Fil d'Ariane
Les cycles de l’eau menacés par le changement climatique et les activités humaines
Le changement climatique a des effets disparates sur les cycles de l’eau dans le monde, avec des inondations dans certaines régions et des sécheresses dans d’autres, a indiqué jeudi une agence des Nations Unies, appelant à une meilleure surveillance d’un cycle de l’eau de plus en plus irrégulier.
Selon un nouveau rapport de l’Organisation météorologique mondiale (OMM), le cycle hydrologique s’emballe sous l’effet du changement climatique et des activités humaines. La sécurité de l’eau pour des millions de personnes est ainsi menacée.
L’étude, qui contient une évaluation détaillée des ressources en eau de la planète, note que les épisodes de sécheresse et de précipitations extrêmes se soldent par un lourd bilan humain et économique. La fonte de la neige, de la glace et des glaciers vient accroître des risques tels que les inondations et menace la sécurité de l’approvisionnement en eau à long terme pour des millions de personnes.
Jusqu’à présent, le manque de données a entravé la surveillance du cycle de l’eau, de plus en plus erratique, qui est lié aux inondations et aux sécheresses. Cela a eu un impact sur le développement de systèmes d’alerte précoce qui permettraient de sauver des vies.
Les glaciers alpins européens n’ont jamais autant reculé que l’année dernière
« Nous assistons à des inondations et des épisodes de précipitations bien plus importants. À l’autre extrême, il y a davantage d’évaporation, des sols secs et des sécheresses plus intenses », a déclaré le Secrétaire général de l’OMM, Petteri Taalas.
Le passage à un courant chaud El Niño cette année aura probablement des effets hydrologiques importants, ajoute l’agence onusienne, rappelant que de nombreux désastres liés à l’eau ont eu lieu dans toutes les régions du monde l’année dernière.
Actuellement, plus de 3,6 milliards de personnes ont un accès insuffisant à l’eau au moins un mois par an. Elles devraient être plus de 5 milliards d’ici à 2050, selon ONU-Eau.
« L’écrasante majorité des catastrophes est liée à l’eau », a fait remarquer M. Taalas.
Selon l’OMM, un peu partout, l’enneigement a été inférieur à la normale, sauf dans une partie de la région sud-américaine. Dans ce contexte, les glaciers alpins européens n’ont jamais autant reculé que l’année dernière.
En 2022, la couverture neigeuse des Alpes, essentielle pour l’alimentation de grands fleuves comme le Rhin, le Danube, le Rhône et le Pô, est restée très inférieure à la moyenne.
« Les Alpes européennes ont connu une perte de masse glaciaire sans précédent », a alerté l’OMM.
Plus de la moitié des réseaux hydrographiques ont fait face à des conditions anormales
« Les glaciers et la couverture glaciaire reculent sous nos yeux. La hausse des températures a accéléré – mais aussi perturbé – le cycle de l’eau. Notre atmosphère plus chaude contient plus d’humidité », a fait observer M. Taalas.
Le troisième pôle, qui englobe le plateau tibétain, l’Himalaya, le Karakorum, l’Hindou Kouch, le Pamir et les montagnes du Tien Shan, joue un rôle crucial dans l’approvisionnement en eau de près de 2 milliards de personnes. Entre 2000 et 2018, le bilan de masse total des glaciers a diminué de plus de 4 %.
L’OMM a observé une diminution notable de la couverture neigeuse et une forte augmentation du volume des lacs glaciaires.
« Cette configuration a eu un impact sur l’écoulement de l’Indus, de l’Amou-Daria, du Yangtsé et du fleuve Jaune, signe de l’évolution de l’influence du changement climatique dans la région », fait valoir l’étude.
Par ailleurs, le rapport se penche sur les variables hydrologiques. Selon l’OMM, plus de la moitié des réseaux hydrographiques mondiaux ont fait face à des conditions anormales. Comme l’année précédente, la plupart ont été confrontés à des volumes inférieurs. Mais ceux-ci ont en revanche été « très supérieurs dans certains ».
L’impact des conditions d’El Niño sur le cycle hydrologique en 2023
Plus de 60 % des principaux réservoirs d’eau ont enregistré des apports inférieurs ou égaux à la normale, ce qui constitue un défi pour l’approvisionnement en eau de tous les utilisateurs dans un climat de plus en plus variable.
Le passage de l’épisode La Niña en 2022 à des conditions El Niño en 2023 aura probablement un impact majeur sur le cycle hydrologique. Il fera l’objet d’une analyse dans le rapport à paraître l’année prochaine.
Plus largement, de graves sécheresses ont touché de nombreuses régions d’Europe au cours de l’été 2022.
La navigation sur le fleuve Mississippi (États-Unis d’Amérique) a pâti des niveaux d’eau extrêmement bas, conséquence d’une sécheresse continue dans le pays. En Amérique du Sud, le bassin du Rio de la Plata subit une sécheresse persistante depuis 2020.
En raison d’une grave sécheresse, le Yangtsé (Chine) a connu un débit ainsi qu’un débit entrant aux réservoirs et une humidité du sol nettement inférieurs à la moyenne.
Dans la Corne de l’Afrique, la sécheresse prolongée a provoqué une crise humanitaire majeure. En revanche, le bassin du Niger et une grande partie de l’Afrique du Sud ont enregistré des débits supérieurs à la moyenne, associés à des inondations majeures en 2022.
Dans le même temps, une gigantesque inondation s’est produite dans le bassin de l’Indus, au Pakistan, faisant au moins 1.700 morts et 33 millions de victimes.