Fil d'Ariane
Seul un quart de l’aide humanitaire autorisée au nord de Gaza, selon l'ONU
Alors qu’après cent jours de guerre à Gaza, Israël poursuit ses bombardements massifs dans l’enclave palestinienne, seul un quart des missions humanitaires ont été menées à bien, entièrement ou partiellement au cours des deux premières semaines de janvier, ont souligné mardi les Nations Unies.
Selon le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA), les autorités israéliennes ont refusé l’accès aux autres missions. Depuis le début de l’année, les agences humanitaires ont planifié une trentaine de missions pour acheminer des fournitures vitales au nord de Gaza.
« Seules 24% (7 sur 29) des missions prévues pour livrer de la nourriture, des médicaments, de l’eau et d’autres fournitures vitales sont arrivées à destination au nord de Gaza », a détaillé le bureau onusien.
La plupart des refus concernaient la livraison de carburant et de médicaments. Les autorités israéliennes ont refusé l’accès à environ 95% (18 sur 19) des missions prévoyant l’acheminement de carburant et de médicaments vers des réservoirs d’eau, des puits et des établissements de santé dans le nord de Gaza.
Des restrictions impactant le fonctionnement d'hôpitaux
En janvier, le nombre de refus d’accès opposés par les autorités israéliennes a fortement augmenté, ce qui a empêché l’acheminement de l’aide humanitaire. « Le déplacement des missions humanitaires dans les zones où se déroulent des opérations militaires actives est coordonné de manière transparente avec les différentes parties au conflit afin de garantir un passage en toute sécurité », a ajouté l’OCHA.
Parmi les missions qui n’ont pas pu avoir lieu, cinq étaient prévues à la pharmacie centrale, quatre autres au centre de santé de Jabalia. Huit missions prévues à quatre réservoirs critiques et aux pompes à eau et à eaux usées ont été également refusées.
Or le manque de combustible pour l’eau, l’assainissement et l’hygiène augmente les risques sanitaires et environnementaux. De plus, le manque de médicaments a affaibli le fonctionnement des six hôpitaux partiellement opérationnels.
C’est dans ce contexte que le Secrétaire général de l’ONU a alerté lundi 15 janvier sur ces restrictions. Selon António Guterres, une opération d’aide efficace à Gaza - ou n’importe où ailleurs - nécessite certains éléments de base.
« Il faut de la sécurité. Elle nécessite un environnement dans lequel le personnel peut travailler en toute sécurité. Elle nécessite la logistique nécessaire et la reprise de l’activité commerciale », a-t-il fait valoir, rappelant que « l’ombre de la famine plane sur la population de Gaza, de même que la maladie, la malnutrition et d’autres menaces sanitaires ».
Des humanitaires détenus
Par ailleurs, les missions humanitaires ont signalé deux cas où des membres de convois étaient détenus par les forces israéliennes. Depuis l’escalade des hostilités, deux cas d’attaques de convois ont été aussi répertoriées.
En outre, « la réticence des autorités israéliennes à ouvrir les principaux itinéraires d’approvisionnement et à faciliter le passage rapide des points de contrôle contrôlés par l’armée israélienne a exposé les acteurs humanitaires à des risques sécuritaires ». Dans ces conditions, la capacité des agences humanitaires à opérer de manière sûre et efficace reste « fortement compromise » par les restrictions appliquées par les autorités israéliennes à l’importation d’équipements humanitaires essentiels.
Sur un autre plan, l’Agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) a indiqué que le nombre moyen de personnes déplacées dans ses abris au sud de Gaza était supérieur à 12.000 par abri. Cela représente plus de quatre fois leur capacité d’accueil. Près de 1,4 million de personnes déplacées sont hébergées dans 154 installations de l’UNRWA dans les cinq gouvernorats, dont 160.000 dans le nord et la ville de Gaza. Selon l’ONU, les installations dépassent largement leur capacité d’accueil.
Au total, 1,9 million de personnes, soit près de 85% de la population de Gaza, étaient estimées déplacées à l’intérieur de l’enclave palestinienne, dont beaucoup ont été déplacées plusieurs fois, les familles étant contraintes de se déplacer à plusieurs reprises à la recherche d’un lieu sûr.
La menace de la famine
De leur côté, des experts des droits de l'homme de l'ONU ont alerté mardi que les habitants de Gaza représentent désormais 80% de toutes les personnes menacées par la la famine ou par une faim catastrophique dans le monde.
« Actuellement, tout le monde à Gaza a faim, un quart de la population meurt de faim et lutte pour trouver de la nourriture et de l’eau potable, et la famine est imminente. Les femmes enceintes ne reçoivent pas une alimentation et des soins de santé adéquats, ce qui met leur vie en danger. En outre, tous les enfants de moins de cinq ans – 335.000 – courent un risque élevé de malnutrition sévère, car le risque de famine continue d’augmenter. Une génération entière risque désormais de souffrir d’un retard de croissance », ont déclaré dans un communiqué conjoint ces huit experts indépendants, dont le Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation, Michael Fakhri, et la Rapporteure spéciale sur la situation des droits de l'homme dans le territoire palestinien occupé depuis 1967, Francesca Albanese.
« Il est sans précédent qu’une population civile entière souffre de la faim aussi complètement et aussi rapidement. Israël détruit le système alimentaire de Gaza et utilise la nourriture comme une arme contre le peuple palestinien », ont-ils ajouté.