Fil d'Ariane
Niger : la vie des plus vulnérables est en jeu, selon le chef des droits de l’homme de l’ONU
Le chef des droits de l'homme de l'ONU, Volker Türk, a exprimé vendredi ses vives inquiétudes pour le peuple nigérien qui a été contraint d'endurer encore plus de misère depuis la prise de pouvoir par des militaires le 26 juillet, appelant les généraux à rétablir immédiatement l'ordre constitutionnel.
« Le Niger est l'un des pays les plus pauvres du monde, et est extrêmement vulnérable au changement climatique. La population a déjà subi beaucoup d'épreuves au fil des ans », a dit M. Türk dans une déclaration à la presse.
« Aujourd'hui, les personnes élues par la population du Niger pour construire une voie permettant de mettre fin à leur dénuement ont été destituées par la force et sont détenues par les responsables du coup d'État remettant ainsi en cause l'ordre constitutionnel. Elles doivent être libérées immédiatement et la voie de la démocratie doit être rétablie », a-t-il ajouté.
La notion même de liberté au Niger est en jeu - Volker Türk
Près de la moitié de la population du Niger est plongée dans l'extrême pauvreté (moins de 2,15 dollars par jour) et des millions de personnes dépendent de l'aide humanitaire.
Depuis la prise de pouvoir par les militaires, leur situation s'est aggravée. Les frontières de ce pays enclavé ont été fermées, le commerce est paralysé, il y a eu de graves coupures d'électricité et les prix des denrées alimentaires ont augmenté.Le Haut-Commissaire a appelé à un accès libre et total de l'aide humanitaire, afin de permettre l'entrée dans le pays de denrées alimentaires, de médicaments et d'autres produits de première nécessité.
M. Türk s'est également inquiété de la décision annoncée par les putschistes de poursuivre le Président Mohamed Bazoum et d'autres personnes travaillant avec lui pour haute trahison. « Cette décision n'est pas seulement motivée par des considérations politiques à l'encontre d'un Président démocratiquement élu, mais elle n'a pas de fondement juridique puisque le fonctionnement normal des institutions démocratiques a été entravé », a-t-il déclaré.
La répression de l'espace civique, y compris les allégations d'intimidation contre les journalistes, l'interdiction des médias internationaux et d'autres restrictions affectant la liberté d'expression et de réunion publique, est également très inquiétante, a ajouté le Haut-Commissaire.
M. Türk a déclaré que la tendance récente à des changements anticonstitutionnels de gouvernement par des forces militaires en Afrique de l'Ouest - le putsch du Niger est le sixième dans la région au cours des trois dernières années - est profondément troublante, et que les conséquences sont toujours supportées par la population locale.
« La notion même de liberté au Niger est en jeu », a déclaré la Haut-Commissaire, notant que la victoire de Mohamed Bazoum en 2021 constituait la première transition démocratique dans l'histoire du pays, marquée par les coups d'État. « Les généraux ne peuvent pas s'arroger le droit de défier - sur un coup de tête - la volonté du peuple. La règle du fusil n'a pas sa place dans le monde d'aujourd'hui ».
L'UNICEF est là « pour rester »
De son côté, le Représentant de l'UNICEF au Niger, Stefano Savi, a rappelé dans un entretien avec ONU Info que les enfants et les femmes sont le visage même de la crise humanitaire qui affectait le Niger bien avant la crise politique actuelle.
Il a souligné que l'UNICEF fournit toujours des services et « est là pour rester » et fournir de l’aide, en se concentrant sur la santé, la nutrition, l'accès à l'eau, l'éducation et la protection des enfants.
4,3 millions de personnes, dont 2 millions d'enfants, ont besoin d'aide humanitaire. M. Savi a déclaré que trois semaines après le début de la crise politique, la fermeture des frontières et de l'espace aérien pourrait avoir un impact sur la livraison de fournitures essentielles, comme les vaccins, les médicaments essentiels ou les aliments thérapeutiques prêts à l'emploi.
« Le Niger est un pays enclavé. Et lorsque vous fermez les frontières, la prestation de services est interrompue. Et même si on peut survivre grâce aux stocks que nous avions avant la crise politique, ces stocks finiront par s'épuiser. Lorsque cela se produira, cela aura un impact majeur sur la vie des enfants, des femmes et des personnes les plus vulnérables au Niger », a-t-il expliqué.
Opérations de l'OIM entravées
De son côté, l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) a appellé à la mise en place d'un couloir humanitaire d'urgence hors du Niger pour les migrants bloqués afin de réduire la surpopulation dans ses centres, où des milliers de migrants sont hébergés, dont beaucoup attendent de rentrer chez eux.
Les fermetures récentes des frontières et de l'espace aérien ont aggravé les difficultés rencontrées par les migrants bloqués et entravé les opérations de retour volontaire assisté de l'OIM, tous les vols étant reportés ou annulés pour le moment. En dix jours, de multiples départs destinés à faciliter le retour volontaire de plus de 1.000 migrants, principalement du Mali et de la République de Guinée, ont été annulés ou reportés, a précisé l’OIM dans un communiqué de presse.
Les inquiétudes continuent de croître à mesure que le nombre de migrants bloqués ayant besoin d'assistance augmente, avec environ 1.800 migrants attendant une assistance en dehors des centres de transit de l'OIM tandis que la capacité et les ressources nécessaires diminuent pour accueillir de nouveaux migrants dans les centres.
L'agence onusienne accueille actuellement environ 5.000 migrants dans sept centres de transit stratégiquement positionnés le long des routes migratoires - quatre dans la région d'Agadez et trois dans la région de Niamey, où elle fournit une aide humanitaire d'urgence comprenant l'hébergement, la nourriture, les soins de santé et le retour volontaire vers les pays d'origine. origine. À l'heure actuelle, la capacité de ces centres est dépassée par des centaines de migrants qui attendent de l'aide à l'extérieur.
Ces dernières semaines, l'OIM a poursuivi son soutien aux communautés d'accueil le long des routes migratoires au Niger via son programme de stabilisation communautaire dans la région d'Agadez. Cette initiative renforce la résilience économique au sein des communautés, avec un accent particulier sur les femmes et les jeunes, tout en favorisant la cohésion sociale entre les communautés d'accueil et de migrants.
Au moins 1.200 femmes ont reçu un soutien aux moyens de subsistance pour promouvoir l'artisanat local, les activités génératrices de revenus et renforcer leur autonomisation socio-économique. De plus, des équipements médicaux ont été fournis aux structures de santé communautaires de sept des 16 communes de la région d'Agadez afin d'améliorer l'accès aux soins des populations hôtes et des migrants.
Le Niger occupe une position unique en tant que pays d'origine, de transit et de destination des mouvements migratoires intrarégionaux. Les frontières de 5.697 kilomètres partagées avec six États voisins placent le pays au centre de la plupart des routes migratoires de la région. Au cours du premier semestre 2023, plus de 60.000 migrants ont traversé le Niger, englobant des profils divers, notamment des travailleurs migrants et des enfants migrants non accompagnés.