Fil d'Ariane
EN DIRECT - « Aucune partie au conflit n'est au-dessus du droit international » (Guterres)
Le Conseil de sécurité des Nations Unies est réuni au siège de l'ONU à New York. Ce débat sur la situation au Moyen-Orient, qui se tient chaque trimestre, prend une toute nouvelle dimension, compte tenu des attaques du Hamas du 7 octobre en territoire israélien et de l'aggravation de la crise humanitaire dans la bande de Gaza, due à la poursuite des bombardements israéliens.
Le Secrétaire général de l'ONU António Guterres a martelé qu'« aucune partie à un conflit armé ne peut se considérer au-dessus du droit international », durant son intervention devant le Conseil de sécurité - la première de la journée.
« Même la guerre a des règles », a-t-il ajouté. « Nous devons exiger de toutes les parties qu'elles respectent leurs obligations en vertu du droit humanitaire international, qu'elles veillent constamment à épargner les civils dans la conduite des opérations militaires, qu'elles respectent et protègent les hôpitaux et qu'elles respectent l'inviolabilité des installations de l'ONU qui abritent aujourd'hui plus de 600 000 Palestiniens ».
Se réjouissant qu'une partie de l'aide humanitaire parvienne enfin à Gaza, il a néanmoins pointé qu'il ne s'agissait que d' « une goutte d'eau dans un océan de besoins », et que les réserves de carburant de l'ONU à Gaza seraient épuisées dans quelques jours, ce qui pourrait entraîner une autre catastrophe.
Libérer les otages
Le chef de l'ONU a ajouté que rien ne justifiait l'assassinat, les blessures et l'enlèvement délibérés de civils, ni le lancement de roquettes contre des cibles civiles.
Quant aux otages retenus par le Hamas, ceux-ci doivent être traités avec humanité, libérés immédiatement et sans conditions, a-t-il réclamé.
Cela dit, M. Guterres a jugé important de reconnaître que les attaques du Hamas s'étaient produites dans le contexte « d'une occupation étouffante » de 56 ans.
« Le peuple palestinien a vu ses terres régulièrement dévorées par les colonies et en proie à la violence, son économie étouffée, ses habitants déplacés et leurs maisons démolies. Leurs espoirs d'une solution politique à leur situation se sont évanouis. Mais les griefs du peuple palestinien ne peuvent justifier les attaques effroyables du Hamas. Et ces attaques effroyables ne peuvent justifier la punition collective du peuple palestinien ».
M. Guterres s'est enfin exprimé en mémoire des 35 collègues de l'agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens, l'UNRWA, déjà tués dans les bombardements sur Gaza au cours des deux dernières semaines.
Participation de chefs de la diplomatie
C'est aujourd'hui la quatrième fois que se réunissent les 15 représentants des Etats membres du Conseil de sécurité, le principal organe de paix et de sécurité de l'ONU, depuis le début de ce nouveau cycle de violences.
Aucun accord n'a pour l'instant été trouvé sur une quelconque action visant à alléger les souffrances des civils pris dans l'engrenage du conflit entre les militants du Hamas, qui contrôlent l'enclave où vivent plus de 2 millions de Palestiniens, et Israël.
Le Conseil a failli à adopter deux projets de résolution. Le premier, présenté par la Russie, appelait à un cessez-le-feu immédiat. Il n'a pas recueilli suffisamment de voix.
Un second projet, présenté par le Brésil - qui préside le Conseil ce mois d'octobre - a été retoqué par un veto américain. Même s'il appelait à une pause dans les bombardements sur Gaza pour permettre l'accès de l'aide, les États-Unis se sont opposés au fait que le projet brésilien ne mentionne pas le droit d'Israël à se défendre.
L'humanité peut prévaloir
Dans un exposé par vidéoconférence ce mardi, la Coordonnatrice humanitaire pour le Territoire palestinien occupé, Lynn Hastings, a déclaré que l'accord sur la reprise des livraisons d'aide humanitaire par le point de passage de Rafah, en Égypte, ainsi que la libération d'un petit nombre d'otages au cours des derniers jours « montrent que, par la diplomatie et la négociation, l'humanité peut prévaloir et que nous pouvons trouver des solutions humanitaires, même au plus profond d'un conflit ».
Exhortant tous les pays influents à exercer leur influence pour que le droit humanitaire international soit respecté, elle a exhorté à faciliter l'acheminement rapide et sans entrave de l'aide humanitaire et à rétablir les connexions d'eau et d'électricité. 20 camions supplémentaires devraient passer par le point de passage de Rafah aujourd'hui, « bien qu'ils soient actuellement retardés ». Mme Hastings a ajouté que les Nations Unies étaient déterminées à « faire leur part pour que ces livraisons se poursuivent ».
Le bilan humain est très lourd : côté israélien, le nombre de morts est plus de trois fois supérieur au nombre cumulé d’Israéliens tués depuis que l'ONU a commencé à recenser les victimes en 2005. À Gaza, en quelques jours de frappes, le nombre de victimes a dépassé celui des Gazaouis tués lors de la guerre de 2014, qui avait duré 50 jours.
Quant au nombre de déplacés à Gaza, il est passé à 1,4 million de personnes. Quelque 600 000 d'entre eux ont trouvé refuge dans les installations de l’UNRWA, dans des conditions de plus en plus difficiles. Les abris débordent. « Il n’y a nulle part où trouver refuge à Gaza. Lorsqu’il s’agit de décider s’ils doivent fuir ou non, les civils sont condamnés quoi qu'ils fassent », a prévenu Mme Hastings.
Ne pouvant pas subvenir à leurs besoins fondamentaux dans le sud, les familles déplacées retourneront dans le nord malgré les bombardements, a prévenu la Coordinatrice, répétant que les civils devaient être protégés et qu'il fallait couvrir leurs besoins essentiels pour survivre, qu’ils décident de partir ou de rester chez eux.
« Enjeux astronomiques »
Face au risque actuel d'extension du conflit à l'ensemble de la région, le Coordonnateur spécial des Nations Unies pour le processus de paix au Moyen-Orient, Tor Wennesland, a déclaré que le Secrétaire général de l'ONU et lui-même recherchaient « toutes les opportunités » pour remédier à la situation sur le terrain et épargner les civils.
« Il est essentiel qu’en tant que communauté internationale unie, nous déployions tous nos efforts collectifs pour mettre fin à l’effusion de sang et empêcher une nouvelle expansion des hostilités, y compris dans la région », a-t-il souligné.
Parlant d’ « enjeux astronomiques », M. Wennesland a appelé tous les acteurs concernés à agir de manière responsable, toute erreur de calcul pouvant avoir des « conséquences incalculables », compte tenu de leur perméabilité au contexte plus large des territoires palestiniens occupés, d’Israël et de la région entière.
Depuis une génération, l’espoir est perdu, a-t-il déploré, alors que « seule une solution politique nous fera avancer ». Les mesures face à cette crise doivent faire avancer un projet de paix négociée qui réponde aux aspirations nationales légitimes des Palestiniens et des Israéliens – la vision de deux États de longue date, conformément aux résolutions de l’ONU, au droit international ainsi qu’aux accords antérieurs, a-t-il remarqué.
Des ministres des Affaires étrangères, notamment israélien, américain et français, participent aussi à la réunion.