Fil d'Ariane
Malgré un nombre record de personnes confrontées à la faim, le financement de l’aide baisse
Le Programme alimentaire mondial des Nations Unies (PAM) a lancé, mardi, un avertissement sévère pour la sécurité alimentaire mondiale, estimant que chaque réduction de 1% de l’aide alimentaire risque de pousser plus de 400.000 personnes au bord de la famine.
Les experts de l’agence onusienne basée à Rome craignent qu’une « boucle fatale » humanitaire ne soit en train de s’enclencher, le PAM étant contraint de ne sauver que les affamés, au détriment de ceux qui ont faim.
Le PAM est ainsi contraint de réduire considérablement les rations dans la plupart de ses opérations en raison de l’effondrement du financement international de l’aide humanitaire.
Les experts de l’agence estiment qu’en conséquence, 24 millions de personnes supplémentaires pourraient se retrouver en situation de famine au cours des 12 prochains mois, soit une augmentation de 50% par rapport à la situation actuelle.
« Le nombre de personnes confrontées à la famine dans le monde ayant atteint un niveau record, nous devons augmenter l’aide vitale, et non la réduire », a déclaré dans un communiqué, Cindy McCain, Directrice exécutive du PAM.
Le PAM s’efforce de répondre aux besoins mondiaux en matière d’aide alimentaire tout en faisant face à un déficit de financement de plus de 60% cette année - le plus important jamais enregistré en 60 ans d’histoire du PAM. Pour la première fois, il a vu ses contributions diminuer alors que les besoins ne cessent d’augmenter.
Des baisses massives
« Si nous ne recevons pas le soutien dont nous avons besoin pour éviter une nouvelle catastrophe, le monde connaîtra sans aucun doute davantage de conflits, de troubles et de famine. Soit nous attisons les flammes de l’instabilité mondiale, soit nous agissons rapidement pour éteindre l’incendie », a ajouté Mme McCain.
Parmi ces quelques opérations qui ont déjà fait l’objet de réductions importantes de l’aide alimentaire, il y a le cas de l’Afghanistan. Le PAM a été contraint en mai dernier de réduire de 66% (8 millions de personnes) sa charge de travail.
Dans d’autres pays comme la Syrie, la Somalie et Haïti, d’importantes baisses ont été opérées en juillet dernier. En Syrie par exemple, l’aide a été réduite de 45% (2,5 millions de personnes), en Haïti, la baisse a été de 25% (100.000 personnes).
Dans le même temps, le PAM a ramené la charge de travail à 2,4 millions de personnes en Somalie. Il s’agit d’une réduction de 49% par rapport aux 4,7 millions de personnes assistées au plus fort de la réponse à la famine, fin 2022.
Des réductions massives ont déjà été mises en œuvre dans près de la moitié des opérations du PAM, y compris des réductions significatives dans d’autres points chauds tels que l’Afghanistan, le Bangladesh, la République démocratique du Congo, la Jordanie, la Palestine, ou le Soudan du Sud.
Ces diverses baisses interviennent alors qu’actuellement, 345 millions de personnes sont confrontées à une insécurité alimentaire aiguë dans le monde, dont 40 millions à des niveaux d’urgence de la faim.
Effet d’entraînement de ces baisses
Ces personnes sont contraintes de prendre des mesures désespérées pour survivre et risquent de mourir de malnutrition. « L’aide alimentaire du PAM est une bouée de sauvetage vitale, souvent la seule chose qui les sépare de la famine », a pourtant insisté l’agence onusienne.
Plus globalement, l’effet d’entraînement de ces réductions de l’aide vitale fera monter en flèche les niveaux d’urgence de la faim.
« Il n’y a qu’une seule façon de s’en sortir », a fait valoir la cheffe du PAM. « Nous devons financer les opérations d’urgence pour nourrir les affamés aujourd’hui tout en investissant dans des solutions à long terme qui s’attaquent aux causes profondes de la faim. Notre objectif commun doit être de mettre fin au cycle vicieux, insoutenable et coûteux de la crise et de la réponse ».
L’analyse révèle l’effet global des réductions des opérations d’assistance du PAM au niveau mondial. La relation entre les réductions et l’insécurité alimentaire n’est pas linéaire, une réduction de 10 à 11% de l’aide ayant un impact plus faible que celui d’une réduction de 45 à 46%, par exemple.
Le rapport ne prend en compte que l’impact des baisses de l’aide alimentaire du PAM sur la faim. Le modèle ne tient pas compte d’autres facteurs susceptibles d’accroître la faim dans le monde, tels que les conflits ou les catastrophes climatiques, ou d’entraîner une amélioration, telle qu’une baisse de l’inflation alimentaire nationale.