Fil d'Ariane
Ukraine : le chef des droits de l’homme de l’ONU dénonce un « climat de peur » dans les zones occupées par la Russie
La Russie a créé un « climat de peur omniprésent» dans les zones qu'elle occupe en Ukraine où ses forces poursuivent leurs abus et tentent de supprimer l’identité ukrainienne, surtout chez les enfants, a fustigé mardi le chef des droits de l’homme de l’ONU.
« À la suite de l’annexion illégale des régions de Donetsk, Kherson, Louhansk et Zaporijjia en septembre 2022, la Fédération de Russie a imposé ses propres systèmes de droit, de gouvernance et d’administration, en violation du droit humanitaire international régissant les situations d’occupation », a affirmé dans un message vidéo, le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Volker Türk.
Cette situation a eu de profondes répercussions sur la vie quotidienne des gens, couvrant tout, de la justice pénale aux affaires et à la propriété, en passant par les impôts et les services sociaux.
Devant le Conseil des droits de l’homme de l’ONU, M. Türk a décrit un climat dans lequel les personnes vivant sous occupation ont été contraintes d’effectuer des travaux obligatoires ou de servir dans l’armée d’occupation.
Faire perdre aux enfants leur identité culturelle
« Mon équipe a documenté un schéma de violence, d’intimidation et de coercition à l’encontre des travailleurs publics, y compris les fonctionnaires locaux, les officiers de police, les gardiens de prison, les enseignants et les travailleurs de la centrale nucléaire de Zaporijjia », a-t-il ajouté.
Les habitants des territoires occupés ont également subi des pressions pour voter aux élections russes. Il est de plus en plus nécessaire de posséder la nationalité russe pour avoir accès aux services sanitaires et humanitaires vitaux, à la sécurité sociale et à l’emploi.
D’une manière générale, de nombreuses politiques ont un impact particulier sur les enfants, voire les ciblent. Le système éducatif utilise désormais un programme russe. Les enfants lisent des manuels scolaires contenant des récits pro-russes, justifiant l’attaque armée contre leur pays. Moscou a intégré des enfants dans des groupes de jeunes pour leur inculquer des notions de patriotisme.
« La Russie a adopté une série de politiques qui ont supprimé le droit des résidents des territoires occupés de choisir librement leur propre identité culturelle, d’accéder et de participer à la vie culturelle qu’ils ont choisie », a regretté M. Türk, relevant que malgré les récits poignants de souffrances humaines qui se déroulent chaque jour en Ukraine, il craint que le monde ne soit devenu « insensible à cette crise ».
Un conflit ponctué par des vagues récurrentes d’attaques
Plus de 10.500 civils ont été tués et plus de 20.000 blessés. Alors que les chiffres réels des victimes sont « probablement beaucoup plus élevés », le conflit s’enracine et se prolonge de plus en plus, ponctué par « des vagues récurrentes d’attaques, comme on l’a vu dans tout le pays la semaine dernière ».
Au cours des deux dernières années, les forces armées russes ont commis des violations généralisées des droits de l’homme, notamment des exécutions illégales, des actes de torture, des disparitions forcées et des détentions arbitraires. Elles ont pris pour cible des personnes perçues comme représentant une menace pour la sécurité de l’occupation, un champ d’action qui s’est élargi au fil du temps pour inclure toute personne perçue comme « pro-ukrainienne ».
Ces violations ont eu lieu dans un contexte d’impunité généralisée. « L’effet cumulé de ces actions a été de créer un climat de peur omniprésent, qui a permis à la Fédération de Russie de renforcer son contrôle », a dénoncé le chef des droits de l'homme de l'ONU.
Des abus à l’encontre d’Ukrainiens accusés de collaboration
Par ailleurs, après que l’Ukraine a repris certains des territoires occupés par la Fédération de Russie, la plupart de ces violations ont pris fin. Cependant, certains résidents sont redevenus des victimes, cette fois aux mains des autorités ukrainiennes.
En vertu de définitions pénales trop larges et trop vagues de la « collaboration », les autorités ukrainiennes ont poursuivi et condamné des habitants qui effectuaient un travail ordinaire au sein de leur communauté locale pendant l’occupation, parfois sous la contrainte ou la coercition. Des personnes ont été condamnées pour des activités qu’une puissance occupante est autorisée à contraindre à effectuer en vertu du droit international humanitaire.
Dans certains cas, les services du Haut-Commissaire Türk ont également constaté des actes de torture et des mauvais traitements, des détentions arbitraires et des violations du droit à un procès équitable à l’encontre d’individus accusés d’activités de collaboration.