Fil d'Ariane
L'ONU constate un ralentissement de la croissance mondiale, avec des differences notoires entre les pays
Malgré un « atterrissage en douceur » attendu de l’économie américaine, une agence des Nations Unies a mis en garde, mercredi, contre un ralentissement de l’économie mondiale, plaidant ainsi pour des politiques plus pragmatiques pour lutter contre l’inflation, les inégalités et la crise de la dette souveraine.
Selon la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), la croissance économique mondiale devrait ralentir, passant de 3 % en 2022 à 2,4 % en 2023, avec peu de signes de reprise l’année prochaine. Dans son Rapport sur le commerce et le développement, la CNUCED note que seuls quelques pays s’écartant de la tendance, sinon la croissance ralentit dans la plupart des régions par rapport à l’année dernière.
« Pour préserver l’économie mondiale de futures crises systémiques, nous devons éviter les erreurs politiques du passé et adopter un programme de réforme positif », a conseillé Rebeca Grynspan, la Secrétaire générale de la CNUCED.
Les Etats-Unis déjouent les pronostics les plus négatifs
À l’échelle mondiale, la reprise après la pandémie prend des directions divergentes. Alors que certaines économies, dont les États-Unis, le Japon, la Chine, le Brésil, le Mexique, l’Inde et la Russie, ont fait preuve de résilience en 2023, d’autres sont confrontées à des défis plus redoutables.
C’est le cas de l’Europe, qui est « au bord de la récession ». Confrontée à un resserrement rapide de la politique monétaire et à de forts vents contraires, les principales économies européennes ralentissent. Et selon la CNUCED, « l’Allemagne se contracte déjà ».
« La stagnation ou la baisse des salaires réels sur l’ensemble du continent, aggravée par l’austérité budgétaire, ralentit la croissance », a détaillé la CNUCED.
Du côté des Amériques, l’économie des Etats-Unis a déjoué les pronostics les plus négatifs, malgré une hausse des taux d’intérêt. Pour la CNUCED, Washington connait jusqu’à présent un ralentissement économique mesuré, sur fond d’atténuation des pressions inflationnistes, grâce à la vigueur des dépenses de consommation, à l’abandon de l’austérité budgétaire et à une intervention monétaire active. Toutefois, le rapport met en garde contre les inquiétudes persistantes en matière d’investissement, en particulier à la lumière des taux d’intérêt élevés et prolongés.
La Chine dispose d’une plus grande marge de manœuvre budgétaire
En Asie, la Chine, bien qu’elle montre des signes de reprise par rapport à l’année dernière, est confrontée à la faiblesse de la demande intérieure des consommateurs et de l’investissement privé. Cependant, « la Chine dispose d’une plus grande marge de manœuvre budgétaire que d’autres grandes économies pour relever ces défis ».
D’une manière générale, l’économie mondiale est à la croisée des chemins, où des trajectoires de croissance divergentes, des inégalités croissantes et un fardeau de la dette de plus en plus lourd projettent une ombre sur son avenir.
A ce sujet, la CNUCED note que l’inégalité économique reste un défi important, les pays en développement étant touchés de manière disproportionnée, y compris par les effets du resserrement monétaire dans les économies avancées. Cet écart croissant entre les richesses menace de compromettre la fragile reprise économique et les aspirations des nations à atteindre les objectifs de développement durable (ODD).
Pour un mécanisme de restructuration de la dette souveraine
Le poids de la dette, qui pèse silencieusement sur de nombreux pays en développement, reste une préoccupation majeure. Le service de la dette publique des « économies frontières » à revenu faible ou moyen inférieur est ainsi passé de près de 6 % à 16 % des recettes publiques au cours de la décennie qui a suivi la crise financière mondiale.
Près d’un tiers des « économies frontières » sont au bord du gouffre du surendettement. Des mesures urgentes sont nécessaires pour éviter que d’autres pays ne se retrouvent en détresse financière et, pire encore, ne basculent dans le défaut de paiement.
La CNUCED appelle à des réformes significatives des règles et des pratiques de l’architecture financière internationale pour gérer les crises de la dette.
Plus globalement, la CNUCED appelle à un changement d’orientation politique, y compris de la part des principales banques centrales, et à l’accompagnement des réformes institutionnelles promises lors de la crise du Covid-19 afin d’éviter une décennie perdue.
« Nous avons besoin d’un dosage équilibré de mesures budgétaires, monétaires et d’offre pour assurer la viabilité financière, stimuler l’investissement productif et créer de meilleurs emplois. La réglementation doit s’attaquer aux asymétries croissantes du système commercial et financier international », a conclu la cheffe de la CNUCED.