Fil d'Ariane
Les obstacles à Gaza continuent de retarder l'acheminement de l'aide vitale
Des médicaments pour les otages israéliens auraient été autorisés à entrer à Gaza pour la première fois jeudi, ainsi qu'une cargaison de fournitures de secours pour les Palestiniens, dans le cadre d'un accord négocié par le Qatar et la France.
Sur la centaine d'Israéliens qui serait toujours détenus à Gaza, environ 45 auraient besoin d'un traitement pour des maladies chroniques ou d'autres médicaments vitaux.
Cette livraison d'aide intervient alors que les agences humanitaires de l'ONU avertissent que le niveau d'assistance pour de nombreux Gazaouis est désormais « presque catastrophique ».
Le Bureau de coordination de l'aide humanitaire de l'ONU, OCHA, dans sa dernière mise à jour mercredi soir, a fait état de bombardements israéliens « intenses » sur l'enclave palestinienne et de tirs de roquettes sur Israël par des groupes armés palestiniens.
Surpeuplement à Rafah
Selon le Programme alimentaire mondial (PAM), la poursuite des violences a rendu presque impossible la distribution de l'aide au-delà de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, où plus de 1,2 million de personnes s'abritent désormais sous des bâches en plastique, dans des conditions de surpeuplement dangereuses.
« Au-delà de Rafah, l’assistance est presque catastrophique », a déclaré Abeer Atefa, responsable de la communication du PAM pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord. Ses commentaires font écho aux appels répétés en faveur d'un meilleur accès lancés par d'autres agences de l'ONU qui s'efforcent d'atteindre les cinq gouvernorats de Gaza.
Au cours des deux premières semaines de l'année 2024, les agences humanitaires ont planifié 29 missions pour livrer des fournitures vitales au nord de Wadi Gaza. Seule une mission sur quatre a pu être menée à bien, les autorités israéliennes ayant refusé les autres, selon l'OCHA.
La branche humanitaire des Nations Unies a également noté que deux missions supplémentaires, initialement coordonnées avec les autorités israéliennes, « n'ont pu être menées à bien en raison de la non-viabilité des itinéraires prévus ou des retards excessifs aux points de contrôle, qui n'ont pas permis aux missions de se dérouler pendant les fenêtres d'opération sûres ».
« Il n’y a pas de gagnant dans ces guerres »
Pendant ce temps, au milieu des bombardements en cours et des violents affrontements à Gaza, plus de 160 Gazaouis sont morts au cours des deux derniers jours et 350 autres ont été blessés, a indiqué OCHA, citant des responsables de la santé dans l'enclave, portant le nombre total de Palestiniens tués depuis le début de la guerre à plus de 24.400.
Trois soldats israéliens auraient également été tués dans des affrontements à Gaza mardi et mercredi, a noté l'OCHA, ce qui signifie que 191 combattants israéliens sont morts depuis le 7 octobre, lorsqu'une attaque sanglante menée par le Hamas en Israël a fait environ 1.200 morts et 250 otages, déclenchant des représailles israéliennes massives.
Les ravages causés par la guerre n'ont laissé « qu'une seule des trois canalisations d'eau reliant Israël à Gaza » en état de fonctionnement, a également averti l'OCHA plus tôt cette semaine.
Alors que les niveaux de diarrhée et d'autres maladies causées par le manque d'hygiène et la faim atteignent déjà un niveau record, le bureau de l’aide humanitaire de l'ONU a noté que la canalisation d'eau de Deir al Balah - dont la capacité est de près de 17.000 mètres cubes d'eau par jour - doit être réparée de toute urgence.
« Les partenaires dans le domaine de l'eau, de l'hygiène et de l'assainissement (WASH) ont estimé que les réparations pourraient prendre jusqu'à quatre semaines, même en tenant compte d'un accès durable et des fournitures nécessaires », a déclaré l’OCHA.
De son côté, à l'issue de sa quatrième visite à Gaza depuis le début du conflit, le chef de l'Agence des Nations Unies chargée des réfugiés palestiniens (UNRWA), Philippe Lazzarini, a déclaré mercredi que le conflit « dure depuis trop longtemps ».
« Il n’y a pas de gagnant dans ces guerres. C’est un chaos sans fin et un désespoir croissant. J’appelle une fois de plus à un cessez-le-feu humanitaire immédiat qui puisse apporter un répit et permettre une augmentation significative et indispensable du flux de fournitures de base, y compris par la voie commerciale. Tout ce qui ne va pas dans ce sens prolongera la misère de toute une population », a-t-il dit dans un communiqué de presse.
Des milliers d’enfants souffrent de malnutrition
De son côté, à l’issue d’une visite de trois jours dans la bande de Gaza, un haut responsable de l’UNICEF a rappelé que sur les près de 25.000 tués dans l’enclave depuis le 7 octobre, environ 70% sont des femmes et des enfants.
« Le meurtre d’enfants doit cesser immédiatement », a dit le Directeur exécutif adjoint du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), Ted Chaiban, dans un communiqué de presse.
« La masse de civils à la frontière est difficile à imaginer et les conditions dans lesquelles ils vivent sont inhumaines. L’eau est rare et un mauvais assainissement est indéniable. Le froid et la pluie de cette semaine ont créé des rivières de déchets. Le peu de nourriture disponible ne répond pas aux besoins nutritionnels des enfants. En conséquence, des milliers d’enfants souffrent de malnutrition et sont malades », a-t-il ajouté.
Face à ces conditions, il a réclamé « la fin des bombardements intenses, qui non seulement tuent des milliers de personnes, mais entravent également l’acheminement de l’aide aux survivants ».
« Nous devons faire entrer davantage de camions, via davantage de points de passage et avec des processus d'inspection beaucoup plus efficaces », a-t-il ajouté. « Il doit y avoir moins de restrictions sur le type d’aide que nous pouvons apporter, comme les générateurs pour les pompes à eau et les canalisations pour réparer les installations d’eau ».
A l'intérieur de la bande de Gaza, Ted Chaiban a jugé impératif que « les restrictions d’accès soient levées, que des communications terrestres fiables soient assurées et que la circulation des fournitures humanitaires soit facilitée pour garantir que ceux qui sont sans aide depuis des jours reçoivent l’aide dont ils ont désespérément besoin ». « Et nous devons fluidifier le trafic commercial à Gaza, afin que les marchés puissent rouvrir et que les familles puissent être moins dépendantes des secours », a-t-il ajouté.
Enfin, il a réclamé un accès au nord de Gaza, où 250.000 à 300.000 personnes vivent et n’ont pas accès à l’eau potable et pratiquement pas de nourriture.