Fil d'Ariane
Aucune date n'a encore été fixée pour les élections tant attendues au Soudan du Sud
Nicholas Haysom, qui dirige également la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS), a informé les ambassadeurs de l’évolution de la situation politique, sécuritaire et humanitaire dans la plus jeune nation du monde, qui devrait tenir ses premières élections post-indépendance en décembre.
Une proposition de date pour les élections est attendu
Les partis politiques poursuivent leurs discussions sur les étapes clés nécessaires au vote et pour résoudre les questions en suspens dans le cadre d’une feuille de route de transition, issue d’un accord de paix de 2018.
M. Haysom a déclaré que le Comité permanent de haut niveau qui supervise la mise en œuvre de l’accord de paix a terminé son rapport et qu’une version préliminaire a été publiée mardi soir.
« Sur les questions cruciales de la date des élections, nous comprenons cependant qu’aucune date n’a encore été convenue et que le Président a désigné les institutions électorales pour produire une proposition réalisable sur la date à laquelle ces élections pourraient avoir lieu », a-t-il dit.
Pourparlers à Nairobi
Entre-temps, un deuxième processus de dialogue a été lancé en mai à Nairobi entre le gouvernement de transition d’unité nationale et les non-signataires de l’accord de paix.
Les pourparlers, connus sous le nom d’Initiative Tumaini, visent à garantir que les parties non signataires, la société civile, les groupes religieux et les chefs traditionnels rejoignent le processus de paix. L’Initiative Tumaini a proposé de nouveaux mécanismes de suivi, de surveillance et de mise en œuvre ainsi qu’une structure de Conseil national de direction.
Cependant, le Mouvement populaire de libération du Soudan dans l’opposition (SPLM/IO), dirigé par le Vice-président résident Riek Machar, a annoncé le mois dernier qu’il se retirait des pourparlers, « invoquant des inquiétudes quant au fait que l’Initiative Tumaini traitait de questions qui avaient déjà été convenues dans l’Accord de paix revitalisé et qu’elle avait donc outrepassé ses attributions », a déclaré M. Haysom.
L’ONU soutient le dialogue
Il a indiqué que la MINUSS a utilisé son rôle de bons offices pour engager les parties impliquées dans ces processus en cours.
Il a souligné que la Mission « ne défend pas l’un ou l’autre processus comme une modalité exclusive, mais promeut la confluence constructive des deux », ajoutant que les deux doivent « avancer avec une rapidité délibérée pour répondre aux aspirations des citoyens sud-soudanais ».
En ce qui concerne la mise en œuvre globale de l’accord de paix et de la feuille de route, il a noté que des mesures avaient été prises, notamment l’octroi de fonds à la Commission nationale de révision de la Constitution et la nomination de hauts comités électoraux des États, tandis que la Commission électorale nationale a commencé à évaluer les infrastructures et les installations nécessaires pour les élections.
Environnement protecteur pour les élections
Jusqu’à présent, 29 partis politiques se sont inscrits pour les élections.
« Je constate que des consultations sont toujours en cours entre les acteurs politiques pour savoir si des élections peuvent ou doivent avoir lieu cette année. Il est donc difficile de considérer le 22 décembre comme un déclencheur définitif, indépendamment d’autres facteurs critiques », a dit M. Haysom.
En attendant, la Mission continue de soutenir la création d’un environnement propice aux élections, en mettant l’accent sur le dialogue et l’engagement, la protection physique et la création d’un « environnement protecteur plus large ».
En ce qui concerne la situation humanitaire, une crise imminente est due à l’insécurité alimentaire chronique, aux retombées de la guerre au Soudan voisin, à l’incertitude politique, à une économie en rapide détérioration et au risque d’inondations sans précédent en septembre.
« Chacun de ces éléments pris séparément représente un défi important. Pris ensemble, ils pourraient pousser le pays à un point de basculement – et tout cela à un moment où le peuple du Soudan du Sud se lance dans une phase délicate de reconstruction nationale », a déclaré le haut responsable onusien.
Des millions de personnes ont besoin d’aide humanitaire
Edem Wosurnu, haute responsable du Bureau des affaires humanitaires de l’ONU, OCHA, a déclaré pour sa part que plus de neuf millions de personnes au Soudan du Sud, soit 76 % de la population, ont besoin de protection et d’assistance humanitaires. La majorité, 54 %, sont des enfants et 24 % sont des femmes.
Au total, un peu plus de sept millions de Sud-Soudanais souffrent d’insécurité alimentaire aiguë, soit une augmentation d’environ 1,5 million par rapport à l’année dernière. En outre, 2,5 millions d’enfants et de femmes sont exposés au risque de malnutrition aiguë, un chiffre qui devrait grimper à 2,7 millions d’ici décembre en raison de l’impact de la crise au Soudan.
« Les projections de mi-année de nos experts en sécurité alimentaire suggèrent que les inondations combinées aux conflits pourraient entraîner des poches de famine entre juin 2024 et janvier 2025 », a dit Mme Wosornu.
L’impact des inondations se fait déjà sentir dans certaines communautés. Depuis mai, de fortes pluies et la libération calculée des eaux du lac Victoria ont provoqué la montée du Nil, affectant jusqu’à 300.000 personnes.
L’impact de la guerre au Soudan
Pendant ce temps, le Soudan du Sud a été le pays le plus touché par la crise des déplacements provoquée par la guerre au Soudan, qui a débuté en avril 2023. Près de 780.000 personnes fuyant les combats ont traversé la frontière, dont 580.000 rapatriés sud-soudanais.
« Beaucoup arrivent dans des zones déjà défavorisées en matière d’assistance. Ils sont souvent mal nourris, en mauvaise condition physique et ont besoin d’une assistance immédiate pour sauver des vies », a déclaré Mme Wosornu.
Une fois de plus, les arrivants sont principalement des femmes et des enfants, dont beaucoup ont besoin d’un soutien spécialisé pour les traumatismes et la violence sexiste.
Les humanitaires sous le feu des critiques
Mme Wosurnu a déclaré que malgré les défis, les travailleurs humanitaires continuent d’agir au Soudan du Sud, atteignant plus de 2,6 millions des six millions de personnes ciblées pour l’aide cette année, mais elle a également souligné les dangers auxquels ils sont confrontés.
« Alors que nous nous préparons à célébrer la Journée mondiale de l’aide humanitaire la semaine prochaine, il convient de rappeler au Conseil que le Soudan du Sud reste l’un des endroits les plus dangereux pour les humanitaires », a-t-elle dit.
Au cours du premier semestre 2024, 237 « incidents d’accès humanitaire » ont été signalés et 46 % d’entre eux impliquaient des violences contre le personnel et les biens. Quatre travailleurs humanitaires ont été tués dans l’exercice de leurs fonctions depuis 2023, a-t-elle ajouté, tandis que les convois d’aide ont été soumis à des taxes illégales et à des pillages.
La réponse humanitaire continue également d’être sous-financée, a-t-elle ajouté. Un plan de 1,8 milliard de dollars pour financer les opérations cette année n’a reçu que 561 millions de dollars à ce jour.