Fil d'Ariane
Gaza : l'ONU s'alarme de la hausse des naissances prématurées et décès maternels
Selon l’Agence des Nations Unies en charge des questions de santé sexuelle et reproductive (UNFPA), de nombreuses femmes sont contraintes d’accoucher sans avoir accès à un soutien médical.
Les soins de santé sexuelle et reproductive, y compris les services postnatals et de planification familiale, sont devenus très limités pour 155.000 femmes enceintes et allaitantes. Celles-ci sont confrontées à de graves risques sanitaires en raison de l’absence de soins prénatals et postnatals.
Les grossesses compliquées et à haut risque liées à des résultats négatifs ont augmenté, tandis que l’accès à des services d’accouchement sûrs a considérablement diminué, en particulier dans le Nord. De plus, les problèmes de transport et la pénurie de personnel médical ont aggravé la crise.
Par ailleurs, les femmes et les jeunes filles sont confrontées à des risques accrus en raison de la surpopulation des abris et de l’insuffisance des installations sanitaires. Les infections se multiplient, 25 % des femmes souffrant d’affections cutanées et d’autres problèmes de santé.
Pas d'accès à des fournitures sanitaires de base
L’hygiène menstruelle est également devenue pratiquement impossible à gérer, car plus de 690.000 femmes menstruées n’ont pas accès à des fournitures sanitaires de base. Le coût d’articles essentiels comme le savon a augmenté de 1.100 %, ce qui rend impossible l’hygiène et accroît la vulnérabilité des femmes à la violence et à l’exploitation.
Cette alerte de l'UNFPA intervient alors que près de 70 % des infrastructures de Gaza sont détruites, laissant la quasi-totalité de la population sans nourriture, sans eau potable, sans soins de santé et/ou sans abris de base. Le système de santé de Gaza s’est presque effondré, la moitié des hôpitaux étant hors service.
Dans les 17 hôpitaux restants, seuls des services minimaux sont disponibles, y compris les soins de maternité, en raison d’un manque de ressources essentielles, y compris de fournitures.
Dans le nord de Gaza, seuls deux des 20 points de services de santé et deux hôpitaux - Kamal Adwan et Al Awda, qui fournissent tous deux des soins obstétriques d’urgence - fonctionnent encore partiellement, car ils s’efforcent de fonctionner sans fournitures, sans carburant, sans nourriture et sans eau.
« Cette situation va encore restreindre l’accès aux soins de santé maternelle pour environ 14.000 femmes enceintes et allaitantes dans le nord de Gaza », a souligné l’agence, qui note que ses fournitures sont bloquées depuis des mois dans des camions à la frontière ou stockées dans des entrepôts en Égypte et à Amman, alors que les femmes et les filles de Gaza en ont un besoin urgent.
Les fournitures comprennent 900 kits de santé reproductive inter-agences, contenant des médicaments et des fournitures essentiels pour des accouchements sûrs et des soins obstétriques d’urgence, 51 tentes à haute performance, à utiliser comme espaces sûrs et points médicaux, des générateurs, des échographies, des moniteurs de patients, et 60.000 kits d’hygiène et de dignité supplémentaires, 6.400 kits post-partum, et plus de 1,2 million de serviettes hygiéniques.
Des patients vont être évacués
Sur un autre plan, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) note que plus de 100 patients, dont des enfants, souffrant de traumatismes et de maladies chroniques seront évacués de Gaza demain mercredi, dans le cadre d’un rare transfert hors de l’enclave ravagée par la guerre.
« Il s’agit de mesures ad hoc. Ce que nous avons demandé à plusieurs reprises, c’est une évacuation médicale durable en dehors de Gaza », a déclaré depuis Gaza, Rik Peeperkorn, Représentant de l’OMS pour le territoire palestinien occupé, lors d’un point de presse régulier de l’ONU à Genève.
Les patients sont classés par ordre de priorité, sur la liste des priorités du ministère gazaoui de la santé. L’OMS les aide à se rendre à un seul endroit, ils seront rassemblés à l’hôpital européen de Gaza, demain à partir de 6 heures, heure locale.
Les patients voyageront dans un grand convoi via le point de passage de Karem Abu Salem, connu sous le nom de Kerem Shalom en Israël, avant de s’envoler pour les Émirats arabes unis, a-t-il ajouté, puis certains d’entre eux se rendront en Roumanie.
Selon l’OMS, 12.000 autres personnes attendaient d’être transférées.
Des patients transférés à l’hôpital Al-Shifa
Par ailleurs l’OMS indique avoir pu atteindre dimanche 3 novembre l’hôpital de Kamal Adwan. Malgré les conditions « désastreuses », l’équipe a réussi à transférer 25 patients et 37 accompagnateurs à l’hôpital Al-Shifa. Elle a également pu livrer du matériel médical et chirurgical pour 7.000 interventions, 150 unités de sang, 20.000 litres de carburant, de la nourriture et de l’eau.
« Des bombardements intenses ont eu lieu à proximité de l’hôpital, même pendant la mission. Peu après le départ de la mission de l’OMS à l’hôpital Kamal Adwan, le troisième étage de l’établissement aurait été touché, blessant 6 enfants qui y sont soignés. L’un d’entre eux aurait été gravement blessé. Des réservoirs d’eau ont été endommagés », a toutefois précisé le Dr Peeperkorn.
A l’hôpital d’Al Awda, une autre mission menée dimanche dernier a permis le transfert de 5 patients et 5 soignants à l’hôpital d’Al-Shifa. L’hôpital comptait 44 patients hospitalisés, dont 5 ont été transférés.
Sur place, les équipes de l’OMS ont constaté que l’hôpital n’avait pas de carburant. Le générateur ne fonctionnait que 3 heures par jour jusqu’au 3 novembre. En raison du manque d’électricité, aucune opération chirurgicale n’a pu avoir lieu.
Campagne de vaccination contre la polio
Concernant la campagne de vaccination contre la polio au nord de Gaza, plus de 105.000 enfants de moins de dix ans (88 % de l’objectif) ont été vaccinés entre le 2 et le 4 novembre. Dans le même temps, près de de 84.000 enfants ont reçu un supplément de vitamine A
Selon l’OMS, la campagne dans le nord a été partiellement prolongée jusqu’à ce mardi 5 novembre dans quatre établissements de santé situés dans des zones densément peuplées. Il s’agit notamment de Shujayyia Muscat Center, Alrahma, Sheikh Ridwan et Alshati Service Center. « Des pauses humanitaires sont assurées pour ces zones », a affirmé le Dr Peeperkorn.
Selon le Représentant de l’OMS, le comité technique de la polio examinera, ce mardi, la couverture afin de déterminer si une nouvelle extension doit être demandée.
A noter que l’objectif de la campagne de lutte contre la polio dans le nord est estimé à 119.000 enfants de moins de dix ans. Et pour interrompre la transmission du poliovirus, il faut qu’au moins 90 % des enfants de chaque communauté et de chaque quartier soient vaccinés, ce qui sera difficile à réaliser compte tenu de la situation.
Des itinéraires extrêmement dangereux
Pour sa part, le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA) prévient que les fournitures humanitaires déjà limitées qui entrent dans la bande de Gaza ont encore diminué depuis le mois d’octobre. Les importations privées sont pratiquement interdites et les autorités israéliennes n’autorisent que l’utilisation de trois points d’entrée : Kerem Shalom, la porte 96, qui se trouve près de Deir al-Balah, et Erez Ouest.
En outre, les travailleurs humanitaires ne peuvent accéder à ces zones frontalières qu’en empruntant des itinéraires extrêmement dangereux. La plupart des routes menant à ces points d’entrée ont été soit interdites par les autorités israéliennes, soit rendues dangereuses en raison des hostilités en cours. Les routes disponibles sont souvent en mauvais état et sujettes au pillage armé alimenté par l’effondrement de l’ordre public et de la sécurité.
Dans ce climat d’obstacles sur l’accès, les fournitures qui atteignent le point de passage nord d’Erez Ouest ne peuvent être envoyées qu’à la ville de Gaza, car les demandes de livraison aux zones assiégées du gouvernorat de Gaza Nord sont constamment refusées et rejetées.