Fil d'Ariane
L’OIT anticipe une légère remontée du chômage et une hausse des inégalités sociales en 2024
Même si le chômage et le déficit d’emplois sont tous deux tombés en dessous des niveaux d’avant la pandémie de Covid-19, le taux de chômage mondial devrait augmenter en 2024 pour atteindre 5,2% cette année, tandis que l’accroissement des inégalités sociales suscite des inquiétudes, a alerté mercredi dans un nouveau rapport l’Organisation internationale du Travail (OIT).
Cette institution onusienne basée à Genève justifie cette légère remontée par la hausse du chômage dans les économies avancées. Alors que la croissance de l’emploi s’est avérée résiliente et que le taux de chômage a atteint son niveau le plus bas, le rapport de l’OIT sur l’Emploi note que deux millions de travailleurs supplémentaires devraient être à la recherche d’un emploi en 2024.
« En raison de la baisse des taux d’activité et du ralentissement de la croissance de l’emploi, il y aura certes une légère hausse de 0.1 %, mais c’est tout de même 2 millions de chômeurs dans le monde », a expliqué l’OIT.
Un taux de chômage mondial à 5,2%, contre 5,1% en 2023
Le taux de chômage mondial passera ainsi cette année à 5,2%, contre 5,1% en 2023.
« Bien qu’il s’atténue, le déficit mondial d’emplois est resté élevé en 2023, s’établissant à plus de 434 millions », a détaillé l’OIT.
L'érosion du niveau de vie résultant de l’inflation ne sera probablement pas compensée rapidement
« Nous prévoyons une baisse modeste de la performance des marchés du travail, en partie parce que la croissance ralentit dans le monde entier », a déclaré Richard Samans, le Directeur du département de recherche de l’OIT.
Les revenus disponibles ont diminué dans la majorité des pays du G20 et, de manière générale, l’érosion du niveau de vie résultant de l’inflation « ne sera probablement pas compensée rapidement ». L’érosion des salaires réels et des niveaux de vie due à des taux d’inflation élevés et persistants et à la hausse du coût du logement ne sera probablement pas compensée rapidement.
« Ce rapport se penche sur les chiffres clés du marché du travail et ce qu’il révèle doit susciter de vives inquiétudes. Il commence à sembler que ces déséquilibres ne sont pas simplement liés à la reprise de la pandémie mais qu’ils sont structurels », a déclaré dans un communiqué, le Directeur général de l’OIT, Gilbert F. Houngbo.
Faible progression de l’emploi attendue dans les pays à revenu intermédiaire supérieur
Après une brève poussée de croissance lorsque les pays se sont remis de la pandémie, la croissance de la productivité globale du travail est rapidement revenue au faible rythme observé au cours de la décennie précédente.
Le rapport indique qu’une faible progression de l’emploi est attendue dans les pays à revenu intermédiaire supérieur au cours des deux prochaines années, mais que les gains d’emploi dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire inférieur resteront robustes.
Dans ces conditions, une fragilité émerge de ces chiffres, selon le rapport qui prévoit que les perspectives du marché du travail et le chômage mondial vont tous deux s’aggraver. Dans ce lot, le chômage des jeunes continue d’entraver l’accélération de l’ajustement structurel et du marché du travail.
« La situation est particulièrement préoccupante dans les pays à revenu élevé, où la croissance de l’emploi devrait devenir négative en 2024 et où seules de modestes améliorations sont attendues en 2025 », a souligné l’OIT.
En un an, plus d’un million de travailleurs « pauvres »
En effet, d’importantes différences persistent entre les pays à revenus élevés et les pays à faibles revenus. Alors que le taux de déficit d’emplois en 2023 était de 8.2 % dans les pays à revenu élevé, il s’élevait à 20.5 % dans le groupe des pays à faible revenu. De même, alors que le taux de chômage en 2023 se maintient à 4,5 % dans les pays à revenu élevé, il est de 5,7 % dans les pays à faible revenu.
Sans une plus grande justice sociale, nous n’aurons jamais de reprise durable
Par ailleurs, le rapport de l’OIT indique que les inégalités des revenus se sont également creusées, ajoutant que l’érosion du revenu disponible réel « n’augure rien de bon pour la demande globale et une reprise économique plus soutenue ».
Malgré une diminution rapide après 2020, le nombre de travailleurs vivant dans l’extrême pauvreté (gagnant moins de 2,15 dollars par personne et par jour en termes de parité de pouvoir d’achat) a augmenté d’environ 1 million en 2023. Le nombre de travailleurs vivant dans une pauvreté modérée (gagnant moins de 3,65 dollars par jour et par personne) a augmenté de 8,4 millions en 2023. Une baisse n’a été observée que dans les pays à revenu intermédiaire supérieur.
Taux élevés chez les femmes sans emploi, ni en études, ni en formation
Du côté positif, les taux d’informalité sont revenus aux niveaux antérieurs à la pandémie, même si le nombre de travailleurs informels s’est élevé à 2 milliards en raison de l’augmentation de la main-d’œuvre mondiale. En 2024, les taux de travail informel devraient rester stables, représentant environ 58 % de la main-d’œuvre mondiale.
Le retour aux taux de participation au marché du travail d’avant la pandémie a varié selon les groupes. Le taux de personnes ni en emploi, ni en études, ni en formation, reste élevé, en particulier chez les jeunes femmes, ce qui pose des problèmes pour les perspectives d’emploi à long terme.
Le rapport indique également que les personnes qui ont réintégré le marché du travail après la pandémie ont tendance à ne pas travailler le même nombre d’heures qu’auparavant, tandis que le nombre de jours de congés de maladie a augmenté de manière significative.
Pour l’OIT, le fossé creusé par la pandémie doit être comblé rapidement par des initiatives ciblées en matière de compétences afin d’empêcher que la résilience de l’emploi ne s’effrite.
« La baisse du niveau de vie et la faiblesse de la productivité, combinées à une inflation persistante, créent les conditions d’une plus grande inégalité et sapent les efforts déployés pour parvenir à la justice sociale. Et sans une plus grande justice sociale, nous n’aurons jamais de reprise durable », a conclu M. Houngbo.