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Cisjordanie : l'ONU condamne l'escalade militaire israélienne

Alors que de nouveaux raids, frappes aériennes et attaques de colons contre des Palestiniens en Cisjordanie occupée ont eu lieu mercredi, le bureau des droits de l’homme des Nations Unies, le HCDH, a averti que les actions de l’armée israélienne risquaient d’enflammer davantage une « situation déjà explosive ».

Le dernier épisode en date a été signalé le lundi 26 août, vers 22h30, quand l’armée de l’air israélienne a lancé au moins quatre frappes aériennes dans le camp de réfugiés de Nur Shams à Tulkarem, tuant trois hommes et deux garçons palestiniens âgés de 13 et 15 ans.

Le bureau du Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme (HCDH) en Palestine a condamné, mercredi, « la réponse de plus en plus militaire des Forces de sécurité israéliennes (FSI) en Cisjordanie occupée, qui viole le droit international et risque d’enflammer davantage une situation déjà explosive », déplorant aussi le fait que Tel Aviv continue d’ignorer les violences perpétrées par les colons.

Il appelle la puissance occupante et les États ayant de l’influence sur Israël, à mettre fin aux attaques des forces de sécurité israéliennes, à la violence des colons et au transfert forcé de Palestiniens en Cisjordanie occupée.

« Une opération majeure des forces de sécurité israéliennes en Cisjordanie occupée risque d’aggraver sérieusement la situation déjà catastrophique dans le territoire palestinien occupé », a renchéri mercredi une porte-parole du HCDH à Genève, Ravina Shamdasani.

« Israël, en tant que puissance occupante, doit respecter ses obligations en vertu du droit international. L’utilisation par les forces de sécurité israéliennes de frappes aériennes et d’autres armes et tactiques militaires viole les normes relatives aux droits de l’homme et les standards applicables aux opérations de maintien de l’ordre. Les homicides illégaux présumés doivent faire l’objet d’une enquête approfondie et indépendante et les responsables doivent rendre des comptes », a-t-elle ajouté.

Tulkarem, dans le nord de la Cisjordanie, a été bombardée en avril 2024.
UNRWA
Tulkarem, dans le nord de la Cisjordanie, a été bombardée en avril 2024.

Flambée de violence

Les FSI ont affirmé que les frappes aériennes visaient une « salle d’opérations ». Selon des informations recueillies auprès de multiples sources, trois des victimes, dont les deux garçons, ont été tuées alors qu’elles passaient devant la maison visée, située dans l’une des petites ruelles encombrées du camp.

Entre le 7 octobre 2023 et le 27 août 2024, au moins 628 Palestiniens ont été tués en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est. Parmi eux, 609 Palestiniens ont été tués par les FSI, 11 par des colons et 8 par les FSI ou des colons lors d’attaques conjointes. Cependant, 159 des personnes tuées, dont 29 garçons et 3 femmes, sont mortes à la suite de frappes aériennes.

Les violences entre les FSI et les Palestiniens armés en Cisjordanie ne constituent pas un conflit armé au sens du droit international humanitaire. Mais selon l’ONU, l’utilisation par les FSI de frappes aériennes et d’autres armes et tactiques militaires viole ces normes et entraîne des exécutions extrajudiciaires et d’autres meurtres illégaux, ainsi que la destruction d’habitations et d’infrastructures palestiniennes.

Climat « d’impunité »

Les Palestiniens continuent également d’être la cible d’autres actes de violence. Le 26 août, vers 23h30, des dizaines de colons israéliens armés ont attaqué le village de Wadi Rahal à Bethléem, et des colons armés ou des réservistes de l’armée ont tiré dans le dos de Khalil Salem Khlawi, 37 ans, et l’ont tué.

Le meurtre de M. Khlawi n’est pas un incident isolé et est une conséquence directe de la politique israélienne de colonisation de la Cisjordanie occupée, en violation du droit international, accompagnée de la complicité des FSI et de l’environnement d’impunité qui prévaut.

Plus largement, le HCDH continue de documenter les attaques quotidiennes des colons et le harcèlement des Palestiniens, y compris les colons qui agressent physiquement les Palestiniens, incendient ou endommagent leurs biens et leurs cultures, volent les moutons, les empêchent d’accéder à leurs terres, à l’eau et aux zones de pâturage, et les forcent à quitter leurs maisons et leurs terres.

Mettre fin au projet de colonisation illégale

Selon le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA), depuis le 7 octobre 2023, 259 ménages palestiniens comprenant 1.547 personnes, dont 753 enfants, ont été déplacés de force dans le cadre de tels incidents liés aux colons israéliens.

Le HCDH craint que la situation en Cisjordanie occupée, qui s’est rapidement détériorée depuis le 7 octobre, ne s’aggrave considérablement si les forces de sécurité israéliennes continuent de recourir systématiquement à la force meurtrière illégale et d’ignorer les violences perpétrées par les colons.

Les services du Haut-Commissaire Volker Türk appellent donc Israël à respecter les obligations qui lui incombent en vertu du droit international, à mettre fin au projet de colonisation illégale, à rétablir l’ordre et à protéger les Palestiniens, notamment en évacuant tous les colons, comme l’a demandé la Cour internationale de justice (CIJ).

Un embouteillage alors que les habitants de Gaza continuent de chercher un lieu sûr pour s'abriter.
© UNRWA
Un embouteillage alors que les habitants de Gaza continuent de chercher un lieu sûr pour s'abriter.

Gaza face à « l’une des plus difficiles crises humanitaires » au monde

A Gaza, l’armée israélienne continue de mener des raids aériens et de multiplier les ordres d’évacuations, aggravant ainsi la catastrophe humanitaire, ont alerté mercredi des agences humanitaires.

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Selon l’Agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA), l’opération humanitaire à Gaza « est devenue l’une des plus difficiles au monde pour l’ONU en ce moment ». Malgré ces défis quotidiens, « l’UNRWA continue d’apporter une aide humanitaire partout où cela est possible et dans les circonstances les plus difficiles », a précisé sur le réseau social X, une porte-parole de l’agence onusienne, Juliette Touma.

En écho à la description préoccupante faite par Mme Touma, une autre porte-parole de l’UNRWA a brossé un sombre tableau du territoire assiégé, après une visite dans la zone centrale de la bande de Gaza où « la situation est tout simplement catastrophique ». « Ce que nous voyons ici, ce sont des centaines de milliers de personnes obligées de se déplacer quotidiennement », a décrit sur X, Louise Wateridge.

Un espace de « confinement » très réduit

Elle explique que, si les habitants de Gaza continuent de fuir en emportant ce qu’ils peuvent et en se déplaçant principalement à pied, il n’y a aucun endroit sûr dans l’enclave palestinienne. « La situation a vraiment changé au cours des dernières semaines, des deux derniers mois. Ce que nous voyons maintenant, ce sont des familles, des mères, des enfants qui traînent leurs affaires », a-t-elle ajouté.

Après chaque ordre d’évacuation de l’armée israélienne, la plupart des Gazaouis se déplacent désormais à pied. L’accès aux véhicules est très limité pour ce type de déplacement, et les gens ne savent tout simplement pas où aller.

Comme pour aggraver les choses, l’espace dans lequel les gens ont été confinés est tellement réduit. « Il y a des chars dans des zones qui étaient désignées comme sûres, ce qui prouve une fois de plus qu’il n’y a plus d’endroit sûr dans la bande de Gaza », a regretté Mme Wateridge.

Difficultés de fournir l’aide dans le sud de Gaza

Sur le terrain et en réponse aux derniers ordres d’évacuation du début de semaine, les agences humanitaires ont pu distribuer quelques tentes comme abris temporaires.  Cependant, les stocks s’épuisent et sont limités, ont insisté les agences humanitaires.

Le personnel du Programme alimentaire mondial (PAM) a dû se réinstaller dans d’autres locaux des Nations Unies et est contraint de quitter ses bureaux et ses maisons d’hôtes à Deir al Balah. Malgré ces difficultés, le PAM continue de fournir une aide alimentaire.

Outre la perte d’entrepôts et d’autres locaux humanitaires en raison des ordres d’évacuation, il reste difficile de se déplacer dans le sud de la bande de Gaza en raison de la forte surpopulation et des déplacements continus. De plus, l’accès des partenaires humanitaires au nord de la bande de Gaza est particulièrement difficile car il nécessite une coordination avec les autorités israéliennes et le passage par un point de contrôle interne.

Les hôpitaux de la bande de Gaza ont du mal à fournir des services.
© WHO
Les hôpitaux de la bande de Gaza ont du mal à fournir des services.

Certains hôpitaux sans nouvelle provision de carburant

Par ailleurs, les plans de ravitaillement des hôpitaux dans cette zone ont maintenant abouti à un refus d’accès à cinq reprises au cours de la semaine dernière, laissant certains hôpitaux sans nouvelle provision de carburant pendant plus de dix jours.

« Comme vous vous en souviendrez, la dépendance à l’égard du carburant pour faire fonctionner les générateurs de secours est totale puisque les autorités israéliennes ont coupé l’approvisionnement en électricité de la bande de Gaza en octobre dernier », a rappelé mardi à New York, Stephane Dujarric, porte-parole du Secrétaire général de l’ONU.

Le 7 octobre 2023, des combattants du Hamas ont pris d’assaut des communautés israéliennes, tuant environ 1.200 personnes et prenant en otage 250 personnes. Depuis, l’armée israélienne a rasé des pans entiers de l’enclave palestinienne, chassant la quasi-totalité de ses 2,3 millions d’habitants de leurs maisons et tuant au moins 40.000 personnes, selon les autorités sanitaires palestiniennes.