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Yémen : l’envoyé de l’ONU réclame la libération immédiate et sans condition des travailleurs humanitaires détenus

L’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, Hand Grundberg, a une nouvelle fois réclamé jeudi, lors d’une réunion du Conseil de sécurité, la libération immédiate et sans condition des travailleurs humanitaires yéménites et internationaux ainsi que des diplomates et employés du secteur privé et des communautés religieuses minoritaires détenus par Ansar Allah (houthistes), qui contrôle le nord du pays.

Leur détention est une profonde injustice, réduit l’espace civique et a un impact négatif sur les efforts humanitaires pour les Yéménites, a-t-il affirmé, demandant qu’Ansar Allah s’abstienne de toute nouvelle détention arbitraire.

Attaques en mer Rouge

L’envoyé de l’ONU a expliqué aux membres du Conseil que son objectif principal reste la médiation d’une résolution durable et juste du conflit au Yémen et il a regretté que la guerre à Gaza et l’escalade régionale compliquent ses efforts.

Les houthistes ont poursuivi leurs attaques contre des navires en mer Rouge, menaçant la stabilité régionale et la sécurité maritime internationale.  En réponse, les États-Unis et le Royaume-Uni ont continué de frapper des cibles militaires à l’intérieur du Yémen. Se disant préoccupé face à cette escalade, M. Grundberg a demandé aux parties de donner la priorité au Yémen et au règlement du conflit au Yémen.

L’Envoyé spécial s’est dit particulièrement préoccupé par l’attaque d’Ansar Allah du pétrolier M.V. Sounion, battant pavillon grec, qui présente une menace imminente de marée noire et d’une catastrophe environnementale d’une ampleur sans précédent au Yémen et dans la région. Il a exhorté Ansar Allah à cesser de prendre pour cible les navires civils dans la mer Rouge et au-delà.

Une situation militaire qui ne s'améliore pas

M. Grundberg a déploré une situation intérieure militaire qui ne s’est pas améliorée, avec des activités militaires inquiétantes le long des lignes de front et l’escalade verbale entre les parties belligérantes.

Bien que les niveaux de violence restent inférieurs à ceux d’avant la période de trêve de 2022, les affrontements à Dalea, Hodeïda, Lahj, Mareb, Saada, Chaboua et Taëz entraînent souvent des pertes en vies humaines inutiles et tragiques. La dynamique actuelle est un rappel brutal que la menace d’un retour à une guerre à grande échelle reste toujours présente, a-t-il averti.

Sur le plan économique, l’accord conclu entre les parties le 23 juillet sur la désescalade économique a permis d’éviter une crise aiguë, a observé l’Envoyé spécial, qui a toutefois noté que la situation économique des Yéménites continue de se détériorer.

C’est en s’engageant durablement et de manière ciblée sur des questions économiques, le cessez-le-feu à l’échelle nationale et un processus politique global et inclusif, que le Yémen pourra parvenir à une paix durable, a encore affirmé M. Grundberg, qui a demandé le soutien indéfectible du Conseil à ses efforts pour obtenir la libération du personnel des Nations Unies détenu et pour réfuter les accusations sans fondement portées sur les différentes agences onusiennes et des partenaires humanitaires.

Joyce Msuya, Secrétaire générale adjointe par intérim aux affaires humanitaires et Coordonnatrice par intérim des secours d'urgence, informe le Conseil de sécurité de la situation au Yémen.
UN Photo/Eskinder Debebe
Joyce Msuya, Secrétaire générale adjointe par intérim aux affaires humanitaires et Coordonnatrice par intérim des secours d'urgence, informe le Conseil de sécurité de la situation au Yémen.

Accusations mensongères

De son côté, la Secrétaire générale adjointe aux affaires humanitaires par intérim, Joyce Msuya, a aussi exprimé sa profonde préoccupation face à la détention arbitraire persistante de membres du personnel des Nations Unies et d’organisations non gouvernementales ainsi que de représentants de la société civile par les autorités de facto houthistes.

Si la plupart de ces personnes sont détenues depuis plus de trois mois, quatre autres le sont depuis 2021 et 2023, a-t-elle précisé, appelant à leur libération immédiate et inconditionnelle. L’ONU mène des actions diplomatiques à cette fin, a indiqué Mme Msuya, avant d’exhorter tous les États Membres à exercer l’influence dont ils disposent pour soutenir ces efforts.

Elle a par ailleurs dénoncé les accusations mensongères des autorités de facto houthistes concernant les travailleurs humanitaires, notamment celles faisant état d’une ingérence dans le système éducatif du Yémen, avertissant que de telles allégations menacent la sécurité du personnel et entravent encore davantage la capacité de l’ONU et de ses partenaires à servir le peuple yéménite.

Des pluies torrentielles ont dévasté des sites de déplacés internes dans la ville de Saada, au Yémen.
© UNHCR/YDF
Des pluies torrentielles ont dévasté des sites de déplacés internes dans la ville de Saada, au Yémen.

Une situation humanitaire qui se détériore

S’agissant de la situation humanitaire au Yémen, celle-ci ne cesse de se détériorer, 62% des ménages interrogés déclarant ne pas avoir assez de nourriture, a-t-elle indiqué.

Pour la première fois, 3 districts –2 à Hodeïda et un à Taëz– sont confrontés à des niveaux de malnutrition extrêmement critiques (phase 5 du Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire) et 4 autres devraient atteindre ce niveau d’ici à octobre, a-t-elle précisé.

Dans les zones contrôlées par le Gouvernement du Yémen, 600 000 enfants devraient, d’ici à la fin de l’année souffrir de malnutrition aiguë et environ 118.000 de malnutrition aiguë sévère, soit une augmentation de 34% depuis 2023.  « Le temps presse si nous voulons éviter une catastrophe », a prévenu Mme Msuya, pour qui l’intensification de la réponse humanitaire nécessitera le soutien de la communauté internationale et la coopération des parties.

En plus de ces défis, le Yémen est confronté aux effets de pluies dévastatrices, d’inondations et de glissements de terrain, ainsi qu’à une épidémie de choléra en pleine expansion, a ajouté Mme Msuya, indiquant qu’à ce jour, 177.000 personnes ont reçu une forme d’aide d’urgence.  

Pénurie de financement

Toutefois, à l’approche du dernier trimestre de l’année, l’appel humanitaire coordonné n’est financé qu’à 28%, les programmes de sécurité alimentaire et agricole qu’à 9% et les activités de soutien aux refuges qu’à 16%, a-t-elle alerté.

En réponse à la gravité de cette pénurie de financement, la Secrétaire générale adjointe aux affaires humanitaires par intérim a dit avoir accepté de débloquer 20 millions de dollars du Fonds central d’intervention d’urgence des Nations Unies (CERF) pour la réponse au Yémen.

Outre un financement adéquat, une réponse efficace nécessite que les parties respectent leurs obligations de faciliter les opérations de secours humanitaires, a souligné Mme Msuya, qui a déploré la persistance d’obstacles à l’accès et d’interférences avec les activités humanitaires. 

L’OCHA a pris des mesures pour minimiser l’exposition de son personnel aux risques dans les zones contrôlées par les houthistes, ce qui a pour conséquence une réponse plus restreinte, a-t-elle expliqué.