Fil d'Ariane
République centrafricaine : la cheffe de la MINUSCA appelle à investir dans les infrastructures
Des progrès ont été réalisés pour faire avancer l’accord de paix de 2019 en République centrafricaine (RCA), mais le soutien de la communauté internationale reste vital, a déclaré jeudi la Représentante spéciale de l'ONU pour le pays, Valentine Rugwabiza, devant le Conseil de sécurité.
La cheffe de la Mission des Nations Unies en République centrafricaine (MINUSCA) a présenté son dernier rapport sur l’évolution de la situation dans le pays.
Mme Rugwabiza a indiqué que la MINUSCA continue de soutenir les efforts du gouvernement pour « décentraliser » le processus de paix avec les groupes armés, y compris les initiatives récentes visant à étendre la présence de l'État dans les zones qui ont été stabilisées grâce à l'assistance de la Mission, à l’instar de la préfecture de la Vakaga, qui a même reçu pour la première fois la visite d’un Premier ministre.
« Un engagement renforcé des partenaires financiers internationaux et des acteurs du développement demeure, à ce titre, central pour consolider les gains de sécurité chèrement obtenus, que ce soit par des investissements ou des programmes de stabilisation destinés à fournir des services de base, ainsi que des moyens de subsistance socio-économiques durables aux populations », a affirmé la Représentante spéciale.
L'engagement du gouvernement
Mme Rugwabiza a salué l'engagement renouvelé du Président centrafricain Faustin-Archange Touadéra à accélérer la mise en œuvre de l'accord de paix, tel qu’il l'a exprimé dans ses remarques à l'Assemblée générale des Nations Unies le mois dernier.
L'appropriation nationale a une nouvelle fois été illustrée par la convocation de la deuxième réunion d'examen du processus de paix, organisée lundi dernier avec les garants et les facilitateurs de l'accord et de sa feuille de route commune.
La réunion a relevé la dissolution de neuf groupes armés signataires et de leurs différentes branches, les progrès réalisés en matière de DDR (désarmement, démobilisation et réintégration), la réforme du secteur de la sécurité, la gestion des frontières, entre autres questions. La cheffe de la MINUSCA a estimé qu’il est « essentiel de capitaliser sur ce momentum pour continuer à renforcer la confiance entre toutes les parties prenantes au processus politique de paix, par le biais d'actions et d’initiatives tangibles ».
Les projets d'élections locales ont également repris, avec le premier tour du scrutin prévu pour octobre 2024, offrant l'occasion d'intensifier la mobilisation des ressources et de réviser le code électoral conformément à la nouvelle Constitution.
Situation sécuritaire volatile
« La situation sécuritaire reste volatile dans certaines régions en dehors de Bangui, notamment dans les zones frontalières », a par ailleurs signalé la cheffe de la Mission.
La MINUSCA a renforcé ses opérations dans les préfectures du Haut-Kotto et de Vakanga pour mieux protéger les civils et décourager les menaces des groupes armés.
Dans le Haut-Mbomo, les Casques bleus ont également facilité leur premier déploiement conjoint avec les forces de défense nationale dans une zone où ils étaient absents auparavant, suite à une intensification des affrontements entre le groupe armé UPC et une nouvelle milice appelée Azande Ani Kpi Gbe.
La guerre et la paix
Mme Rugwabiza a déclaré que la milice a informé la MINUSCA ce mois-ci de sa décision de déclarer un cessez-le-feu, de rejoindre le processus de DDR et de promouvoir la cohésion sociale.
« Ces résultats illustrent une fois de plus l'efficacité des efforts concertés, même s'il reste beaucoup à faire, notamment en ce qui concerne le renforcement des capacités des institutions nationales de sécurité et de défense », a-t-elle déclaré.
Elle s’est félicitée du rapatriement volontaire ces derniers mois des anciens combattants de l'Armée de résistance du Seigneur (LRA) du Haut-Mbomo, où ils représentaient une menace réelle et permanente pour les civils après plus de 15 ans.
De même, la Représentante spéciale a salué la signature d’un accord de coopération frontalière entre la RCA et le Soudan du Sud le 1er septembre « qui devrait contribuer à renforcer le développement de réponses coordonnées aux menaces transfrontalières ».
La période couverte par le rapport a également vu un afflux de réfugiés du Tchad et du Soudan déchiré par la guerre, créant des défis importants et accroissant les besoins humanitaires.
Des lacunes critiques à la MINUSCA
En ce qui concerne la MINUSCA elle-même, Mme Rugwabiza a indiqué que la mission avait reconfiguré ses dispositifs de sécurité afin d'optimiser son efficacité, notamment en réduisant le nombre de bases opérationnelles temporaires et en améliorant les conditions de vie et de travail, en particulier pour le personnel déployé dans les zones reculées.
« Afin de préserver les valeurs des Nations Unies et de maintenir la confiance de la population partout où nous opérons, la MINUSCA continue à renforcer la prévention et la gestion des risques d'exploitation et abus sexuels, tout en travaillant avec les agences de l’équipe pays des Nations Unies pour assister les victimes identifiées », a également fait valoir la cheffe de la MINUSCA.
Le renforcement de la surveillance a permis de réduire le nombre de nouveaux cas signalés cette année, et les efforts seront intensifiés conformément à la politique de tolérance zéro des Nations Unies en matière d'exploitation et d'abus sexuels, a-t-elle ajouté.
L’importance d’investir dans les infrastructures
La MINUSCA est également confrontée à des lacunes « critiques » en matière de capacités de transport aérien et terrestre, ainsi que de chaîne d'approvisionnement, qui entravent sa mobilité. Elle a cité en exemple « les infrastructures limitées, l’absence ou inutilisation de la majorité des pistes hors de Bangui ».
« Ainsi, il faut plusieurs semaines à un convoi pour se rendre de Bangui à Birao, dans le nord-est, ou à Obo, dans le sud-est. La saison des pluies, qui dure sept mois, rend les pistes impraticables », a-t-elle illustré, soulignant que cette situation affecte « le bien-être, la sûreté et la sécurité des soldats de la paix, ainsi que notre réponse opérationnelle ».
Mme Rugabizwa a déclaré que la MINUSCA prévoyait de mettre en œuvre les recommandations formulées lors d'une récente évaluation globale des capacités logistiques « si le budget nous est accordé », appelant le Conseil à la soutenir.
Elle a expliqué que ce soutien « devrait contribuer à améliorer les capacités critiques de la MINUSCA en matière d'aviation, tout en permettant de réhabiliter certaines infrastructures de transport terrestre », et que ceux-ci pourraient bénéficier au développement de la RCA.
« De tel investissements apporteront une contribution à la consolidation de la paix et stabilité durables en RCA », a affirmé la Représentante de l’ONU pour la RCA, avant de rendre hommage aux trois Casques bleus qui ont perdu la vie en octobre dans des accidents de transport terrestre.