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Russie : le procès d’Oleg Orlov, un exemple de la politisation de la justice, selon une experte de l'ONU

Une experte indépendante des Nations Unies a condamné, lundi, le harcèlement judiciaire dont fait l’objet Oleg Orlov, lauréat du prix Nobel de la paix, dans le cadre d’un procès motivé par des considérations politiques en Fédération de Russie.

« Cette affaire est un exemple de l’intensification de la répression des défenseurs des droits de l’homme en Russie, où le pouvoir judiciaire a renoncé à son indépendance sous la pression politique », a déclaré dans un communiqué, Mariana Katzarova, Rapporteure spéciale des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme en Russie.

Selon l’experte indépendante onusienne, le procès d’Orlov n’est pas seulement une attaque contre l’individu, mais « une tentative orchestrée pour faire taire les voix des défenseurs des droits de l’homme en Russie et toute critique de la guerre contre l’Ukraine ». 

« Il s’agit d’un exemple classique de système répressif dans lequel l’application de la loi et le pouvoir judiciaire sont instrumentalisés à des fins politiques », a-t-elle ajouté.

Jugé pour avoir exprimé sa position anti-guerre

Le co-fondateur de Memorial, ONG ayant reçu le prix Nobel de la paix en 2022, est jugé pour « discréditation de l’armée ».

La Rapporteure spéciale indique suivre de près la décision du tribunal Golovinsky de Moscou à l’encontre d’Oleg Orlov, qui risque jusqu’à trois ans d’emprisonnement, lors d’une audience prévue à ce lundi midi, 26 février, à Moscou. « M. Orlov est poursuivi et jugé pour avoir exprimé sa position anti-guerre alors que le monde entier a célébré le deuxième anniversaire de l’invasion totale de l’Ukraine par la Russie samedi dernier », a-t-elle rappelé.

Après la condamnation initiale d’Orlov et l’amende de 150.000 roubles russes, le tribunal municipal de Moscou a annulé le verdict le 14 décembre 2023 et a accédé à la demande du ministère public de revenir à la phase d’enquête pour tenter de durcir les charges qui pèsent contre lui.

Selon l’experte, les dispositions légales en vertu desquelles Orlov est accusé de « discréditer l’utilisation des forces armées russes » n’ont aucun fondement en droit international et constituent une violation flagrante des obligations internationales de la Russie en matière de protection de la liberté d’expression et de promotion d’un environnement sûr pour les défenseurs des droits de l’homme. 

« J’appelle les autorités russes à abandonner immédiatement toutes les poursuites pénales à l’encontre d’Oleg Orlov, connu pour sa lutte incessante en faveur des droits de l’homme et de la recherche de la vérité historique en Russie », a fait valoir Mme Katzarova.

Mariana Katzarova, Rapporteure spéciale sur la situation des droits de l'homme en Fédération de Russie, s'adresse au Conseil des droits de l'homme à Genève.
UN News/Dominika Tomaszewska-Mortimer
Mariana Katzarova, Rapporteure spéciale sur la situation des droits de l'homme en Fédération de Russie, s'adresse au Conseil des droits de l'homme à Genève.

Appel à la libération immédiate de tous les prisonniers politiques

D’autant que la procédure pénale contre Orlov est entachée « d’irrégularités qui constituent des violations manifestes du droit à un procès équitable », notamment « la préparation précipitée de nouvelles accusations et l’approbation de l’acte d’accusation en moins de 24 heures ».

L’experte a noté que le tribunal avait également considérablement entravé la capacité d’Orlov à préparer sa défense en limitant à seulement six jours le temps dont il disposait pour examiner les documents relatifs à l’affaire.

A noter que Mme Katzarova, conjointement avec d’autres Rapporteurs spéciaux des Nations Unies, a appelé les autorités russes à abandonner toutes les charges retenues contre M. Orlov dans une lettre envoyée en mai 2023. Comme l’indique son rapport au Conseil des droits de l’homme, elle a déploré l’absence de réponse et la répression croissante des voix dissidentes et de l’expression pacifique contre la guerre en Ukraine.

« Je réitère mon appel à la libération immédiate de tous les prisonniers politiques en Russie et à la fin de la répression de la société civile et des activistes anti-guerre », a fait remarquer la Rapporteure spéciale.

NOTE

Les Rapporteurs spéciaux et les groupes de travail font partie de ce que l'on appelle les procédures spéciales du Conseil des droits de l'homme. Les titulaires de mandat des procédures spéciales sont des experts indépendants en matière de droits de l'homme nommés par le Conseil des droits de l'homme pour traiter soit de situations nationales spécifiques, soit de questions thématiques dans toutes les régions du monde. Ils ne font pas partie du personnel de l'ONU et sont indépendants de tout gouvernement ou organisation. Ils servent à titre individuel et ne reçoivent pas de salaire pour leur travail.