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LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE ACHÈVE SA PREMIÈRE SESSION DE 2008

Communiqué de presse
Il présente ses observations finales sur les rapports des Fidji, de l'Italie, des États-Unis, de la Belgique, du Nicaragua, de Moldova et de la République dominicaine

Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a clos, aujourd'hui à Genève, les travaux de sa soixante-douzième session en rendant publiques ses observations finales concernant les États parties à la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale dont les rapports ont été examinés au cours de cette session: Fidji, Italie, États-Unis, Belgique, Nicaragua, Moldova et République dominicaine.

Le Comité a aussi décidé d'envoyer une liste écrite de questions au Gouvernement de la Gambie, au titre de sa procédure de bilan applicable aux pays dont la présentation des rapports accuse un important retard. Il a par ailleurs accepté les demandes de délai supplémentaire formulées par les Émirats arabes unis, Monaco et le Panama pour la présentation de leurs rapports respectifs.

Au cours de cette session, le Comité a tenu un dialogue avec le Coordinateur de l’Unité des peuples autochtones et des minorités du Haut Commissariat aux droits de l'homme, M. Julian Burger, au sujet de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones adoptée le 13 septembre dernier par l'Assemblée générale. Le Comité s'est aussi entretenu avec M. Gianni Magazzeni, Coordonnateur de l'Unité en charge des institutions nationales au sein du Haut Commissariat aux droits de l'homme. Le Comité a également eu un échange de vues avec un représentant de l’Organisation internationale du travail au sujet des moyens mis en œuvre pour lutter contre la discrimination sur le lieu de travail et assurer le respect des droits des peuples autochtones.

Le Comité a par ailleurs organisé, dans le contexte des travaux du Groupe de travail intergouvernemental sur l'application effective de la Déclaration et du Programme d'action de Durban, un dialogue sur la mise en œuvre de la Convention et les possibilités d'améliorer son efficacité. Il a également été saisi du rapport du président du Groupe de travail du Comité sur les mesures d'alerte rapide et la procédure d'action urgente.

Le Comité a enfin décidé que sa Présidente écrirait aux Gouvernements du Belize, des Philippines, du Brésil, du Chili, du Pérou, de l'Éthiopie et de la Chine, au sujet d'un certain nombre de questions relatives à l'application de la Convention.

En début de session, le Comité a élu Mme Fatimata-Binta Victoire Dah à sa présidence. Les autres membres du Bureau nommés pour deux ans sont : M. Alexei S. Avtonomov, M. José Francisco Cali Tzay et M. Anwar Kemal, Vice-Présidents, et M. Linos-Alexandre Sicilianos, Rapporteur.

Lors de sa prochaine session, qui se tiendra à Genève du 28 juillet au 15 août 2008, le Comité doit examiner les rapports de l'Équateur, de la Suisse, de la Suède, de l'Allemagne, de l'Autriche, du Togo, de la Namibie et de la Fédération de Russie. Le Comité tiendra en outre un débat sur les mesures spéciales.


Observations finales

Le Comité a adopté des observations finales concernant les sept États parties à la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale dont les rapports ont été examinés au cours de cette session: Fidji, Italie, États-Unis, Belgique, Nicaragua, Moldova et République dominicaine.

Dans ses observations finales sur les Fidji, le Comité se félicite de l'intention déclarée de ce pays de faire la déclaration prévue à l'article 14 de la Convention (reconnaissant la compétence du Comité pour examiner des communications ou plaintes émanant de particuliers). Le Comité note en outre avec satisfaction l'adoption de la loi sur l'immigration de 2003 et l'abrogation de l'article 8 (1) g de la loi, qui a marqué une amélioration substantielle de la législation sur l'immigration. Il se félicite que les Fidji se soient engagées à œuvrer pour la réconciliation entre les communautés du pays et salue la ratification par le pays des conventions de l'Organisation internationale du travail n°111 sur la discrimination dans l'emploi et la profession et n°169 sur les peuples indigènes et tribaux. Le Comité réitère toutefois sa préoccupation que le pays ait décidé de maintenir ses réserves et déclarations à l'égard de la Convention, lesquelles peuvent gravement affecter la mise en œuvre de cet instrument, en particulier à la lumière de l'évolution récente du droit international concernant la protection des droits des autochtones. Tout en notant les assurances données par la délégation quant à l'indépendance de la Commission fidjienne des droits de l'homme, le Comité se dit préoccupé par les risques que cette Commission puisse ne plus satisfaire pleinement aux critères énoncés dans les Principes de Paris.

Le Comité recommande que les Fidji mènent une réflexion sur la façon dont le concept de «Fidjiens autochtones» se rattache à la définition des peuples autochtones en droit international, en particulier s'agissant de la Convention 169 de l'OIT et de la Déclaration de 2007 sur les droits des peuples autochtones. Par ailleurs, les Fidji sont invitées à expliquer comment le concept de «Fidjiens autochtones» a été appliqué en droit et en pratique et à rendre compte de son impact sur la jouissance des droits de l'homme par tous les Fidjiens. Dans ce contexte, le Comité reste préoccupé par le fait que le besoin de mesures spéciales, dans des secteurs tels que l'éducation et l'emploi, pourrait ne pas être fondé sur une évaluation réaliste de la situation actuelle des différentes communautés. Les Fidji sont donc encouragées à s'engager dans un exercice de collecte de données afin d'assurer la conception et la mise en œuvre de mesures spéciales sur la base des besoins, ainsi que le contrôle et l'évaluation réguliers de la mise en œuvre de ces mesures. Le Comité réitère également la nécessité de veiller à ce que les mesures spéciales adoptées ne conduisent en aucun cas au maintien de droits inégaux ou distincts pour différents groupes ethniques. Le Comité reste préoccupé par le faible taux de représentation des Indo-Fidjiens dans les forces militaires et de police et dans l'administration publique en général. En outre, il reste préoccupé par l'opposition des Fidji à l'interdiction des organisations racistes et par l'absence de dispositions législatives prévoyant que la commission de délits à motivation raciale constitue une circonstance aggravante. Il est regrettable que les Fidji n'aient pas été en mesure de fournir des données concernant la composition ethnique de la population carcérale. Le Comité regrette aussi de n'avoir pas reçu suffisamment d'informations concernant la nature de la relation entre les communautés autochtones et leurs terres ou encore l'étendue géographique de l'application des lois coutumières. À cet égard, il reste préoccupé par le fait que l'état actuel de la distribution des terres aux Fidji entrave le développement économique des collectivités non autochtones, en particulier les Indo-Fidjiens.

Après avoir examiné le rapport périodique de l'Italie, le Comité se félicite de l'adoption du décret législatif du 9 juillet 2003 qui transpose la directive du Conseil européen consacrant le principe de l'égalité de traitement de toutes les personnes, indépendamment de leur race ou origine ethnique. Le Comité se félicite également de la convocation d'une Conférence européenne sur les Roms en janvier 2008, à Rome, afin d'identifier des solutions aux problèmes rencontrés par les Roms, ainsi que de la signature en juin 2005 d'un mémorandum d'accord pour la protection des mineurs «gitans, nomades et camminanti», entre l'Association pour les nomades et le Ministère de l'Éducation. Le Comité salue en outre l'entrée en vigueur, en janvier 2008, d'un décret accordant aux immigrés une meilleure protection contre les mesures d'expulsion, ainsi que la création du Bureau national pour l'élimination de la discrimination raciale et l'adoption du décret-loi prévoyant de nouvelles mesures pour prévenir et sanctionner les actes de violence à motivation raciale au cours de manifestations sportives - y compris la mise en place d'un Observatoire national sur les événements sportifs. Tout en prenant note des assurances de l'Italie selon lesquelles le pays envisage la reconnaissance des Roms et des Sintis en tant que minorités dans le droit national, sur un pied d'égalité avec les minorités linguistiques historiques protégées par la loi, le Comité se dit préoccupé par l'absence de législation et de politiques nationales face à la spécificité et aux besoins des Roms et des Sintis. Tout en se félicitant de la nouvelle politique de lutte contre la marginalisation des Roms et des Sintis, qui vise à faciliter leur insertion sociale, le Comité est préoccupé par le fait que les membres de ces deux communautés vivent encore dans des conditions de ségrégation de facto dans des campements où ils n'ont pas accès aux installations les plus élémentaires. Il est en outre préoccupé par les cas rapportés de discours de haine, y compris des déclarations ciblant des ressortissants étrangers et des Roms, attribués à des hommes politiques.

Le Comité recommande notamment à l'Italie de renforcer ses efforts visant à prévenir les infractions à caractère raciste et haineux et de faire en sorte que les dispositions pénales soient effectivement mises en œuvre. L'Italie devrait également prendre des mesures pour empêcher l'utilisation illégale de la force par la police contre les Roms; les autorités locales devraient prendre des mesures plus déterminées pour prévenir et punir les actes de violence à motivation raciale à leur égard et à l'égard des personnes d'origine étrangère. Préoccupé par le fait que les médias ont continué à jouer un rôle dans la représentation d'une image négative des Roms et des Sintis, le Comité recommande à l'Italie d'encourager les médias à jouer un rôle actif dans la lutte contre les préjugés et les stéréotypes négatifs qui ont conduit à la discrimination raciale. Il demande en outre à l'Italie d'adopter rapidement le code de conduite des journalistes. D'autres préoccupations exprimées par le Comité portent sur la situation des travailleurs migrants sans papiers, en particulier en provenance d'Afrique, d'Europe orientale et d'Asie, et sur les informations relatives à des violations de leurs droits de l'homme - y compris des allégations de mauvais traitements, les bas salaires payés avec un retard considérable, la durée excessive de travail et les situations de «servitude», notamment la rétention du salaire par les employeurs comme moyen de paiement de l'hébergement dans des logements surpeuplés, sans électricité ni eau courante. Le Comité est également préoccupé par les allégations selon lesquelles des étrangers dans le centre de rétention et d'assistance de Lampedusa n'ont pas été correctement informés de leurs droits, n'ont pas accès à un avocat et font face à l'expulsion collective. L'Italie est encouragée à améliorer les conditions de séjour de ces centres d'accueil et des centres d'identification.

Dans ses observations finales sur les États-Unis, le Comité se félicite de la reconnaissance par ce pays de son caractère multiracial, multiethnique et multiculturel. Il relève avec satisfaction les actions menées par les départements et agences du Gouvernement fédéral, notamment la division des droits civils du Département de la justice, la Commission de l'égalité des chances en matière d'emploi et le Département du logement et du développement urbain. Le Comité se félicite aussi de la reconduction de deux lois sur la violence contre les femmes et sur le droit de vote, en 2005 et 2006 respectivement. De même, il se réjouit du lancement en 2007 d'une initiative visant à l'éradication du racisme dans le contexte professionnel. Un autre motif de satisfaction du Comité réside dans le lancement d'un partenariat national pour l'éradication des disparités de santé au détriment des minorités raciales et ethniques. Le Comité se réjouit en outre des dispositions d'une loi californienne enjoignant aux municipalités d'intégrer à leurs plans d'urbanisme des mesures tendant à répondre aux besoins en logement des personnes à faible revenu appartenant à des minorités raciales, ethniques et nationales.

Cependant, le Comité exprime sa préoccupation face à la persistance d'une ségrégation raciale de fait dans les écoles publiques des États-Unis. À cet égard, il relève que, dans deux décisions récentes, la Cour suprême de ce pays est revenue sur les acquis de l'important arrêt Brown v. Board of Education de 1954, en limitant la capacité des autorités locales à promouvoir l'intégration scolaire par l'interdiction de certaines mesures d'intégration tenant compte de l'appartenance raciale de leurs bénéficiaires. Le Comité recommande que les États Unis s'efforcent d'identifier les causes profondes de la ségrégation scolaire de fait et adoptent des stratégies de déségrégation et d'accès égalitaire à l'école. Le Comité recommande en outre que les États-Unis prennent toutes les mesures nécessaires - notamment de nature législative - pour rendre aux écoles la possibilité de promouvoir l'intégration scolaire en appliquant des mesures ciblées respectueuses des dispositions de la Convention. D'autre part, le Comité s'inquiète des disparités raciales persistantes dans le système de justice pénale des États-Unis, en particulier du nombre anormalement élevé de personnes appartenant à des minorités raciales, ethniques et nationales au sein de la population carcérale. Cette situation serait imputable au traitement plus sévère réservé aux justiciables appartenant à ces minorités, surtout les personnes afro-américaines, dans le déroulement des procédures pénales. Compte tenu de sa recommandation générale n° 31, selon laquelle les disparités raciales marquées constatées dans l'administration et le fonctionnement de la justice peuvent être considérées comme des indicateurs objectifs de la discrimination raciale, le Comité recommande que les États-Unis prennent toutes les mesures appropriées pour garantir le droit de chacun à un traitement égal devant les tribunaux, mesures comprenant notamment des études sur la nature et la portée du problème ainsi que l'application de stratégies nationales pour l'élimination de la discrimination raciale structurelle. Le Comité relève encore avec préoccupation que, selon des informations en sa possession, un nombre anormalement élevé de personnes emprisonnées à vie sans possibilité de remise de peine sont des jeunes, voire des enfants, appartenant à des minorités raciales, ethniques et nationales. Le Comité considère que la persistance de cette situation est incompatible avec l'article 5 de la Convention. Il recommande aux États-Unis de ne plus condamner de personnes âgées de moins de dix-huit ans à des peines d'emprisonnement à vie sans possibilité de remise de peine et de réexaminer la situation des personnes purgeant actuellement de telles peines.

S'agissant de la Belgique, le Comité prend note avec satisfaction de l'adoption de la loi du 10 mai 2007, modifiant la loi de 1981 sur la répression des actes de racisme et de xénophobie. Il exprime sa satisfaction face au travail effectué par le Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme, en particulier pour ce qui est de la poursuite devant les tribunaux de cas de discrimination raciale. Le Comité prend note avec satisfaction de la mise en œuvre, en 2004, d'un plan d'action fédéral de lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la violence xénophobe, ainsi que de la mise en place d'une unité spéciale chargée de traquer les messages racistes sur l'Internet. Il félicite en outre la Belgique pour son rôle actif à l'égard de la Conférence de Durban et de son suivi et se félicite des politiques adoptées pour améliorer l'insertion des migrants dans le marché du travail et dans la société.

Le Comité reste cependant préoccupé par la persistance de discours de haine en Belgique. Tout en notant que le parti du «Vlaams Blok», une organisation promouvant le racisme et la propagande discriminatoire, avait été dissous en 2004, après un long procès pour délits racistes, et que le parti "Vlaams Belang", son successeur, est soumis à une procédure judiciaire devant le Conseil d'État depuis mai 2006, le Comité s'inquiète de ce que la Belgique n'a pas pris de mesures législatives particulières pour la mise en oeuvre des dispositions de la Convention visant à déclarer illégales et à interdire les organisations qui incitent à la discrimination raciale. Le Comité est également préoccupé par le faible nombre de procédures pénales pour infractions racistes et par le grand nombre de plaintes retirées, surtout en ce qui concerne des actes de violence raciale, de haine et de discrimination commis par des membres des forces de police. Le Comité recommande à la Belgique de fournir, dans son prochain rapport périodique, des informations détaillées sur les enquêtes, les poursuites et les condamnations relatives à des infractions à motivation raciale. La Belgique devrait en outre renforcer ses campagnes d'information et ses programmes d'éducation au sujet de la Convention. De même, le Comité recommande que le pays prenne des dispositions pour renforcer ses activités de formation en matière de lutte contre la discrimination à l'attention des personnels de la police et du système de justice pénale. Le Comité est d'autre part préoccupé par les conclusions d'une étude de l'Institut national des statistiques pénales et de criminologie, montrant que le système judiciaire est plus sévère avec les étrangers qu'avec les Belges. Il est également préoccupé par le fait que les minorités ethniques sont souvent surreprésentées dans les logements sociaux en milieu urbain - jusqu'à représenter 90% des occupants de ces logements dans certains cas - ce qui a abouti à une ségrégation de facto dans certains quartiers des grandes villes. La Belgique devrait adopter des mesures efficaces pour prévenir la ségrégation de facto et remédier aux causes de ce phénomène. De même, le Comité est préoccupé par le décret adopté en 2006 par la communauté flamande restreignant l'accès aux logements sociaux aux seules personnes ayant pris l'engagement d'apprendre le néerlandais, ce décret ayant par ailleurs été approuvé par le Conseil d'État. La Belgique devrait veiller à ce que les exigences linguistiques ne conduisent pas à une discrimination indirecte exercée en raison de l'origine nationale ou ethnique. Le Comité se dit aussi préoccupé par un jugement récent de la Cour européenne des droits de l'homme qui a constaté que la Belgique avait violé la Convention européenne des droits de l'homme au motif du traitement inhumain et dégradant de demandeurs d'asile. Le Comité est enfin préoccupé par l'exercice effectif des droits sociaux, économiques et culturels des Roms et des gens du voyage en Belgique. Aussi, le Comité recommande-t-il que la Belgique renforce les mesures prises pour améliorer la scolarisation des enfants roms ainsi que les possibilités d'emploi pour les Roms et les gens du voyage.

Suite à l'examen du rapport du Nicaragua, le Comité a adopté des observations finales dans lesquelles il se dit conscient des difficultés sociales et économiques rencontrées par ce pays depuis plus de vingt ans, du fait de conflits internes et de catastrophes naturelles qui compliquent l'application effective des dispositions de la Convention. Le Comité se félicite de l'adoption par le Nicaragua de mesures destinées à protéger les droits des peuples autochtones, s'agissant en particulier des lois sur l'environnement et les ressources naturelles, sur l'emploi officiel des langues des communautés de la côte atlantique et sur le régime de propriété commune des peuples autochtones et des communautés ethniques de certaines régions du pays. De même, le Comité se félicite de l'adoption, en novembre 2007, du nouveau Code pénal nicaraguayen, qui contient une définition de la discrimination raciale, ainsi que de l'entrée en vigueur, en 2006, d'une loi instituant un système éducatif régional autonome. Le Comité se félicite d'autre part de la création d'un bureau du procureur spécial chargé de la défense des droits des peuples autochtones et des communautés ethniques. Enfin, il note avec satisfaction que le Nicaragua a ratifié la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et de leur famille.

Le Comité recommande néanmoins que le Nicaragua poursuive ses efforts méthodologiques visant à mieux rendre compte de la complexité ethnique de la société nicaraguayenne. Par ailleurs, s'il prend bonne note de l'existence de lois protégeant les droits des peuples autochtones, le Comité est préoccupé par le fait que les peuples autochtones des régions du centre, du nord et du Pacifique ne bénéficient pas encore d'une loi reconnaissant et garantissant leurs droits. Il recommande que le Gouvernement assure la pleine participation des peuples autochtones et des communautés d'origine africaine à tous les niveaux de la vie politique nationale. Tout en se félicitant de l'institution d'un "Comité interinstitutions des droits de l'homme", composé de représentants du Gouvernement et de la société civile, le Comité déplore que cet organe ne fonctionne pas de manière efficace dans la pratique et recommande donc que le pays prenne les mesures nécessaires pour que cet organe soit officiellement reconnu en tant que responsable du développement et de la mise en œuvre d'une politique nationale de lutte contre le racisme et soit doté des moyens techniques et financiers nécessaires à son bon fonctionnement. Au nombre de ses recommandations, le Comité demande au Nicaragua d'adopter les mesures nécessaires à la lutte contre les préjugés racistes entraînant une discrimination de la part des médias, privés et publics, en particulier à l'encontre des peuples autochtones et des communautés d'origine africaine. Dans le domaine de l'information toujours, le Comité recommande que les autorités promeuvent la compréhension, la tolérance et l'amitié entre les groupes raciaux cohabitant au Nicaragua, en encourageant, entre autres, l'adoption d'un code déontologique engageant les médias à respecter la culture et l'identité des peuples autochtones et des communautés d'origine africaine. Le Comité recommande enfin qu'une attention particulière soit accordée à la protection des femmes appartenant à ces deux groupes, compte tenu de la double discrimination dont elles sont ainsi victimes.

À l'issue de l'examen du rapport du Moldova, le Comité relève que la région de Transnistrie se trouve toujours hors du contrôle effectif des autorités de Moldova, ce qui empêche ces dernières de veiller, dans cette région, à l'application de la Convention. Le Comité se félicite par ailleurs de l'adoption par le Moldova d'une loi sur les réfugiés en 2002 ainsi que des règlements basés sur cette loi concernant l'octroi d'une aide matérielle aux personnes réfugiées. Un autre motif de satisfaction réside, selon le Comité, dans l'introduction d'un programme national d'action en matière d'asile et de migration destiné à atténuer les effets de l'immigration illégale et à renforcer le système national d'asile. Le Comité se réjouit également que le Plan d'action national dans le domaine des droits de l'homme (2004-2008) contienne un chapitre sur les droits des minorités nationales. Il se félicite aussi de l'introduction d'un enseignement scolaire sur la Shoah et sur les causes du génocide des Juifs et des Roms. Par ailleurs, le Comité se félicite d'initiatives législatives récentes visant à aligner la loi nationale sur le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, en préparation d'une ratification dudit Statut par le pays.

Observant toutefois avec préoccupation que le Moldova ne dispose pas de loi générale sur la prévention de la discrimination et la lutte contre ce phénomène, le Comité recommande l'adoption d'une législation complète à cet égard qui protègerait non seulement les citoyens mais aussi, dans la mesure du possible, les non-citoyens. La législation devrait, d'autre part, inclure une définition de la discrimination directe et indirecte, prévoir des sanctions et la possibilité d'octroyer un dédommagement, ainsi qu'un aménagement du régime du fardeau de la preuve dans les procédures civiles. Le Comité recommande en outre que le Moldova alloue les ressources nécessaires au fonctionnement du Bureau des relations interethniques et au renforcement du Conseil de coordination des organisations ethniques et culturelles. Par ailleurs, tout en prenant acte du fait que le Plan d'action 2007-2010 en faveur des Roms prévoit des mesures spéciales dans les domaines de l'emploi, des soins de santé et de la protection des enfants, le Comité se déclare préoccupé par l'incapacité du Bureau des relations interethniques à préparer des plans d'application annuels. Il recommande que les organisations de Roms, en particulier, puissent participer de manière efficace au contrôle et à l'application du Plan. Le Comité relève par ailleurs avec inquiétude que les organisations publiques et religieuses et les médias se livrant à l'incitation à la haine raciale, nationale ou religieuse ne sont, en pratique, pas mis hors la loi. Il recommande que les dispositions de la loi sur la lutte contre les activités extrémistes soient appliquées conformément à l'article 4 de la Convention. Le Comité rappelle que l'absence de plaintes de la part des victimes de discrimination raciale renvoie généralement soit à un manque de connaissance des voies de recours existantes, soit à une absence de volonté politique d'engager les poursuites nécessaires. À cet égard, le Comité recommande que le Moldova introduise des programmes de formation obligatoire des forces de police et du personnel judiciaire justice à l'application des lois sanctionnant les incitations à la haine et à la discrimination raciales.

S'agissant de la République dominicaine, le Comité relève les conséquences pour ce pays de la crise humanitaire qui sévit en Haïti, lesquelles se traduisent notamment par une forte immigration. Il note avec satisfaction que la République dominicaine a ratifié la Convention sans émettre aucune réserve. Le Comité note également avec satisfaction l'inscription au Code du travail d'un article concernant la lutte contre la discrimination. Il indique en outre apprécier les informations reçues de la délégation dominicaine concernant le projet de nouveau Code pénal actuellement à l'étude intégrant les dispositions de la Convention.

Le Comité relève cependant avec préoccupation que le rapport de la République dominicaine, décrivant la composition démographique du pays, utilise les expressions de "caractéristiques génétiques" et de "pureté raciale" de différents groupes ethniques, ce qui risque de mener à une interprétation erronée des politiques du pays. Le Comité rejette par ailleurs la déclaration de la délégation selon laquelle il n'existe pas de discrimination raciale de la part des autorités dominicaines; il fait observer qu'aucun gouvernement ne peut connaître la manière dont chacun de ses fonctionnaires s'acquitte de ses fonctions. Le Comité rappelle à cet égard que les autorités sont tenues, par la Convention, d'interdire et de faire cesser, par tous les moyens appropriés, et notamment par la loi, toute manifestation de discrimination raciale. Le Comité recommande par conséquent l'adoption de lois interdisant la discrimination fondée sur la race, la couleur, l'ascendance ou les origines ethnique ou nationale. D'autre part, le Comité s'inquiète d'informations reçues faisant état de mises en détention et de déportations collectives de migrants haïtiens hors de toute procédure régulière. Il recommande à la République dominicaine de veiller à ce que les lois sur le rapatriement ou la déportation de non-ressortissants n'entraînent aucune discrimination sur la base de la race, de la couleur ou de l'origine. De même, les non-ressortissants ne devraient pas être soumis à des expulsions collectives. Le Comité recommande en outre que la République dominicaine s'en tienne, vis-à-vis des migrants privés de papiers d'identité, à des mesures humaines et acceptées au plan international. Enfin, le Comité souligne la relation entre l'enregistrement à la naissance et la jouissance par les enfants de leurs droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels. Il recommande donc que la République dominicaine garantisse l'octroi de certificats de naissance à tous les enfants nés dans le pays, comme l'y enjoint un arrêt de la Cour interaméricaine des droits de l'homme rendu en 2005.


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CRD08013F