Fil d'Ariane

L’ONU « choquée » par la reprise des raids israéliens sur Gaza

« Le Secrétaire général de l’ONU lance un appel pressant pour que le cessez-le-feu soit respecté, que l’aide humanitaire soit rétablie sans entrave et que les otages restants soient libérés sans condition », a réagi son porte-parole adjoint, Farhan Haq, dans une déclaration à la presse.
Dans ce communiqué, António Guterres s’est dit « choqué par les frappes aériennes israéliennes à Gaza, au cours desquelles un nombre important de civils ont été tués ».
Du côté de l’Agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA), on relève des « scènes atroces de civils tués, dont des enfants, suite aux vagues de bombardements intensifs des forces israéliennes cette nuit ». « Alimenter [l’enfer sur terre] en reprenant la guerre ne fera qu’apporter plus de désespoir et de souffrance. Un retour au cessez-le-feu est indispensable », a fait valoir sur X, le chef de l’UNRWA, Philippe Lazzarini.
Faire cesser l’offensive israélienne
Le chef du Bureau des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA) s’est alarmé, mardi, des « terribles nouvelles » en provenance de Gaza. « Nos travailleurs humanitaires ont fait tout leur possible pour sauver le plus de vies possibles à Gaza. Immense souffrance des survivants. Et maintenant, ça. Toutes les personnes qui ont de l’influence doivent insister pour que cela cesse », a écrit Tom Fletcher sur X.
Il réagissait à une publication, plus tôt dans la matinée, de Muhannad Hadi, le Coordinateur humanitaire pour les territoires palestiniens occupés, condamnant les frappes israéliennes sur Gaza. « Des rapports initiaux et non confirmés disent que des centaines de personnes ont été tuées. C’est insensé. Un cessez-le-feu doit être rétabli immédiatement. Les habitants de Gaza ont enduré des souffrances inimaginables », a indiqué ce dernier dans un communiqué.
Ce « cauchemar » ne fera qu’ajouter « une tragédie à la tragédie »
Pour sa part, le chef des droits de l’homme de l’ONU, Volker Türk, s’est dit « horrifié » par les frappes aériennes et les bombardements israéliens de la nuit dernière à Gaza, qui ont fait des centaines de morts, et ajouté que « ce cauchemar doit cesser immédiatement ».
« Cela ne fera qu’ajouter une tragédie à la tragédie », a déploré dans un communiqué M. Türk, rappelant que les 18 derniers mois de violence ont montré très clairement qu’il n’y a pas de voie militaire pour sortir de cette crise. « Le recours d’Israël à une force militaire supplémentaire ne fera qu’accroître la misère d’une population palestinienne qui souffre déjà de conditions catastrophiques ».
« Le ministère de la santé indique qu’au moins 326 personnes ont été tuées dans la vague d’attaques israéliennes à Gaza », a aussi précisé lors d’un point de presse à Genève, Ajith Sunghay, qui dirige le Bureau des droits de l’homme de l’ONU pour le territoire palestinien occupé. Mais ce bilan provisoire pourrait augmenter car de nombreuses personnes se trouvent encore sous les décombres des bâtiments bombardés.
M. Türk appelle donc à la libération « immédiate et sans condition » des otages israéliens et de « toutes les personnes détenues arbitrairement ». « La guerre doit cesser définitivement. Nous demandons instamment à toutes les parties influentes de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour parvenir à la paix et éviter de nouvelles souffrances aux civils ».
Des centres de santé « littéralement débordés »
Alors que les agences humanitaires redoutent déjà les conséquences de cette nouvelle escalade, de « très nombreuses structures de santé » de l’enclave palestinienne « sont littéralement débordées » en raison de nouveaux bombardements israéliens, a fait savoir, la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR).
« Il y a bien sûr le fait que la situation se détériore avant même les récents développements. Même si l’arrivée de six semaines d’aide a été très positive, nous n’avons reçu aucune autre aide ni aucun autre médicament depuis le début du mois de mars. La situation est donc très compliquée », a affirmé Tommaso Della Longa.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a souligné la pénurie de médicaments dans le territoire palestinien. « Il y a un risque que les travailleurs de la santé ne puissent pas fournir de traitement pour différentes conditions médicales, pas seulement pour les blessures traumatiques », a détaillé le porte-parole de l’OMS, Tarik Jašarević.
L’armée israélienne émet un ordre d’évacuation pour l’est de Gaza
Sur le terrain, les Palestiniens ont repris leurs déplacements forcés. Des images de la presse et des réseaux sociaux ont montré des familles palestiniennes s’éloigner de la frontière est avec Israël.
Ces familles ont recommencé à fuir les raids sur Beit Hanoun, dans le nord de Gaza.
Dans le même temps, l’armée israélienne a émis un ordre d’évacuation pour l’est de l’enclave. Dans un message sur X, le porte-parole arabophone de l’armée israélienne, a lancé un avertissement aux habitants de la zone frontalière est du territoire, et notamment ceux « de Beit Hanoun, de Khouzaa, d’Abasan Al-Kabira et d’Abasan Al-Jadida».
« Pour votre propre sécurité, vous devez évacuer immédiatement vers les abris connus de l’ouest de la ville de Gaza et dans ceux de Khan Younès », a mis en garde Avichay Adraee.
Le cessez-le-feu avait permis le retour de milliers de déplacés
Cette nouvelle escalade de violences a eu lieu deux mois après la conclusion du cessez-le-feu mettant fin à la guerre à Gaza. En six semaines, le Hamas a libéré une trentaine d’otages en échange de près de 2.000 prisonniers palestiniens.
Mais, depuis la fin de la première phase du cessez-le-feu, le 2 mars, le Hamas et Israël n’ont pas réussi à s’entendre sur l’application de la deuxième phase visant à libérer la soixantaine d’otages restants et à mettre fin au conflit.
Le cessez-le-feu avait apporté un certain soulagement dans l’enclave et avait permis à des centaines de milliers de Palestiniens déplacés de rentrer chez eux.
La première phase du cessez-le-feu à Gaza, du 19 janvier au 1er mars 2025, a permis l’entrée quotidienne d’un grand volume de fournitures humanitaires et d’un flux régulier de carburant. Selon l’OCHA, elle a considérablement amélioré l’environnement sécuritaire général et l’accès humanitaire à Gaza.
Des colis alimentaires distribués à plus de deux millions de personnes
Les agences humanitaires ont ainsi acheminé plus de 78.000 tonnes d’aide alimentaire à Gaza, contre environ 23.000 tonnes au cours du mois précédant le cessez-le-feu, ce qui a permis d’intensifier immédiatement les distributions d’aide alimentaire.
Alors que depuis le mois d’août, plus d’un million de personnes n’avaient pas reçu leur ration alimentaire mensuelle complète en raison de pénuries d’approvisionnement, en seulement six semaines, les humanitaires de l’ONU ont été en mesure de distribuer à plus de deux millions de personnes des colis alimentaires de la taille d’un ménage.
Cela s’ajoute aux distributions parallèles de farine de blé - l’UNRWA à elle seule ayant atteint plus de 1,28 million de personnes avec cet aliment de base essentiel - et de plus de 860.000 repas chauds par jour dans la bande de Gaza.
Pour renforcer la prévention, environ 230.000 enfants et 90.000 personnes souffrant de malnutrition aiguë ont reçu des suppléments nutritifs spécialisés. En outre, plus de 19.000 nourrissons et jeunes enfants ont reçu des aliments complémentaires prêts à l’emploi.
Des acquis remis en cause par la fermeture des points de passage
Sur un autre plan, 25 établissements de santé, dont 11 hôpitaux, deux hôpitaux de campagne et un centre de santé publique, ont reçu des médicaments et des fournitures vitales. Selon l’OCHA, cela a permis de répondre aux besoins d’environ 1,9 million de personnes grâce à des traitements et des interventions chirurgicales.
Autre secteur vital, la production d’eau a augmenté de près de 50 %, passant d’une moyenne quotidienne d’environ 90.000 mètres cubes au cours du mois précédant le cessez-le-feu à plus de 135.000 mètres cubes au cours des dernières semaines de février. Les puits d’eau souterraine ont plus que doublé leur production en six semaines grâce à un approvisionnement régulier en carburant et à des réparations d’urgence.
« Mais la fermeture de tous les points de passage imposée par Israël pour l’entrée des marchandises à partir du 2 mars augmente déjà les besoins et perturbe les services », avertit l’OCHA.
Israël intensifie la colonisation et l’annexion en Cisjordanie
S’agissant de la situation en Cisjordanie, un rapport du Bureau des droits de l’homme de l’ONU fait état d’une intensification de la colonisation dans cette partie des Territoires occupés de Palestine. Couvrant la période du 1er novembre 2023 au 31 octobre 2024, le document fait état d’une expansion significative des colonies israéliennes en Cisjordanie occupée, y compris à Jérusalem-Est.
Au total, 1.779 structures palestiniennes ont été démolies en Cisjordanie pour « absence de permis de construire », qu’il est presque impossible d’obtenir pour les Palestiniens, ce qui a entraîné le déplacement forcé de 4.527 personnes. Le nombre de Palestiniens déplacés de force à la suite de démolitions a augmenté de près de 200 % par rapport à la période précédente.
Des mesures auraient été prises pour mettre en œuvre des plans de construction de plus de 20.000 logements dans des colonies israéliennes nouvelles ou existantes à Jérusalem-Est uniquement, tandis que plus de 200 propriétés palestiniennes ont été démolies à Jérusalem-Est. Plus de 10.000 unités dans les colonies israéliennes existantes du reste de la Cisjordanie sont en cours de construction.
« Le transfert par Israël d’une partie de sa propre population civile dans le territoire qu’il occupe constitue un crime de guerre », a déclaré le Haut-Commissaire Volker Türk, exhortant la communauté internationale à lutter contre la colonisation croissante de la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, par Israël.