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A Gaza, survivre entre les ordures et les décombres

Au lendemain d’une cinquième frappe aérienne contre une école en huit jours, les habitants de la bande de Gaza continuent d’être déplacés et de vivre dans la peur, a indiqué lundi une porte-parole de l’Agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA), soulignant qu’il est désormais difficile de voir où commencent les ordures et où s’arrêtent les décombres dans l’enclave palestinienne.

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Selon les rapports des médias, l’armée israélienne a bombardé une nouvelle école abritant des déplacés, la cinquième en huit jours, faisant au moins 15 morts selon la Défense civile du territoire palestinien. Au cours de la semaine dernière, quatre autres écoles accueillant des déplacés avaient été ciblées par des frappes israéliennes en quatre jours, causant plusieurs décès parmi les occupants.

Samedi, le camp d’Al-Mawasi, près de Khan Younis, un secteur déclaré il y a plusieurs mois « zone humanitaire » par Israël, a été visé par les raids israéliens. Et ce lundi, des rapports des médias font état de bombardements aériens et des tirs d’artillerie continuant de viser l’enclave palestinienne.

Les gens en fuite partout

Sur place, l’agence onusienne alerte sur la détérioration de la situation humanitaire. Des images vidéos partagées sur le réseau social X montrent des scènes de désolation, notamment des bâtiments en ruine ou des décombres, mais aussi des Gazaouis à dos d’âne pour fuir certaines zones d’hostilités.

« Les gens sont en fuite partout. C’est probablement l’une des décisions les plus difficiles à prendre dans sa vie que de tout laisser derrière soi », a dit sur X, la porte-parole de l’UNRWA, Juliette Touma.

Pour sa part, le Programme alimentaire mondial (PAM) note que l’enclave palestinienne est massivement « encombrée et souffre d’une grave pénurie d’eau ». L’assainissement est pratiquement inexistant, et les eaux usées brutes et les montagnes d’ordures ont fait grimper en flèche les taux d’infection parmi les populations.

En écho à ces descriptions, l’UNRWA souligne qu’il est difficile de voir où commencent les ordures et où s’arrêtent les décombres dans certaines zones. Alors que les températures augmentent, les familles tentent désespérément de survivre dans les décombres de cette ville du sud de la bande de Gaza.

15 ans pour déblayer les millions de tonnes de décombres

Il faudrait jusqu’à 15 ans pour déblayer environ 40 millions de tonnes de décombres de guerre dans la bande de Gaza, selon le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE). Pour l’UNRWA, l’opération nécessiterait plus de 100 camions et coûterait plus de 500 millions de dollars.

« Les débris constituent une menace mortelle pour les habitants de Gaza car ils peuvent contenir des munitions non explosées et des substances nocives », avertit sur X, l’agence onusienne.

Ce sont avec de telles menaces que les Gazaouis sont obligés de chercher un abri. « Khan Younis ce matin, les gens utilisent des bâches et des draps pour s’abriter au milieu des destructions », a décrit sur X, Louise Wateridge, une autre porte-parole de l’UNRWA.

Plus de 330.000 tonnes de déchets se sont accumulées dans ou près des zones peuplées de Gaza, posant des risques catastrophiques pour l'environnement et la santé.
©UNRWA
Plus de 330.000 tonnes de déchets se sont accumulées dans ou près des zones peuplées de Gaza, posant des risques catastrophiques pour l'environnement et la santé.

La quête de l’eau, une routine « épuisante »

Autre urgence, la quête désespérée de l’eau. Et sur le terrain, les populations font, chaque matin, la queue pendant des heures sous le soleil brûlant pour remplir des bouteilles et des jerrycans d’eau potable.

« Ensuite, beaucoup d’entre eux doivent marcher de longues distances en portant des charges lourdes dans la chaleur de l’été. Cette routine épuisante se répète encore et encore à Gaza », a détaillé l’agence onusienne.

Derrière ces besoins urgents en vivres ou en eau et cette vie « exténuante », il n’y a pas de zone « sûre » ou « humanitaire » à Gaza. Ces « désignations » sont « trompeuses », a regretté le chef de l’UNRWA, après le raid aérien contre Khan Younis.

Philippe Lazzarini a ainsi cité le sort d’une mère palestinienne qui a perdu son enfant de huit ans et en a un autre blessé lors de l’attaque israélienne contre al-Mawasi, près de Khan Younis.

La mère a déclaré à l’UNRWA qu’elle pensait être en sécurité à al-Mawasi, une zone que l’armée israélienne avait précédemment désignée comme « zone humanitaire sûre ». « L’attaque d’hier (samedi) et les nombreuses victimes nous rappellent brutalement que personne n’est en sécurité à Gaza, où qu’il se trouve », a écrit sur X, M. Lazzarini.

Choc et tristesse

Le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a déclaré samedi, par l’intermédiaire de son porte-parole, qu’il était « choqué et attristé par la perte de vies humaines » à al-Mawasi.

Les autorités israéliennes ont affirmé qu’il s’agissait d’une frappe de « précision » visant le principal commandant militaire du Hamas, Mohammed Deif, et son adjoint, Rafa Salama.

De son côté, Scott Anderson, Directeur des affaires de l’UNRWA à Gaza, a affirmé avoir assisté à « l’une des pires scènes qu’il ait vues à Gaza au cours des neuf derniers mois » lors de sa visite au complexe médical Nasser à Khan Younis samedi après le raid aérien à al-Mawasi.

« Faute de lits, de matériel d’hygiène, de draps ou de blouses en nombre suffisant, de nombreux patients ont été soignés à même le sol, sans désinfectant. Les systèmes de ventilation étaient éteints en raison du manque d’électricité et de carburant, et l’air était imprégné de l’odeur du sang », a-t-il dit.