Fil d'Ariane
Le prix de la paix et du développement : payer pour l’ONU
L’ONU est chargée de répondre à de nombreuses questions urgentes d’importance mondiale, des crises humanitaires aux opérations de maintien de la paix en passant par la crise climatique. Tout cela a un coût, mais pas autant qu’on pourrait le penser. Avec le budget 2024 récemment approuvé, nous expliquons ce qui se cache derrière les chiffres.
Juste avant Noël, les 193 États membres qui composent l'Assemblée générale des Nations Unies ont signé un budget de 3,59 milliards de dollars pour couvrir les dépenses du Secrétariat de l'ONU en 2024. C'est beaucoup d'argent mais, comme l'a expliqué le porte-parole adjoint de l'ONU, Farhan Haq, à ONU Info : on obtient beaucoup pour chaque dollar dépensé.
Farhan Haq : Si l'on additionne les budgets ordinaires du Secrétariat de l'ONU et ceux du maintien de la paix, le coût annuel moyen de l'ONU pour chaque personne sur la planète est d'environ 1,25 dollar ; c'est à peu près le prix d'un sac de chips à New York.
Outre le Secrétariat de l'ONU, les Nations Unies comprennent également un large éventail d'agences, de fonds, de programmes et de missions de maintien de la paix pour traiter toutes sortes de questions, qui sont financés séparément et qui ne sont pas inclus dans le budget de 3,59 milliards de dollars.
Au sommet de l’échelle se trouvent des agences telles que le Programme alimentaire mondial (PAM), l’agence pour les réfugiés (HCR) et le Fonds pour l’enfance (UNICEF), qui disposent de budgets de plusieurs milliards de dollars. Les petites agences s'occupent, par exemple, des affaires maritimes, du tourisme mondial ou de l'aviation civile et disposent de budgets fixés en conséquence. Les États membres adhèrent et paient des cotisations à ces agences sur une base volontaire.
ONU Info : Comment sont calculées les cotisations des États membres au budget de l’ONU ?
Farhan Haq : Le montant payé est basé sur une formule complexe qui prend en compte la taille de l'économie de chaque pays [d'autres éléments incluent le revenu par habitant et le niveau de développement]. Les montants varient de 22% du budget, payés par les États-Unis, à 0,001%, payés par les pays les moins avancés.
[Découvrez ici combien votre pays a payé en 2023 en cotisations à l'ONU]
ONU Info : Que se passe-t-il si un pays ne paie pas sa cotisation à l'ONU ?
Farhan Haq : Si le montant qu'un pays doit est égal à ce qu'il devait payer pour les deux années précédentes, il perd son vote à l'Assemblée générale des Nations Unies. Il ne récupère pas ce vote à moins que l’Assemblée générale ne prenne une décision spéciale, ou s’il paie suffisamment pour passer en dessous du seuil de deux ans. Donc, ils essaient d’éviter de devoir autant.
ONU Info : Le budget continue-t-il d'augmenter chaque année ?
Évidemment, en raison de facteurs tels que l'inflation, le budget peut augmenter en termes nominaux, mais en termes réels, il arrive souvent que l'ONU coupe dans ses dépenses, de sorte qu'il n'y a pas de croissance réelle globale. En revanche, faire face à des crises telles que l’épidémie de COVID-19 peut alourdir les dépenses, auquel cas on peut constater une réelle augmentation du budget.
ONU Info : Alors que tant d'argent change de mains, comment l'ONU gère-t-elle la fraude et le gaspillage ?
Farhan Haq : Nous avons des auditeurs internes et externes, comme le Bureau des services de contrôle interne des Nations Unies, qui enquêtent sur les allégations de fraude ou de corruption interne.
Mais la principale méthode de contrôle passe en fin de compte par les États membres des Nations Unies, qui approuvent le budget annuel et veillent à ce que les dépenses payées par l'ONU correspondent à ses objectifs.
L’ONU essaie d’utiliser tout son argent de manière vérifiable. Nous surveillons nos opérations de maintien de la paix pour garantir que tous les pays qui fournissent des troupes et du matériel soient remboursés pour le travail qu'ils effectuent et, lorsque l'aide humanitaire est envoyée aux pays, nous essayons de mettre en place des contrôles pour nous assurer que toute l’aide va là où elle est nécessaire et n’est pas détournée.
ONU Info : Quel est le coût des opérations humanitaires ?
Farhan Haq : En 2021 [en plus du budget ordinaire], nous avons lancé un appel de 3,77 milliards de dollars supplémentaires pour aider 174 millions de personnes dans 60 pays.
Il s’agissait d’une aide cruciale pour sauver des vies, et pourtant nous n’en avons reçu qu’un peu moins de la moitié. Avec certains appels, seulement 20 à 30% de nos dépenses sont couvertes. Cela dépend vraiment. Dans certaines crises, qui retiennent le plus l'attention du monde entier, nous obtenons tout l'argent que nous demandons. Mais dans d’autres, qui ne sont pas aussi visibles dans l’actualité, on en reçoit beaucoup, beaucoup moins.
L’aide humanitaire se divise en quelques catégories de base, mais les principales concernent la nourriture, l’eau potable, les abris et différents biens qui peuvent aider les personnes à survivre. Qu'il s'agisse de moustiquaires dans certains pays ou de vêtements d'hiver dans d'autres, nous essayons de les distribuer le plus efficacement possible aux gens.
Nous ne considérons pas l’aide humanitaire comme une simple dépense. C'est un investissement dans les gens et le signe que nous n'abandonnons pas ceux qui ont un rôle crucial à jouer dans la construction de leur propre pays.
Nous devons créer un monde meilleur où les gens peuvent prendre soin d’eux-mêmes. Et c'est ce que nous essayons de faire avec l'argent que nous dépensons. Lorsque vous investissez un dollar dans l'éducation d'une fille, vous investissez dans quelqu'un qui peut créer un avenir meilleur pour elle-même et pour sa communauté.