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Les promesses et les dangers des avancées technologiques examinés au Conseil de sécurité

Le Conseil de sécurité de l’ONU a exploré lundi la nature à double tranchant des avancées technologiques rapides – allant de l’intelligence artificielle à la neurotechnologie – mettant en évidence à la fois les solutions révolutionnaires et les risques émergents pour la paix et la sécurité mondiales.

Robin Geiss, Directeur de l’Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement (UNIDIR), a ouvert la voie aux discussions en soulignant le rythme effréné des avancées scientifiques dans des domaines tels que la robotique avancée, l’impression 3D, l’IA générative et l’espace.

Alors qu’il a fallu près de 50 ans pour que le réseau électrique des années 1880 atteigne 100 millions de foyers, ChatGPT a franchi le même cap en seulement deux mois en 2022.

« Cela indique une compression drastique du temps dont disposent les décideurs politiques pour réagir et s’adapter aux avancées scientifiques et technologiques dans le monde d’aujourd’hui », a déclaré M. Geiss.

« Dans le même temps, la convergence croissante de différentes technologies, combinée à leur nature intrinsèquement à double usage, peut entraîner des conséquences profondes et imprévues », a-t-il ajouté, soulignant la complexité des avancées scientifiques, technologiques et leur impact sur la société dans son ensemble.

Le Conseil de sécurité se réunit pour anticiper l’impact des progrès scientifiques sur la paix et la sécurité internationales.
UN Photo/Eskinder Debebe
Le Conseil de sécurité se réunit pour anticiper l’impact des progrès scientifiques sur la paix et la sécurité internationales.

Avenir de la sécurité mondiale

M. Geiss a attiré l’attention sur la technologie quantique, qui pourrait avoir d’ici cinq à dix ans des impacts multiples et significatifs sur la sécurité mondiale.

L’informatique quantique, a-t-il expliqué, pourrait perturber la sécurité de l’information et des communications en rendant obsolètes les techniques de cryptage traditionnelles. En même temps, elle pourrait révolutionner la guerre en permettant aux capteurs de détecter des objets sous terre ou sous l’eau.

« L’informatique quantique ouvrira une nouvelle ère pour l’IA (intelligence artificielle) en permettant le calcul de modèles qui ne peuvent actuellement pas être exécutés même sur les ordinateurs les plus puissants », a-t-il déclaré.

En ce qui concerne l’avenir, M. Geiss a prédit que la prochaine décennie verrait également des avancées majeures dans l’intelligence artificielle générale, qui serait capable de « comprendre, d’apprendre et d’appliquer » des connaissances dans un large éventail de contextes.

« Ce changement profond aurait des conséquences de grande portée dans toute la société », a-t-il ajouté, appelant à une action urgente pour anticiper à la fois les menaces et les opportunités posées par ces technologies émergentes.

Les professeurs Jocelyne Bloch (à gauche) et Grégoire Courtine (à droite) informent le Conseil de sécurité.
UN Photo/Evan Schneider
Les professeurs Jocelyne Bloch (à gauche) et Grégoire Courtine (à droite) informent le Conseil de sécurité.

Neurotechnologie : reconnecter le cerveau et le corps

Les professeurs Jocelyne Bloch et Grégoire Courtine ont également fait un exposé au Conseil de sécurité, présentant des avancées neurotechnologiques de pointe susceptibles de transformer des vies, tout en soulevant des questions éthiques et de sécurité cruciales.

La professeure Bloch, neurochirurgienne suisse, a présenté le développement par son équipe d’un « pont numérique » entre le cerveau et la moelle épinière – une technologie qui permet aux patients paralysés de marcher à nouveau en contournant les lésions de la moelle épinière.

La moelle épinière contrôlant les mouvements des jambes est intacte, « juste déconnectée du cerveau », a-t-elle déclaré. En implantant des électrodes dans le cerveau et la moelle épinière, et en utilisant l’intelligence artificielle pour décoder les signaux cérébraux, ce système restaure le mouvement naturel.

« Nous avons récemment restauré la mobilité du bras chez un patient tétraplégique et prévoyons d’étendre la thérapie aux paralysies liées aux accidents vasculaires cérébraux et aux maladies neurodégénératives telles que la maladie de Parkinson », a déclaré la professeure Bloch.

Opportunités et défis éthiques

Le professeur Courtine, neuroscientifique français, a évoqué l’impact sociétal plus large de ces avancées.

« Ces progrès auront un impact significatif sur la vie de nombreuses personnes, notamment de jeunes athlètes blessés, des soldats revenant du combat paralysés ou des civils victimes collatérales », a-t-il noté.

Au-delà des avantages individuels, l’application généralisée de la neurotechnologie allégerait également les fardeaux sociaux et économiques. Il a toutefois averti que les interfaces cerveau-machine, comme celles utilisées dans leurs recherches, pourraient être exploitées à des fins non thérapeutiques ou militaires.

« Nos patients peuvent déjà contrôler des drones par la pensée », a-t-il averti, prévenant que de telles capacités pourraient être utilisées par des personnes en bonne santé à des fins non médicales, ce qui pourrait entraîner de nouveaux risques de sécurité.

La science-fiction devient réalité

Le développement rapide de la neurotechnologie introduit également des vulnérabilités. Des appareils comme le « pont numérique » sont sensibles aux perturbations causées par les champs électromagnétiques ou le piratage, ce qui pourrait compromettre des données neurologiques critiques.

« Nous sommes à un moment clé de l’histoire », a déclaré le professeur Courtine.

« Ce qui relevait de la science-fiction il y a quelques décennies devient peu à peu réalité. Il est de notre responsabilité collective de façonner cette nouvelle ère de manière éthique et sûre, tout en ouvrant la voie à des avancées qui changeront la vie ».