Fil d'Ariane
Une experte de l'ONU dénonce le sort des défenseurs des droit humains en Algérie
L'Algérie doit cesser de s'en prendre aux défenseurs des droits de l'homme afin de consolider les réformes sociales entreprises au cours des quatre dernières années, a plaidé ce mardi une experte indépendante de l'ONU.
« Tout en saluant les réformes évidentes ayant eu lieu au cours des quatre dernières années et le nouvel accent mis sur la participation citoyenne, je regrette que certains défenseurs des droits de l'homme travaillant sur des sujets sensibles subissent des restrictions constantes », a déclaré la Rapporteure spéciale des Nations Unies sur la situation des défenseurs des droits de l'homme, Mary Lawlor, dans un communiqué publié à l'issue d'une visite officielle dans le pays.
L'experte de l'ONU a observé quatre principaux types de violations utilisées pour empêcher les défenseurs des droits humains d'exercer leur travail : un harcèlement judiciaire constant, la dissolution des principales organisations de défense des droits de l'homme, des restrictions sur la liberté de mouvement, ainsi que des pratiques d’intimidation et de surveillance ayant de graves répercussions sur la santé mentale des défenseurs et de leurs familles.
Des lois suscitant de la « terreur »
« Je déplore qu'un groupe de défenseurs des droits de l'homme ayant tenté de se rendre à Tizi Ouzou, où je tenais des réunions, en aient été empêchés et aient été détenus durant 10 heures », a-t-elle ainsi déclaré.
« Compte tenu de l'histoire récente de l'Algérie, des lois robustes relatives au terrorisme sont manifestement nécessaires », a indiqué l'experte. « Cependant, il est regrettable de constater que les lois conçues pour lutter contre le terrorisme suscitent tant de terreur auprès des défenseurs des droits de l'homme, en raison d’une définition trop large et excessivement vague de ce qui relève du terrorisme dans le Code pénal ».
La Rapporteure spéciale a noté que l'Article 87 bis du Code pénal algérien était l'une des lois les plus fréquemment invoquées pour poursuivre les défenseurs des droits de l'homme en justice.
Des progrès dans plusieurs domaines
Toutefois, l'experte a déclaré que de nombreuses personnes travaillaient à la protection et à la promotion des droits humains avec le soutien total du gouvernement et des organes consultatifs nouvellement créés dans des domaines tels que les droits de la femme, les droits de l'enfant, l’accès à la santé, la lutte contre la pauvreté et la participation politique.
Sur la base de cette collaboration et de cette expérience, la Rapporteure spéciale a estimé que le gouvernement est désormais mieux équipé pour tendre la main aux défenseurs des droits humains qui travaillent sur des questions sensibles.
Mme Lawlor a enfin salué l'acquittement de trois défenseurs des droits de l'homme, Jamila Loukil, Kaddour Chouicha et Said Boudour, d’accusations de terrorisme qui pesaient contre eux, devant le tribunal de Dar El Baida, dimanche dernier.
« J'espère que cet acquittement marquera le début d'un processus de révision de l'Article 87 bis, et je me tiens à la disposition du gouvernement algérien pour l’assister à cet égard », a-t-elle réagi.
NOTE :
Les Rapporteurs spéciaux font partie des procédures spéciales du Conseil des droits de l'homme. Les procédures spéciales, le plus grand groupe d'experts indépendants du système des droits de l'homme des Nations Unies, est le nom général des mécanismes indépendants d'enquête et de suivi du Conseil qui traitent soit de situations nationales spécifiques, soit de questions thématiques dans toutes les parties du monde. Les experts des procédures spéciales travaillent sur une base volontaire ; ils ne font pas partie du personnel des Nations Unies et ne reçoivent pas de salaire pour leur travail. Ils sont indépendants de tout gouvernement ou organisation et travaillent à titre individuel.