envisager l'adoption d'une loi relative à la répression de la traite des adultes. Il lui recommande en outre de prendre des mesures efficaces pour accroître le taux de scolarisation aux niveaux primaire et secondaire, en particulier dans les zones rurales et en ce qui concerne les filles. Le Comité se dit en outre profondément préoccupé par la prévalence du travail des enfants ainsi que par les informations sur les cas d'infanticides à propos d'enfants dits » sorciers » et par le fort taux de mortalité maternelle et infantile.

Le Comité note avec satisfaction la volonté dont témoigne la Bolivie depuis 2006 d'entreprendre des changements destinés à garantir à tous les habitants sans discrimination les droits consacrés dans le Pacte. Il se dit toutefois préoccupé par le fait qu'une grande partie des recommandations qu'il avait faites en 2001 n'ont pas été mises en œuvre et déplore notamment de nouveau la répartition extrêmement inégale des richesses en Bolivie. Le Comité reste préoccupé par la marginalisation des peuples autochtones dans le pays et par la discrimination dont ils font l'objet. Il exhorte la Bolivie à redoubler d'efforts pour éliminer le travail des enfants. Le pays est par ailleurs prié de prendre les mesures nécessaires, y compris d'ordre législatif, afin d'éviter que les familles paysannes qui occupent pacifiquement les terres en soient expulsées par la force. Il est également recommandé à la Bolivie de se doter d'un régime spécial de propriété intellectuelle destiné à protéger les droits collectifs des peuples autochtones.

En ce qui concerne l'Inde, le Comité note avec satisfaction l'importante contribution apportée par la Cour suprême de ce pays au développement de la jurisprudence internationale en faveur de la justiciabilité des droits relevant du Pacte. Il se dit toutefois profondément préoccupé par le fait qu'en dépit des garanties constitutionnelles relatives à la non-discrimination et des dispositions du droit pénal sanctionnant les actes de discrimination, une discrimination largement répandue et souvent socialement acceptée, ainsi que des actes de harcèlement et de violence persistent à l'encontre des membres de certains groupes défavorisés et marginalisés tels que les femmes, les castes et tribus énumérées, les peuples autochtones, les pauvres vivant en milieu urbain, les travailleurs du secteur informel, les personnes déplacées internes, les minorités religieuses comme la population musulmane, les personnes handicapées et les personnes vivant avec le VIH/sida. D'autre part, le Comité note avec préoccupation qu'en dépit des interdictions légales existantes, prévalent en Inde le travail forcé, les pires formes de travail des enfants et d'autres conditions de travail équivalant à une exploitation.

Le vendredi 9 mai, le Comité a en outre tenu une journée de discussion générale sur le thème du droit de chacun de participer à la vie culturelle, qui servira de base à l'élaboration d'une observation générale du Comité sur cette question. Durant cette session, il a également progressé dans l'adoption de ses directives pour l'élaboration des rapports des États parties. Il a en outre discuté et approuvé la manière dont il pourrait traiter, dans le cadre du projet de protocole facultatif sur la justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels, de plaintes en rapport avec le droit à l'autodétermination. Le Comité a par ailleurs discuté, entre autre, du thème du commerce international et des droits de l'homme. Il a en outre décidé de demander l'autorisation de tenir une troisième session annuelle dans les années à venir.


Au cours de sa prochaine session, qui se tiendra du 3 au 21 novembre 2008, le Comité doit examiner les rapports des Philippines, de l'Angola, du Kenya, du Nicaragua et de la Suède, ainsi qu'un rapport présenté par la Mission d'administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK).


Observations finales sur les rapports examinés au cours de la session

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a adopté des observations finales sur les rapports présentés par la France, le Bénin, la Bolivie et l'Inde en vertu du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

Dans ses observations finales sur le rapport périodique de la France, le Comité reconnaît les efforts déployés par le pays depuis 1998 pour lutter contre l'exclusion sociale et garantir l'égalité des chances pour les personnes appartenant aux groupes vulnérables et défavorisés, en matière d'emploi, de logement, de santé et d'accès à la vie culturelle. Il se félicite de la création, en décembre 2004, de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (HALDE) et de la mise en place, en avril 2006, du contrat d'insertion dans la vie sociale, visant à faciliter l'accès aux opportunités d'emploi pour les jeunes personnes sans qualification professionnelle et celles vivant dans les zones urbaines sensibles. Le Comité se réjouit également de la reconnaissance, en vertu de la loi du 5 mars 2007, du droit au logement en tant que droit opposable.

Le Comité regrette toutefois que la France ne consacre que 0,39% de son PNB à l'aide publique au développement, alors que l'objectif fixé par les Nations Unies est, pour les pays industrialisés, de 0,7%. Le Comité note par ailleurs avec préoccupation que les femmes appartenant aux minorités raciales, ethniques et nationales qui vivent dans les zones urbaines sensibles, en particulier les mères célibataires, sont confrontées à de multiples formes de discrimination et font face à des difficultés en matière d'accès à l'emploi, à la sécurité sociale et aux services sociaux, ainsi qu'en matière d'accès au logement, à la santé et à l'éducation. Le Comité se dit par ailleurs préoccupé par la persistance d'écarts de salaires entre hommes et femmes. Est en outre jugé préoccupante la persistance d'un taux de chômage des jeunes considérablement plus élevé que la moyenne nationale. Le Comité note en outre avec préoccupation la persistance d'une discrimination de facto largement répandue à l'encontre des personnes appartenant aux minorités raciales, ethniques et nationales - en particulier celles en provenance du Maghreb, de la Turquie et de l'Afrique noire. Le Comité note par ailleurs avec préoccupation que, du fait du large recours aux contrats de travail à durée déterminée, temporaires et à temps partiel, un grand nombre de personnes ayant un emploi ne bénéficient pas de la sécurité de l'emploi et sont payées au SMIC, ce qui ne suffit pas pour leur permettre, ainsi qu'à leurs familles, de jouir d'un niveau de vie adéquat. Aussi, le Comité recommande-t-il à la France de prendre toutes les mesures nécessaires pour limiter, autant que possible, le recours aux contrats de travail temporaires comme moyen d'encourager les entreprises à employer des personnes appartenant à des groupes vulnérables, tels que les jeunes, les parents célibataires et les personnes sans qualification professionnelle.

Le Comité reste préoccupé par l'ampleur de la pauvreté en France. Il recommande au pays de renforcer ses efforts en matière de lutte contre la pauvreté, notamment en étendant le revenu de solidarité active actuellement expérimenté dans 34 départements. Le Comité se dit en outre profondément préoccupé que les personnes appartenant à des minorités raciales, ethniques et nationales, en particulier les travailleurs migrants et les personnes d'origine immigrante, soient concentrées dans des zones résidentielles pauvres qui se caractérisent par leur mauvaise qualité, par de vastes complexes de logements mal entretenus, par des opportunités d'emploi limitées, par un accès inadéquat aux installations de soins de santé et aux transports publics, par des écoles sous-financées et par une forte exposition à la criminalité et à la violence. La France est exhortée à prendre toutes les mesures appropriées, en consultation étroite avec les populations concernées, pour réduire le phénomène de la ségrégation résidentielle fondée sur l'origine raciale, ethnique et nationale. Le Comité reste en outre préoccupé par la fourniture inadéquate de logements sociaux pour les ménages à faibles revenus ainsi que par la hausse continue des loyers dans le secteur locatif privé. Il note avec préoccupation la persistance de la discrimination de facto à laquelle sont confrontés les Gitans et les gens du voyage en matière de logement en raison du manque d'aires de parking aménagées pour leurs caravanes et des mauvaises conditions de vie existant dans de nombreuses aires de stationnement prévues par les autorités, souvent situées loin des zones résidentielles et dans des endroits où les infrastructures de base font défaut. Le Comité reste en outre profondément préoccupé par l'ampleur du phénomène des sans-abri. Est également jugé profondément préoccupant le taux élevé de suicides en France, en particulier chez les personnes âgées de 15 à 44 ans. En outre, le Comité note avec préoccupation les disparités considérables qui persistent en termes de performances scolaires et de taux d'abandon scolaire entre les élèves français et les élèves appartenant aux minorités raciales, ethniques ou nationales. Par ailleurs, le Comité reste préoccupé par le défaut de reconnaissance officielle des minorités en France.


S'agissant du rapport périodique du Bénin, le Comité accueille avec satisfaction les mesures législatives adoptées par le pays pour promouvoir l'égalité entre les hommes et les femmes ainsi que pour réprimer l'exploitation et la violence sexuelle à l'encontre des femmes et des enfants. Il se félicite en outre de l'adoption de la loi du 10 avril 2006 portant prévention, prise en charge et contrôle du VIH/sida et de plusieurs documents cadres qui prévoient la prise en charge des enfants et orphelins vulnérables, de la diminution du taux de prévalence du VIH/sida, qui est passé de 4,1% en 2001 à 2% en 2005, ainsi que de la distribution gratuite des médicaments antirétroviraux aux victimes. Le Comité se félicite que l'enseignement maternel et primaire est désormais gratuit dans les institutions d'éducation publique.

Le Comité relève toutefois avec préoccupation que la Commission béninoise des droits de l'homme est dotée du statut d'une organisation non gouvernementale et que son indépendance et son financement ne sont pas suffisamment assurés. Il regrette en outre l'absence d'informations sur l'applicabilité directe ou non du Pacte et constate avec regret que le manque de données statistiques ventilées et actualisées sur l'étendue de la jouissance des droits énoncés dans le Pacte ne permet pas d'évaluer avec précision la mise en œuvre des dispositions de cet instrument par le Bénin. Le Comité est en outre préoccupé par les informations selon lesquelles 25% des enfants béninois n'ont pas été enregistrés à la naissance, ce qui les empêcheraient d'accéder aux services de santé et à l'éducation, entre autres. Il est également préoccupé par la persistance des traditions et attitudes stéréotypées qui ont un effet négatif sur la jouissance égale par les femmes des droits économiques, sociaux et culturels. D'autre part, le Comité est profondément préoccupé par les informations sur les cas d'infanticides à propos d'enfants dits «sorciers», par exemple les nourrissons handicapés ou ceux dont la mère décède après l'accouchement, motivés par des croyances traditionnelles persistantes chez certaines populations du Nord du Bénin. Le Comité relève avec préoccupation que 43% de la population souffrent d'une malnutrition chronique. Il note en outre avec préoccupation que les logements sociaux pour les personnes et les familles défavorisées et marginalisées demeurent insuffisants, la plupart d'entre eux étant réservés aux employés du secteur public. D'autre part, le Comité est vivement préoccupé par le fort taux de mortalité maternelle et infantile.

Le Comité invite le Bénin à envisager d'amender le Code des personnes et de la famille afin de garantir l'égalité pleine entre les enfants nés dans le cadre du mariage et les enfants nés hors mariage. Il recommande en outre au pays d'assurer à toutes les personnes, sans distinction de leur secteur de travail ou autre, une couverture par les régimes de sécurité sociale leur accordant des prestations adéquates d'assurance contre les principaux risques de la vie. Il prie également le Bénin d'adopter des dispositions pénales faisant expressément référence à la violence familiale et au viol conjugal en tant que délits. Préoccupé par le nombre élevé de personnes victimes de la traite à partir et à l'intérieur du Bénin et, en particulier, en transit sur son territoire à des fins d'exploitation sexuelle et de travail forcé, le Comité recommande au pays d'envisager l'adoption d' une loi relative à la répression de la traite des adultes. Il lui recommande en outre de prendre des mesures efficaces pour accroître le taux de scolarisation aux niveaux primaire et secondaire, en particulier dans les zones rurales et en ce qui concerne les filles, par le biais de l'augmentation du nombre de salles de classes et d'enseignants, du financement des manuels scolaires et des repas de midi. Le Comité est profondément préoccupé par la prévalence du travail des enfants, notamment par le fréquent abus d'enfants engagés comme employés domestiques ou «vidomégons».


S'agissant de la Bolivie, le Comité note avec satisfaction la volonté dont témoigne l'État depuis 2006 d'entreprendre des changements destinés à garantir à tous les habitants sans discrimination les droits consacrés dans le Pacte. Il note également avec satisfaction que le projet de nouvelle Constitution approuvé par l'Assemblée intègre tous les droits reconnus dans le Pacte. Le Comité constate en outre avec satisfaction que la mortalité maternelle en Bolivie a été considérablement réduite et accueille avec satisfaction l'introduction en 2007 de la «rente universelle de vieillesse». Le Comité constate aussi avec satisfaction que la Bolivie a élevé la Déclaration sur les droits des peuples autochtones au rang de loi. Il prend note par ailleurs des efforts déployés par le pays pour protéger l'environnement. Le Comité se dit toutefois préoccupé qu'une grande partie des recommandations qu'il avait faites en 2001 n'ont pas été mises en œuvre. Il déplore de nouveau la répartition extrêmement inégale des richesses en Bolivie. Le salaire minimum reste insuffisant pour permettre aux travailleurs et aux membres de leur famille de bénéficier d'un niveau de vie digne. De plus, le Comité reste préoccupé par le nombre élevé d'enfants victimes de violences physiques et mentales, ainsi que par la persistance de l'exploitation du travail des enfants, en particulier des enfants autochtones. Le Comité se dit également préoccupé par la discrimination et les conditions de travail auxquelles sont confrontés les travailleurs en Bolivie, notamment dans les mines; il relève que ces pratiques ont cours principalement dans la zone du Haut Parapeto du Chaco bolivien, dans les provinces Gran Chaco, Cordillera, O'Connor et Luis Calvo, dans les départements de Tarija, Santa Cruz et Chuquisaca, et déplore les difficultés que rencontre l'État pour effectuer des inspections du travail dans ces zones. Le Comité se dit également préoccupé par le fort taux d'avortements qui continue de prévaloir en Bolivie, en particulier parmi les jeunes filles âgées de 14 et 15 ans, ainsi que par l'accès limité à l'éducation pour les groupes vulnérables et marginalisés, en particulier les autochtones.

Bien qu'il note les efforts déployés par le pays depuis 2006, le Comité reste préoccupé par la marginalisation des peuples autochtones dans le pays et par la discrimination dont ils font l'objet, en particulier pour ce qui a trait à l'éducation, à un logement convenable, à l'alimentation et aux services de santé. Le Comité constate en outre que 70% des terres appartiennent à seulement 7% de la population. Les droits collectifs des peuples autochtones ne sont pas protégés de manière adéquate, relève avec préoccupation le Comité.

Au nombre de ses recommandations, le Comité recommande à la Bolivie d'intensifier ses efforts afin de doter le pays de sa nouvelle Constitution. Il exhorte en outre le pays à prendre les mesures nécessaires pour réduire l'extrême pauvreté. Il l'exhorte également à redoubler d'efforts pour éliminer le travail des enfants dans tous les secteurs, en particulier dans celui des services domestiques. La Bolivie est par ailleurs priée de prendre les mesures nécessaires, y compris d'ordre législatif, afin d'éviter que les familles paysannes qui occupent pacifiquement les terres en soient expulsées par la force et afin d'enquêter et de sanctionner les responsables d'expulsions forcées et de violations connexes des droits reconnus par le Pacte. Le pays est aussi instamment prié de poursuivre ses efforts visant la démarcation et la récupération des terres et territoires ancestraux des peuples autochtones. Il est également recommandé au pays de se doter d'un régime spécial de propriété intellectuelle destiné à protéger les droits collectifs des peuples autochtones, y compris leurs productions scientifiques, ainsi que leurs connaissances et leur médecine traditionnelles. D'autre part, le Comité prie instamment la Bolivie d'intensifier ses efforts afin de combattre la violence au foyer, par le biais de la promulgation d'une législation spécifique sanctionnant ce type de violence comme un délit.

Dans ses observations finales sur le rapport périodique de l'Inde, le Comité note avec satisfaction les mesures législatives et autres adoptées par le pays afin de promouvoir les droits économiques, sociaux et culturels, et notamment la loi de 2006 sur l'interdiction du mariage des enfants; la loi nationale de 2005 sur la garantie de l'emploi dans les zones rurales; ou encore la loi de 2005 sur la protection des femmes contre la violence domestique. Le Comité note en outre avec satisfaction l'importante contribution apportée par la Cour suprême de l'Inde au développement de la jurisprudence internationale en faveur de la justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels, par le biais de son interprétation active de la Constitution. Il note toutefois avec regret la position de l'Inde selon laquelle la réalisation des droits énoncés dans le Pacte est totalement progressive par nature. Le Comité se dit profondément préoccupé par les informations indiquant que les défenseurs des droits de l'homme - notamment ceux qui aident les particuliers et les communautés à faire valoir leurs droits économiques, sociaux et culturels - sont menacés, harcelés et soumis à des violences par les agents de l'État et par les agents responsables de l'application des lois. À cet égard, il note avec préoccupation que la législation sur la sécurité nationale accorde une impunité aux agents de l'État qui violent les droits de l'homme. Le Comité est en outre profondément préoccupé qu'en dépit des garanties constitutionnelles relatives à la non-discrimination et des dispositions du droit pénal sanctionnant les actes de discrimination, une discrimination largement répandue et souvent socialement acceptée, ainsi que des actes de harcèlement et de violence persistent à l'encontre des membres de certains groupes défavorisés et marginalisés tels que les femmes, les castes et tribus énumérées, les peuples autochtones, les pauvres vivant en milieu urbain, les travailleurs du secteur informel, les personnes déplacées internes, les minorités religieuses comme la population musulmane, les personnes handicapées et les personnes vivant avec le VIH/sida. Le Comité est également préoccupé par les obstacles que rencontrent les victimes en matière d'accès à la justice et relève le faible taux de poursuite dont font l'objet les crimes commis à l'encontre de personnes appartenant aux castes et tribus énumérées. Le Comité est aussi préoccupé par le manque d'application de la loi sur l'interdiction de la sélection du sexe de l'enfant, qui se traduit par un taux élevé d'avortements de fœtus féminins et par un déséquilibre du ratio entre les sexes qui ne cesse de s'accroître.

D'autre part, le Comité note avec préoccupation qu'en dépit des interdictions légales existantes, prévalent en Inde le travail forcé, les pires formes de travail des enfants et d'autres conditions de travail équivalant à une exploitation. Le Comité recommande notamment au pays de prendre des mesures effectives afin d'assurer que ces violations soient poursuivies et les employeurs dûment sanctionnés. Il lui recommande également de lancer une campagne nationale visant à éliminer le travail de récupération manuelle des déchets et autres formes de travail dégradant. L'Inde est également encouragée à assurer que les salaires minima fixés au niveau des États de l'Union sont pleinement appliqués sur l'ensemble du territoire et dans tous les secteurs afin de permettre à tous les travailleurs et à leurs familles de jouir d'un niveau de vie adéquat. L'Inde est encouragée à établir un système effectif d'indexation et de réajustement régulier du salaire minimum sur le coût de la vie. Il est en outre recommandé au pays de lever, tant au niveau de la loi que dans la pratique, les obstacles qui s'opposent aux droits des syndicats de mener des négociations collectives et d'accorder une attention particulière aux droits des travailleurs dans les zones économiques spéciales et dans les zones franches industrielles d'exportation. Le Comité se dit par ailleurs préoccupé par l'incidence exceptionnellement élevée de la violence domestique contre les femmes et les enfants. Il note en outre avec préoccupation que le trafic de personnes reste un sérieux problème en Inde et se dit particulièrement préoccupé que les femmes et les enfants appartenant aux castes et tribus énumérées constituent une grande proportion des victimes de trafic et d'exploitation sexuelle. Il est recommandé à l'Inde d'adopter une loi pénalisant ces pratiques et d'accorder une priorité au traitement du problème du commerce d'organes humains.

En dépit de la croissance économique rapide qu'a connue le pays ces dix dernières années, une pauvreté extrême ainsi qu'une grave insécurité alimentaire voire des pénuries persistent en Inde et affectent de manière disproportionnée les personnes vivant dans les États les plus pauvres et les groupes défavorisés et marginalisés, s'inquiète d'autre part le Comité. Il se dit en outre préoccupé par le manque de politique nationale de logement destinée à répondre particulièrement aux besoins des individus et groupes défavorisés et marginalisés, notamment pour les personnes vivant dans les bidonvilles dont il semblerait que le nombre ne cesse de croître. Le Comité reste en outre profondément préoccupé par les informations faisant état de déplacements et d'expulsions forcées dans le contexte de l'acquisition de terres par des acteurs privés et publics à des fins de projets de développement. Par ailleurs, le Comité se dit préoccupé qu'en dépit de la croissance économique enregistrée par le pays, les dépenses de santé restent exceptionnellement faibles – se situant aux alentours de 1% du produit national brut. Une proportion significative de la population continue de n'avoir qu'un accès limité voire aucun accès du tout aux services de soins de santé. La croissance des infections par le VIH/sida est également jugée préoccupante. Le Comité se dit aussi préoccupé par le manque d'accès à l'eau potable et par la présence de métaux lourds dans les eaux souterraines. Il fait en outre part de sa préoccupation face à la surpopulation dans les prisons, lesquelles fonctionnent à 200 voire 300% de leur capacité maximale, ce qui se traduit par des taux disproportionnés de tuberculose et d'autres problèmes de santé parmi les détenus. Le Comité note par ailleurs avec préoccupation la qualité généralement faible de l'éducation dans les écoles publiques et le sous-financement de ces établissements. En outre, le taux d'analphabétisme des adultes reste élevé. Le Comité se dit préoccupé que les survivants de l'accident de 1984 dans l'usine de pesticide de Union Carbide India Limited à Bhopal continuent de souffrir des effets à long terme sur la santé de l'exposition au gaz qui en est résulté et que les efforts de l'État pour réhabiliter et indemniser les victimes ont été largement inadéquats.


Déclaration du Comité sur la crise alimentaire mondiale

Le Comité a adopté, lors de sa séance de clôture, une déclaration sur la crise alimentaire mondiale dans laquelle il se dit extrêmement alarmé par la hausse rapide des prix alimentaires à travers le monde et par la forte hausse des prix de l'énergie qui ont précipité une crise alimentaire mondiale et affectent de manière néfaste le droit à une alimentation adéquate et d'autres droits de l'homme de plus de 100 millions de personnes. Dans cette déclaration, le Comité souligne que tous les États parties sont tenus d'assurer pour chaque personne relevant de leur juridiction un accès physique et économique à une alimentation essentielle minimale. En vertu de l'article 11.2 du Pacte, les États parties reconnaissent le droit de chacun d'être à l'abri de la faim, rappelle le Comité. La crise alimentaire actuelle constitue une atteinte à l'obligation d'assurer une distribution équitable des denrées alimentaires mondiales en rapport avec les besoins, affirme le Comité.

Le Comité demande à tous les États de traiter immédiatement les causes de la crise alimentaire et les exhorte notamment à prendre immédiatement des mesures, individuellement et par le biais de l'aide internationale, afin d'assurer le droit de chacun d'être à l'abri de la faim, notamment en fournissant et en distribuant une aide humanitaire d'urgence sans discrimination. Le Comité exhorte en outre les États à limiter la hausse rapide des prix alimentaires, notamment en encourageant la production de produits alimentaires de base locaux aux fins de consommation locale, au lieu de détourner au profit de la production de biocarburants des terres arables qui pourraient servir à des semences alimentaires. Les États sont également exhortés à prendre des mesures pour lutter contre la spéculation sur les produits alimentaires.

Le Comité recommande la mise sur pied d'un mécanisme international de coordination chargé de superviser et de coordonner les réponses apportées à la crise alimentaire. Il prie instamment les États parties à traiter les causes structurelles de cette crise, notamment en révisant le régime de commerce mondial de l'Organisation mondiale du commerce afin d'assurer que les règles commerciales mondiales applicables à l'agriculture promeuvent au lieu de saper le droit de chacun d'être à l'abri de la faim.


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