Fil d'Ariane
« Le Pakistan est la chronique d’un chaos climatique annoncé », déclare le chef de l’ONU
Le Secrétaire général de l’ONU, participant ce mercredi 27 septembre à une réunion d’information informelle de l’Assemblée générale consacrée aux terribles inondations au Pakistan l’année dernière, a érigé ce pays en exemple de l’injustice climatique et appelé les pays développés, premiers responsables des émissions de carbone, à prendre leurs responsabilités.
« Je n’oublierai jamais ce carnage climatique » a confié António Guterres devant l’Assemblée générale.
Au total, quelque 1.700 personnes sont mortes, huit millions de personnes ont été déplacées et 33 millions affectées par l’énorme tempête.
« Plus de huit millions de Pakistanais vivant dans les régions sinistrées n’ont toujours pas accès à l’eau potable et des millions d’autres dépendent eux aussi de l’aide humanitaire », a-t-il déploré, alors que la reconstruction de deux millions de maisons détruites, de 30.000 écoles et 2.000 établissements de santé endommagés ou détruits ne fait que commencer.
Une réponse rapide au désastre
Le chef de l’ONU a de plus constaté que « l’économie pakistanaise est en lambeaux ».
Selon le Bureau de coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA), les inondations ont dévasté près de 3 millions d’hectares de cultures et tué plus d’un million de têtes de bétail, entrainant une chute des revenus et une inflation de 40% des prix alimentaires. Quelque huit millions de personnes ont sombré dans la pauvreté tandis que des millions d’autres ont été contraintes de quitter leurs localités pour chercher un emploi.
Joyce Msuya, Sous-Secrétaire générale et Coordonnatrice adjointe des secours d'urgence, a reconnu que la réponse a été rapide et efficace.
« Quelques semaines seulement après les inondations, le gouvernement pakistanais et les Nations Unies ont lancé ensemble le Plan d'intervention pour les inondations, qui demandait 816 millions de dollars pour venir en aide à 9,5 millions de personnes parmi les plus touchées », a-t-elle rappelé. « Grâce aux autorités nationales et provinciales de gestion des catastrophes, aux organisations humanitaires, à la société civile pakistanaise - y compris les organisations locales dirigées par des femmes – et à la générosité de la communauté internationale, plus de 6 millions de personnes ont depuis reçu une forme d'aide humanitaire ».
« L’ONU s’est tenue aux côtés des Pakistanais », a confirmé le Secrétaire général, se félicitant de la mobilisation des donateurs l’année dernière, qui ont apporté 69% des fonds réclamés par le Plan d’intervention pour les inondations.
Mais les besoins restent immenses
Toutefois, Joyce Msuya, comme António Guterres, ont rappelé l’ampleur des besoins actuels. Le Fonds central d’intervention d’urgence des Nations Unies (CERF), qui depuis 2006 a dépensé 2,2 milliards de dollars dans 85 pays, nécessite selon elle l’aide des donateurs pour reconstituer ses capacités.
Le chef de l’ONU a, lui, évoqué les milliards promis en janvier lors la conférence sur un Pakistan résilient au climat, au titre du Cadre de résilience, de relèvement, de réhabilitation et de reconstruction, connu sous le nom de « 4RF ».
« Le Pakistan attend toujours une grande partie de ce financement, consenti dans sa grande majorité sous la forme de prêts, et les retards sapent les efforts de la population pour rebâtir son existence », a regretté Antonio Guterres, en appelant les donateurs à tenir leurs engagements dès que possible.
Le Pakistan mérite un appui décisif
« Le Pakistan nécessite, et mérite, un appui massif de la communauté internationale », a poursuivi le chef de l’ONU, évoquant l’injustice que subit cette nation. « Le pays est responsable de moins d’1% des gaz à effet de serre, mais sa population est 15 fois plus susceptible qu’ailleurs de mourir des impacts liés au climat ».
« Il est une double victime, du chaos climatique et de notre système financier mondial obsolète et injuste qui empêche les pays à revenu intermédiaire d'accéder aux ressources dont ils ont tant besoin pour investir dans l'adaptation et la résilience », a-t-il ajouté.
António Guterres a tenu à ériger le Pakistan en exemple, et « en chronique du chaos climatique annoncé » qui frappe aux portes du monde entier, de la Libye à la Corne de l’Afrique, comme en Chine ou au Canada.
« Certains pays affirment qu’ils n’ont pas les moyens de réduire leurs émissions, mais la vérité est que personne ne peut se permettre une dégradation du climat », a-t-il rappelé. « Il n’y a pas assez d’aide humanitaire et d’aide au développement dans le monde pour y répondre. Les systèmes énergétiques basés sur les combustibles fossiles sont une décision politique et ces décisions doivent changer. Car la science est claire. Le passage aux énergies renouvelables est impératif ».
Le chef de l’ONU a assuré que son programme d’accélération et son pacte de solidarité pour le climat montrent la voie à suivre et attendent des actes concrets de la prochaine Conférence sur le climat, la COP28. Il a appelé le système international à soutenir les pays vulnérables par le Fonds des pertes et dommages et le Fonds vert pour le climat, par l’allègement de la dette ainsi que par l’apport de 100 milliards de dollars et le doublement par les pays développés du financement climatique pour l’adaptation et la résilience.
Le Pakistan est un test décisif pour la justice climatique », a conclu António Guterres. « Les pays qui ont le plus contribué au réchauffement de la planète doivent contribuer le plus à réparer les dommages qu’il cause ».