Aller au contenu principal

LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE CLÔT LES TRAVAUX DE SA SESSION DE PRINTEMPS

Communiqué de presse
Il présente ses recommandations à la Suède, l'Australie, l'Algérie, le Costa Rica, l'Indonésie, l'ex République yougoslave de Macédoine, la Zambie et l'Islande

Le Comité contre la torture a clos, ce matin, les travaux de sa quarante et unième session, qui s'est ouverte le 28 avril au Palais Wilson, à Genève. Il a rendu publiques ses conclusions et recommandations sur les huit rapports examinés au cours de la session, à savoir ceux de l'Australie, de la Suède, de l'Algérie, du Costa Rica, de l'Indonésie, de l'ex-République yougoslave de Macédoine, de la Zambie et de l'Islande.

Dans ses conclusions et recommandations sur l'Australie, le Comité se félicite des amendements apportés par ce pays à sa législation s'agissant de la détention des immigrants et en particulier des enfants. Il prend également acte avec satisfaction de la fermeture des centres de rétention en Papouasie-Nouvelle-Guinée et à Nauru. Il exprime toutefois sa préoccupation s'agissant des lois et pratiques antiterroristes de l'État partie. Le Comité exprime aussi son inquiétude concernant les conditions de détention en Australie, et attire l'attention sur la surpopulation carcérale, l'insuffisance de soins de santé mentale pour les détenus, le taux disproportionné d'autochtones incarcérés, parmi lesquels un nombre croissant de femmes et d'enfants, et les allégations de décès d'autochtones en prison pour des raisons qui ne sont pas clairement déterminées.

Le Comité félicite la Suède pour les efforts qu'elle ne cesse de déployer afin de prévenir et d'éliminer tout acte ou conduite contraire aux dispositions de la Convention et note avec satisfaction l'amendement apporté au Code de procédure pénale qui incorpore une disposition explicite sur le non-refoulement. Il note aussi avec satisfaction les efforts en cours pour réformer la législation, les politiques et les procédures afin d'assurer une meilleure protection des droits de l'homme, y compris le droit de ne pas être soumis à la torture et de mauvais traitements, en particulier la modification de la loi de 2006 sur les étrangers. Tout en notant que des changements positifs ont eu lieu en matière de politique d'asile, s'agissant de l'accueil de demandeurs d'asile sans papiers et de la détention provisoire des requérants, le Comité regrette que cette dernière mesure demeure courante et qu'il n'y ait pas de limite dans la durée de la détention d'un demandeur d'asile.

Le Comité relève, au nombre des aspects positifs s'agissant du rapport de l'Algérie, l'introduction au Code pénal de la criminalisation de la torture, la signature de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et le moratoire sur la peine de mort depuis 1993. Il se déclare toutefois préoccupé par la définition peu spécifique du terrorisme et relève que la définition des actes terroristes et subversifs ne devrait pas conduire à des interprétations permettant de réprimer, sous le couvert d'actes terroristes, l'expression légitime des droits consacrés par le Pacte relatif aux droits civils et politiques. Le Comité est également préoccupé par le maintien de l'état d'urgence depuis 1992 et fait part de son inquiétude à l'égard de l'impunité dont bénéficient les groupes armés et les agents de l'État, de l'absence d'enquête s'agissant des 4000 à 7000 personnes disparues depuis les années 1990, ainsi que des violences, notamment des violences d'ordre sexuel, perpétrées à l'encontre des femmes pendant cette période et demeurées impunies.

S'agissant du Costa Rica, le Comité se félicite des efforts déployés par le pays pour assurer une meilleure protection du droit de ne pas être soumis à la torture, notamment la définition du délit de torture dans le Code pénal et les mécanismes mis en place pour faciliter la soumission de plaintes. Le pays doit toutefois prendre des mesures pour limiter le recours à la détention préventive et réduire sa durée. Il note avec préoccupation l'augmentation de la population carcérale en raison, notamment, du recours limité à des peines de substitution et à la criminalisation de certains comportements. Le Comité est également préoccupé par le pouvoir accordé aux agents d'immigration qui pourrait avoir une incidence sur l'obligation de non-refoulement établi par la Convention. Des préoccupations subsistent en outre concernant des violences contre des personnes en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité transsexuelle.

Le Comité se réjouit des efforts accomplis par l'Indonésie en vue de renforcer ses institutions et sa législation en matière de protection et promotion des droits de l'homme. Il est toutefois préoccupé par des allégations nombreuses, dignes de foi et corroborées qui font état de la pratique routinière et systématique de torture et de mauvais traitements à l'encontre de suspects en détention préventive dans le but d'obtenir des aveux, et enjoint le pays à prendre des mesures immédiates et urgentes de prévention. Il se dit préoccupé par les allégations faisant état de viols perpétrés par le personnel militaire et par la définition restrictive de ce délit dans le Code pénal. Il demande à l'Indonésie d'adopter toutes les mesures nécessaires pour éradiquer la pratique persistante et généralisée des mutilations génitales féminines et pour lutter contre la violence domestique. Le Comité est préoccupé par les informations faisant état d'un usage de la force disproportionné et de mauvais traitements par les forces de police, l'armée et des groupes paramilitaires durant des opérations menées en Papouasie, à Aceh et dans d'autres provinces touchées par des conflits armés. Il regrette l'absence de coopération en matière de justice internationale, notamment s'agissant de la poursuite des auteurs de violations systématiques des droits de l'homme perpétrées au Timor oriental en 1999.

Le Comité se félicite que l'ex-République yougoslave de Macédoine ait intégré le crime de torture dans sa législation. Il se réjouit que le pays ait ratifié le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, tout en regrettant que des accords bilatéraux conclus avec des pays tiers pour empêcher que leurs citoyens ne soient extradés vers la Cour pénale pour des crimes qui incluent la torture. Le Comité souligne, par ailleurs, la nécessité d'un mécanisme indépendant et impartial d'enquête à l'égard des allégations de violences commises par la police et met aussi en évidence le fait que des peines très faibles ont été imposées aux personnes jugées coupables de délits de torture ou mauvais traitement dans l'exercice de leur fonction. Le Comité observe que l'exploitation sexuelle des femmes et des jeunes filles demeure un problème aigu dans le pays et l'engage à poursuivre et punir les responsables du trafic humain, à améliorer ses services de réhabilitation des victimes et à mettre en place des formations sur les causes et les conséquences du trafic humain.

S'agissant de la Zambie, le Comité se réjouit du dialogue ouvert et sincère avec la délégation de haut-niveau de ce pays et de la reconnaissance par le pays des difficultés rencontrées dans l'application de la Convention. Le Comité se réjouit d'apprendre que la Commission des droits de l'homme de Zambie a la possibilité de visiter des prisons et des cellules de police, mais s'inquiète du manque de ressources dont elle dispose et de son manque de pouvoir puisqu'elle est uniquement habilitée à formuler des recommandations. Tout en accueillant avec satisfaction l'engagement de la Zambie à améliorer les conditions de détention, le Comité réitère l'expression de sa grave préoccupation s'agissant de la surpopulation carcérale manifeste, des conditions physiques déplorables des prisonniers et de leur manque de soins et d'alimentation. Il demande que la Zambie abolisse immédiatement la pratique de la privation alimentaire utilisée comme punition et procède à une séparation systématique des détenus hommes, femmes et enfants.

Dans ses conclusions et recommandations sur l'Islande, le Comité se félicite, en particulier, des nouvelles règlementations en matière d'application des peines et la formation des gardiens de prison. Il a aussi salué la ratification par l'État partie de la Convention du Conseil de l'Europe contre le trafic des êtres humains et l'introduction dans son code pénal de dispositions visant à punir ce délit. L'Islande a aussi amendé sa législation afin de répondre de manière plus adéquate à la violence contre les femmes, en particulier la violence domestique. Le Comité a pris acte avec satisfaction de ce qu'aucune plainte pour acte de torture n'ait été déposée. Au nombre des sujets de préoccupation du Comité, celui-ci mentionne le fait qu'il n'existe pas de suivi et de contrôle véritablement indépendant des centres de détention et des institutions psychiatriques. Il relève aussi que seules deux demandes d'asile ont abouti au cours de ces vingt dernières années et que l'État partie est réticent à augmenter son quota de permis de séjours humanitaires.

Au cours de cette session, le Comité a été saisi du premier rapport du Sous-Comité de la prévention de la torture, créé en vertu du Protocole facultatif se rapportant à la Convention, et dont les travaux ont débuté en février 2007. Il s'est également penché sur le suivi de diverses plaintes individuelles - examinées en vertu de l'article 22 de la Convention.


Lors de sa session d'automne, qui se tiendra à Genève du 3 au 21 novembre 2008, le Comité contre la torture a prévu d'examiner les rapports de la Belgique, de la Chine (et des Régions administratives spéciales de Macao et de Hong Kong), du Kazakhstan, du Kenya, de la Lituanie, du Monténégro et de la Serbie.


Conclusions et recommandations concernant les rapports examinés

Le Comité contre la torture a adopté des conclusions et recommandations sur les rapports examinés au cours de cette session et présentés par les six pays suivants: Australie, Suède, Algérie, Costa Rica, Indonésie, ex-République yougoslave de Macédoine, Zambie et Islande. Les textes complets de ces observations finales sont disponibles sur la page internet de la session, à l'adresse suivante http://www2.ohchr.org/english/bodies/cat/cats40.htm (consultez la colonne «Concluding Observations» en regard de chaque pays).

Dans ses conclusions et recommandations sur le troisième rapport périodique de l'Australie, le Comité se félicite des amendements apportés à la législation s'agissant de la détention des immigrants, et en particulier des enfants. Il prend également acte avec satisfaction de la fermeture des centres de rétention en Papouasie-Nouvelle-Guinée et à Nauru et à la décision de l'Australie de mettre fin à ladite Stratégie du Pacifique. Le Comité se réjouit aussi des excuses formulées par le gouvernement à la population aborigène pour les politiques passées qui ont conduit à l'enlèvement à leur famille d'enfants de communautés autochtones. Tout en notant que le Gouvernement australien envisage d'intégrer une définition de la torture qui aurait une application extraterritoriale, le Comité se dit préoccupé de ce que le délit de torture n'apparaisse pas à dans la législation fédérale et qu'il y ait des lacunes s'agissant de la criminalisation de la torture dans certains États et territoires. Le Comité exprime, par ailleurs, sa préoccupation s'agissant des lois et pratiques antiterroristes de l'Australie, soulignant, en particulier, les pouvoirs accrus consentis aux services secrets australiens, l'absence de contrôle judiciaire et le caractère secret entourant la détention préventive telle qu'elle est prévue par l'Acte antiterroriste de 2005, de même que les difficiles conditions de détention imposées aux suspects accusés d'actes terroristes. À cet égard, il enjoint l'Australie de s'assurer que la détention préventive et les ordres de contrôles soient pratiqués conformément à ses obligations en matière de droits de l'homme et en particulier au droit à un procès équitable.

S'agissant des immigrants illégaux, le Comité recommande que l'Australie abolisse sa politique de détention forcée des personnes qui pénètre sur le territoire australien de manière irrégulière et qu'elle prévoie des mesures alternatives à la rétention. S'agissant du principe de non-refoulement, le Comité est préoccupé de ce que l'interdiction du non-refoulement ne soit pas incorporée dans la législation nationale et demande à l'Australie que l'interdiction de renvoyer une personne dans un autre pays où il y a de bonnes raisons de croire qu'elle pourrait être soumise à la torture soit intégrée à la fois dans la législation nationale et dans celle des États et Territoires. Le Comité réitère, par ailleurs, sa recommandation à l'Australie d'adopter un système complémentaire de protection afin que la réalisation de ses obligations en matière de non-refoulement ne dépende pas uniquement des pouvoirs discrétionnaires du ministre. Le Comité demande en outre à l'État partie, dans le cas où il aurait recours aux assurances diplomatiques dans d'autres situations que celles qui sont exclues par l'article 3, de l'informer, dans son prochain rapport, du nombre de cas d'extraditions ou d'enlèvements qui ont été sujettes à des garanties diplomatiques depuis septembre 2001. Le Comité se dit par ailleurs préoccupé de ce que la formation aux droits de l'homme des forces de l'ordre et du personnel militaire avant déploiement à l'étranger ne soit pas systématique. Il exprime aussi son inquiétude concernant les conditions de détention en Australie, et attire l'attention, notamment, sur la surpopulation carcérale, l'insuffisance de soins de santé mentale pour les détenus, le taux disproportionné d'autochtones incarcérés, parmi lesquels un nombre croissant de femmes et d'enfants et les allégations de décès d'autochtones en prison, pour des raisons qui ne sont pas clairement déterminées.

Le Comité félicite la Suède, qui présentait son cinquième rapport, pour le respect des obligations qui lui incombent en vertu de la Convention et pour les efforts qu'elle ne cesse de déployer afin de prévenir et d'éliminer tout acte ou conduite contraire aux dispositions de cet instrument. En particulier, le Comité note avec satisfaction l'amendement apporté au Code de procédure pénale qui incorpore une disposition explicite sur le non-refoulement. Il se félicite également de l'adoption d'une nouvelle législation sur les garanties fondamentales, de même que de l'adoption d'un plan d'action pour combattre la violence contre les femmes, les crimes d'honneur et la violence dans les couples de même sexe. Le Comité prend note également avec satisfaction de l'entrée en vigueur d'un plan d'action visant à prévenir les risques que les demandeurs d'asile mineurs, non accompagnés, puissent faire l'objet de disparitions et devenir victimes du trafic d'êtres humains. Toutefois, le Comité regrette que la Suède n'ait pas changé de position sur la question de l'intégration spécifique de la Convention dans le droit suédois. Le fait que les actes de torture sont punissables en vertu d'autres provisions signifie qu'ils peuvent être sujets à certaines restrictions. À cet égard, le Comité se dit préoccupé de ce que le statut de restrictions applicable à certaines dispositions du Code pénal puisse empêcher la poursuite de crimes graves, en particulier quand ceux-ci ont été commis à l'étranger.

Tout en notant que des changements positifs ont eu lieu en matière de politiques d'asile, s'agissant de l'accueil de demandeurs d'asile sans papier et de la détention provisoire des requérants, le Comité regrette que cette dernière mesure demeure courante et qu'aucune limite ne soit prévue à la durée de la détention d'un demandeur d'asile. Le Comité a, par ailleurs, pris note avec satisfaction des informations détaillées présentée par la Suède sur les mesures prises pour mettre en application ses recommandations s'agissant du cas Agiza contre la Suède. Il regrette toutefois que les éléments clefs de ces recommandations aient été omis, notamment la demande que la Suède mène une enquête approfondie et poursuive dûment les responsables. Le Comité prend note avec satisfaction des informations fournies par la Suède sur les programmes de formation et de sensibilisation destinés à la police et au personnel pénitentiaire. Il invite toutefois le pays à développer et mettre en œuvre une méthodologie lui permettant d'évaluer l'efficacité et l'impact de ces programmes sur la réduction des actes de torture, de violence et de mauvais traitement. Le Comité exprime encore sa préoccupation de ce que 40 à 50% de détenus font l'objet de restrictions particulières et qu'ils n'ont actuellement pas la possibilité de faire appel contre les décisions de restrictions, et demande à la Suède de prendre toutes les mesures appropriées pour réduire ces restrictions et leur durée. En regard d'allégations faisant état de la poursuite de discriminations à l'égard des groupes vulnérables, en particulier des Roms, le Comité invite la Suède à intensifier ses efforts pour lutter contre les discriminations qui s'exercent contre ces groupes. Le Comité se dit aussi préoccupé de ce que le rapport sur l'établissement d'une autorité chargée d'enquêter sur des plaintes à l'encontre de policiers et de procureurs ne recommande pas l'établissement d'une autorité indépendante mais d'une unité séparée au sein de la police, et demande à l'État partie de mettre en place un organe indépendant.

Au nombre des aspects positifs s'agissant du troisième rapport périodique de l'Algérie, le Comité relève, notamment, l'introduction au Code pénal de la criminalisation de la torture, la signature de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et le moratoire sur la peine de mort déclaré dans l'État partie depuis 1993. Le Comité se réjouit aussi de l'engagement de l'Algérie pour la réconciliation nationale, ainsi que des déclarations selon lesquelles elle entend continuer à améliorer la promotion et la protection des droits de l'homme. Le Comité se déclare toutefois préoccupé par la définition peu spécifique du terrorisme, et relève que la définition des actes terroristes et subversifs ne devrait pas conduire à des interprétations permettant de réprimer sous le couvert d'actes terroristes l'expression légitime des droits consacrés par le Pacte relatif aux droits civils et politique. Le Comité est également préoccupé par le maintien de l'état d'urgence, proclamé en 1992, et cela en dépit des informations données par l'État partie. Tout en prenant note des révisions du Code de procédure pénale, le Comité demeure également préoccupé par des informations reçues selon lesquelles la durée légale de la garde à vue (jusqu'à 12 jours) peut être prolongée dans les faits à plusieurs reprises. Il s'inquiète aussi des allégations faisant état de l'existence de centres secrets de détention qui échapperaient au contrôle judiciaire, et de l'absence d'information indiquant que l'autorité judiciaire compétente ait entrepris des mesures visant à enquêter sur ces allégations. Tout en notant avec satisfaction la création de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme (CNCPPDH) le 9 octobre 2001, le Comité demeure préoccupé par le manque d'informations disponibles concernant les travaux de la Commission et s'inquiète du fait que ses membres soient désignés par décret présidentiel, et que, selon les informations données par la délégation algérienne, le Président juge de l'opportunité de la suite à donner aux recommandations de la Commission, y compris la publication de son rapport, ce qui constitue un obstacle à la transparence nécessaire à son bon fonctionnement et à son indépendance.

Le Comité prend note que l'ordonnance nº06-01 portant mise en œuvre de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale prévoit une amnistie pour les membres des groupes armés et les agents de l'État. En ce qui concerne les membres des groupes armés qui se seraient rendus aux autorités, le Comité note qu'ils bénéficient de l'exonération des poursuites ou d'une diminution de peine s'ils n'ont pas commis de massacres, d'attentats à la bombe ou de viols. Le Comité estime que ces dispositions ne sont pas conformes à l'obligation de tout État partie de procéder à une enquête impartiale chaque fois qu'il y a des motifs raisonnables de croire qu'un acte de torture a été commis sur tout territoire sous sa juridiction, de poursuivre les auteurs de ces actes et d'indemniser les victimes. Le Comité prend acte de la reconnaissance par l'Algérie de la disparition forcée de milliers de personnes en Algérie depuis le début des années 1990 et note que les chiffres avancés par le Gouvernement dans le cadre du recensement des personnes disparues depuis les années 1990 varient entre 4000 et 7000 personnes. Il se déclare préoccupé de ce qu'en dépit de ces faits, les autorités judiciaires compétentes n'aient pas déclenché l'action publique dans le but d'enquêter sur le sort des personnes disparues, d'identifier, de poursuivre, et de sanctionner les auteurs de disparitions forcées. Il souhaite que l'Algérie lui communique dans les meilleurs délais la liste des personnes disparues recensées depuis les années 1990. Par ailleurs, le Comité se déclare préoccupé par les informations reçues faisant état de plusieurs milliers de cas de femmes victimes de viols par des membres des groupes armés durant le conflit interne qui a sévi dans l'État partie. Il s'inquiète par ailleurs de l'absence d'enquêtes, de poursuites et de condamnations des membres des groupes armés pour motif de viol, ainsi que de l'absence d'indemnisation et de réadaptation médicale, psychologique et sociale des victimes de ces actes. En conclusion, le Comité encourage vivement l'État partie à collaborer avec les procédures spéciales du Conseil des droits de l'homme, et à autoriser la visite du Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, celle du Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, celle du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, et celle du Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste.

S'agissant du rapport du deuxième rapport périodique du Costa Rica, le Comité note avec satisfaction que, depuis l'examen du rapport initial, le pays a ratifié le Protocole facultatif à la Convention contre la torture, ainsi que le Statut de Rome de la Cour pénale internationale. Il se félicite des efforts déployés dans le Costa Rica pour réformer la législation, les politiques et procédures visant à assurer une meilleure protection du droit de ne pas être soumis à la torture ou autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, notamment la définition du délit de torture dans le Code pénal, l'existence de mécanismes pour faciliter la soumission de plaintes, la loi sur la criminalisation de la violence à l'égard des femmes. Le Comité estime toutefois que le Costa Rica doit prendre des mesures pour limiter le recours à la détention préventive et réduire sa durée par des mesures de remplacement lorsque l'accusé ne pose pas une menace pour la société. Il note avec préoccupation l'augmentation de la population carcérale et les facteurs qui ont contribué à cette situation, notamment le recours limité à des peines de substitution, un nombre croissant de peines de prison, la criminalisation de certains comportements entraînant la détention préventive en tant que mesure de précaution.

Le Comité note également avec préoccupation que le projet de loi sur l'immigration ne prévoit pas le droit de faire appel. Le Comité est également préoccupé par le pouvoir accordé aux agents d'immigration de rejeter les migrants en situation irrégulière situés dans une zone de 50 km de la frontière sans recours administratif, ce qui pourrait avoir une incidence sur l'obligation de non-refoulement établi par la Convention. Le Comité exprime en outre sa préoccupation en ce qui concerne les délais excessifs pour déterminer le statut de réfugié et estime que le Costa Rica devrait prendre toutes les mesures nécessaires à cet égard en coopération avec le Haut Commissariat pour les réfugiés. Le pays devrait aussi prévoir dans sa législation des mesures non privatives de liberté pour les migrants et fixer une durée maximum de détention en attente d'expulsion. Tout en notant des efforts pour lutter contre les abus de pouvoir par les gardes-frontières et le personnel des établissements de détention et des prisons, des préoccupations subsistent concernant des violences contre les migrants, ainsi que les nationaux, en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité transsexuelle. Le Comité exprime aussi sa préoccupation devant les allégations d'abus sexuels et la violence physique contre des détenus homosexuels et les transsexuels. Le Comité exprime par ailleurs sa préoccupation concernant l'absence de programmes de l'État pour la réhabilitation des victimes. Le Comité note avec satisfaction que les châtiments corporels sont interdits dans l'éducation et le système pénal pour mineurs mais déplore que l'article 143 du Code de la famille stipule que les parents ont le droit de corriger les enfants de manière modérée. Le Comité encourage le Costa Rica à accélérer l'interdiction totale des châtiments corporels contre les enfants.


S'agissant du deuxième rapport périodique de l'Indonésie, le Comité se réjouit des efforts accomplis par ce pays en vue de renforcer ses institutions et sa législation en matière de protection et promotion des droits de l'homme, qui s'exprime, en particulier, par la création de nombreuses commissions, lois et décrets. Il se félicite également de l'accession, par l'Indonésie, au Pacte international relatif aux droits civils et politiques et aux réponses positives accordées aux demandes de visites de plusieurs rapporteurs spéciaux. Tout en exprimant sa satisfaction d'avoir reçu des rapports de la Commission nationale sur la violence contre les femmes et de la Commission nationale indonésienne des droits de l'homme, le Comité regrette que cette dernière n'ait pas été en mesure de participer à ses réunions. Le Comité fait état de sa profonde préoccupation à l'égard des allégations nombreuses, dignes de foi et corroborées par le Rapporteur spécial contre la torture, qui font état de la pratique routinière et systématique de torture et de mauvais traitements à l'encontre de suspects en détention préventive, dans le but d'obtenir des aveux. Il déplore, notamment, la durée excessive de la détention préventive, l'absence d'un enregistrement systématique des détenus, un accès limité des prisonniers à un avocat et à un médecin et un déni de leur droit à contacter leurs familles. Il enjoint l'Indonésie à prendre des mesures immédiates et urgentes afin de prévenir les actes de torture et les mauvais traitements dans tout le pays et à annoncer la mise en œuvre d'une politique de tolérance zéro à l'égard de telles pratiques commises par des agents de l'État. Tout en prenant acte de l'intention de l'État partie de relever l'âge de responsabilité pénale à 12 ans, le Comité recommande que l'Indonésie se conforme de toute urgence aux normes internationales en vigueur dans ce domaine. Le Comité exprime encore sa préoccupation à l'égard de l'incitation à la violence contre des personnes appartenant à des minorités, notamment à des minorités religieuses comme l'Ahmadiyah. Il rappelle que l'État partie est responsable de la protection des membres de ces groupes et devait s'assurer que les auteurs de violence et d'abus à leur égard soient punis.

Le Comité se dit profondément préoccupé par les informations faisant état d'un usage de la force disproportionné et de traitements cruels, inhumains et dégradants par les forces de police, l'armée et des groupes paramilitaires durant des opérations menées notamment en Papouasie, à Aceh et dans d'autres provinces touchées par des conflits armés. Relevant que ces actes font rarement l'objet d'enquêtes et de poursuites, le Comité invite l'Indonésie à s'assurer que toutes les allégations de torture et de mauvais traitement fassent sans délai l'objet d'enquêtes impartiales et que les responsables soient poursuivis et punis conformément à la gravité de leurs actes, comme l'exige la Convention. Le Comité fait aussi mention de l'absence de coopération de l'Indonésie en matière de justice internationale, notamment s'agissant de la poursuite des auteurs de violations systématiques des droits de l'homme perpétrées au Timor oriental en 1999. Le Comité exprime, en outre, son inquiétude de ce que certains règlements locaux, comme à Aceh, prévoient des châtiments corporels pour des délits nouvellement définis et que ces mesures soient mises en œuvre par une «police de la morale» dont la subordination et le contrôle par une institution étatique publique est mal définie. Le Comité se dit préoccupé par les allégations faisant état d'une incidence élevée de viols perpétrés par le personnel militaire et par la définition restrictive de ce délit dans le Code pénal indonésien. Il demande par ailleurs que toutes les mesures nécessaires soient prises pour éradiquer la pratique persistante et généralisée des mutilations génitales féminines et pour lutter contre la violence domestique. Tout en prenant acte de l'adoption en 2007 d'une loi sur le trafic d'êtres humains, le Comité relève le faible nombre d'enquêtes menées par rapport au nombre important de victimes de la traite estimé par l'Indonésie et demande que des enquêtes rapides, impartiales et efficaces soient menées et que les responsables de trafic d'êtres humains soient traduits en justice. Se référant à des allégations corroborées par les observations du Rapporteur spécial sur l'indépendance des juges et des avocats, le Comité exprime également son inquiétude par rapport à la corruption, aux collusions et au népotisme prévalant dans le système judiciaire et recommande à l'Indonésie de s'attacher à renforcer l'indépendance du système judiciaire dans le cadre de sa transition vers la démocratie.

Pour ce qui est de l'ex-République yougoslave de Macédoine, qui présentait également son deuxième rapport, le Comité se félicite de l'incorporation dans la législation de ce pays du crime de la torture. Il se réjouit également de l'adoption d'un plan d'action visant à mettre en œuvre les recommandations faites par le Comité européen de la prévention de la torture, suite à sa visite de 2004 dans le pays. Le Comité accueille, par ailleurs avec satisfaction la mise en œuvre d'une stratégie nationale de lutte contre la violence domestique, de même que l'introduction dans la loi d'une clause séparée pour le délit de trafic d'êtres humains. L'ex-République yougoslave de Macédoine a ratifié le Statut de Rome de la Cour pénale internationale en mars 2002, ce dont le Comité se réjouit, tout en regrettant que des accords bilatéraux conclus avec d'autres états parties à la Convention pays pour empêcher que des citoyens de ces pays ne soient extradés vers la Cour pénale pour des crimes qui incluent la torture. Le Comité est également préoccupé par l'inclusion dans la loi d'amnistie adoptée en 2002, des «actes criminels liés au conflit de 2001», estimant que cela peut créer les conditions favorables à l'impunité pour des violations graves des droits de l'homme qui comprennent des violations de la Convention. Il rappelle à cet égard à l'État partie que les mesures d'amnistie qui empêchent la poursuite des auteurs de torture ou autre mauvais traitements violent le principe de non-dérogeabilité. Le Comité, tout en prenant acte des efforts faits pour renforcer l'indépendance de l'Office des poursuites, attire l'attention sur les dysfonctionnements de cette institution lorsqu'il s'agit d'enquêter sans délai sur des allégations de torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il souligne, par ailleurs, la nécessité pour le pays de mettre en place un mécanisme indépendant et impartial d'enquête à l'égard des allégations de violences commises par la police et suggère d'élargir dans ce sens les compétences de l'ombudsman. Le Comité met aussi en évidence le fait que des peines très faibles ont été imposées aux personnes jugées coupables de délits de torture ou mauvais traitement dans l'exercice de leur fonction et recommande que des peines appropriées soient prononcées à l'encontre des auteurs de crimes incluant les traitements cruels, inhumains ou dégradants, afin de prévenir la torture.

Le Comité note les efforts accomplis par l'ex-République yougoslave de Macédoine pour former la police et le personnel des prisons en matière de prévention de la torture. Il recommande néanmoins que ces formations soient assurées de manière plus régulière, qu'elles comprennent des modules spécifiques à l'intention des médecins, et qu'elles portent aussi sur le traitement différencié à l'égard des femmes lors des arrestations et de la détention. Le Comité prend acte des diverses mesures qui ont été prises pour prévenir la violence domestique mais exprime sa préoccupation à l'égard de la persistance de cette violence et du nombre peu élevé d'enquêtes et de poursuites portant sur des actes de violence domestique. Le Comité observe, par ailleurs, que l'exploitation sexuelles des femmes et des jeunes filles demeure un problème aigu en ex-République yougoslave de Macédoine et enjoint le pays à poursuivre et punir les responsables du trafic humain, à améliorer ses services de réhabilitation des victimes et à mettre en place des formations sur les causes et les conséquences du trafic humain à l'intention des forces de l'ordre et de la police des frontières. Se référant au cas de M. Khald El-Masri, le Comité souligne qu'il partage les préoccupations exprimées par divers organes internationaux s'agissant des circonstances peu claires entourant l'arrestation, la détention et le transfert de cette personne vers un pays tiers.

En ce qui concerne le deuxième rapport périodique de la Zambie, le Comité se réjouit du dialogue ouvert et sincère avec la délégation de haut-niveau de ce pays et de la reconnaissance par la Zambie des difficultés rencontrées dans l'application de la Convention. Il se félicite de la ratification par la Zambie du Statut de Rome de la Cour pénale internationale, de même que de la ratification du Protocole pour prévenir, supprimer et punir le trafic de personnes, en particulier des femmes et des enfants. Le Comité prend également acte avec satisfaction de diverses mesures législatives visant à abolir les châtiments corporels, d'un amendement de la Loi sur les prisons qui prévoit notamment le droit pour les détenus de bénéficier d'un service de santé et la possibilité d'une libération conditionnelle et de l'élaboration de lignes directrices établissant des normes de procédure pour les interrogatoires de suspects et le traitement des personnes en détention provisoire. Le Comité recommande de nouveau que la Zambie incorpore dans sa Constitution et dans d'autres lois le principe d'interdiction absolue de la torture, quelles que soit les circonstances. Il se réjouit d'apprendre que la Commission nationale des droits de l'homme ait la possibilité de visiter des prisons et des cellules de police, mais s'inquiète du manque de ressources dont elle dispose et de son manque de pouvoir puisqu'elle est uniquement habilitée à formuler des recommandations et qu'elle ne peut recevoir de plaintes. S'agissant de la procédure de poursuite, le Comité réitère à la Zambie sa recommandation faite il y a sept ans, à savoir que ce pays mette en place un mécanisme de plaintes indépendant pour les victimes d'actes de torture. Le Comité a aussi regretté l'absence de poursuites à l'encontre d'auteurs de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, de même que l'absence de sanctions appropriées.

Le Comité observe avec inquiétude qu'il n'y a pas de règle formelle garantissant aux détenus l'accès à un avocat, à un médecin et le droit de contacter sa famille. Tout en accueillant avec satisfaction l'engagement de la Zambie à améliorer les conditions de détention, le Comité réitère l'expression de sa grave préoccupation s'agissant de la surpopulation carcérale manifeste, des conditions physiques déplorables des prisonniers et de leur manque de soin et d'alimentation et demande à la Zambie de prendre des mesures urgentes pour mettre ses centres de détention en conformité avec les normes minimales pour le traitement des prisonniers requises par les Nations Unies. Il demande aussi que la Zambie abolisse immédiatement la pratique de la privation alimentaire utilisée comme punition et procède à une séparation systématique des détenus hommes, femmes et enfants. Notant, de manière générale, que la plupart des personnes vivant en Zambie ne sont pas conscientes de leurs droits, le Comité recommande à ce pays d'entreprendre des campagnes d'information pour remédier à cette situation. S'agissant de la violence contre les femmes, le Comité, tout en prenant acte que la réforme du Code pénal devra permettre de mieux prévenir et lutter contre la violence fondées sur le genre, constate avec préoccupation que les violences contre les femmes sont chose courante, en particulier les violences sexuelles et les violences au sein de la famille. Le Comité se préoccupe également du clivage existant dans ce domaine entre le droit coutumier et le droit statutaire. S'agissant enfin du principe de non-refoulement, le Comité prend acte avec satisfaction de la coopération de la Zambie avec le Haut-Commissariat pour les réfugiés et de son intention de remplacer l'actuel Acte de contrôle des réfugiés par une nouvelle loi sur les réfugiés. Il recommande à cet égard que la Zambie s'assure que la nouvelle législation sera conforme aux dispositions de la Convention s'agissant de la protection des personnes contre l'expulsion vers des pays où elles courent le risque d'être torturées.

Dans ses conclusions et recommandations faisant suite à l'examen du deuxième rapport périodique de l'Islande, le Comité contre la torture salue les efforts incessants de ce pays pour se conformer à ses obligations au titre de la Convention et éliminer tout acte et conduite contraires à ses dispositions. Il s'est félicité, en particulier, des nouvelles règlementations édictées par l'Islande en relation avec l'application des peines et la formation des gardiens de prison. Il a aussi salué la ratification par l'État partie de la Convention du Conseil de l'Europe contre le trafic d'êtres humains et l'introduction dans son code pénal de dispositions visant à punir ce délit. L'Islande a aussi amendé sa législation afin de répondre de manière plus adéquate à la violence contre les femmes, en particulier la violence domestique. Le Comité a pris acte avec satisfaction de ce qu'aucune plainte pour acte de torture n'avait été déposée dans ce pays. Le Comité réitère toutefois la recommandation déjà transmise dans le cadre de l'examen des rapports précédents, à savoir que l'Islande incorpore la définition de la torture dans sa législation en vertu de l'article 1 de la Convention. Il recommande aussi au pays d'amender son code pénal afin que les preuves qui seraient obtenues par la torture soient explicitement exclues des procédures judiciaires.

Au nombre des sujets de préoccupation du Comité, celui-ci mentionne le fait qu'il n'existe pas de suivi et de contrôle véritablement indépendant des centres de détention et des institutions psychiatriques, bien que l'ombudsman parlementaire soit habilité à inspecter les prisons et les infrastructures psychiatriques lorsqu'il le juge nécessaire. Il recommande à cet égard que les compétences de l'ombudsman soit élargies et qu'un mécanisme de contrôle indépendant soit mis en place. S'agissant des conditions de détention, le Comité insiste sur la nécessité de placer les détenus mineurs dans des établissements distincts et séparés des adultes. Le Comité est aussi préoccupé face à ce qu'il considère comme un usage excessif de l'isolement cellulaire. En ce qui concerne le principe de non-refoulement et le droit d'asile, le Comité relève que seules deux demandes d'asile ont abouti au cours de ces vingt dernières années et que l'État partie est réticent à augmenter son quota de permis de séjours humanitaires. Le Comité a par ailleurs exprimé sa préoccupation en regard d'allégations faisant état de brutalités policières et de conduites inappropriées aux postes frontières et recommandé que tous les agents des forces de l'ordre, de même que les garde-côtes, reçoivent une formation en matière de droits de l'homme. Il a aussi invité l'Islande à soumettre à une formation les soldats de la paix et le personnel affecté à des missions supervisées par les Nations Unies, l'Union européenne ou l'OTAN.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

CAT08020F