Fil d'Ariane
Gaza : les derniers ordres d’évacuation placent les habitants à quelques pâtés de maisons de la ligne de front
Les ordres d’évacuation « continus » émis par l’armée israélienne menacent les habitants de l’enclave palestinienne, déjà extrêmement vulnérables.
« Nulle part dans la bande de Gaza n’est sûr... On a l’impression que les gens attendent la mort », a déploré sur le réseau social X, une porte-parole de l’Agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA).
« Des zones qui étaient (dans) la zone humanitaire sont maintenant la ligne de front », a affirmé Louise Wateridge, relevant que les habitants de Gaza « ne sont désormais qu’à quelques pâtés de maisons de la ligne de front ».
Une façon de rappeler qu’il « n’y a plus d’espace » ou de « zones sûres » où les déplacés internes puissent s’abriter dans l’enclave palestinienne.
86 % de Gaza placée sous ordre d’évacuation
L’armée israélienne a ordonné aux habitants de plusieurs quartiers de Deir el-Balah de fuir.
Dans un message publié sur son compte X en langue arabe, Tsahal a mis en ligne une carte indiquant les quartiers du sud de la ville qui sont désormais considérés comme une « zone de combat dangereuse ».
« À tous les résidents et personnes déplacées situés dans les blocs 129 et 130 dans les ruelles Al Mahatta et Deir Al Balah au sud, de la rue Salah El Din jusqu’à la rue indiquée sur la carte », a détaillé l’armée, ajouté qu’elle allait bientôt « agir avec force » contre les combattants qui s’y trouvent. Elle a ainsi exhorté les habitants à se diriger immédiatement vers l’ouest.
Selon l’ONU, jusqu’à 1,9 million de personnes (soit neuf personnes sur dix) sont déplacées internes, y compris des Gazaouis qui ont été déplacés à plusieurs reprises (certains jusqu’à dix fois).
Depuis octobre, environ 314 kilomètres carrés, soit près de 86 % de la bande de Gaza, ont été placés sous ordre d’évacuation par l’armée israélienne.
Les chars de retour à Khan Younis
À Khan Younis, où les chars israéliens sont de retour, l’UNRWA a exprimé ses inquiétudes croissantes quant à l’endommagement ou à la destruction prochaine d’installations essentielles dans les zones de la ville du sud destinées à être évacuées.
Il s’agit notamment de la station de pompage d’eau de Khan Younis qui vient d’être remise en état et qui dessert quelque 100.000 personnes, du centre de santé japonais de l’UNRWA à Khan Younis qui a rouvert le mois dernier - et qui est destiné à jouer un rôle clé dans la prochaine campagne de vaccination contre la polio - et du centre de formation de Khan Younis, une grande installation désormais utilisée comme entrepôt pour stocker des fournitures humanitaires.
« Sans cet entrepôt, nous ne pouvons pas acheminer l’aide et la placer n’importe où. Il n’y a plus d’entrepôts », a expliqué Mme Wateridge.
« Il y a l’eau, les médicaments et les vaccins, et la distribution ; si l’une de ces installations est endommagée et détruite, cela va être désastreux », a-t-elle déclaré à ONU Info.
L’impact humanitaire des ordres d’évacuation répétés et des hostilités en cours
Selon les dernières informations du Groupe Santé, les ordres d’évacuation et les déplacements forcés vers des zones exiguës et surpeuplées continuent d’avoir un impact négatif sur la santé publique. Il s’agit notamment de l’accès limité aux installations sanitaires ainsi qu’un approvisionnement limité en eau potable.
Cela se traduit également par une surpopulation avec des personnes vivant dans des tentes ou des infrastructures d’hébergement médiocres, entraînant un risque accru d’apparition et de propagation de maladies infectieuses.
D’une manière générale, les établissements de santé sont débordés, compromettant la qualité des soins et mettant la vie des patients en danger, a insisté l’UNRWA dans son dernier rapport de situation.
Ces derniers développements interviennent au lendemain d’une mise en garde du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA). L’Agence onusienne a prévenu que les ordres d’évacuation répétés et les hostilités en cours continuaient de limiter des opérations humanitaires déjà compromises par les restrictions imposées à l’accès, les pénuries de carburant et autres problèmes.
Les obstacles de l’acheminement de l’aide
Des parties de la route de Salah ad Din, un passage crucial pour les missions humanitaires, sont concernées par le dernier ordre d’évacuation donné par les autorités israéliennes, samedi dernier, dans des parties de la province de Deïr el-Balah.
Cette situation rend presque impossible pour les agents humanitaires de circuler sur cette route principale. La route côtière n’est pas une alternative viable. Les plages sont envahies par des abris de fortune installés par les déplacés palestiniens.
Par conséquent, la circulation des convois le long de la route côtière est extrêmement lente et les produits et services essentiels, comme l’eau, sont loin de parvenir aux gens qui en ont besoin en quantité suffisante.
Plus largement, l’UNRWA fait état de « plusieurs obstacles » dans l’acheminement de l’aide, notamment au point de passage de Karem Abu Salem (Kerem Shalom), dans le sud de Gaza.