Fil d'Ariane
Yémen : des hauts responsables de l’ONU appellent au cessez-le-feu et à la reprise du processus politique
Lors d’une réunion du Conseil de sécurité consacrée à la situation au Yémen, jeudi, deux hauts responsables de l’ONU ont souligné la nécessité d’un cessez-le-feu, d’une désescalade et de la reprise du processus politique inclusif.
« Je suis déçu comme les Yéménites de l’absence de cessez-le-feu national avant le Ramadan », a déclaré Hans Grundberg, Envoyé spécial du Secrétaire général de l’ONU pour ce pays.
« La population attend en vain une amélioration de ses conditions de vie, un processus politique inclusif, le paiement des salaires et des pensions, la reprise des exportations du pétrole et un autre accord sur la libération des prisonniers », a indiqué le haut fonctionnaire.
« En dépit de ces espoirs déçus, nos efforts pour finaliser et mettre en œuvre une feuille de route restent inébranlables », a pourtant assuré M. Grundberg, qui s’est dit persuadé que « les Yéménites partagent mon impatience à l’idée de réaliser ces aspirations ».
Guerre à Gaza
Selon l’Envoyé spécial, « l’espace de médiation est devenu davantage compliqué, bien que nous ayons essayé de séparer le processus de paix de l’évolution de la situation régionale depuis la guerre à Gaza ».
« Ce qui passe au niveau régional a un impact sur le Yémen et ce qui se passe au Yémen peut avoir un impact sur la région », a ajouté M. Grundberg, notant que « depuis novembre de l’année dernière, Ansar Allah cible des navires en mer Rouge et dans le golfe d’Aden tuant et blessant la semaine dernière des membres d’équipage d’un navire ». « En réponse, depuis janvier, les États-Unis et le Royaume-Uni ont frappé des cibles militaires dans les zones contrôlées par Ansar Allah », a-t-il précisé.
Le mouvement Ansar Allah (appelé aussi houthistes) dirige de fait le nord du Yémen et est en conflit depuis des années avec le gouvernement yéménite, soutenu par une coalition internationale menée par l’Arabie saoudite.
Selon l’Envoyé spécial, « plus l’escalade se prolongera, plus l’espace de médiation du Yémen deviendra difficile ». « Dans le pire des cas, les parties pourraient décider de s’engager dans un aventurisme militaire risqué qui propulserait le Yémen dans un nouveau cycle de guerre », a-t-il ajouté.
Appel à la retenue
« Par conséquent, il faut rester concentré sur les objectifs à long terme », a indiqué le haut fonctionnaire appelant à la retenue et en faveur d’une désescalade.
Il a aussi réitéré la mise en garde du Secrétaire général « contre le risque d’une nouvelle propagation du conflit de Gaza dans la région, et ses récents appels en faveur d’un cessez-le-feu humanitaire immédiat à Gaza ».
« Mon travail est guidé par les priorités formulées par les Yéménites pour le Yémen et je reste concentré sur la conclusion d’un cessez-le-feu et le lancement d’un processus politique », a répété M. Grundberg, pour qui « c’est la seule façon de résoudre le conflit au Yémen ». « Les Yéménites de tous les horizons veulent la paix et disent qu’il faut y arriver ».
« Ma médiation auprès des parties yéménites vise à rapprocher les positions et identifier les moyens d’instaurer un cessez-le-feu, d’améliorer les conditions de vie et d’entamer un processus politique », a réitéré l’Envoyé spécial. Ce fut le cas ces dernières semaines lors des réunions avec les principaux responsables de la sécurité à Aden et à Taëz pour préparer un futur cessez-le-feu à l’échelle nationale.
« Avec ONU-Femmes, nous nous efforçons de consulter les membres de la société civile, les dirigeantes politiques, les militantes des droits humains et les représentants des groupes marginalisés », a-t-il dit.
M. Grundberg a également déclaré « avoir encouragé les efforts de médiation locaux notamment sur la nécessité d’ouvrir les routes et la liberté de circulation ».
L’Envoyé spécial a enfin exhorté le Conseil de sécurité à soutenir un processus politique au Yémen. « J’ai besoin de cet appui pour faire en sorte que les parties s’engagent dans le processus de paix », a-t-il dit.
Augmentation de l’insécurité alimentaire
De son côté, la Directrice des opérations et du plaidoyer au Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), Edem Wosornu, présente à la réunion du Conseil, a prévenu que « les progrès observés depuis la trêve négociée par l’ONU en avril 2022 risquent de s’effondrer ».
« Selon le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et le Programme alimentaire mondial (PAM), l’insécurité alimentaire a augmenté de 11% depuis novembre 2023 », a-t-elle informé.
D’après ces mêmes évaluations, près de la moitié des enfants de moins de 5 ans souffrent d’un retard de croissance modéré à sévère, soit une progression de 4% par rapport à 2022.
« Pour une reprise plus large des distributions alimentaires », l’intervenante a rappelé que les besoins du PAM se chiffrent à 230 millions de dollars pour couvrir trois cycles de distribution alimentaire en faveur des familles les plus vulnérables dans les zones contrôlées par les houthistes.
Mme Wosornu a aussi demandé à « la communauté internationale de soutenir le cadre de développement de l’ONU pour le Yémen afin de permettre de briser le cycle de dépendance à l’égard de l’aide extérieure et de l’aider à bâtir une économie robuste, autonome et durable ».
Préoccupée par les tensions régionales et de l’escalade de la situation en mer Rouge, la haute responsable de l’OCHA a répété l’appel du Secrétaire général au plein respect de la résolution 2722 (2024) et insisté sur l’importance d’un accès humanitaire sans restriction aux personnes dans le besoin au Yémen.
« Le Conseil doit soutenir les efforts de désescalade et de paix, notamment les initiatives locales dirigées par des femmes », a-t-elle dit.