Fil d'Ariane

Les droits de douane risquent de dévaster les économies les plus pauvres, selon la CNUCED

La CNUCED rappelle que le système commercial mondial, jusqu'ici « fondé sur des règles », a stimulé les échanges internationaux et contribué à une baisse progressive des droits de douane, une taxe que les pays prélèvent sur les marchandises importées.
Deux tiers du commerce en libre échange
En 2023, environ deux tiers du commerce mondial se sont effectués sans droits de douane.
En revanche, les hausses successives des droits de douane récemment annoncées par les États-Unis et la Chine suscitent des inquiétudes quant à l'impact de cette escalade des tensions commerciales sur les économies les plus pauvres et les plus vulnérables.
Dans un nouveau rapport, publié le 14 avril, la CNUCED demande avec insistance que les économies les plus pauvres et les plus vulnérables soient exemptées de droits de douane.
Cette demande fait suite à l'annonce récente par l'administration américaine de mesures tarifaires à l'encontre de 57 pays, dans le but de rectifier le déficit commercial des États-Unis avec ses partenaires internationaux. Face au tollé provoqué par ces mesures, la Maison Blanche a fait volte-face, la semaine dernière, en annonçant un moratoire de 90 jours sur les hausses de droits de douanes, qui allaient de 11 % pour le Cameroun à 50 % pour le Lesotho.
Ce revirement ne concernent cependant pas les produits chinois, toujours sous le coup des mesures tarifaires de Washington. En réponse, Pékin a augmenté ses droits de douanes contre les exportations américaines, dans ce qui s'apparente de plus en plus à une guerre commerciale.
Les économies les plus vulnérables en danger
28 des pays soumis à des droits de douane réciproques représentent chacun moins de 0,1 % des déficits commerciaux.
Le rapport constate que dans de nombreux cas l'imposition des droits de douane, que l'administration américaine qualifie de « réciproques », risquent de dévaster les économies les plus pauvres et les plus vulnérables, sans réduire de manière significative les déficits commerciaux des États-Unis ni augmenter les recettes fiscales du pays.
De l’Angola au Vanuatu, les 57 partenaires commerciaux concernés contribuent en effet de manière minime aux déficits commerciaux des États-Unis, note le rapport d’ONU commerce et développement.
Parmi eux, 11 sont considérés comme faisant partie des pays les moins avancés et 28 représentent chacun moins de 0,1 % des déficits.
Comme beaucoup de ces économies sont de petite taille et ont un faible pouvoir d'achat, elles offrent des opportunités de marché d'exportation limitées pour les États-Unis.
« Toute concession commerciale qu'elles accorderaient n'aurait que peu d'importance pour les États-Unis, tout en réduisant potentiellement leurs propres recettes fiscales », souligne le rapport de la CNUCED.
Un impact « minime » sur les États-Unis
Si les droits de douane dits « réciproques » sont à nouveau appliqués à l'issue du moratoire, la demande pour de nombreux produits importés devrait diminuer en raison de la hausse des prix.
Même si les niveaux d'importation des États-Unis restaient aux niveaux de 2024, les recettes tarifaires supplémentaires perçues auprès des économies plus pauvres seraient donc minimes.
Pour 36 des 57 partenaires commerciaux, les droits de douane réciproques généreraient moins de 1 % des recettes tarifaires actuelles des États-Unis.

Impact négatif potentiel
Le rapport note également que plusieurs pays confrontés à des droits de douane réciproques potentiels exportent des produits agricoles que les États-Unis ne produisent pas et pour lesquels il existe peu de substituts.
Il en va ainsi de la vanille de Madagascar ou du cacao de Côte d'Ivoire et du Ghana.
En 2024, les États-Unis ont importé de la vanille de Madagascar pour une valeur totale de 150 millions de dollars ; les importations de cacao de Côte d'Ivoire ont atteint près de 800 millions de dollars, tandis que les celles provenant du Ghana se sont élevées à 200 millions de dollars.
L'augmentation des droits de douane sur ces produits, malgré les possibilités d'augmenter les recettes, risque d'entraîner une hausse des prix pour les consommateurs américains.
Pour en savoir plus sur le rôle des droits de douane dans le commerce international, consultez l’édition de mars du Global Trade Update (Mise à jour sur le commerce mondial).