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RCA : l’insécurité persiste dans certaines zones minières, alerte un expert de l’ONU

Si la situation sécuritaire s’est améliorée en République centrafricaine grâce aux efforts des autorités appuyées par les forces « bilatérales russes » et les forces de la Mission onusienne (MINUSCA), certaines zones, notamment minières et frontalières, continuent de subir des attaques des groupes armés, a alerté mardi un expert indépendant des Nations Unies.

Au Conseil des droits de l’homme, l’Expert indépendant de l’ONU sur la situation des droits de l’homme en République centrafricaine (RCA) a rappelé l’attaque dont a fait l’objet en juin dernier la sous-préfecture de Ndélé.

Les villages de Diki, Miamani et Chari ont ainsi fait l’objet d’une attaque par un groupe armé non identifié qui « vole, tue, agresse, sème la terreur et perturbe les activités commerciales et agricoles des populations civiles ». Ayant été repoussé en février par les Forces armées centrafricaines (FACA), le groupe est revenu à la faveur du retrait des FACA et de leurs alliés.

L’insécurité a été également « omniprésente » le 25 mai dernier dans les zones périphériques de Birao. « La présence limitée des FACA dans l’extrême Nord-Est, à la frontière avec le Soudan, expose les populations civiles à des attaques des groupes armés. En avril, la MINUSCA avait déployé ses éléments en soutien aux FACA à Am-Dafock, à la frontière avec le Soudan », a déclaré Yao Agbetse.

En outre, au cours des deux premières semaines d’avril, le groupe armé des 3R (Retour, Réclamation et Réhabilitation) a tué 24 civils dans l’Ouham-Pendé au Nord-Ouest de la RCA.

Une patrouille de l'ONU traverse une zone commerciale d'une ville de République centrafricaine.
© MINUSCA/Herve Serefio
Une patrouille de l'ONU traverse une zone commerciale d'une ville de République centrafricaine.

Une société minière chinoise suspendue pour liens présumés avec des groupes armés

Par ailleurs, l’expert indépendant a critiqué la situation de certaines entreprises, notamment minières, qui continuent de jouer un rôle « trouble » dans le contexte conflictuel. Le gouvernement centrafricain a ainsi ordonné la suspension des activités de Daqing SARL, une société minière chinoise, en raison de graves accusations de collaboration avec des milices armées.

« Après le Groupe Castel et sa filiale la Sucrerie Africaine de Centrafrique (SUCAF-RCA) sur lesquels pèsent des allégations de collusion/d’accointance avec le groupe armé UPC, l’entreprise chinoise Daqing Sarl exploitant la mine d’or et de diamant à Mingala dans la Basse-Kotto, au sud du pays, a fait l’objet, le 7 juin 2024, d’un arrêté du ministère des Mines et de Géologie portant suspension de ses opérations pour coopération avec des groupes armées, exploitation illégale, introduction illégale de sujets étrangers dans les zones minières, et non-paiement des taxes et d’absence de rapports d’activités ».

Yao Agbetse appelle l’Inspection générale des mines à dresser une cartographie actualisée des entreprises minières, à procéder à leur inspection périodique et à mettre les résultats de ses investigations à la disposition de l’Assemblée nationale et de la Haute Autorité de la Bonne gouvernance.

La gestion des frontières et la transhumance des éleveurs

L’autre défi sécuritaire concerne la gestion des frontières. Une façon pour l’expert d’insister sur l’importance de la mise en œuvre des engagements au titre des commissions mixtes. Ceux-ci permettent de mieux adresser les enjeux de la transhumance, la détermination des couloirs dédiés, et la sensibilisation des éleveurs et des agriculteurs.

Le renforcement de la sécurité des frontières doit viser le combat contre les menaces transnationales, notamment les trafic d’armes, l’utilisation des territoires voisins comme base arrière par des groupes armés pour leur approvisionnement et leur entrainement ainsi que « les mouvements de marchandises illicites et l’extrémisme ».

D’une manière générale, les violations des droits de l’homme n’ont pas cessé en RCA. Selon l’expert, les abus ont certes diminué mais les groupes armés, « les forces de défenses et de sécurité et forces bilatérales russes continuent de commettre des violations des droits de l’homme ».

« Aujourd’hui, il est urgent que les autorités centrafricaines mettent tout en œuvre pour la restauration, l’extension et la consolidation de l’autorité de l’Etat sur l’ensemble du territoire national », a insisté Yao Agbetse.

M. Basile enseigne la non-violence en République centrafricaine.
Rena Effendi
M. Basile enseigne la non-violence en République centrafricaine.

Processus de réconciliation

Devant le Conseil des droits de l'homme, l’expert s’est également penché sur la mise en œuvre de la Feuille de route de Luanda, estimant que « le bilan des 5 ans de l’Accord est globalement encourageant ».

Toutefois, des défis importants restent à affronter tels la dissolution des groupes armés, la réintégration militaire ou économique des ex-combattants, la lutte contre l’impunité, la construction de la démocratie à la base, ainsi que tout le processus de réconciliation et l’édification des garanties de non-répétition.

« Dix ans après la mise en place de la MINUSCA et cinq ans après l’Accord politique pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine (APPR-RCA), la RCA est à la croisée des chemins », a fait valoir l’expert, appelant les différents acteurs à « œuvrer pour une gouvernance politique fondée sur les droits de l’homme ».

« Le gouvernement devrait faire la preuve de sa lutte contre la corruption et les efforts visant l’assainissement des finances publiques et l’augmentation des recettes fiscales pour financer les programmes de la justice transitionnelle », a conclu Yao Agbetse.

NOTE :

Les Rapporteurs spéciaux, les experts indépendants et les groupes de travail font partie de ce que l’on appelle les procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme. Les procédures spéciales, le plus grand groupe d’experts indépendants du système des droits de l’homme des Nations Unies, est le nom général des mécanismes indépendants d’enquête et de suivi du Conseil qui traitent soit de situations nationales spécifiques, soit de questions thématiques dans toutes les parties du monde. Les experts des procédures spéciales travaillent sur une base volontaire ; ils ne font pas partie du personnel des Nations Unies et ne reçoivent pas de salaire pour leur travail. Ils sont indépendants de tout gouvernement ou organisation et travaillent à titre individuel.