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Depuis Tonga, Guterres appelle à augmenter les financements pour faire face à la montée du niveau de la mer

Le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a lancé mardi un « SOS mondial » depuis Tonga, dans le Pacifique, exhortant les gouvernements à intensifier l’action climatique pour « sauver nos mers », alors que deux nouveaux rapports révèlent comment l’élévation du niveau de la mer menace cette région vulnérable.
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S’exprimant lors d’une conférence de presse dans la capitale, Nuku’alofa, M. Guterres a appelé les dirigeants mondiaux à réduire drastiquement les émissions mondiales de gaz à effet de serre, à éliminer rapidement les combustibles fossiles et à augmenter massivement les investissements dans l’adaptation au changement climatique pour protéger les populations des risques actuels et futurs.

« C’est une situation insensée : la montée des eaux est une crise entièrement imputable à l’humanité. Une crise qui va bientôt prendre des proportions presque inimaginables, sans canot de sauvetage pour nous ramener en sécurité », a-t-il averti. « Mais si nous sauvons le Pacifique, nous nous sauvons aussi nous-mêmes. Le monde doit agir et répondre au SOS avant qu’il ne soit trop tard ».

Une montée sans précédent du niveau de la mer

Le chef de l’ONU a déclaré que le niveau moyen mondial de la mer augmente à un rythme sans précédent depuis 3.000 ans.

« La raison est claire : les gaz à effet de serre, générés en grande partie par la combustion des combustibles fossiles, cuisent notre planète. Et la mer absorbe littéralement la chaleur », a-t-il poursuivi.

Les mers ont absorbé plus de 90 % du réchauffement climatique au cours des cinq dernières décennies. L’eau se dilate lorsqu’elle devient plus chaude, et la fonte des glaciers et des calottes glaciaires a augmenté le volume de la mer, provoquant ainsi le débordement de l’océan.

Les changements océaniques s’accélèrent

Pendant ce temps, deux documents de l’ONU publiés ce jour-là « mettent en évidence cette situation », a-t-il déclaré.

L’étude de l’Organisation météorologique mondiale (OMM) sur l’état du climat dans le Pacifique Sud-Ouest, ainsi qu’un rapport de l’Équipe d’action climatique de l’ONU sur la montée des eaux dans un monde en réchauffement, « montrent que les changements océaniques s’accélèrent, avec des conséquences dévastatrices ».

Ensemble, ils soulignent combien les températures mensuelles de la mer continuent de battre des records. Dans le même temps, les vagues de chaleur marines sont devenues plus intenses et plus longues, doublant de fréquence depuis 1980, tandis que la montée des eaux amplifie la fréquence et la gravité des ondes de tempête et des inondations côtières.

Les îles du Pacifique « particulièrement exposées »

« Les rapports d’aujourd’hui confirment que le niveau relatif de la mer dans le Pacifique Sud-Ouest a augmenté encore plus que la moyenne mondiale – dans certains endroits, de plus du double de l’augmentation mondiale au cours des 30 dernières années », a déclaré le Secrétaire général.

Il a expliqué que « les îles du Pacifique sont particulièrement exposées » : l’altitude moyenne est d’un à deux mètres au-dessus du niveau de la mer, environ 90 % de la population vit à moins de cinq kilomètres de la côte et la moitié de toutes les infrastructures se trouvent à moins de 500 mètres de la mer.

« Sans réduction drastique des émissions de gaz à effet de serre, les îles du Pacifique peuvent s’attendre à une élévation supplémentaire du niveau de la mer d’au moins 15 centimètres d’ici le milieu du siècle et à plus de 30 jours par an d’inondations côtières à certains endroits », a-t-il déclaré.

Les rapports ont révélé que le taux moyen d’élévation du niveau de la mer a plus que doublé depuis les années 1990, ce qui indique que « le phénomène s’accélère de manière inhabituelle et incontrôlée ».

Alors que le niveau moyen de la mer à l’échelle mondiale a augmenté de plus de 10 centimètres depuis 1993, la situation est encore pire dans le Pacifique, où certains endroits dépassent les 15 centimètres.

Des études scientifiques suggèrent qu’une augmentation de la température mondiale de 2 degrés Celsius par rapport aux niveaux préindustriels pourrait potentiellement conduire à l’effondrement des calottes glaciaires du Groenland et de l’Antarctique occidental, condamnant essentiellement « les générations futures à une élévation inéluctable du niveau de la mer pouvant atteindre 20 mètres – sur une période de millénaires ».

L'élévation du niveau de la mer affecte les nations insulaires du Pacifique comme les Samoa
United Nations/Kiara Worth
L'élévation du niveau de la mer affecte les nations insulaires du Pacifique comme les Samoa

« Des mers déchaînées nous attendent tous »

Le monde est actuellement sur une trajectoire vers une augmentation de la température de 3 degrés Celsius par rapport aux niveaux préindustriels, ce qui signifie que l’élévation du niveau de la mer se produirait beaucoup plus rapidement, ce qui serait un désastre pour Tonga et au-delà.

« La montée des eaux nous frappera tous, ainsi que la dévastation de la pêche, du tourisme et de l’économie bleue », a déclaré le Secrétaire général.

Il a rappelé qu’environ un milliard de personnes dans le monde vivent dans des zones côtières, ce qui inclut des « mégalopoles côtières » comme la capitale du Bangladesh, Dhaka, Los Angeles aux États-Unis, Mumbai en Inde, Lagos au Nigéria et Shanghai en Chine.

La montée des eaux augmentera la fréquence des inondations côtières et d’autres événements extrêmes, a-t-il déclaré, et une augmentation de la température de 2,5 degrés Celsius pourrait faire passer ce taux d’une fois tous les 100 ans à une fois tous les cinq ans d’ici la fin du siècle.

Sans nouvelles mesures d’adaptation et de protection, les dommages économiques pourraient s’élever à des milliers de milliards de dollars, a-t-il ajouté, exhortant les dirigeants mondiaux à agir dès maintenant.

Réduire les émissions mondiales

M. Guterres a souligné la nécessité de limiter la hausse de la température mondiale à 1,5°C, ce qui signifie « réduire les émissions mondiales de 43 % par rapport aux niveaux de 2019 d’ici 2030, et de 60 % d’ici 2035 ».

Il a appelé les gouvernements à mettre en œuvre de nouveaux plans d’action nationaux pour le climat, connus sous le nom de contributions déterminées au niveau national (CDN), d’ici 2025, comme promis lors de la conférence sur le climat COP28 de l’ONU à Dubaï l’année dernière.

Les dirigeants doivent également mettre le monde sur la voie d’une élimination progressive et rapide des combustibles fossiles, notamment en mettant fin aux nouveaux projets de charbon ainsi qu’à l’expansion des nouvelles centrales pétrolières et gazières, a-t-il poursuivi. Cela s’ajoute à leur engagement à tripler la capacité des énergies renouvelables, à doubler l’efficacité énergétique et à mettre fin à la déforestation d’ici 2030.

Soutenir les pays vulnérables

Le Secrétaire général a de nouveau réitéré son appel de longue date aux pays du G20, « les plus gros émetteurs », pour qu’ils jouent un rôle de premier plan dans ces efforts.

« Et le monde doit accroître massivement le financement et le soutien aux pays vulnérables.... Nous avons besoin d’une augmentation des fonds pour faire face à la montée des eaux », a-t-il dit.

En prévision de la conférence climatique de l’ONU de cette année, il a exhorté les pays à « stimuler les financements innovants ». Les pays les plus riches doivent également tenir leurs engagements, qui incluent le doublement du financement de l’adaptation à au moins 40 milliards de dollars par an d’ici 2025.

Abordant la justice climatique, il a également souligné la nécessité de « contributions significatives » au nouveau Fonds pour les pertes et dommages afin de soutenir les îles du Pacifique et d’autres pays vulnérables.

Il en va de même pour les initiatives annoncées lors du dernier Forum des îles du Pacifique, qui s’est ouvert à Tonga lundi.

« Enfin, nous devons protéger chaque personne sur Terre avec un système d’alerte précoce d’ici 2027 », a-t-il déclaré. « Cela signifie renforcer les capacités des pays en matière de données pour améliorer la prise de décision en matière d’adaptation et de planification côtière ».