Fil d'Ariane
Ukraine : l’ONU dénonce des exécutions sommaires de civils et des actes de torture contre des détenus
Un rapport du Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH) sur l’Ukraine fait état de nouvelles « violations flagrantes » du droit international relatif aux droits de l’homme, de graves violations du droit international humanitaire et de crimes de guerre, principalement commis par les forces de la Fédération de Russie.
Ce rapport a été présenté par le Haut-Commissaire aux droits de l’homme Volker Türk devant le Conseil des droits de l’homme à Genève ce mardi. D’emblée, le haut responsable a regretté que la situation en Ukraine se soit ajoutée à une litanie de souffrances continues, et que « l'attention du monde semble blasée par les multiples crises auxquelles nous sommes confrontés ».
Parmi les graves violations documentées par le Haut-Commissariat depuis février 2022, soit « 662 jours », M. Türk a signalé 142 cas d'exécutions sommaires de civils dans des territoires contrôlés ou occupés par la Russie, mais aussi des actes de torture et de mauvais traitements généralisés infligés aux détenus, y compris des violences sexuelles, ainsi qu'un grand nombre de disparitions forcées. « Les pratiques de torture et d'autres traitements cruels sont monnaie courante dans les lieux de détention des territoires occupés par la Russie », a-t-il déploré.
10 000 civils tués, dont plus de 560 enfants
Au 4 décembre, le HCDH avait enregistré et confirmé plus de 10 000 décès de civils résultant du conflit depuis février 2022, dont plus de 560 enfants. Selon les données du rapport, 18 500 civils ont été blessés, dont beaucoup grièvement. « Le bilan réel est probablement beaucoup plus élevé », a indiqué le Haut-Commissaire.
Le rapport présenté ce mardi couvre une période comprise entre le 1er août et le 30 novembre. Durant ce laps de temps, le HCDH a recensé 2 440 civils tués et blessés, la plupart d'entre eux par des armes explosives telles que des obus d'artillerie et des roquettes, des armes à sous munitions et des missiles.
Un « nombre disproportionné » de victimes âgées
La plupart de ces civils ont été tués dans les zones de Donetsk, Kharkiv, Kherson et Zaporijjia, près des lignes de front, et parmi eux se trouvait un « nombre disproportionné de personnes âgées, qui ne voulaient pas ou ne pouvaient pas se réinstaller pour se mettre en sécurité », s’est indigné M. Türk.
Les attaques de missiles russes ont également visé des installations de stockage et de transport de céréales, qui sont nécessaires à l'exportation de denrées alimentaires et constituent des biens civils protégés par le droit international humanitaire. « De telles attaques menacent un secteur essentiel de l'économie ukrainienne et privent les habitants de nombreux pays d'une alimentation d'une importance cruciale », a relevé le Haut-Commissaire devant les délégués des Etats.
Journalistes et militants de la société civile ciblés
Dans les territoires occupés par la Fédération de Russie, y compris la Crimée, le HCDH a recueilli des informations faisant état de détentions arbitraires et de disparitions forcées perpétrées par les forces armées russes, à l'encontre de responsables locaux, de journalistes, de militants de la société civile et d'autres civils. Parmi eux figurent de nombreux militants tatars de Crimée, a précisé M. Türk.
Enfin, le Haut-Commissaire a exhorté tous les États, en particulier « ceux qui ont de l'influence », à demander que les deux parties - et en particulier la Fédération de Russie - prennent des mesures immédiates et décisives pour veiller au plein respect du droit international relatif aux droits de l'homme et du droit international humanitaire. « En fin de compte, il n'y a qu'une seule solution à ce conflit tragique et de grande envergure : une paix juste », a-t-il indiqué. « Conformément à la résolution de l'Assemblée générale et à l’ordonnance de la Cour internationale de Justice, la Fédération de Russie doit immédiatement cesser de recourir à la force contre l'Ukraine », a insisté M. Türk.
Attaques contre les établissements de santé
Alors que l’Ukraine entre dans un nouvel hiver, qui s’annonce « froid et long », le représentant de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) en Ukraine Jarno Habicht a indiqué « que les besoins humanitaires dans le pays se poursuivront en 2024 au même niveau qu'aujourd'hui », lors d’une conférence de presse à Genève tenue en visioconférence depuis Odessa. L’agence de santé de l’ONU ciblera son aide auprès de 3,8 millions de personnes, principalement dans l’est et le sud du pays, a-t-il précisé.
M. Habicht a déploré que l’accès aux soins soit très compliqué dans ces régions en raison des attaques contre les établissements de santé. Il a relevé qu’un certain nombre d'établissements ne fonctionnent pas entièrement ou partiellement. Par exemple, 21 % des infrastructures de santé ne sont que partiellement fonctionnels dans la région de Kharkiv, a-t-il déploré, ajoutant que l'accès aux soins était difficile précisément là où les besoins humanitaires persistaient ».
Pour relever ce défi, l’OMS continue de livrer de l’aide médicale à l’Ukraine. Depuis le 24 février 2022, elle a distribué près de 4 000 tonnes d'aide médicale notamment des ambulances, des médicaments, de l'équipement, et de l'oxygène. L’OMS envisage par ailleurs de restaurer les installations, avec une priorité pour les services médicaux d’urgence.