Fil d'Ariane
Gaza : face au bilan humain « insupportable », les négociations pour une résolution au Conseil de sécurité continuent
Le bilan des tués parmi les civils de Gaza, notamment des femmes et des enfants, a été qualifié d’« insupportable » par le Coordonnateur spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient, Tor Wennesland, devant les membres du Conseil ce mardi, tandis qu'un vote sur un projet de résolution, prévu dans l’après-midi, a finalement été reporté de nouveau.
Ce mardi a marqué une nouvelle journée cruciale au Conseil de sécurité à New York, où les négociations se sont poursuivies pour tenter de parvenir à un consensus sur une action plus unifiée en réponse à la crise à Gaza.
Sur le terrain, les hostilités se poursuivent à l'intérieur de Gaza, alors que les forces israéliennes progressent dans la ville de Khan Younis, située dans la partie sud du territoire, tout en intensifiant leurs opérations dans les bastions du Hamas au nord, dans le camp de réfugiés de Jabaliya, dans le quartier de Shujaiya, ainsi qu'à l'hôpital de Kamal Adwan, a rapporté devant le Conseil le Coordonnateur spécial Tor Wennesland, qui intervenait en visioconférence depuis Jérusalem.
Le bilan des tués parmi les civils, notamment des femmes et des enfants, a été qualifié d’« insupportable » par M. Wennesland. Au cours de la période écoulée, a-t-il précisé, les frappes aériennes israéliennes se sont intensifiées partout dans la bande de Gaza et plus d’un millier de morts supplémentaires – en grande majorité palestiniens – sont à déplorer depuis sa dernière intervention au Conseil voici douze jours.
M. Wennesland est aussi revenu sur l’incident du 15 décembre, où « les forces armées israéliennes ont déclaré que des soldats israéliens avaient abattu par erreur trois otages à Shujaiya ». L'armée israélienne a annoncé avoir récupéré les corps, « alors que le Hamas et d’autres factions continuaient de lancer de manière indiscriminée des roquettes sur des zones du sud et du centre d’Israël », un tir de barrage ayant aussi visé Jérusalem ce même 15 décembre.
Plus d'une centaine d’Israéliens sont toujours détenus par le Hamas.
Situation humanitaire « insurmontable »
Le Coordonnateur spécial a ensuite décrit une situation situation humanitaire « insurmontable » à Gaza, « dans un contexte de déplacements d’une ampleur inimaginable et de combats intenses ».
Le système de réponse humanitaire étant au bord du gouffre, M. Wennesland, a relevé que les mesures « limitées » prises par Israël, comme l’autorisation de faire entrer plus de carburant, de vivres, de gaz domestique, pour positives qu’elles soient, « sont loin de suffire pour faire face à la catastrophe humaine sur le terrain ».
Le Nord de la bande de Gaza demeure pour l’essentiel inaccessible aux acteurs humanitaires en raison de l’insécurité et des restrictions imposées par Israël.
En Cisjordanie, la « violence des colons »
M. Wennesland a également attiré l’attention sur la situation en Cisjordanie, où la pression ne cesse d’augmenter en raison des activités israéliennes de colonisation, lesquelles ont plus que doublé pour atteindre un nouveau record annuel depuis 2017. Pour le Coordonnateur spécial, la « violence des colons », l'augmentation des attaques armées palestiniennes, les opérations des forces de sécurité israéliennes, lui font « craindre le pire ». À l’aune de ces tensions, il a mis en garde contre une escalade touchant toute la région du Moyen-Orient, à commencer par le Liban et la mer Rouge.
Après avoir condamné les attaques armées « odieuses » du Hamas le 7 octobre accompagnées de violences sexuelles sur lesquelles toute la lumière devra être faite, M. Wennesland s’est arrêté sur l’ampleur des destructions à Gaza « sans précédent et insupportable », et le meurtre de civils à Gaza – notamment de femmes et d’enfants, qu’il a condamné sans équivoque. « Je pleure également la perte de tous les civils, dont 131 collègues des Nations Unies, ce qui représente la plus grande perte en vies humaines dans l'histoire de l'Organisation », a-t-il ajouté.
Tous les auteurs de violences devront être tenus pour responsables de leurs actes et rapidement traduits en justice, a-t-il insisté. Après avoir exhorté Israël à faire cesser les activités de peuplement en Cisjordanie, illégales au regard du droit international, il a conclu en déclarant que rien ne peut remplacer un processus politique légitime pour résoudre les problèmes fondamentaux à l’origine de la guerre. L’ONU, a-t-il rappelé, se tient toujours aux côtés des Palestiniens et des Israéliens pour une solution des deux États.
Violations du cessez-le-feu à travers la Ligne bleue
Intervenant par vidéoconférence depuis Jérusalem, le Chef de l’Organisme des Nations Unies chargé de la surveillance de la trêve (ONUST) Patrick Gauchat a aussi pris la parole devant les membres du Conseil. Il a commencé par noter que, puisque l’ONUST n’est pas présente à Gaza ou dans le sud d’Israël ou aux alentours, son personnel « n’était pas en mesure d’observer » directement les événements du 7 octobre ou les développements depuis lors. Cependant, ces événements « ont certainement eu un impact sur nos opérations et la dynamique régionale », a-t-il déclaré, ajoutant que depuis le 8 octobre, de nombreuses violations du cessez-le-feu ont eu lieu à travers la Ligne bleue - soit la ligne tracée le 7 juin 2000 par l'ONU après le retrait israélien du Liban le 25 mai 2000 - et sur le Golan, entre Israël et la Syrie.
La création de l’ONUST remonte à 75 ans, le Conseil ayant demandé, le 29 mai 1948, la cessation des hostilités en Palestine, en vertu de la résolution 50. Cette trêve devait être supervisée par un médiateur de l’ONU, assisté d’un groupe d’observateurs militaires, qui allait devenir l’ONUST, première mission de maintien de la paix de l’histoire des Nations Unies, a expliqué M. Gauchat.
Il a également indiqué que l’ONUST disposait de bureaux de liaison au Caire, à Beyrouth et à Damas, ainsi qu’à Jérusalem pour la Jordanie et Israël, ce qui permet à la Mission d’analyser et de traiter des questions complexes, en particulier celles non couvertes par d’autres missions opérant dans la région, qu’il s’agisse de maintien de la paix ou de missions politiques spéciales. Il a aussi mis l’accent, dans ce contexte, sur le contact direct avec les cinq parties par la transmission de messages et l’établissement de « mesures tactiques de confiance ».