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Iraq : un mémorial du génocide des Yézidis ouvre à Solagh, au Sinjar

Un mémorial du génocide des Yézidis, construit avec le soutien de l'Agence des Nations Unies pour les migrations (OIM); a été inauguré récemment à Solagh dans la région du Sinjar, dans le nord de l'Iraq. A ce même endroit, il y a neuf ans, 90 femmes yézidies ont subi le martyre par le groupe terroriste Daech. 

« Lorsque le génocide s’est produit, j’étais juste là », a confié Chinar, 18 ans, en se tenant devant la Tombe des Mères. « Ils ont séparé les femmes plus âgées du reste d’entre nous. J’avais 10 ans ».

« Il est très difficile pour moi d’être ici aujourd’hui mais il est important de se souvenir de ce qui nous est arrivé. Je sais juste que mes frères et sœurs ont été tués ; je ne sais pas où sont leurs corps, alors ce mémorial m’offre un espace pour venir prier [pour les morts] et pour me souvenir », a-t-elle expliqué dans des propos rapportés par l'OIM.

Le 18 octobre, Chinar et des dizaines d’autres survivants yézidis se sont retrouvés pour l’ouverture du site du mémorial, un espace commun pour se souvenir et faire le deuil, un témoignage physique de la force et de la résilience de la communauté yézidie. 

Nadia Murad, ancienne habitante de Sinjar et membre de la communauté yézidie était aussi présente. La Prix Nobel de la Paix 2018 a décidé de faire don d’une partie de son Prix pour acheter le terrain où est érigé le monument. 

«  Je trouvais qu’il était important qu’il soit érigé ici », a déclaré Nadia Murad, lors de la cérémonie d’inauguration, « veillant sur les Tombes des mères, où ma propre mère, aux côtés de nombreuses autres, a été laissée ici, bien que jamais oubliée ».

« J’espère qu’il rendra un hommage apportant du réconfort et apaisant notre peine personnelle, tout en donnant un sens au traumatisme de notre communauté », a-t-elle dit.

« Nous avons vécu 74 massacres et personne n’est au courant » 

Construite à la demande de survivants par l’ONG « Nadia’s Initiative » et l’OIM en Iraq, le site du mémorial rend hommage à la résilience et au courage de la communauté yézidie, qui a enduré des violences et des persécutions systématiques pendant l’occupation de Daech.

« Nous avons vécu 74 massacres et personne n’est au courant », a dit Samar, 18 ans. « L’importance de ce mémorial est qu’il permet aux personnes d’en savoir plus sur ce qui nous est arrivé. Il restera ici pour longtemps ». 

Le mémorial a pour vocation d’aider à tourner la page et d’offrir un espace pour les familles qui, jusqu’à maintenant, n’ont pas pu retrouver les corps de leurs proches. Il offre une forme de justice que la communauté yézidie ciblée par Daech mérite désespérément.  

Conçu à l’aide d’images en 3D offertes par l’architecte yézidi Dersim Khairy Namo, et en coopération étroite avec des artistes locaux, des ingénieurs et des dirigeants communautaires, l’espace de 10.000 mètres carrés accueille près de 3.000 tombes en marbre non identifiées en souvenir des vies perdues en août 2014. 

Une personne yézidie de Sinjar qui a été enlevée par l'EIIL dans un camp pour personnes déplacées à Akre, en Iraq (photo d'archives).
Photo: Giles Clarke / Getty Images Reportage
Une personne yézidie de Sinjar qui a été enlevée par l'EIIL dans un camp pour personnes déplacées à Akre, en Iraq (photo d'archives).

3.000 membres de la communauté yézidie exécutés

Selon Giorgi Gigauri, chef de mission de l’OIM en Iraq, « le souvenir est le premier pas vers le relèvement ».

« Une étape cruciale de ce processus est l’octroi de réparations individuelles et la coordination d’autres mesures de justice de transition pour répondre aux horreurs du génocide et aux crimes contre l’humanité commis par Daech, tel que mentionné dans la Loi yézidie sur les survivants  », a-t-il souligné. 

Plus de 3.000 membres de la communauté yézidie ont été exécutés et enterrés dans des fosses communes lors de ce qui a été considéré par les Nations Unies comme un génocide contre la minorité religieuse yézidie.