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Soudan : l’ONU condamne des attaques contre un hôpital et un marché à El Fasher, au Darfour

La Coordinatrice humanitaire des Nations Unies pour le Soudan, Clémentine Nkweta-Salami, a condamné fermement lundi les attaques « aveugles » contre un hôpital et un marché aux bestiaux à El Fasher, dans l’État du Darfour-Nord.

Mme Nkweta-Salami s’est dite profondément attristée par ces « horribles attaques » contre des civils et des infrastructures civiles. « Les infrastructures civiles ne devraient jamais être une cible et sont protégées par le droit humanitaire international », a affirmé dans un communiqué la Coordinatrice humanitaire pour le Soudan.

Selon les autorités locales soudanaises, au moins 97 civils auraient été tués ou blessés lors d’une attaque le 27 juillet contre un hôpital, des zones résidentielles et un marché aux bestiaux dans la ville d’El Fasher.

L’incident aurait pris de nombreux civils par surprise, car la ville avait connu un calme relatif pendant environ deux semaines, ce qui avait permis aux marchés de rouvrir et à de nombreuses familles de retrouver leurs moyens de subsistance.

Plus de 19.000 morts depuis avril 2023

Cette attaque à El Fasher intervient alors que le Soudan est confronté aux pires niveaux d’insécurité alimentaire aiguë de son histoire, avec plus de la moitié de sa population - 25,6 millions de personnes - en situation de faim aiguë.

Plus de 8,5 millions de personnes sont confrontées à des niveaux d’urgence de la faim, tandis que plus de 755.000 personnes sont dans des conditions catastrophiques dans le Grand Darfour, le Kordofan du Sud et du Nord, le Nil Bleu, Al Jazirah et Khartoum.

Selon les partenaires humanitaires, plus de 19.000 personnes ont été tuées et plus de 33.000 blessées depuis que le conflit a éclaté en avril 2023. Plus de 10 millions de personnes ont fui leur domicile, dont plus de 5 millions d’enfants, et plus de 2 millions de personnes sont passées dans les pays voisins.

Après ces attaques « aveugles » dans l’État du Darfour-Nord, les humanitaires de l’ONU rappellent que la reprise des moyens de subsistance et d’autres activités économiques, le libre accès de l’aide humanitaire et l’augmentation du financement de l’aide humanitaire sont « essentiels pour que le Soudan puisse éviter la menace imminente de la famine ».

Course contre la montre

« En ce moment où les partenaires sont dans une course contre la montre et font tout ce qu’ils peuvent pour éviter une catastrophe humanitaire à grande échelle, j’appelle les parties à cesser le combat et à faire tout leur possible pour protéger les civils, leur permettre de circuler librement et de poursuivre leur vie quotidienne », a fait valoir Mme Nkweta-Salami.

Malgré un financement limité et un environnement opérationnel difficile, les partenaires humanitaires sont sur le terrain et ont apporté une forme d’aide humanitaire à plus de 7,1 millions de personnes entre janvier et mai. L’appel humanitaire de 2,7 milliards de dollars n’est financé qu’à hauteur de 32 %.

La Coordinatrice humanitaire de l’ONU pour le Soudan exhorte donc les donateurs à prendre d’urgence des mesures pour honorer leurs engagements et trouver de nouveaux financements si les humanitaires veulent avoir une chance d’empêcher « une famine à grande échelle ».   

Fortes pluies et crues soudaines frappent l’est du Soudan

Un enfant et sa mère regardent à travers une fenêtre dans la communauté d'Alsabaat, dans l'État de Kassala.
© UNICEF/Ahmed Mohamdeen Elfatih
Un enfant et sa mère regardent à travers une fenêtre dans la communauté d'Alsabaat, dans l'État de Kassala.

Plusieurs régions du Soudan ont connu des pluies torrentielles ces deux derniers jours. Des abris dans l'Etat de Kassala, dans le sud-est du Soudan, ont été inondés. Les premiers rapports humanitaires indiquent qu’environ 10.180 personnes, dont la plupart sont des personnes déplacées récemment arrivées de l’État de Sennar, ont été affectées.

« Ce chiffre pourrait être plus élevé car les autorités et les partenaires humanitaires poursuivent l’évaluation des communautés d’accueil, des réfugiés et des personnes déplacées qui ont fui vers Kassala après l’éclatement du conflit en avril 2023 », a précisé le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA).

Selon l’OCHA, au moins cinq personnes seraient décédées. Trois d’entre elles se sont noyées dans la rivière Gash, tandis qu’un enfant est mort dans un site de déplacement pendant la nuit de fortes pluies.

Les personnes déplacées nouvellement arrivées de l’Etat de Sennar ont été accueillies dans cinq sites de rassemblement et centres d’accueil dans la ville de Kassala et la localité de Gharb Kassala.

Selon le département météorologique de Kassala, 118 mm de précipitations ont été enregistrés à Kassala, 74 mm dans la localité de Gharb Kassala et 95 mm dans la localité de Wad Sheriffe. Ces chiffres sont parmi les plus élevés enregistrés depuis de nombreuses années. Le manque d’entretien des berges de la rivière Gash et de ses affluents, la réhabilitation des canaux d’irrigation et l’absence de réparation des canaux d’eau dans la ville de Kassala exacerbent l’impact des fortes pluies sur les infrastructures.

En attendant, le gouvernement de l’État de Kassala est en train d’identifier un terrain pour reloger les personnes touchées par les inondations. Les partenaires humanitaires travaillent avec les autorités pour évacuer les personnes touchées par les inondations vers des sites plus sûrs.

Craintes de recrudescence des maladies transmises par l’eau

Les partenaires humanitaires ont fourni des tentes, de la nourriture et des articles non alimentaires, installé des systèmes temporaires d’approvisionnement en eau et d’assainissement, et attendent une décision des autorités de l’État pour identifier un site approprié pour la réinstallation des personnes déplacées à l’intérieur du pays.

Sur le terrain, c’est une course contre la montre. D’autant que les eaux de crue auraient submergé les tentes et les installations d’eau et d’assainissement, ainsi que les routes. La majorité des personnes déplacées affectées ont été forcées de vivre en plein air sur le bord des routes et n’ont pas accès à la nourriture, à l’eau potable ou à des installations sanitaires sûres, alors que l’on craint de plus en plus une recrudescence des maladies transmises par l’eau.

Selon l’OCHA, les besoins prioritaires sont le relogement dans des abris et des bâtiments situés dans des zones plus sèches, la nourriture, les articles non alimentaires et l’accès à l’eau potable et aux installations sanitaires.

Avec les fortes pluies prévues pour les jours à venir, le niveau de la rivière Gash pourrait augmenter, entraînant de nouvelles inondations dans la ville de Kassala, redoutent les humanitaires.

Le défi de l’accès avec des routes impraticables

D’autant que le Centre de prévisions et d’applications climatiques de l’autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) prévoit, qu’entre le 24 et le 31 juillet, environ 13,4 millions de personnes dans certaines parties de l’ouest et de l’est du Soudan devraient être confrontées à des précipitations exceptionnellement fortes.

Ces prévisions interviennent dans un contexte de poursuite des affrontements armés entre les Forces armées soudanaises et les paramilitaires des Forces de soutien rapide dans la ville d’El Fasher, au Darfour, mais aussi dans l’Etat de Sennar.

Selon les agences humanitaires, les inondations et l’intensification des hostilités ne feront qu’aggraver une situation humanitaire déjà extrêmement alarmante.

Selon l’ONU, le poste frontière de Tine, utilisé pour transporter les biens du Tchad à la région du Darfour au Soudan, est en ce moment impraticable, comme tenu des lourdes pluies et des inondations.  Nombreuses sont les parties méridionales du pays qui sont également inaccessibles.