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Liban : le PAM alerte sur une aggravation de l’insécurité alimentaire

Alors que l’armée israélienne a appelé une nouvelle fois lundi à l’évacuation de plusieurs villages du Liban-Sud, dont Tyr, Bint Jbeil et Marjeyoun, la sécurité alimentaire continue de se dégrader dans un contexte de crise politique et économique exacerbée par le conflit entre Israël et le Hezbollah.

Selon le Programme alimentaire mondial des Nations Unies (PAM), l’insécurité alimentaire au Liban devrait s’aggraver en raison des opérations militaires en cours, qui mettent à rude épreuve les infrastructures, déplacent de force les populations et aggravent les effets de la crise économique.

Depuis le 25 septembre, les évaluations hebdomadaires du marché par le PAM ont mis en évidence les difficultés persistantes de la vente au détail et de l’approvisionnement alimentaire. À El Nabatieh, 80 % des magasins restent fermés et à Baalbek-El Hermel, les fermetures sont passées de 26 % à 42 % fin octobre.  La Bekaa reste très fonctionnelle (85 pour cent), les autres zones étant pleinement opérationnelles.

L’inflation des prix reste préoccupante, en particulier dans l’Akkar et le Nord. De plus, les ruptures d’approvisionnement alimentaire ont diminué de « manière significative », en particulier à Beyrouth. Les niveaux de stocks se sont généralement améliorés, bien que de faibles niveaux persistent dans le Akkar, le Sud, le Nord et le Mont-Liban.

Des fournitures vitales sont livrées à des villages difficiles d'accès dans le sud du Liban.
© UNOCHA
Des fournitures vitales sont livrées à des villages difficiles d'accès dans le sud du Liban.

Le conflit menace également le secteur agricole dans la Bekaa et le Sud Liban

Selon l’agence onusienne basée à Rome, le conflit menace également le secteur agricole dans la Bekaa et le Sud, qui représente plus de 60 % de la production agricole du Liban. 

« Les dommages causés par les attaques israéliennes sont estimés à 12 milliards de dollars dans les secteurs économiques, les bâtiments et les infrastructures », a détaillé le PAM dans son dernier rapport sur la situation humanitaire au Liban.

Dans ce contexte, le centre d’appel du PAM indique avoir reçu la semaine dernière près de 2.760 demandes, principalement de la part de personnes déplacées. Les deux tiers des appelants ont demandé une aide alimentaire ou en espèces, 10 % ont demandé un changement de lieu temporaire et 15 % des appels étaient liés à des programmes.

Ces derniers développements humanitaires interviennent alors qu’Israël a intensifié ses opérations militaires, aggravant encore la situation fragile du Liban et faisant plus de 3.000 morts et 13.600 blessés depuis octobre 2023.

Des filets de sécurité sociale à l’approche de l’hiver

Près d’un quart de la population du pays a été affecté par le conflit (1,4 million de personnes), avec près de 875.200 personnes déplacées à l’intérieur du pays selon l’OIM.

« Selon la Sûreté générale libanaise, 561.800 personnes sont passées en Syrie depuis le 23 septembre (66 % de Syriens et 34 % de Libanais) », a ajouté le PAM, relevant que plus de 30.000 Libanais se sont réfugiés en Iraq entre le 27 septembre et le 5 novembre 2024.

En réponse à la crise humanitaire au Liban, le PAM a intensifié son aide d’urgence aux personnes touchées et a apporté une aide alimentaire et/ou en espèces à près de 450.000 personnes dans les abris et les communautés, depuis le 23 septembre. Cela porte à près de 620.000 le nombre total de personnes touchées par le conflit en 2024.

À l’approche de l’hiver, le PAM collabore avec le ministère des affaires sociales pour améliorer la plateforme nationale d’argent liquide du filet de sécurité sociale résistant aux chocs (SRSSN) et pour veiller à ce que l’assistance en argent liquide atteigne les personnes touchées qui ne sont pas couvertes par les programmes du PAM.

Les déplacements accroissent le risque de propagation des maladies infectieuses

De son côté, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) note que l’insécurité et les restrictions d’accès pour les travailleurs de la santé et les premiers intervenants ont un impact sur le travail sur le terrain.

Les banlieues sud de Beyrouth, de la Bekaa, du Sud et de Baalbek continuent d’être systématiquement ciblées, ce qui entraîne une augmentation des déplacements forcés de civils. « Cette augmentation du nombre de personnes déplacées, dont les conditions d’hébergement ne sont pas optimales, accroît le risque de propagation des maladies infectieuses ».

Par ailleurs, entre le 30 octobre et le 4 novembre, 17 signaux de maladies infectieuses ont été reçus parmi les personnes déplacées dans les abris, notamment des cas de fièvre aphteuse, d’intoxication alimentaire, d’hépatite A, d’infections respiratoires, de suspicion de tuberculose, de rougeole, de gale et de poux. Les équipes de l’Unité de surveillance épidémiologique (ESU) ont commencé à enquêter et à vérifier les signaux et les références, précise l’OMS.

Des soldats de la paix de l'ONU au Liban réparent une route endommagée dans le sud du pays.
© UNIFIL
Des soldats de la paix de l'ONU au Liban réparent une route endommagée dans le sud du pays.

Un soutien sans faille de la FINUL aux civils face à la montée de la violence

À la suite de l’escalade spectaculaire de la violence de part et d’autre de la Ligne bleue à la fin du mois de septembre, qui a posé d’énormes problèmes aux soldats de la paix ainsi qu’à la population locale, les soldats de la paix ont persévéré et sont restés sur leurs positions dans tout le Sud-Liban.

Force intérimaire des Nations unies au Liban (FINUL) rappelle d’ailleurs que les soldats de la paix ont eux-mêmes été pris pour cible plus d’une demi-douzaine de fois alors qu’ils continuaient à surveiller et à rendre compte de la situation sur le terrain. Malgré cela, ils ont intensifié - dans la mesure du possible - diverses initiatives de soutien aux populations civiles locales ainsi qu’aux personnes déplacées à l’intérieur du pays.

De la remise en état des routes endommagées à la fourniture d’une assistance médicale et d’autres services essentiels, les soldats de la paix ont fait tout ce qu’ils pouvaient pour aider ceux qui ont continué à rester chez eux, ainsi que ceux qui ont été déplacés par le conflit.

Entre le 23 septembre (date du début de l’escalade dramatique) et le 31 octobre, le service de liaison de la FINUL a facilité plus de 1.800 activités liées à la protection des civils libanais, notamment des journalistes et des secouristes, ainsi qu’à celle des forces armées libanaises et des biens de la FINUL.

« En raison des opérations menées par les FDI (Forces de défense israéliennes) au Liban, le service de liaison a dû s’adapter à la nouvelle situation et, bien que nous tenions les deux parties informées, le niveau d’interaction avec les FDI a considérablement augmenté afin de déconflictualiser les mouvements de la FINUL et de permettre l’évacuation des civils de certaines zones », a affirmé l’officier de liaison en chef de la FINUL, le colonel Olivier Waché.