Fil d'Ariane
Haïti : la violence armée aggrave la crise de malnutrition infantile
Intensifiée par l’escalade de l’insécurité, le blocage des routes et l’effondrement du système de santé, la crise nutritionnelle mortelle qui touche Haïti pousse les enfants « au bord du précipice », a averti mardi l’UNICEF.
« Les affrontements et l’instabilité en Haïti ont des conséquences qui vont bien au-delà des risques liés à la violence elle-même. La situation engendre une crise sanitaire et nutritionnelle qui pourrait coûter la vie à un nombre incalculable d’enfants », a déclaré la cheffe de l’UNICEF, Catherine Russell.
Le nombre d’enfants souffrant de malnutrition aiguë sévère en Haïti a augmenté de 19% en 2024, selon les récentes conclusions de l’analyse menée par le Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC).
En outre, 1,64 million de personnes sont confrontées à une insécurité alimentaire aiguë correspondant à la phase 4 de la classification (niveau d’urgence), ce qui accroît le risque d’émaciation et de malnutrition chez les enfants, en particulier dans huit régions du pays.
La violence limite l’accès aux soins et à l’aide
La violence armée qui frappe les départements de l’Artibonite et de l’Ouest, où se trouve la capitale Port-au-Prince, a pour effet de limiter l’acheminement de l’aide et contribue à l’effondrement d’un système de santé déjà fragilisé, autant de facteurs qui menacent de manière imminente la vie de plus de 125.000 enfants exposés à un risque de malnutrition aiguë sévère.
« Des milliers d’enfants se trouvent au bord du précipice, alors même que des fournitures vitales sont prêtes à être distribuées dès que les violences cesseront et que les routes et les hôpitaux seront rouverts », a indiqué la Directrice générale de l’UNICEF.
Cette crise nutritionnelle est entièrement le fait de l’homme. La population en Haïti a besoin de toute urgence de sécurité, afin de pouvoir accéder aux services vitaux dont elle dépend et pour que les travailleurs humanitaires puissent atteindre les enfants et les familles qui en ont désespérément besoin, estime l'UNICEF.
Depuis janvier, la détérioration de la situation sécuritaire en Haïti a continué d’aggraver la crise humanitaire, ce qui a entraîné de lourdes conséquences sur la capacité de l’agence onusienne à stocker, distribuer et réapprovisionner les fournitures nécessaires.
Au début du mois, l’un des 17 conteneurs de l’UNICEF a été pillé dans le port principal de Port-au-Prince. Le conteneur contenait des articles essentiels à la survie des mères, des nouveau-nés et des enfants, notamment des réanimateurs et du matériel associé.
2 hôpitaux sur 5 opérationnels dans l’ensemble du pays
Du fait de l’insécurité persistante, seuls deux hôpitaux sur cinq sont opérationnels dans l’ensemble du pays, et seul un centre de santé sur quatre fonctionne dans le département de l’Artibonite, la principale région rizicole du pays.
Parallèlement, l’insécurité actuelle régnant à Port-au-Prince a rendu extrêmement difficile la distribution de fournitures de santé et de produits nutritionnels destinés aux quelque 58.000 enfants souffrant d'émaciation sévère dans la zone métropolitaine.
La route de Martissant – seul couloir humanitaire reliant Port-au-Prince aux régions du sud – reste bloquée, laissant environ 15.000 enfants souffrant de malnutrition en proie à une situation catastrophique.
L’insécurité qui frappe une grande partie de la capitale haïtienne entrave notamment l’acheminement des aliments thérapeutiques prêts à l’emploi utilisés pour traiter les enfants souffrant de malnutrition aiguë sévère, ainsi que leur réapprovisionnement, laissant présager des ruptures dans la chaîne d’approvisionnement et d’importantes conséquences si la situation persiste.
Protéger les familles et leur fournir une aide vitale
Malgré cet environnement extrêmement instable, l’UNICEF redouble d’efforts pour protéger les familles, notamment celles se retrouvant prises au piège et coupées des services essentiels, et leur fournir une aide vitale.
En collaboration avec le Gouvernement et ses partenaires, l'agence onusienne aide à maintenir les systèmes et services nationaux et régionaux et, dans les zones les plus instables, les services de proximité dont dépendent les enfants et les familles.
Dans ce contexte, l’UNICEF a cité trois priorités :
- Une accélération des efforts de la part de communauté internationale pour protéger les civils, rétablir la loi et l’ordre dans les rues, et assurer la circulation en toute sécurité des travailleurs humanitaires et des fournitures vitales, y compris des aliments thérapeutiques prêts à l’emploi ;
- Une hausse des financements souples et immédiats pour répondre aux besoins des plus vulnérables à mesure que la situation évolue, en veillant à ce que l’aide parvienne aux populations touchées le plus rapidement possible ;
- La protection des écoles, des hôpitaux et des autres infrastructures essentielles dont dépendent les enfants, ainsi qu’à la sauvegarde des espaces humanitaires.